Donné à Rome, près de Saint Pierre, le 25 décembre en la fête de la Nativité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, l’an 1955
A nos Vénérables Frères les Patriarches, Primats, Archevêques, évêques et autres Ordinaires en paix et communion avec le Siège apostolique, ainsi qu’à tout le clergé et aux fidèles de l’univers catholiqueVénérables Frères,
Salut et Bénédiction apostolique !
Nous Nous sommes toujours grandement intéressé à la musique sacrée ; c’est pourquoi il Nous a paru opportun de reprendre le sujet de manière méthodique dans cette Encyclique et d’éclairer aussi un peu plus de nombreuses questions discutées durant les dernières dizaines d’années, afin que cet art noble et original serve chaque jour davantage à rehausser la splendeur du culte divin et à soutenir la vie spirituelle des fidèles. Nous avons voulu en même temps répondre aux désirs que dans leur sagesse un bon nombre d’entre vous, Vénérables Frères, Nous ont exprimés, aux vœux formulés lors de Congrès traitant cette matière, par des spécialistes et des musiciens de valeur, aux suggestions de l’expérience pastorale et aux progrès des études musicales. Nous espérons par là confirmer, éclairer et recommander ce que saint Pie X a sagement établi dans le chirographe qu’il a nommé à bon droit « le code juridique de la musique sacrée » [1], de telle sorte que cet art remarquable, adapté aux conditions actuelles et enrichi en quelque manière, réponde toujours mieux à son rôle élevé.
I – Histoire
La musique fait assurément partie des dons de nature que Dieu, en qui s’harmonisent le parfait accord et la suprême unité, a départis aux hommes créés à son « image et ressemblance » [2], car elle concourt avec les autres arts libéraux à la joie de l’esprit et au plaisir de l’âme. Aussi Augustin a‑t-il raison de dire : « C’est pour signifier une grande chose que la musique, c’est à dire l’art ou le sens du rythme exact, a été également concédée par la libéralité de Dieu aux mortels doués d’une âme raisonnable » [3].
Personne ne s’étonnera donc que le chant sacré et l’art de la musique, ainsi qu’il résulte de nombreux documents anciens ou récents, aient partout et toujours été employés, même chez les païens, pour embellir les cérémonies religieuses ; et que le culte du vrai Dieu en particulier ait usé de cet art dès les anciens temps. Le peuple de Dieu, lorsqu’il eut été sauvé de la Mer Rouge par un miracle de la puissance divine, chanta un chant de victoire au Seigneur ; et Marie, sœur de Moïse son chef, sous l’effet d’une inspiration prophétique, chanta avec le peuple en s’accompagnant du tambourin [4]. Plus tard, tandis qu’on transportait l’Arche de Dieu de la maison d’Obédédom dans la ville de David, le roi lui-même « et tout Israël dansaient devant le Seigneur au son de toutes sortes d’instruments de bois de cyprès, de harpes, de luths, de tambourins, de sistres et de cymbales » [5]. Le roi David lui-même régla la musique et les chants à employer dans le culte sacré [6] ; cette règlementation fut rétablie après le retour du peuple de l’exil, et observée fidèlement jusqu’à la venue du Divin Rédempteur. Dans l’Église fondée par le Sauveur, le chant sacré fut en usage et en honneur dès le début, ainsi que le montre clairement l’Apôtre saint Paul quand il écrit aux Ephésiens : « Remplissez-vous de l’Esprit Saint et récitez entre vous des psaumes, des hymnes et des cantiques spirituels » [7] ; et que cette manière de chanter fût en usage également dans les réunions chrétiennes, il l’indique par ces paroles : « Lorsque vous vous assemblez, chacun peut avoir un cantique… » [8]. Pline atteste la même chose après l’âge apostolique : les renégats, écrit-il, affirmaient « que leur faute ou leur erreur se ramenait au fait qu’un jour fixe ils avaient l’habitude de se réunir avant l’aube et de réciter un chant au Christ comme à un dieu » [9]. Ces paroles du proconsul romain en Bithynie montrent clairement qu’au temps même des persécuteurs, la voix de l’Église qui chante ne s’était pas complètement tue ; ce que Tertullien confirme en rapportant que dans les réunions des chrétiens « on lit les écritures, on chante les psaumes, on fait des causeries » [10].
Lorsque l’Église jouit de nouveau de la liberté et de la paix, d’innombrables témoignages des Pères et des Écrivains ecclésiastiques confirment que les psaumes et les hymnes étaient d’un usage presque quotidien dans le culte liturgique. Et même peu à peu de nouvelles formes de chant sacré se créèrent, de nouveaux genres de cantiques furent inventés, que les Scholæ Cantorum, spécialement à Rome, développèrent de plus en plus. Et la tradition rapporte que Notre Prédécesseur d’heureuse mémoire, saint Grégoire le Grand, recueillit avec soin tout ce que les anciens avaient transmis, le mit en bon ordre et protégea par des lois et des règles opportunes la pureté et l’intégrité du chant sacré. De Rome, le chant romain fut transporté petit à petit dans les autres régions de l’Occident ; non seulement il s’enrichit de nouvelles formes et de nouveaux modes, mais un nouveau genre de chant sacré entre même en usage, à savoir l’hymne religieux, qui employait parfois la langue vulgaire. Quant au chant choral, qu’on appela « grégorien », du nom de son rénovateur S. Grégoire, il ne fut bientôt plus seul à donner splendeur au culte : à partir du VIIIème ou IXème siècle en effet, dans presque toutes les régions de l’Europe chrétienne, se répandit dans les églises l’usage de l’orgue.
