Mes bien chers amis,
Mes bien chers frères,
La liturgie de l’Église en ces jours de Noël a été pour nous qui l’avons suivie d’une manière très fidèle, une lumière extraordinaire. Une lumière qui nous éclaire sur ce qu’est cet Enfant qui est né à Bethléem.
Et nous avons entendu souvent le nom de Jésus revenir et – à côte de ce nom – l’explication et la signification du nom de Jésus qui a été choisi par Dieu Lui-même pour être imposé à cet Enfant.
Jésus est avant tout notre Sauveur. Jésus est notre Sauveur. Si nous voulons nous rendre pendant quelques instants à la grotte de Bethléem et essayer de reconstruire ce qui s’est passé lors de la naissance de Notre Seigneur, nous suivons les bergers. Nous lisons sur leurs visages, la joie, leur enthousiasme, à la pensée que les anges leur ont désigné ce Messie qu’ils attendent, ce Sauveur que tout Israël attend. « Enfin, Il est né, vous le reconnaîtrez parce qu’il est entouré de langes et qu’il se trouve dans une crèche ».
Pannis involutum, et positum in præsepio (Lc 2,12). Voilà ce qu’ont dit les anges. C’est ainsi que les bergers se précipitent, ils se hâtent pour aller trouver cet Enfant, ce Sauveur d’Israël et ce Sauveur de toutes les nations. Et si nous avions pu les accompagner et nous joindre à eux, nous aurions trouvé, comme le dit l’Évangile, Marie, Joseph et l’Enfant dans la crèche.
Remarquez bien cette insistance de l’Évangile sur ce fait que l’Enfant Jésus a vraiment été déposé dans une crèche, dans une mangeoire pour les animaux.
Et même je dirai, que l’Église se plaît comme Jésus Lui-même et comme l’Église elle-même se plaît à nous montrer les détails au milieu desquels Jésus est né. Il devait y avoir la présence d’animaux. Nous l’avons chanté dans un répons au cours de cette nuit :
O magnum mysterium et admirabile sacramentum ut animalia vidèrent Dominum natum, jacentem in præsepio (Matines).
Quelle chose extraordinaire. Des animaux ont vu Jésus. Eh oui, l’Église veut signifier par là que Jésus est le maître de la Création, non seulement le Maître, mais Il est le Créateur. Et toutes les créatures doivent lui rendre hommage, même les créatures irrationnelles.
Et videbit omnis caro salutare Dei (Lc 3,6).
Et toute chair verra le salut du Seigneur. Toute chair. Pourquoi toute chair ? Oui, la chair des hommes, la chair des oiseaux, la chair des animaux, la chair des poissons. Toute chair créée par le Seigneur verra Notre Seigneur (cf. 1 Co 15,39). Car Il est le Maître, Il en est le Créateur.
Ainsi donc Jésus a voulu naître dans une crèche. Et si nous interrogeons la très Sainte Vierge Marie, pour lui demander ce qui s’est passé : Racontez-nous la naissance du Sauveur. Et la très Sainte Vierge nous racontera l’apparition de l’Ange Gabriel, l’entretien qu’elle a eu avec lui. Et elle nous dira aussi, que son nom est Jésus, parce qu’il est venu sauver Israël et toutes les nations.
Et si nous interrogeons saint Joseph, saint Joseph nous dira également : Eh oui, j’ai eu des hésitations. Je me suis demandé comment il était possible que Marie porte un enfant. Et j’ai voulu m’éloigner. Voici qu’un ange est venu me dire : « Ne crains pas Joseph, l’Enfant que porte Marie est venu par l’opération du Saint-Esprit, et tu le nommeras Jésus. »
Et vocabis nomen ejus Jesum (Mt 1, 20–21). Car il était dans la coutume des juifs, que ce soit le père qui impose le nom. Et c’est saint Joseph qui a imposé le nom de Jésus à cet Enfant.
Et vocabis nomen ejus Jesum, ipse enim salvum faciet populum suum (Mt 1,21). Parce que c’est Lui qui sauvera Israël.
Ainsi, aussi bien à la très Sainte Vierge Marie, qu’à saint Joseph et qu’aux bergers, si nous les interrogeons, ils nous diront : Voici le Sauveur d’Israël et le Sauveur de toutes les nations. C’est donc sous cet aspect essentiel, principal, que Jésus se présente à nous.
Et si nous réfléchissons tant soit peu, pendant quelques instants, sur la personnalité de Jésus, alors nous tombons dans la stupéfaction, dans l’admiration. Nous sommes devant le mystère le plus grand, le plus beau, que les hommes aient jamais vu : que Dieu se soit fait homme. Car c’est la Personne Elle-même du Verbe, donc Dieu Lui-même qui anime cet Enfant. Il n’y a pas d’autre Personne en cet Enfant. Il n’y a pas de Personne humaine. Il n’y a que la Personne divine. C’est donc le Verbe de Dieu incarné qui se présente à nous, sous les aspects d’un enfant, d’un homme. Mais alors, cet Enfant a‑t-il vraiment la science infinie ? Cet Enfant a‑t-il dans les mains le monde entier ? Porte-t-il dans ses mains toutes les créatures ? Est-Il vraiment le Créateur du monde ?
