À nos vénérables frères Herbert Vaughan Cardinal-Prêtre de la Sainte Église Romaine, Archevêque de Westminster, et aux autres évêques de la province de Westminster
Léon XIII, PapeVénérables frères
Salut et bénédiction apostolique.
Au milieu des plus graves préoccupations et d’amertumes d’ordres divers, une grande consolation n’a cessé de Nous être apportée par la complète et constante union des évêques avec le Siège apostolique. Nous savions déjà, Vénérables Frères, que vous vous distinguiez particulièrement à ce titre, et Nous en avons eu une nouvelle preuve tout récemment à l’occasion de la lettre collective que vous avez adressée à votre peuple, conformément à votre autorité, et que vous avez voulu Nous soumettre pour savoir si elle répondait à Notre sentiment.
Il est trop connu, le fléau — qui sévit ici et ailleurs est menaçant — de ces opinions absolument erronées dont l’ensemble est communément désigné sous le nom de Catholicisme libéral.
Vous signalez, sans l’exagérer, mais en en précisant la nature et l’étendue, le danger qui menace actuellement le catholicisme en Angleterre ; et votre parole, appuyée sur les documents et les enseignements de l’Eglise, ne va eu aucun point au delà de la vérité.
Tout ce que renferment votre enseignement et vos conseils a été fréquemment professé par Nos prédécesseurs, défini en détail par les Pères du Concile du Vatican, expliqué plus d’une fois par Nous- même, soit oralement, soit par écrit.
Elle Nous a paru sage et importante. Vous, en effet, chargés, comme évêques, par l’Esprit-Saint de gouverner chacun votre partie de l’Eglise de Dieu, vous savez mieux que personne ce que requiert le salut de vos peuples, et vous indiquez avec à‑propos et prudence l’action qu’il faut entreprendre.
C’est une très salutaire pensée que vous avez eue de prescrire la défiance vis-à-vis du nationalisme qui s’insinue avec une perfide habileté : il n’est pas de poison plus pernicieux pour la foi.
De même, quoi de plus juste que vos ordres concernant l’obéissance due aux évêques ? Cette soumission et cette docilité à l’égard de la puissance épiscopale n’est pas, en effet, une vertu facultative, mais un devoir absolu et le principal fondement de la divine constitution de l’Eglise.
Aussi vous louons-Nous vivement et vous approuvons-Nous sur tous ces points.
Quant aux maux que vous énumérez avec douleur, et que vous signalez, pour qu’ils s’en prémunissent, à ceux qui ont des sentiments droits, la source en est surtout dans la prépondérance acquise par les esprits mondains, dans la répugnance des âmes pour la tradition chrétienne de la souffrance, et dans leur penchant à la mollesse. Or, nul ne peut conserver la foi intacte et combattre pour la cause du Christ sans une constance énergique que les difficultés ne sauraient entamer.
Que tous ceux donc qui portent le nom de catholiques travaillent avec plus de soin à cultiver leur âme ; qu’ils défendent le grand bienfait de la foi avec les armes de la prudence et de la vigilance ; qu’ils s’adonnent avec plus d’ardeur à la pratique et à l’exercice des vertus chrétiennes, et qu’ils se forment particulièrement à la charité, à l’abnégation, à l’humilité et au mépris de ce qui doit périr.
En des occasions précédentes, Nous avons demandé d’instantes supplications auprès du Dieu tout-puissant pour qu’il ramène la nation anglaise tout entière à la religion de ses ancêtres ; Nous avons dit qu’il faut chercher dans la probité des mœurs et l’innocence de la vie le moyen d’être exaucé. Nous répétons aujourd’hui les avertissements et les mêmes exhortations.
Dans la même intention, Nous désirons vivement que se propage et s’étende l’association pieuse établie par Nous sous le vocable de Notre-Dame de la Compassion.
C’est ainsi que tous les catholiques doivent s’occuper du salut du prochain en travaillant au leur, et en consacrant tous leurs efforts à leur propre sanctification. Que votre lumière brille devant les hommes de telle sorte qu’ils voient vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui est dans les cieux (Matth, v, 16.).
Enfin, que la déférence à l’égard du Pontife romain soit sacrée pour les catholiques ; si quelques adversaires s’efforcent d’affaiblir son autorité par leurs discours ou de la rendre suspecte, qu’ils les réfutent sans crainte en leur opposant cette déclaration du vénérable Bède, Docteur de l’Eglise : « Le bienheureux Pierre, qui a confessé le Christ avec une véritable foi et l’a suivi avec un véritable amour, a reçu les clés du royaume des cieux et la souveraineté de la puissance judiciaire précisément pour que tous les croyants comprennent que quiconque se sépare de l’unité de la foi ou de sa communion ne peut être délivré des liens du péché ni franchir le seuil du royaume céleste. » [1]
Comme gage des faveurs divines et en témoignage de Notre paternelle bienveillance, Nous vous accordons très affectueusement dans le Seigneur, à vous, Vénérables Frères, ainsi qu’à votre peuple, la bénédiction apostolique.
Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 11 février 1901, en la vingt-troisième année de notre Pontificat.
LEON XIII, Pape.
Source : Lettres Apostoliques de S.S. Léon XIII, t. 6, p. 228, Maison de la Bonne Presse, Paris, rue Bayard
- Homélies, l. XVI.[↩]