Au chant choral s’ajouta aussi peu à peu à partir du IXème siècle le chant polyphonique, dont la théorie et la pratique se développèrent de plus en plus aux siècles suivants, et qui, surtout au XVème et au XVIème siècles, sous l’impulsion de grands artistes, s’éleva une admirable perfection. L’Église a toujours honoré également ce chant polyphonique et l’a volontiers admis jusque dans les Basiliques Romaines et les cérémonies pontificales pour rehausser la magnificence des rites sacrés. Sa force et son éclat s’accrurent encore du fait que les voix des chanteurs furent accompagnées non seulement par l’orgue mais aussi par d’autres instruments de musique.
Et c’est ainsi qu’avec la faveur et les encouragements de l’Eglise, la musique sacrée parcourut à travers les siècles un long chemin qui, lentement parfois et laborieusement, la conduisit à une plus grande perfection : partie des mélodies grégoriennes simples et naturelles, encore que très parfaites en leur genre, elle atteignit aux œuvres d’art grandioses qu’embellissent et épanouissent de façon extraordinaire non seulement les voix humaines, mais aussi les orgues et les autres instruments de musique. Ce progrès de la musique manifeste combien l’Église eut à cœur de rendre le culte divin toujours plus splendide et plus agréable au peuple chrétien ; il montre aussi pourquoi elle dut à plusieurs reprises empêcher qu’on ne dépassât les justes limites et qu’avec un véritable progrès quelque chose de profane et d’étranger au culte sacré ne s’y introduisît et ne la défigurât.
A toutes les époques les Souverains Pontifes ont rempli avec sollicitude ce devoir de vigilance ; et le Concile de Trente proscrivit avec sagesse « cette sorte de musique dans laquelle quelque chose de sensuel ou d’impur se mêle soit à l’orgue soit au chant » [11]. Sans parler de nombreux autres Souverains Pontifes, Notre Prédécesseur d’heureuse mémoire Benoît XIV, à l’approche du jubilé, dans son Encyclique du 19 février 1749, où l’on trouve une érudition et des idées remarquables, exhorta d’une façon particulière les Évêques à écarter par tous les moyens les abus et les exagérations qui s’étaient introduits dans la musique sacrée [12]. Nos Prédécesseurs Léon XII, Pie VIII [13], Grégoire XVI, Pie IX [14], Léon XIII, adoptèrent la même attitude. On peut toutefois affirmer avec raison que Notre Prédécesseur d’immortelle mémoire, saint Pie X, a réalisé une restauration et une réforme complètes de la musique sacrée en revenant aux principes et aux normes transmis par les anciens, qu’il rassembla opportunément et adapta aux conditions de l’époque actuelle [15]. Enfin, comme Notre dernier Prédécesseur, Pie XI, d’heureuse mémoire, le fit dans la Constitution Apostolique Divini cultus sanctitatem, du 20 décembre 1929 [16], Nous-même par l’Encyclique Mediator Dei, du 20 novembre 1947, avons complété et confirmé les prescriptions des Pontifes antérieurs [17].
II – Les lois fondamentales
Personne assurément ne s’étonnera que l’Église s’intéresse de façon si attentive à la musique sacrée. Il ne s’agit pas en effet de formuler des lois esthétiques ou techniques concernant la musique, mais l’intention de l’Église est de protéger celle-ci contre tout ce qui pourrait la rendre moins digne ; elle est appelée en effet à rendre service dans une matière aussi importante que le culte divin.
En cela la musique sacrée n’obéit pas à d’autres lois que celles qui s’imposent à tout art religieux et même à tout art en général. Or Nous n’ignorons pas que ces dernières années des artistes ont osé, au grand détriment de la piété, introduire dans les églises des œuvres qui manquaient de toute inspiration religieuse et qui offensaient même les justes principes de l’art. Ils s’efforcent de justifier cette regrettable manière d’agir par des arguments spécieux qu’ils assurent découler de la nature de l’art. Ils répètent en effet que l’inspiration de l’artiste est libre et qu’il n’est pas permis de lui imposer de règles extérieures à l’art, qu’elles soient religieuses ou morales, parce qu’elles blessent gravement la dignité de l’art et mettent en quelque sorte des entraves à l’activité inspirée de l’artiste.
De tels arguments touchent une question assurément ardue et grave, qui intéresse tout art et tout travail artistique et ne peut se résoudre par les seuls principes de l’art et de l’esthétique, mais demande qu’on recoure au principe suprême de la fin dernière qui régit de façon sacrée et inviolable tout homme et toute action humaine. Le fait que l’homme est ordonné à sa fin dernière, qui est Dieu, constitue une loi absolue et nécessaire, fondée sur la nature même de Dieu et sa perfection infinie, et Dieu lui-même ne pourrait en affranchir personne. Cette loi éternelle et immuable commande que l’homme lui-même et toutes ses actions manifestent et imitent dans la mesure du possible l’infinie perfection de Dieu, à la louange et à la gloire du Créateur. Aussi’ l’homme, né pour atteindre cette fin suprême, doit-il se conformer à l’archétype divin et diriger dans son action toutes ses facultés physiques et spirituelles, les subordonner entre elles et les soumettre comme il convient au but à atteindre. C’est donc d’après leur accord avec la fin dernière de l’homme que l’art et ses œuvres doivent être jugés ; il s’agit en effet d’un des plus nobles exercices du génie humain car son but est d’exprimer dans les œuvres humaines l’infinie beauté de Dieu, et il en constitue comme le reflet. C’est pourquoi on ne peut professer le principe de « l’art pour l’art », selon lequel, négligeant totalement la fin essentielle à toute créature, l’art serait complètement affranchi de toutes les lois qui ne découleraient pas de l’art même. Ce principe manque de tout fondement, ou bien il porte gravement atteinte à la dignité de Dieu, Créateur et fin dernière. Quant à la liberté de l’artiste, qui n’est pas une impulsion aveugle née de la fantaisie ou du désir de la nouveauté, elle n’est nullement restreinte ou supprimée par le fait d’être soumise à la loi divine ; elle en est plutôt ennoblie et perfectionnée.