Eh oui ! Il est vraiment le Créateur du monde et nous l’avons chanté cette nuit, lorsque nous avons dit de la très Sainte Vierge :
Quem totus non capit orbis in tua se clausit viscera, factus homo (Alléluia) : « Vous avez enfermé dans votre sein. Celui que le monde ne peut pas contenir ».
Car en effet, le monde ne contient pas Dieu ; c’est Dieu qui contient le monde et qui le dépasse puisque c’est sa créature.
Alors, cet enfant qui est là, dans la crèche, entouré des animaux, entouré de deux personnes modestes : Marie et Joseph, c’est le Verbe de Dieu. C’est Celui qui porte dans sa main le monde entier. C’est Lui qui l’a créé. C’est Lui qui veut le sauver. C’est Lui qui veut apporter son Sang pour sauver les hommes. Mais a‑t-il besoin de nous sauver ? D’où vient la nécessité de ce salut ?
Le péché de l’homme. Nous sommes pécheurs. S’il n’y avait pas le péché, Jésus ne serait pas venu sur terre. Au moins dans les circonstances que la Providence nous a exposées et définies.
Ainsi donc, cet Enfant, est Celui qui vient nous racheter de nos péchés. Et parce qu’il vient nous racheter de nos péchés. Il affirme la Vérité, l’Éternité de Dieu et la nécessité de L’adorer. Il est notre Maître. Il est notre Roi. Il est notre Sauveur. Il est notre Prêtre.
Alors, avec les bergers, adorons cet Enfant-Jésus.
Mais voici que les grands de ce monde s’inquiètent. Pourquoi adorer cet enfant ? Serait-il donc roi, et s’il est roi, ne va-t-il pas porter ombrage à notre autorité, à notre puissance, à nos royaumes, aux royaumes de ce monde ?
Eh oui, Il portera ombrage aux princes de ce monde, si ces princes ne se soumettent pas à ses lois.
Car Il est le Roi des rois. Mais nous l’avons chanté aussi cette nuit :
Astiterunt reges terras, et principes convenerunt in unum adversus Dominum, et adversus Christum ejus (Ac 4,26) : « Les rois se sont soulevés contre Dieu et contre son Christ, et contre Celui qu’il a oint.
Contre Celui qui est son Fils. »
Et Dieu sait si l’Histoire donne raison à ce verset de l’Écriture :
Est-il possible que des hommes se soulèvent contre Celui qui veut les racheter, contre Celui qui vient leur porter la vie ; contre Celui qui vient verser son Sang pour leur donner la vie éternelle ?
Hélas, nous le voyons encore de nos jours. Où sont aujourd’hui, les Princes des peuples qui sont agenouillés devant l’Eucharistie, aujourd’hui, en cette nuit de Noël ? Où sont ceux qui se sont agenouillés devant l’Enfant-Jésus ? Combien, à notre époque, combien cela est douloureux de penser qu’après deux mille ans de christianisme, deux mille ans de prédication de l’Évangile, la parole de l’Écriture est toujours vraie.
Astiterunt reges in unum adversus Dominum, adversus Christum ejus.
Alors que devons-nous faire, nous, devant cette situation du monde qui rejette Notre Seigneur Jésus-Christ, qui ne veut pas croire à sa divinité ?
Nous devons affirmer la divinité de Notre Seigneur Jésus-Christ. Oui, cet enfant est Dieu. Cet enfant qui est dans la crèche. Il est Dieu. Et nous devons L’adorer. Il est notre tout.
Et nous avons encore lu tout à l’heure, dans l’Épître, les paroles de saint Paul qui disent : « Tout passe ici-bas comme les vêtements qui vieillissent » : Et omnes ut vestimentum veterascent (He 1,11). Tu autem idem ipse es (He 1,12) : « Toi cependant tu demeures toujours le même ».
Dieu demeure le même. Qu’Il soit sous cette écorce fragile de cet Enfant de Bethléem ; qu’Il soit sur la Croix ; qu’Il soit ressuscité ; qu’Il soit au Ciel, Il est toujours le même. Idem ipse est.
Et c’est précisément parce que nous croyons à l’immutabilité de Dieu, parce que nous croyons que Dieu est toujours le même ; nous ne voulons pas que Dieu change.
Et pour nous cette immutabilité de Dieu qui est sa force, qui est la Vérité, alors que tout change, comme un vêtement qui vieillit. Lui ne change pas.
