Editorial du n° 34 de février 2014 – Aux Sources du Carmel : les effets de la grâce sanctifiante

Bulletin du Tiers-​Ordre sécu­lier pour les pays de langue fran­çaise

Editorial du n° 34 de février 2014 – Aux Sources du Carmel :
les effets de la grâce sanctifiante, abbé Dubroeucq

Cher frère, Chère sœur,

Un des effets les plus mer­veilleux de la grâce sanc­ti­fiante est de faire de notre âme un sanc­tuaire vivant, selon ces paroles de l’Apôtre : « Ne savez-​vous pas que vous êtes les temples de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? » [1 Cor. 3, 17]. C’est une des véri­tés les plus tou­chantes du chris­tia­nisme, les plus géné­ra­trices de pié­té, les plus riches en semences de sainteté. 

Elle était très fami­lière aux pre­miers chré­tiens. Saint Paul y fait appel pour mettre en garde les Corinthiens contre ceux qui tra­vaillent à détruire son œuvre : « Ne savez-​vous pas que vous êtes le temple de Dieu et que l’Esprit-Saint habite en vous ? Si quelqu’un détruit le temple de Dieu, Dieu le détrui­ra, car le temple de Dieu est saint, et c’est ce que vous êtes. » [1 Cor., 3, 16]. Contre l’impureté : « Ne savez-​vous pas que votre corps est le temple du Saint-​Esprit qui est en vous, que vous avez reçu de Dieu, et que vous n’êtes plus à vous-​mêmes ? Glorifiez donc et por­tez Dieu dans votre corps. » [1 Cor., 6, 19]. Comme une église consa­crée appar­tient à Dieu et ne peut plus ser­vir aux usages pro­fanes, ain­si en est-​il du bap­ti­sé. Pour saint Jean, ceux qui ont le pri­vi­lège d’avoir la foi au Christ et la cha­ri­té, demeurent en Dieu et Lui en eux. Cette pré­sence est alors per­ma­nente : « Nous ferons en lui notre demeure. »

Les Pères de l’Église n’ont pas man­qué de trans­mettre avec fidé­li­té une si magni­fique et si féconde doc­trine. Ainsi saint Ignace d’Antioche (†107), dans son Épître aux Éphésiens : « Faisons donc toutes nos actions avec la pen­sée qu’Il habite en nous, nous serons ain­si ses temples, et lui-​même sera notre Dieu rési­dant en nous. C’est bien ce qu’Il est en réa­li­té et ce qu’Il appa­raî­tra clai­re­ment à nos yeux par le juste amour que nous lui por­te­rons. » [Rouët de Journel, Textes ascé­tiques des Pères de l’Église, Herder, Fribourg, 1947, n°14, p.5]. Saint Augustin, par­lant de l’effusion du Saint-​Esprit qui eut lieu le jour de la Pentecôte, s’exprime de la sorte : « L’Esprit-Saint vint donc en ce jour à ses fidèles, non plus par une simple opé­ra­tion ou une grâce de visite, mais par la pré­sence même de sa majes­té. » [St Aug., ser­mo 185, de Temp.].

La litur­gie fait de nom­breuses allu­sions à l’habitation du Saint-​Esprit en nous, dans les offices de la Pentecôte ; dans la col­lecte du mer­cre­di de l’octave, elle « demande que l’Esprit-Saint, arri­vant en nous, fasse de nous, en y demeu­rant, le temple de sa gloire. » Cette véri­té est éga­le­ment expri­mée dans le pre­mier exor­cisme du bap­tême : « Je t’exorcise, esprit immonde…, afin que tu t’éloignes de cette créa­ture que Notre-​Seigneur daigne appe­ler dans son saint temple pour en faire le temple du Dieu vivant où puisse habi­ter le Saint-​Esprit. »

Enfin l’enseignement offi­ciel de l’Église nous est don­né par le pape Léon XIII dans son ency­clique Divinum illud du 9 mai 1897 : « Dieu, par sa grâce, réside dans l’âme du juste ain­si qu’en un temple, d’une façon très intime et spé­ciale. De là ce lien d’amour qui unit l’âme à Dieu plus étroi­te­ment qu’un ami ne peut l’être à l’égard de son meilleur ami, et cette jouis­sance pleine et suave qu’elle goûte en sa pré­sence. Cette union admi­rable, appe­lée inha­bi­ta­tion, qui ne dif­fère de celle des bien­heu­reux habi­tants du ciel que par la condi­tion ou l’état, est pro­duite très réel­le­ment par la pré­sence de toute la Trinité : «  Nous vien­drons en lui et nous ferons en lui notre demeure (Jn, 24, 23) ». » [P. Cattin, Sources de la vie spi­ri­tuelle, Édit. St Paul, Fribourg, 1958, t. 1, p. 14–15].