Ces vérités, qui s’appliquent à toutes les œuvres d’art, valent aussi, évidemment, pour l’art religieux et sacré. L’art religieux est encore davantage consacré à Dieu, à sa louange et à sa gloire, puisqu’il n’a pas d’autre but que d’orienter fortement les âmes des fidèles par les œuvres qu’il présente à leur vue ou à leurs oreilles. L’artiste qui ne professe pas les vérités de la foi ou que sa manière de vivre éloigne de Dieu ne doit donc pas se mêler d’art religieux : il lui manque en effet ce sens intérieur qui permet de voir ce que demande la majesté de Dieu et du culte divin, et il ne peut espérer que ses œuvres sans inspiration religieuse, même si elles dénotent un homme qui connaît son art et qui ne manque pas d’habileté, respirent vraiment la piété et la foi qui conviennent au temple de Dieu et à sa sainteté, et soient par conséquent dignes d’y être admises par l’Église, gardienne et juge de la vie religieuse.
Quant à l’artiste dont la foi est ferme et la vie digne d’un chrétien, qu’il suive l’élan de son amour pour Dieu et fasse religieusement usage des forces que Dieu lui a concédées, qu’il s’efforce d’exprimer par les couleurs, les lignes, les sons et les chants les vérités qu’il croit et la piété qu’il professe, et cela d’une manière si juste et si agréable que cet exercice sacré soit pour lui-même comme un acte de religion et pour le peuple un stimulant puissant à la foi et à la piété. L’Église a toujours honoré et honorera toujours de tels artistes, elle leur ouvre largement les portes de ses églises, car elle est heureuse d’accueillir l’aide considérable qu’ils lui apportent par leur art et leur habileté dans l’accomplissement plus efficace de son ministère apostolique.
Ces lois de l’art religieux s’appliquent plus étroitement encore à la musique sacrée car elle touche davantage le culte divin que la plupart des autres arts, tels que l’architecture, la peinture et la sculpture : celles-ci en effet s’efforcent de préparer un cadre digne des rites divins, celle-là, au contraire occupe une place importante dans l’exécution même des cérémonies religieuses. C’est pourquoi l’Église doit veiller avec le plus grand soin à écarter d’elle, comme d’une servante de la sainte liturgie, tout ce qui ne convient pas au culte sacré ou pourrait empêcher les fidèles d’élever leur esprit vers Dieu.
La dignité de la musique Sacrée, son but sublime, est en effet d’embellir par la beauté de ses mélodies la voix du prêtre qui célèbre ou du peuple chrétien qui loue Dieu, d’entraîner vers Dieu par son charme les esprits des fidèles, de rendre plus intenses et plus ferventes les prières liturgiques de la communauté chrétienne, afin que tous puissent louer et prier avec plus de force, d’application et d’efficacité l’unique Dieu en trois Personnes. La musique sacrée contribue donc à augmenter l’honneur que l’Église unie au Christ, son Chef, rend à Dieu ; elle augmente aussi le fruit que les fidèles, sous l’effet des accords sacrés, retirent de la sainte liturgie et qu’ils manifestent par une conduite digne d’un chrétien, comme l’enseigne l’expérience quotidienne et le confirment de nombreux monuments littéraires antiques et modernes. Saint Augustin parlant des chants exécutés « d’une voix claire et appropriée » avoue : « Quand elles sont ainsi chantées, je sens que nos esprits s’enflamment au son des paroles saintes de façon plus religieuse et plus ardente que si elles n’étaient pas chantées de la sorte, et les différents sentiments de notre âme s’expriment chacun à leur façon dans la voix et dans le chant, qui les excitent en vertu de je ne sais quel rapport caché » [18]. Il est facile d’en conclure que la dignité et l’importance de la musique sacrée sont d’autant plus grandes qu’elle touche davantage à l’action suprême du culte chrétien, le sacrifice eucharistique de l’autel. Elle ne peut donc rien faire de plus élevé, rien de plus sublime que d’accompagner discrètement la voix du prêtre qui offre la victime divine, de répondre joyeusement à ses appels avec le peuple présent, et de souligner de son art toute l’action sacrée. La musique sacrée remplit encore un autre ministère, presque aussi noble que le premier, quand elle accompagne et embellit les autres cérémonies liturgiques, avant tout la récitation au chœur de l’Office divin. Cette musique « liturgique » mérite donc le plus grand honneur et la plus grande louange.
Il faut néanmoins faire grand cas de la musique qui, sans être destinée d’abord à la sainte liturgie, aide néanmoins beaucoup la religion par son objet et sa fin, et mérite par là d’être appelée musique « religieuse ».
