Notre joie devant cette clarté – La revue américaine The Remnant du 27 août 2012 a publié ce commentaire de Brian M. McCall, professeur de Droit, sur la Déclaration du Chapitre général de la Fraternité Saint-Pie X.
La Déclaration finale du Chapitre général indique clairement que la Fraternité Saint-Pie X reconnaît l’autorité du Pape, ce qui la situe à l’opposé de presque tout le reste des membres actuels de l’Eglise qui ont tendance à nier ce principe et à favoriser, au contraire, la collégialité démocratique.
Dans ma lettre ouverte aux évêques de la Fraternité Saint-Pie X, datée du 15 mai 2012, (et publiée par The Remnant dans son édition du 15 juin 2012), j’avais fait remarquer que je m’étais jusqu’à alors abstenu de tout commentaire sur les discussions en cours entre le Vatican et la Fraternité Saint-Pie X. La raison en était que, depuis les neuf derniers mois, les détails de ces discussions étaient maintenus dans la confidentialité. Afin de tenter de minimiser les pressions extérieures, les deux parties avaient préféré garder confidentiels les différents éléments des documents échangés. Ces derniers mois, qui ont vu une série de fuites d’informations confidentielles, ont mis en évidence la prudence d’une telle initiative.
Cependant, à la suite du Chapitre général de la Fraternité Saint-Pie X, nous disposons désormais d’informations précises sur la position de la Fraternité Saint-Pie X (mais pas sur celle du Vatican) sur les questions principales. La Déclaration finale est un modèle de langage précis et clair. Une lecture attentive nous permet d’avoir une bonne compréhension de la position de la Fraternité Saint-Pie X, qui se révèle être la même que celle de son fondateur, Mgr Lefebvre. Je pense qu’un jour cette Déclaration finale sera considérée d’une importance égale à celle de la Déclaration de 1974. Elle dissipe en tout cas beaucoup de rumeurs et de mythes qui se sont répandus comme la peste, depuis des semaines, sur internet.
Les points suivants se dégagent de la Déclaration du Chapitre général :
La Fraternité Saint-Pie X est unifiée sur sa mission
Le diable semble avoir concentré ses efforts ces derniers temps pour tenter de harceler la Fraternité Saint-Pie X de l’extérieur et de l’intérieur. Ses ennemis ont ainsi tenté de semer la division et la discorde. Certains, peut-être inconsciemment ou mus par une bonne volonté apparente, pensant parfois qu’ils tentaient d’aider la Fraternité Saint-Pie X, ont créé un climat de peur et d’instabilité. C’est en réponse à cette escalade émotionnelle que j’ai écrit aux quatre évêques depuis Rome en mai dernier. Ma demande était la suivante : qu’une réunion des dirigeants de la Fraternité Saint-Pie X ait lieu publiquement pour rassurer les prêtres et les fidèles démontrant ainsi que, tout en maintenant la nécessité d’un débat franc et ouvert, ils se retrouvaient tous sur le fondement des principes catholiques qui ont donné naissance à la Fraternité Saint-Pie X.
Le Chapitre général a répondu à ce besoin et devrait désormais rassurer les prêtres et les fidèles sur le profond sentiment d’unité entre ses dirigeants. Le Supérieur général s’est ainsi entretenu avec les évêques, les supérieurs de District et les membres les plus anciens de la Fraternité Saint-Pie X et a conclu qu’après « une discussion franche », les doutes et les incompréhensions ont été « dissipés » (voir l’entretien avec Mgr Bernard Fellay, DICI n°258 du 20/07/12). Ainsi, comme le fait savoir la Déclaration du Chapitre général, « nous avons retrouvé notre union profonde en sa mission essentielle : garder et défendre la foi catholique, former de bons prêtres et œuvrer à la restauration de la chrétienté. » (DICI n°259 du 10/08/12).
Au milieu de tous les communiqués diplomatiques et manœuvres du Vatican, le Chapitre a humblement reconnu qu’il est facile de s’y perdre (comme beaucoup d’entre nous l’ont compris au cours des neuf mois écoulés). Cette reconnaissance permet de dissiper le nuage de confusion qui a fait naître toutes les dernières difficultés.