« Dieu veut tou­jours par­faire ce qu’il a com­men­cé. Se don­ner, se rendre pré­sent, s’unir, n’est pas de sa part un vain geste, sans effet. S’il se donne, s’il se rend pré­sent, s’il s’unit à l’âme, il tend à lui révé­ler de quelque façon sa pré­sence, à lui faire sen­tir son amour, à la faire jouir de lui, à entrer avec elle dans une vie de ten­dresse à deux, dans une plus affec­tueuse et plus intense fami­lia­ri­té, à lui four­nir comme un avant-​goût de l’intimité céleste. Il tend à se mani­fes­ter à elle, selon la pro­messe de Notre-​Seigneur rap­por­tée par saint Jean (Jn, 14, 21) : « Si quelqu’un m’aime, mon Père l’aimera, et moi je l’aimerai, et je me mani­fes­te­rai à lui. » » [Mgr Cuttaz, Le juste, chez l’auteur, Annecy, 1955, p. 154–155].

C’est là une véri­té chère à la doc­trine mys­tique du Carmel, cette cer­ti­tude que Dieu est pré­sent au plus intime de notre âme comme objet de connais­sance et d’amour ; pour le trou­ver, il faut se recueillir, ren­trer « au-​dedans », dans le royaume inté­rieur. C’est « au plus intime de notre âme » qu’il faut le cher­cher et l’y décou­vrir. « Pour aller à sa recherche, nous dit sainte Thérèse de Jésus, elle n’a qu’à entrer en soli­tude, regar­der au-​dedans d’elle-même, et ne pas s’éloigner d’un hôte si excellent. » [Chemin de la per­fec­tion, ch. 28, in Thérèse d’Avila. Œuvres com­plètes, Paris, Cerf, 2010, p.802]. Mais aus­si, « l’âme à laquelle Dieu se com­mu­nique davan­tage est celle qui est la plus riche d’amour, en d’autres termes, celle dont la volon­té est plus conforme à La volon­té de Dieu. Et celle dont la volon­té est entiè­re­ment conforme, entiè­re­ment sem­blable à la volon­té de Dieu, est tota­le­ment unie à Dieu et sur­na­tu­rel­le­ment trans­for­mée en lui. » [Saint Jean de la Croix, Montée du Carmel, Livre 2, ch. 5, 4, in Jean de la Croix. Œuvres com­plètes, Paris, Cerf, 1997, p.646]. Je cite­rai encore la bien­heu­reuse Élisabeth de la Trinité tout impré­gnée de cette dévo­tion dont elle cher­chait à faire par­ti­ci­per sa sœur Guite, mère de famille : « Notre vie est dans les Cieux…Oh ! ma Guite, ce Ciel, cette mai­son de notre Père, il est au « centre de notre âme ! Comme tu le ver­ras dans saint Jean de la Croix, lorsque nous sommes en notre centre le plus pro­fond nous sommes en Dieu. N’est-ce pas que c’est simple, que c’est conso­lant ? A tra­vers tout, par­mi les sol­li­ci­tudes maternelles,…tu peux te reti­rer en cette soli­tude pour te livrer à l’Esprit Saint afin qu’Il te trans­forme en Dieu..» [Élisabeth de la Trinité. Œuvres com­plètes, Paris, Cerf, 1996, L. 239, p. 613].

Quelles consé­quences pra­tiques découlent de cette doc­trine ? Cette pré­sence divine par la grâce impose tous les devoirs qu’exige la pré­sence eucha­ris­tique, essen­tiel­le­ment deux : le res­pect et l’intimité. C’est en les ren­dant à Dieu qu’on Le glo­ri­fie. Puisque Dieu habite en notre âme, il faut en sor­tir toutes les idoles, tout ce qu’on pré­fère à Dieu : c’est le tra­vail de puri­fi­ca­tion qu’il nous est deman­dé d’accomplir constam­ment, par la ver­tu de péni­tence. A cet effort de puri­fi­ca­tion doit s’ajouter un effort d’intimité : si Dieu vit avec nous, ne faut-​il pas vivre avec lui ? S’il demeure en nous, ne faut-​il pas demeu­rer en Lui ?

La fête de la Nativité de Notre-​Seigneur vient de nous rap­pe­ler cette nais­sance de Dieu en notre âme par la grâce. A la suite de nos saints du Carmel et avec la Vierge imma­cu­lée, vivons nous aus­si dans le recueille­ment auquel nous invite la pré­sence de l’Hôte divin. 

Je vous bénis

Abbé L.-P. Dubrœucq †

Retraites carmélitaines

Retraites car­mé­li­taines

Retraites mixtes (hommes et dames),ouvertes prin­ci­pa­le­ment aux ter­tiaires du car­mel mais aus­si aux per­sonnes inté­res­sées par la spi­ri­tua­li­té du carmel.

Inscriptions auprès de M. l’ab­bé Dubroeucq au prieu­ré de Gastines tél : 02 41 74 12 78 

Tél : au prieu­ré Saint Louis-​Marie Grignon de Montfort, 49380 Faye d’Anjou ou au 06 16 80 63 17