Il existe encore un autre genre de musique sacrée, qu’on peut qualifier de « populaire » et qui, né de l’Église, lui doit aussi ses heureux développements ; il est capable d’exercer, l’expérience en témoigne, une influence considérable et salutaire sur les âmes des fidèles, qu’on l’emploie dans les églises pour les cérémonies non liturgiques ou au dehors pour d’autres solennités. En effet, la mélodie de ces chants le plus souvent en langue vulgaire, s’imprime sans effort dans la mémoire et y fixe également les paroles et les phrases que la répétition fréquente fait mieux comprendre. Il en résulte qu’en apprenant ces cantiques dès leur jeune âge les enfants trouvent plus de facilité à connaître les vérités de notre foi, à les goûter, à les retenir, ce qui aide sérieusement l’enseignement du catéchisme. Pour les jeunes gens et les adultes, ces chants religieux constituent une agréable récréation et un plaisir honnête ; ils contribuent à une certaine magnificence religieuse des réunions et des congrès, ils apportent jusque dans les familles chrétiennes une joie pieuse, une douce consolation et un bien spirituel. C’est pourquoi ces cantiques populaires qui sont d’un grand secours à l’apostolat, méritent d’être eux aussi soigneusement cultivés et développés.
En exaltant donc les qualités et l’efficacité apostolique de la musique sacrée Nous soulignons un fait qui doit remplir de joie et de consolation tous ceux qui d’une manière ou d’une autre s’appliquent à la cultiver et à la pratiquer. Tous ceux en effet qui composent des pièces musicales avec talent, qui les dirigent, ou les exécutent par la voix ou sur les instruments exercent, bien que de diverses manières, un véritable apostolat, et recevront de Notre Seigneur, chacun selon son mérite, les récompenses des apôtres. Qu’ils estiment donc grandement la tâche qui les fait non seulement artistes et maîtres, mais aussi serviteurs et auxiliaires du Christ dans l’apostolat, et qu’ils manifestent également dans leur vie la dignité de leur fonction.
III – Différents genres de la musique sacrée
En raison de la dignité et de l’efficacité de la musique sacrée et du chant religieux, dont Nous venons de parler, il est tout à fait nécessaire qu’ils soient sous tous rapports soigneusement réglés, de manière à pouvoir porter leurs fruits salutaires.
Il faut en premier lieu que le chant et la musique sacrée qui sont le plus étroitement unis au culte liturgique de l’Église atteignent le but élevé qui leur est proposé. Cette musique – comme le faisait déjà sagement remarquer Notre Prédécesseur saint Pie X -, « doit donc posséder les qualités propres de la liturgie, avant tout la sainteté et la qualité de la forme, d’où découle naturellement un autre caractère, sa valeur universelle » [19].
Qu’elle soit sainte ; tout ce qui rappelle le monde profane, qu’elle ne l’accueille pas et qu’elle ne le laisse pas s’introduire dans ses mélodies. C’est cette sainteté qui caractérise éminemment le chant Grégorien en usage dans l’Église depuis tant de siècles et qui peut être appelé pour ainsi dire son patrimoine. Ce chant en effet par l’accord intime de ses mélodies avec le texte sacré, non seulement s’adapte de près aux paroles mais il interprète en quelque sorte leur sens et leur valeur, et les fait goûter à l’âme des auditeurs ; cet effet il l’obtient par des moyens musicaux simples et faciles mais animés d’un art si sublime et si saint qu’ils entraînent l’admiration sincère de tous et constituent pour les spécialistes et les artistes de la musique sacrée comme une source inépuisable de nouvelles mélodies. Ce trésor précieux du chant sacré grégorien, il appartient à tous ceux à qui le Christ Notre Seigneur a confié la garde et l’administration des richesses de son Église de le conserver soigneusement et d’y faire participer largement le peuple chrétien. Aussi ce que Nos Prédécesseurs S. Pie X, qu’on appelle a bon droit le restaurateur du chant grégorien [20], et Pie XI [21] ont sagement ordonné et enseigné, Nous aussi, en considération des caractéristiques qui distinguent le vrai chant grégorien, Nous le voulons et le prescrivons, à savoir qu’on utilise largement ce chant sacré dans les cérémonies liturgiques et que l’on veille avec grand soin à l’exécuter correctement, dignement et pieusement. Et si, à cause de fêtes récemment instaurées, il faut composer de nouvelles mélodies, qu’on en charge des maîtres vraiment compétents de manière à rester fidèle aux lois propres du chant grégorien authentique et en sorte que les nouvelles compositions puissent rivaliser avec les anciennes par leur valeur et leur pureté.
Si l’on observe réellement de tout point ces normes, on réalisera aussi comme il se doit la seconde propriété de la musique sacrée, à savoir qu’elle soit vraiment un art ; et quand, dans toutes les églises de la terre, le chant grégorien résonnera dans toute sa pureté et son intégrité, il aura lui aussi, comme la Liturgie Romaine, la note d’universalité ; de la sorte, où qu’ils se trouvent, les fidèles entendront une musique familière et pour ainsi dire de chez eux et percevront par là avec une vraie consolation l’unité admirable de l’Église. Voilà certes l’une des raisons principales pour lesquelles l’Église souhaite tant que le chant Grégorien soit intimement associé aux paroles latines de la liturgie sacrée.