La meilleure façon de surmonter la confusion est la manière catholique : revenir aux principes de base et aux objectifs. La Fraternité Saint-Pie X a ainsi rétabli le lien profond de son unité fondée sur la triple mission de son fondateur, Mgr Lefebvre : la défense de la foi, la formation des prêtres et le combat pour le Christ-Roi. Malgré l’importance de la régularisation canonique de la Fraternité Saint-Pie X qui lui permettrait de retrouver, en toute justice, sa légalité, la Déclaration précise que cet objectif n’est pas sa raison d’être. Que ce tort soit réparé un jour ne serait que légitime, mais il est seulement accidentel à la mission première de la Fraternité Saint-Pie X, qui n’est rien d’autre que d’offrir ces trois présents à l’Eglise, pour le bien de l’Eglise. Une adhésion aussi claire à ses fondamentaux devrait inciter tous les observateurs, de l’intérieur comme de l’extérieur, à constater que les nuages des neuf derniers mois se sont dissipés.
La Fraternité Saint-Pie X professe son adhésion entière à l’Eglise catholique et à la Rome éternelle, mère et maîtresse de vérité
Tandis que les responsables actuels des diocèses, des universités et des instituts religieux éructent erreurs et hérésies presque chaque jour et partout dans le monde, il n’y a que de la Fraternité Saint-Pie X qu’on exige une profession publique de la foi catholique. Or, la simple assertion « Je crois toutes les vérités que vous nous avez révélées et que vous nous enseignez par votre sainte Eglise » paraît être devenue l’objet d’un important fatras de manœuvres diplomatiques de la part du Vatican, lequel a envoyé des signes contradictoires sur l’interprétation qu’il faut en faire. Il semble que le Saint-Siège ait tenté de plaire à tous, aussi bien à ceux qui critiquent Vatican II qu’aux progressistes profondément attachés… ». La Fraternité Saint-Pie X a purifié cette atmosphère diplomatique en publiant une profession de foi simple, usant d’un vocabulaire et d’un style tout à fait traditionnels :
(Nous réaffirmons) notre foi dans l’Eglise catholique et romaine, seule Eglise fondée par Notre Seigneur Jésus-Christ, en dehors de laquelle il n’y a pas de salut ni de possibilité de trouver les moyens qui y mènent ; dans sa constitution monarchique, voulue par Notre Seigneur, qui fait que le pouvoir suprême de gouvernement sur toute l’Eglise revient au pape seul, vicaire du Christ sur terre ; dans la royauté universelle de Notre Seigneur Jésus-Christ, créateur de l’ordre naturel et surnaturel, auquel tout homme et toute société doivent se soumettre. (DICI n°259 du 10/08/2012).
Ce passage exprime vraiment tout dans une parfaite clarté et fait office d’une profession de foi particulièrement adaptée à notre temps. Il réaffirme en particulier les trois dogmes les plus attaqués à notre époque : « Extra Ecclesiam nulla salus, hors de l’Eglise, point de salut » ; la nature monarchique – et non collégiale – de l’Eglise ; la Royauté sociale du Christ à laquelle tous les hommes et toutes les nations doivent se soumettre et sans laquelle même la vertu naturelle et la paix sont impossibles. Ces trois dogmes sont effectivement refusés par la liberté (possibilité de salut ou d’éléments de salut hors de l’Eglise), l’égalité (déni de la règle hiérarchique donnée par le Christ) et la fraternité (gouvernement collégial de l’Eglise), promues par les partisans de Vatican II ou la « Révolution française dans l’Eglise », pour paraphraser le cardinal Suenens.
Au lieu de harceler Mgr Fellay pour qu’il signe un préambule doctrinal, le Vatican devrait exiger de chaque supérieur, président d’université et évêque qu’il signe la déclaration citée ci-dessus s’il souhaite conserver sa fonction. Je pense qu’en conséquence il y aurait quelques postes vacants !
Comment cette puissante réaffirmation de la foi se rapporte-elle à la question qui nous préoccupe, et au problème qui est à la racine de la crise actuelle – « au milieu d’une Eglise en pleine crise et d’un monde qui s’éloigne de jour en jour de Dieu et de sa loi » ? La Déclaration finale indique clairement que la cause de cette situation est à chercher à la fois dans les nouveautés du concile Vatican II et dans les changements pratiques qui ont suivi.
