Innocent III

176ᵉ Pape ; de 1198 à 1216

1200

Lettre à al-Malik al-‘Adil, sultan de Damas et Babylone

Demandant la restitution de Jérusalem

Par cette lettre adres­sée au sul­tan al-​Malik al-‘Adil (1145–1218), frère de Saladin, le pape deman­dait la res­ti­tu­tion de Jérusalem en échange de pri­son­niers et d’une paix durable. Il n’ob­tint pas gain de cause.

Au noble sul­tan de Damas et de Babylone, véné­ra­tion et amour du nom divin

Le pro­phète Daniel nous apprends que c’est le Dieu du ciel qui met en lumière ce qui est caché, qui change les temps et dépose les empires, afin que tout le monde recon­naisse que le Très-​Haut est le maître des trônes et les dis­tri­bue à son gré : c’est ce qu’il a mon­tré clai­re­ment en met­tant Jérusalem et son ter­ri­toire en la puis­sance de votre frère, non pré­ci­sé­ment en consi­dé­ra­tion de ses mérites, mais plu­tôt en puni­tion des offenses par les­quelles le peuple chré­tien a sou­le­vé la colère du Tout-​Puissant. Mais nous nous sommes adres­sé à lui, et nous espé­rons qu’il aura pitié de nous, puisque Dieu, pour nous ser­vir des paroles du pro­phète, n’oublie pas la misé­ri­corde, même dans sa colère. D’après l’exemple de celui qui dit dans l’Evangile : « Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur », nous vous deman­dons, en tout humi­li­té, que la pos­ses­sion vio­lente de ce pays ne fasse plus ver­ser de sang ; que, docile à de sages conseils, vous nous ren­diez cette terre bénie, puisqu’à l’exception d’une gloire vaine et sté­rile, il en résulte des dom­mages plu­tôt peut-​être que des avan­tages. Si vous accé­dez à nos vœux, nous déli­vre­rons réci­pro­que­ment les pri­son­niers, nous lais­se­rons repo­ser la guerre et notre peuple sera trai­té près de vous comme le vôtre le sera chez nous. Nous vous sup­plions de rece­voir ami­ca­le­ment les por­teurs de cette lettre, d’avoir pour eux les égards dus au carac­tère dont ils sont revê­tus, enfin de leur don­ner une réponse conve­nable et conforme à notre attente.

Source : Histoire du pape Innocent III, abbé Jorry, Arras, 1853. – PL, t. 216, col. 832