Nous n’ignorons pas que le Saint Siège, pour des motifs graves, a concédé en cette matière des exceptions bien définies mais Nous ne voulons pas qu’on les étende ni qu’on les applique à d’autres régions sans la permission du Saint-Siège. Bien plus, là où il est permis de profiter de ces concessions, que les Ordinaires des lieux et les autres pasteurs sacrés veillent avec soin à faire apprendre par les fidèles dès l’enfance au moins les mélodies Grégoriennes les plus faciles et les plus usitées pour qu’ils sachent les utiliser pendant les fonctions sacrées et qu’en cela aussi l’unité et l’universalité de l’Église resplendissent chaque jour davantage.
Cependant là où une habitude séculaire ou immémoriale permet d’insérer dans la Messe solennelle des cantiques populaires en langue vulgaire après le chant latin des paroles liturgiques, les Ordinaires des lieux pourront le tolérer « si, en raison des circonstances de lieux et de personnes, il jugent que cette coutume ne peut être prudemment supprimée » [22], sans préjudice de la norme qui défend de chanter les paroles liturgiques en langue vulgaire, comme il a été précisé plus haut.
Pour que les chantres et le peuple chrétien comprennent bien le sens des paroles liturgiques liées à la mélodie, il Nous plaît de reprendre les recommandations des Pères du Concile de Trente invitant spécialement « les pasteurs et tous ceux qui ont charge d’âme à exposer fréquemment, par eux-mêmes ou par d’autres, quelque passage du texte de la Messe pendant qu’elle se célèbre et, entre autres, quelque mystère de ce très saint sacrifice, surtout les dimanches et les jours de fête » [23] ; qu’ils le fassent en particulier au moment de la catéchèse. A notre époque, la chose sera plus facile et plus aisée qu’aux siècles précédents parce que dans presque tous les pays les textes liturgiques traduits en langue vulgaire et expliqués par des écrivains compétents se trouvent dans des livres et brochures qui peuvent éclairer et aider efficacement les fidèles à comprendre ce que les ministres sacrés prononcent en latin, et presque à y prendre part.
Il est clair que ce que Nous avons exposé ici brièvement sur le chant Grégorien concerne surtout le rite latin romain de l’Église ; mais on peut aussi l’appliquer soit aux chants liturgiques des autres rites occidentaux comme l’Ambrosien, le Gallican, le Mozarabe, soit à ceux des divers rites orientaux respectivement. Tous ceux-ci en effet, en démontrant l’admirable fécondité de l’Église dans ses liturgies et ses formules de prière, conservent aussi de précieux trésors dans leur chant liturgique propre ; il faut les préserver et en empêcher non seulement la disparition mais aussi toute diminution et dépravation. Parmi les monuments les plus anciens et les plus remarquables de la musique sacrée, les chants liturgiques des divers rites orientaux occupent sans aucun doute une place prédominante ; leurs mélodies ont exercé beaucoup d’influence sur la formation de celles de l’Église d’Occident, compte tenu des adaptations demandées par le caractère propre de la liturgie Latine. Nous souhaitons que le choix de chants des Rites Orientaux à l’élaboration duquel travaille avec zèle l’Institut Pontifical des Études Orientales, en collaboration avec l’Institut Pontifical de Musique sacrée, progresse rapidement tant pour la partie théorique que pour la pratique ; de la sorte les séminaristes des Rites de l’Église Orientale, bien formés au chant sacré, pourront par là contribuer grandement, quand ils seront prêtres, à accroître la beauté de la maison de Dieu.
En louant et en recommandant de la sorte le chant Grégorien, Nous n’avons pas l’intention d’écarter des cérémonies de l’Église la polyphonie sacrée qui, si elle répond à ses exigences propres, peut contribuer de façon insigne à la splendeur du culte divin et à la dévotion des chrétiens. Personne n’ignore en effet que beaucoup de morceaux polyphoniques, composés surtout au XVIe siècle, se distinguent par une telle pureté et une telle richesse qu’ils méritent de tout point d’accompagner et de rehausser en quelque sorte les cérémonies de l’Église. Si la polyphonie authentique subit au cours des siècles une décadence progressive tandis qu’assez souvent s’y mêlaient des airs profanes, le travail infatigable des spécialistes a provoqué pendant ces dernières décades un heureux renouveau, grâce à l’étude approfondie des œuvres des anciens maîtres que l’on propose à l’imitation et à l’émulation des compositeurs modernes. C’est pourquoi dans les Basiliques, dans les cathédrales et dans les églises des religieux on peut exécuter aussi bien les compositions polyphoniques des anciens maîtres que celles des auteurs récents et conférer ainsi aux rites sacrés une éclatante splendeur. Bien plus, Nous savons que dans les églises plus modestes il n’est pas rare que l’on exécute des morceaux polyphoniques plus simples mais composés avec sincérité et un vrai sens de l’art. L’Église encourage tous ces efforts ; car, comme le dit Notre Prédécesseur d’immortelle mémoire S. Pie X, « elle a favorisé sans cesse le progrès artistique en acceptant au service de la religion tout ce que l’esprit humain a trouvé de bon et de beau au cours des siècles, pourvu que soient observées les lois de la liturgie » [24]. Ces lois prescrivent d’user en cette matière grave de prudence et de tout le soin requis pour qu’on n’introduise pas dans les églises des morceaux polyphoniques enflés et ampoulés dont la prolixité empêche de saisir les paroles liturgiques, interrompt l’action sacrée ou avilit le talent des chanteurs aux dépens de la dignité du culte.
