Grégoire IX

178ᵉ pape ; de 1227 à 1241

27 mai 1233

Lettre au calife almohade ar-Rashîd

Exhortation au baptême

Au noble Miramolinus, connaître le che­min de la véri­té et y demeu­rer fidèlement.

Dans une autre lettre que nous avons fait par­ve­nir à ta gran­deur par nos chers fils, les frères de l’ordre des Mineurs, te mon­trant la véri­té de la foi chré­tienne, nous sup­pliions comme nous le pou­vons le père des lumières que, consi­dé­rant avec la clé­mence qui est la sienne l’élan de notre inten­tion, il se montre accueillant et favo­rise avec bon­té nos prières, et qu’il ouvre les oreilles de ton cœur afin que, comme nous le dési­rons ardem­ment pour toi, tu acquières la grâce dans le pré­sent et la gloire dans l’avenir, dans la dévo­tion du cœur et l’humilité de l’esprit.

Nous dési­rons et nous vou­lons ardem­ment que, à toi qui marche dans les ténèbres, la vraie lumière montre son fils unique, et qu’elle t’appelle avec misé­ri­corde à la foi de la véri­té chré­tienne dans la recon­nais­sance de son fils le Seigneur Jésus-​Christ, afin que, puri­fié par le bap­tême de régé­né­ra­tion tu t’attaches à plaire à Dieu dans une nou­velle vie, comme son fils adop­tif, lui qui veut régner avec ses fidèles dans le royaume des cieux. Et plût au ciel que la confiance que nous avons conçue ne soit pas trom­pée, espé­rant d’après tes pro­pos que tu te montres accueillant et bien dis­po­sé envers les reli­gieux de notre foi et spé­cia­le­ment notre véné­rable frère A[gnellus], évêque de Fès, et les autres frères de l’ordre des Mineurs, et que tu les honores avec suf­fi­sam­ment de bien­veillance, ce qui sera un signe clair de la misé­ri­corde divine en vue de ton salut. C’est pour­quoi, l’évêque et les frères sus­dits te por­tant une bien sin­cère affec­tion dans le Christ, s’emploient à pro­mou­voir auprès du Seigneur et du Siège apos­to­lique ton pro­fit tant tem­po­rel qu’éternel avec l’amour et le zèle d’une pié­té inlas­sable. Enfin, comme les richesses de la bon­té du Christ sont inef­fables, tu dois avoir le ferme espoir et la pleine confiance que si un chan­ge­ment s’opère en tout par la droite du très-​haut, ce que nous sou­hai­tons et dési­rons, celui-​ci aug­men­te­ra l’honneur de ton règne, lui qui pro­met à ceux qui l’aiment le cen­tuple ici-​bas et la vie éter­nelle dans le monde à venir ; quant à nous, nous te confions des choses plus grandes et plus dignes, de sorte que ta magni­fi­cence et ton renom soient plus amples.

Sinon, si par hasard tu pré­fé­rais être l’ennemi plu­tôt que l’ami du Christ, nous ne souf­fri­rions en aucune manière, comme nous ne devons le souf­frir, que tu sois ser­vi par ses fidèles.

Donné au Latran le VI des calendes de juin, la sep­tième année.

Source : Pierre Guichard & Denis Menjot, Pays d’Islam et Monde Latin, pp. 186–190 – K.-E. Lupprian, ibid, p. 128–129 (coll. Studi e Testi, 291)