Et c’est pourquoi notre foi ne peut pas changer. Elle est immuable comme Dieu. La foi dans les mystères, la foi dans les sacrements, la foi dans le Saint Sacrifice de la messe est immuable. Nous ne pouvons pas changer. Tout cela est l’image de Dieu. Tout cela est Dieu pour nous. C’est l’expression de Dieu parmi nous.
Notre foi n’est pas autre chose que la vision de Dieu, la préparation de la vision béatifique. Dieu ne changera pas non plus.
C’est pourquoi nous devons affirmer la Vérité de Notre Seigneur Jésus-Christ, la vérité de sa divinité. Et particulièrement de notre temps où cette divinité est combattue, même à l’intérieur de l’Église où son règne veut être limité.
En ce jour de Noël, l’Église nous offre trois messes. La messe de la nuit, la messe de l’aurore et la messe du jour. Et cela signifie que Jésus a eu également comme trois naissances.
Naissance en Dieu. Naissance éternelle du Fils unique sortant du sein du Père.
Naissance de la Vierge Marie. Naissance de nos âmes.
Nous devons donc méditer sur ces vérités que l’Église nous donne et demander à Dieu, que cette naissance de nos âmes soit toujours vivante. Rappelons-nous en particulier le jour de notre baptême. C’est à ce jour-là que le Sauveur a appliqué les grâces de sa Rédemption à nos âmes, le jour où nous avons été baptisés.
Alors ressuscitons la grâce de notre baptême, ne la laissons pas s’étioler, ne la laissons pas mourir dans nos âmes, mais ressuscitons la grâce de notre baptême par la fréquentation des sacrements, par l’assistance à la messe, par la communion avec Notre Seigneur qui nous donnera ses grâces et fera croître nos âmes dans la vie spirituelle, dans l’amour de Dieu, dans l’amour du prochain.
Et alors nous chanterons les louanges de Dieu. Comme les bergers. Ils sont retournés à leurs pâturages avec leurs troupeaux et ils ont chanté la gloire de Dieu et ils ont entendu les anges qui, eux aussi dans le Ciel chantaient la gloire de cet Enfant qui venait de naître, qui n’était autre que leur Dieu à eux aussi, les anges. Car Jésus est au-dessus des anges. Comme le dit si bien saint Paul dans sa lettre aux Hébreux, où il dit : À quel ange Dieu a‑t-il dit qu’il était son Fils unique. Notre Seigneur Jésus-Christ c’est le Roi des anges et c’est pourquoi les anges ont chanté « Gloria in excelsis Deo ». Nous chanterons les louanges de Dieu en nous unissant aux anges et aux bergers.
Nous les chanterons tout au long de notre vie, tous les jours de notre existence aussi, comme les bergers, nous répandrons la nouvelle de la naissance du Sauveur.
Si nous avons la foi dans la divinité de Notre Seigneur Jésus-Christ, si nous croyons justement qu’il est le Sauveur, qu’il n’y a pas d’autre sauveur ici-bas ; qu’il est le seul par lequel nous pouvons recouvrer la vie spirituelle et la vie éternelle, alors comment ne serions-nous pas missionnaires, comment ne désirerions-nous pas proclamer cela à la face du monde, afin que toutes les âmes de bonne volonté reçoivent la grâce de Notre Seigneur et parviennent à la vie éternelle.
C’est ce qu’ont fait les bergers. Et les gens étaient dans l’émerveillement en entendant ce que les bergers racontaient de ce qu’ils avaient vu.
Puissent les personnes qui nous entendent être émerveillées aussi de la bonne nouvelle : Le Sauveur nous est né. Qu’enfin le Ciel nous est ouvert, enfin nous pouvons parvenir à la béatitude céleste pour l’éternité.
Voilà ce que nous devons demander aujourd’hui dans nos prières. Et n’oublions jamais que ce Jésus que nous aurions voulu nous aussi adorer dans la crèche avec les bergers, que nous aurions voulu porter dans nos bras comme le vieillard Siméon en disant notre Nunc dimittis, ce Jésus est dans nos tabernacles. C’est le même, Semper idem ipse est, il est toujours le même. Jésus est là dans nos tabernacles. C’est Celui qui est dans la crèche ; c’est Celui qui est ressuscité ; c’est Celui qui est mort pour nous sur la Croix.
Alors tout à l’heure quand vous communierez : adorez Jésus. Adorez-Le de toute votre âme. Mettez toute votre âme à sa disposition. Mettez tout votre être dans ses mains, afin que vraiment vous soyez remplis des grâces que Jésus est venu nous apporter.
Demandons à la très Sainte Vierge Marie, de nous donner la connaissance de son Fils. Qu’elle nous apprenne ce qu’est cet Enfant-Jésus, afin que nous l’annoncions toujours davantage.
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.