Ces normes s’appliquent aussi à l’usage de l’orgue et des autres instruments de musique. Parmi les instruments qui sont autorisés dans les églises, l’orgue occupe à juste titre la première place car il est admirablement adapté aux chants et aux rites sacrés, il confère aux cérémonies de l’Église une splendeur étonnante et une magnificence toute spéciale, il émeut les fidèles par l’ampleur et la douceur du son, il comble leurs âmes de joie quasi céleste et les élève puissamment vers Dieu et vers le ciel.
A côté de l’orgue, il y a aussi d’autres instruments qui peuvent aider efficacement à atteindre la fin élevée de la musique sacrée pourvu qu’ils n’aient rien de profane, rien de bruyant et de strident, ce qui ne conviendrait aucunement à l’action sacrée et à la gravité de l’endroit. Parmi eux, viennent en premier lieu les instruments à corde, parce qu’ils expriment avec une force extraordinaire les sentiments de joie ou de tristesse, soit qu’on les utilise seuls, soit qu’on les associe à d’autres instruments ou à l’orgue. D’ailleurs Nous avons déjà parlé clairement dans Notre Encyclique Mediator Dei des compositions musicales qu’il ne faut pas écarter facilement du culte catholique. « Bien plus, si elles n’ont aucun caractère profane ou messéant à la sainteté du lieu et de l’action liturgique, si elles ne procèdent pas d’une manie pour ce qui est étrange ou extravagant, qu’on les admette dans nos églises, car elles peuvent contribuer grandement à relever la splendeur des cérémonies sacrées, à élever les âmes, à ranimer la vraie dévotion » [25]. Il est à peine nécessaire cependant de dire que si les moyens et les talents ne sont pas à la hauteur de pareilles tâches, il vaut mieux ne pas les aborder que de présenter une exécution peu digne du culte divin et des assemblées sacrées.
A ces questions qui se rattachent étroitement à la Liturgie sacrée de l’Église, s’ajoutent comme Nous l’avons dit plus haut, les chants religieux populaires, la plupart du temps en langue vulgaire, qui ont leur origine dans le chant liturgique lui-même ; mais, comme ils sont adaptés à l’esprit et aux sentiments de chaque peuple, ils diffèrent beaucoup entre eux, selon le caractère des diverses nations et régions. Pour que ces cantiques religieux procurent au peuple chrétien un profit et une utilité spirituels, ils doivent être pleinement conformes aux enseignements de la foi catholique, la proposer et l’expliquer correctement, se servir d’une langue facile et d’une mélodie simple, en évitant les redondances et la verbosité et enfin, malgré leur brièveté et leur facilité, ne pas manquer de dignité et de gravité religieuse. Composés de la sorte, les cantiques sacrés, jaillis du fond de l’âme populaire, remuent profondément les cœurs et la sensibilité et excitent à la piété ; et lorsqu’ils sont chantés à l’unisson par la foule assemblée dans une cérémonie religieuse, ils élèvent puissamment vers le ciel l’esprit des fidèles. Aussi, bien qu’on ne doive pas les utiliser dans les Messes solennelles sans autorisation spéciale du St Siège, ils peuvent, au cours des Messes non solennelles, aider remarquablement les fidèles à assister au St Sacrifice non comme des spectateurs muets et presque inertes, mais, en suivant de la voix et du cœur l’action sacrée, à unir leur prière à celles du prêtre pourvu que ces chants soient bien adaptés à chacune des parties du St Sacrifice ; et Nous sommes très heureux de savoir que cela se fait dans beaucoup de régions du monde catholique.
Dans les cérémonies qui ne sont pas strictement liturgiques, ces cantiques religieux, pourvu qu’ils possèdent les qualités requises, comme Nous l’avons dit plus haut, peuvent contribuer de façon très salutaire à attirer le peuple chrétien, à l’instruire, à le pénétrer d’une piété sincère et enfin à le remplir d’une sainte joie ; et cela tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des églises, surtout dans les processions et les pèlerinages, ainsi que lors des Congrès religieux nationaux ou internationaux. Ils seront particulièrement utiles lorsqu’il s’agit d’apprendre les vérités catholiques aux enfants, dans les associations de jeunesse et les réunions des confréries pieuses, comme l’expérience maintes fois l’a clairement montré.
Aussi Nous ne pouvons Nous empêcher, Vénérables Frères, de vous exhorter avec instance à cultiver et à promouvoir avec beaucoup de zèle et d’initiative le chant populaire religieux dans vos diocèses. Vous ne manquerez pas d’hommes compétents pour recueillir et réunir ces cantiques là où cela n’a pas encore été fait, pour que tous les fidèles puissent plus facilement les apprendre, les chanter et les retenir de mémoire. Ceux qui sont chargés de la formation religieuse des enfants n’omettront pas d’utiliser comme il faut ces moyens efficaces, et les dirigeants de la jeunesse catholique les mettront sagement à profit dans la charge si importante qui leur est confiée. Ainsi peut-on espérer obtenir un autre avantage souhaité de tous, à savoir la suppression des chants profanes dont la mélodie sensuelle ou les paroles souvent voluptueuses et lascives qui les accompagnent, sont un danger fréquent pour les chrétiens, pour les jeunes surtout ; qu’on les remplace par des chants qui procureront un plaisir chaste et pur et, en même temps, nourriront la foi et accroîtront la piété ; ainsi le peuple chrétien commencera ici sur la terre à chanter le cantique de louange qu’il chantera éternellement dans le ciel : « A celui qui est assis sur le trône et à l’Agneau, bénédiction, honneur, gloire et puissance dans les siècles des siècles » [26].