Pour toutes les nouveautés du concile Vatican II qui restent entachées d’erreurs et pour les réformes qui en sont issues, la Fraternité ne peut que continuer à s’en tenir aux affirmations et enseignements du Magistère constant de l’Eglise ; elle trouve son guide dans ce Magistère ininterrompu qui, par son acte d’enseignement, transmet le dépôt révélé en parfaite harmonie avec tout ce que l’Eglise entière a toujours cru, en tout lieu (DICI n°259 du 10/08/2012).
Ce passage est très soigneusement rédigé et doit être compris tel quel. Tout d’abord, il n’est pas dit que l’Eglise a officiellement promulgué des erreurs, cette affirmation reviendrait à nier l’infaillibilité de l’Eglise. On n’y rejette pas l’ensemble du Concile comme erroné, voire comme fauteur d’hérésie. On y affirme que la seule façon d’évaluer les « nouveautés » du concile Vatican II doit se faire à la lumière des « affirmations et enseignements du Magistère constant de l’Eglise ».
Remarquons bien qu’il est clairement établi dans cette Déclaration, que les erreurs ne se trouvent pas dans le Magistère de l’Eglise, mais que seules les nouveautés en sont « entachées ». La solution proposée n’est autre que celle de saint Vincent de Lérins, qui résiste à l’épreuve du temps depuis 1500 ans :
Dans l’Eglise catholique elle-même, il faut veiller soigneusement à s’en tenir à ce qui a été cru partout, et toujours, et par tous ; car c’est cela qui est véritablement et proprement catholique, comme le montrent la force et l’étymologie du mot lui-même, qui enveloppe l’universalité des choses. Et il en sera finalement ainsi si nous suivons l’universalité, l’antiquité, le consentement général. Nous suivrons l’universalité, si nous confessons comme uniquement vraie la foi que confesse l’Eglise entière répandue par tout l’univers ; l’antiquité, si nous ne nous écartons en aucun point des sentiments manifestement partagés par nos saints aïeux et par nos pères ; le consentement enfin si, dans cette antiquité même, nous adoptons les définitions et les doctrines de tous, ou du moins de presque tous les évêques et les docteurs. (Chapitre 4 du Commonitorium A.D. 434)
Plus tard, dans le même ouvrage, saint Vincent explique ce que cette règle signifie pour l’Eglise :
L’Eglise du Christ, elle, gardienne attentive et prudente des dogmes qui lui ont été donnés en dépôt, n’y change jamais rien, n’ajoute rien, n’enlève rien ; elle ne retranche pas ce qui est nécessaire, ni n’ajoute de superflu ; elle ne laisse pas perdre ce qui est à elle, ni n’usurpe ce qui est à autrui. (chapitre 25 du Commonitorium).
De l’aveu même du pape, le concile Vatican II contient des éléments nouveaux. Et alors même que le Saint-Père souhaiterait que le cercle soit carré, en essayant de trouver des nouveautés en continuité avec leur contraire, la Fraternité Saint-Pie X ne fait que répéter ce que disait saint Vincent répondant à la question de savoir comment considérer les nouveautés : tenir à ce qui a toujours et partout été cru. En d’autres termes : « affirmations et enseignements du Magistère constant de l’Eglise ». C’est tout ce que nous pouvons faire face aux nouveautés qui ont été diffusées.
La Fraternité Saint-Pie X n’est pas schismatique
Depuis pratiquement le début de son histoire, il y a 42 ans, les ennemis de la Fraternité Saint-Pie X l’ont affublée de l’étiquette de « schismatique » afin de la discréditer. Habituellement, ceux qui utilisent ce terme peinent à le définir. Le schisme est un acte de la volonté. Etre schismatique signifie nier l’autorité du pape et des évêques unis à lui, et donc choisir de se couper de l’Eglise. Contrairement à l’état d’hérésie qui peut se produire sans en avoir l’intention, on ne peut involontairement devenir schismatique.