Ce que Nous avons écrit jusqu’ici concerne surtout les peuples appartenant à l’Église chez lesquels la religion catholique est déjà fermement établie. En pays de Mission, on ne pourra mettre à exécution chacun de ces points avant que le nombre des chrétiens ne soit suffisamment élevé, que des églises plus vastes n’aient été construites, que les écoles fondées par l’Église ne soient fréquentées par les enfants des chrétiens et enfin que le nombre de prêtres ne réponde aux besoins. Cependant Nous exhortons instamment les missionnaires qui travaillent avec zèle dans ces étendues si vastes de la vigne du Seigneur et à qui leur charge impose de graves soucis à accorder aussi à ce point une attention diligente. Il est admirable de voir comment beaucoup de peuples confiés aux soins des missionnaires trouvent un plaisir considérable à la musique et relèvent par le chant sacré les cérémonies consacrées au culte des idoles. Il n’est donc pas sage que les messagers du Christ, le Vrai Dieu, fassent peu de cas ou négligent tout à fait ce secours efficace de l’apostolat. Aussi les prédicateurs de l’Évangile en pays païen doivent dans l’exercice de leur ministère promouvoir avec zèle cet amour du chant religieux que nourrissent les gens confiés à leurs soins de telle sorte que ces peuples remplacent leurs cantiques religieux, qui souvent suscitent l’admiration des nations cultivées, par des chants chrétiens similaires dans lesquels les vérités de la foi, la vie du Christ et de la Vierge, les louanges des Saints soient célébrées dans la langue et avec les mélodies qui leur sont familières.
Que les missionnaires eux-mêmes se souviennent aussi que depuis l’antiquité, lorsque l’Église Catholique a envoyé les messagers de l’Évangile dans les régions où la lumière de la foi ne brillait pas encore, elle s’est efforcée d’y introduire, avec les rites sacrés, des chants liturgiques, parmi lesquels le chant Grégorien, et cela afin que les peuples à convertir, charmés par la douceur du chant, fussent amenés plus facilement à embrasser les vérités de la religion chrétienne.
IV – Dispositions pratiques
Pour que les recommandations et les prescriptions que Nous avons données dans cette Encyclique à l’exemple de Nos Prédécesseurs, obtiennent l’effet souhaité, ne manquez pas, Vénérables Frères, d’user de tous les secours que vous offre la haute charge qui vous a été confiée par le Christ et par l’Église et que l’on emploie avec grand succès, comme le montre l’expérience, dans beaucoup d’églises chrétiennes.
Et d’abord veillez à ce que, dans la cathédrale elle-même et, pour autant que les circonstances le permettront, dans les autres églises importantes de votre juridiction, il y ait une Schola Cantorum bien choisie qui soit pour les autres un exemple et les stimule à cultiver et à perfectionner avec diligence le chant sacré. Là où il est impossible d’avoir des Scholæ Cantorum ou si l’on ne trouve pas un nombre suffisant de « petits chanteurs », il est permis, « sous la responsabilité de l’Ordinaire, à un groupe d’hommes et de femmes ou de jeunes filles de chanter les textes liturgiques à la Messe solennelle, à l’endroit destiné exclusivement à cet usage hors du chœur, pourvu que les hommes soient tout à fait séparés des femmes et des jeunes filles, et que tous les inconvénients soient évités » [27].
Il faut veiller avec grand soin à ce que ceux qui se préparent aux Saints Ordres dans vos Séminaires et dans les Instituts missionnaires ou Religieux apprennent soigneusement selon la volonté de l’Église la théorie et la pratique de la musique sacrée et du chant Grégorien, sous la conduite de maîtres compétents en cet art, qui aient une grande estime de la tradition et obéissent aux prescriptions et aux normes du St Siège.
Si parmi les élèves d’un Séminaire ou d’un Collège religieux il s’en trouve qui aiment cet art et y soient particulièrement doués, que les Supérieurs du Séminaire ou du Collège ne manquent pas de vous en avertir pour que vous puissiez leur donner l’occasion de cultiver ces aptitudes et que vous les envoyiez à l’Institut Pontifical de Musique sacrée de cette Ville ou dans un Athénée où l’on enseigne cette discipline, pourvu que leur conduite et leurs vertus donnent l’espérance qu’ils seront d’excellents prêtres.
Il faut aussi veiller à ce que les Ordinaires des lieux et les Supérieurs religieux aient des sujets capables de les aider dans un domaine si important dont ils ne pourront pas facilement s’occuper eux-mêmes comme il serait nécessaire à cause de leurs charges nombreuses et importantes. Il est excellent que dans la Commission diocésaine d’Art sacré, il y ait quelqu’un de très compétent en musique sacrée et en chant pour surveiller activement ce qui se passe dans le diocèse, pour informer l’Ordinaire de ce qui se fait et doit se faire, recevoir ses ordres et les faire exécuter. Si dans un diocèse il existe une de ces Associations qui ont été fondées pour cultiver la musique sacrée et ont été vivement louées et recommandées par les Souverains Pontifes, l’Ordinaire pourra aussi s’en servir comme il le jugera bon, pour s’acquitter de sa tâche.
Ces Associations pieuses fondées pour instruire le peuple en musique sacrée ou pour la cultiver plus à fond, et qui peuvent contribuer beaucoup par la parole et par l’exemple au progrès du chant sacré, aidez-les, Vénérables Frères, de votre bienveillance et développez-les pour qu’elles aient une vie féconde, des maîtres excellents et capables, pour qu’elles développent dans tout le diocèse la connaissance, l’amour et la pratique de la musique sacrée et des chants religieux en observant dûment les lois de l’Église et en Nous obéissant entièrement.
Après avoir assez longuement traité ce sujet selon Notre paternelle sollicitude, Nous avons pleine confiance, Vénérables Frères, que vous mettrez en œuvre tout votre zèle pastoral pour résoudre une question qui importe tant à la célébration plus digne et plus magnifique du culte divin. Nous espérons que tous ceux qui dans l’Église ont, sous votre conduite, la direction de ce qui concerne la musique, trouveront dans cette Encyclique un stimulant pour promouvoir avec une nouvelle ardeur et un nouveau zèle généreux ce genre d’apostolat. Ainsi comme Nous le souhaitons, cet art si noble, si apprécié à tous les âges de l’Église, sera cultivé aujourd’hui encore et, perfectionné chaque jour davantage, il retrouvera la splendeur véritable de la sainteté et de la beauté ; pour sa part, il aidera les fidèles réunis dans les églises à donner à Dieu Un en Trois Personnes, avec une foi plus solide, une espérance plus ferme et une charité plus ardente, les louanges qui lui sont dues, par des chants dignes et harmonieux ; et même hors des églises, dans les familles chrétiennes et dans les réunions de chrétiens, ils feront ce que saint Cyprien dit si bien à Donat : « Que les psaumes résonnent en ce sobre banquet ; et si tu as une bonne mémoire et une voix sonore, remplis cette fonction selon la coutume : tu nourris davantage les personnes si Nous entendons un cantique spirituel si les douceurs de la religion charment nos oreilles » [28].
Entre-temps dans l’espoir d’obtenir les fruits les plus abondants que produiront, Nous l’espérons, Nos présentes Exhortations, de tout cœur Nous vous accordons, Vénérables Frères, à chacun de vous et au troupeau qui vous est confié, à ceux-là surtout qui, suivant Notre désir, s’occupent de promouvoir la musique sacrée, Notre Bénédiction Apostolique, en témoignage de Notre affection et en gage des dons célestes.
Donné à Rome, près de Saint Pierre, le 25 décembre en la fête de la Nativité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, l’an 1955, de Notre Pontificat le dix-septième.
PIE XII, Pape.
- Motu Proprio Tra le sollecitudini dell’ufficio pastorale : Acta Pii X, vol. I, p. 77.[↩]
- Cfr. Gen. 1, 26.[↩]
- Epist. 161, De origine animae hominis, 1, 2 ; P. L., XXXIII, 725.[↩]
- Cfr. Ex. 15, 1–20.[↩]
- 2 Sam. 6, 5.[↩]
- Cfr. I Paral. 23, 5 ; 25, 2–31.[↩]
- Eph. 5, 18 s. ; cfr. Col. 3, 16[↩]
- I Cor. 14, 26.[↩]
- Pline, Epist. X, 96, 7.[↩]
- Cfr. Tertullien, De anima, c. 9 ; P. L. II, 701 ; et Apol. 39 : P. L. 1, 540.[↩]
- Conc. Trid. Sess. XXII : Decretum de observandis et evitandis in celebratione Missae.[↩]
- Cfr. Benedicti XIV Litt. Enc. [Annus qui : Opera omnia (ed. Prati, Vol. 17, 1, p. 16).[↩]
- Cfr. Litt. Apost. Bonum est confiteri Domino, d. d. 2 Aug. 1828, Cfr. Bullarium Romanum, ed. Prati, ex Typ. Aldina, t. IX, p. 139 sq.[↩]
- Cfr. Acta Leonis XIII, vol. XIV (1895), p. 237–247 ; cfr. Acta S. Sedis, vol. XXVII (1894), p. 42–49.[↩]
- Cfr. Acta Pii X, vol. I, p. 75–87 ; Acta S. S. XXXVI (1903–04), 329–339 ; 387–395.[↩]
- Cfr. A. A. S. vol. XXI (1929), p. 33 sq.[↩]
- Cfr. A. A. S. vol. XXXIX (1947), p. 521–595.[↩]
- S. Augustin. Confess., lib. X, c. 33, P. L., XXXII, 799 s.[↩]
- Acta Pii X, l. c. p. 78.[↩]
- Lettera al Card. Respighi, Acta Pii X, l. c. 68–74 ; v. p. 73 sq. ; Acta S. Sedis, vol. XXXVI (1903–04), pp. 325–329 ; 395–398 ; v. 398.[↩]
- Pius XI Const. Apost. Divini cultus ; A. A. S. vol. XXI (1929), p. 33 sq.[↩]
- Codex Iuris Canonici, can. 5.[↩]
- Conc. Trid. Sess. XXII, De sacrificio Missae, c. VIII.[↩]
- Acta Pii X, l. c. p. 80.[↩]
- A. A. S. vol. XXXIX (1947), p. 590.[↩]
- Apoc. 5, 13.[↩]
- Decr. S. Rit. Congr. n. 3964 ; 4201 ; 4231.[↩]
- S. Cypriani Epist. ad Donatum (Epistula 1, n. XVI) ; P. L., 4, 227.[↩]