Il faut se couper de l’Eglise, consciemment et volontairement. La Déclaration indique clairement que la Fraternité Saint-Pie X reconnait l’autorité du pape (à la différence, de fait, de presque tout le reste de l’Eglise qui la nie en faveur de la collégialité démocratique). La profession de foi citée ci-dessus déclare expressément que « le pouvoir suprême de gouvernement sur toute l’Eglise revient au pape seul, vicaire du Christ sur terre ». Je mets au défi quiconque de trouver un exemple historique d’un schismatique reconnu qui a publiquement exprimé de tels propos. Il n’y en aura jamais aucun, cette affirmation étant tout le contraire de l’intention du schisme. On retrouve cette ferme volonté d’éviter le schisme dans la prière à Notre-Dame (à la fin de la Déclaration) :
« Qu’elle daigne garder dans l’intégrité de la foi, dans l’amour de l’Eglise, dans la dévotion au successeur de Pierre, tous les membres de la Fraternité Saint-Pie X et tous les prêtres et fidèles qui œuvrent dans les mêmes sentiments, afin qu’elle nous garde et nous préserve tant du schisme que de l’hérésie. »
Voici des paroles difficilement schismatiques !
Espérons alors que la calomnie contre la Fraternité Saint-Pie X cesse enfin.
Que va-t-il se passer à présent ?
Comment le Vatican va-t-il recevoir cette Déclaration, après avoir pris acte poliment de sa publication ? Il est encore difficile aujourd’hui de spéculer sur cette question. La Déclaration ne refuse pas d’autres réunions ou discussions avec le Vatican. Elle ne refuse pas toute régularisation canonique, mais déclare simplement que toute proposition nécessitera un vote délibératif du Chapitre général. Une exigence qui montre que l’unité de la Fraternité Saint-Pie X doit être maintenue dans le processus, ce qui est simplement une participation au caractère d’unité de l’Eglise.
Si le Vatican devait réagir par un retour de la persécution, en lançant par exemple de nouvelles excommunications, la clarté de cette Déclaration rendrait alors absurde l’attitude du Vatican. Pour quel délit la Fraternité Saint-Pie X serait-elle « excommuniée » ? Pour rester fidèle aux « affirmations et enseignements du Magistère constant de l’Eglise » ? Pour réaffirmer le dogme défini Extra Ecclesiam nulla salus ? Pour sa défense de la Royauté sociale de Notre Seigneur et son désir de voir se reconstruire la chrétienté ? Ses prêtres vont-ils être déclarés schismatiques pour avoir prié afin d’être préservés du schisme ? Une telle farce serait semblable à l’absurdité qui a été rapporté par The Remnant il y a plus de dix ans, quand un prêtre a tenté de faire arrêter l’abbé Michael McMahon (FSSPX) et ses étudiants pour avoir récité le chapelet dans une église catholique du Michigan. Comme les lecteurs s’en souviendront sûrement, la police ne pouvait pas comprendre comment un prêtre catholique devait être arrêté pour avoir récité une prière catholique dans une église catholique. Au bout du compte, c’est le prêtre progressiste qui a été ridiculisé.
La Déclaration prévoit tout de même cette possibilité de nouvelles persécutions. Le Chapitre général a exprimé le souhait de s’unir « aux autres chrétiens persécutés dans les différents pays du monde qui souffrent pour la foi catholique, et très souvent jusqu’au martyre ». Cette phrase exprime le pressentiment de nouvelles persécutions à venir et l’acceptation de les subir, si telle était la volonté de Dieu, afin d’en recueillir de plus grands fruits pour la foi.
Espérons toutefois que Dieu interdise une telle réaction désastreuse de la part du Vatican qui porte déjà la responsabilité de tant de blessures par des décennies de gestion imprudente. Quelle serait la réaction du clergé et des fidèles si le Vatican, qui permet le mépris pur et simple de la foi en tous lieux, menaçait de nouveau d’excommunier un petit groupe de prêtres pour ses intentions de vivre et de croire en suivant ce que les catholiques ont fait de tout temps ?
Si Benoît XVI veut vraiment favoriser la restauration de l’Eglise après la crise post-conciliaire, il devrait tout simplement reconnaître la beauté de cette profession de foi de la Fraternité Saint-Pie X et déclarer unilatéralement celle-ci en communion avec l’Eglise. Cela peut sembler impossible, mais rappelons que la Fraternité Saint-Pie X vient d’offrir une croisade de douze millions de chapelets pour l’Eglise. Rien n’est impossible à Dieu et Il ne peut refuser aucune demande faite par sa sainte Mère.
Source : The Remnant – traduction par nos soins – DICI n°260 du 14/09/12