A ceux qui pensent être dispensés de l’effort de se sanctifier, au prétexte qu’ils sont dans le monde, accablés d’obligations familiales et professionnelles, ce livre est destiné. Selon son sous-titre, il nous présente la sanctification du devoir d’état à l’école de l’évêque de Genève et docteur de l’Eglise.
Comme saint François de Sales fit comprendre aux gens du monde, par son Introduction à la vie dévote (1609), qu’ils ne se sanctifieraient pas malgré leurs occupations familiales et professionnelles, mais par ces tâches effectuées dans un esprit authentiquement chrétien, l’auteur de Toute la vie sanctifiée montre qu’aujourd’hui plus que jamais chacun peut et doit progresser spirituellement en s’acquittant des devoirs de son état.
C’est dire combien ce livre est d’une actualité brûlante ! Son auteur, le chanoine Francis Mugnier (1884–1949), docteur en théologie, licencié ès-lettres, fut professeur au grand séminaire d’Annecy, président de l’Académie Salésienne, et supérieur des Chapelains de Saint-François-de-Sales.
Dans une introduction vibrante, il présente l’objectif qu’il s’est fixé, en partant du constat suivant : « On fait quelques prières ; on entend la messe le dimanche ; on pratique l’abstinence du vendredi ; on communie même quelquefois. Dieu, sans doute, doit être satisfait. Il a son dû. Et vraiment que pourrait-on bien faire de plus pour Lui ? Travail et occupations ordinaires ne viennent-ils pas accaparer, très légitimement d’ailleurs, tous nos instants ? »
Et il récuse immédiatement ce mauvais prétexte : « Ainsi, hélas ! raisonnent bon nombre de chrétiens. Ils oublient que la loi de Dieu et son amour ont en nous des exigences universelles, et qu’il est dans l’ordre que tous nos actes, même les plus profanes, et sans aucune exception, soient rapportés à Dieu, orientés à Lui, et faits pour son amour. »
Il voit là une justification dangereuse : « Il ne s’agit pas seulement ici de la pauvre faiblesse humaine, qui rend difficilement réalisable un idéal très grand, très haut, mais pénible à la nature. Non, il s’agit d’une doctrine qui ne tend à rien de moins qu’à énerver la loi évangélique et à fausser toute l’orientation spirituelle des consciences. » Et de citer Pie XI, dans son encyclique Rerum omnium (26 janvier 1923), à l’occasion du troisième centenaire de la mort de saint François de Sales :
« Ce préjugé affirme que la véritable sainteté, conforme à l’enseignement de l’Eglise catholique, est impossible à réaliser, qu’à tout le moins elle est si difficile à atteindre qu’elle ne concerne en aucune façon le commun des fidèles, mais seulement de rares privilégiés, âmes d’élite et très élevées. Il soutient encore que cette sainteté entraîne tant d’ennuis et d’embarras qu’elle est absolument incompatible avec la situation d’hommes et de femmes vivant hors du cloître. »
En vérité, rappelle le chanoine Mugnier, « toute la doctrine de saint François de Sales s’oppose directement à cette erreur, à cette “hérésie”, qui voudrait bannir la dévotion et la sainteté de la vie du commun des hommes. »
Avec Pie XI, il affirme que l’auteur de l’Introduction à la vie dévote « se consacre tout entier à montrer que la sainteté est parfaitement compatible avec tous les devoirs et toutes les conditions de la vie dans le monde, que chacun peut, au milieu même du siècle, mener une vie conforme à ses intérêts éternels, pourvu qu’il ne se laisse pas envahir et imprégner par l’esprit du monde.
« Entre-temps, à son école, nous apprenons à faire cela même – hormis le péché – que fait habituellement tout le monde ; mais aussi – ce que bien des gens oublient – à le faire saintement et en vue de plaire à Dieu. »
L’éditeur résume le propos de cet ouvrage de façon judicieuse : « La volonté divine se manifeste pour chacun de nous par notre devoir d’état. C’est dans tel milieu familial ou telle société, dans telle situation de fortune ou de santé, avec tel métier ou telles occupations, que nous accomplissons notre devoir.
« Saint François de Sales, plein de finesse et d’équilibre, nous montre comment notre milieu, notre travail, nos affections légitimes, nos honnêtes délassements, loin d’être un obstacle, peuvent devenir, au contraire, un moyen de sanctifier toute notre vie, en accomplissant, par amour pour Dieu, notre devoir d’état. »
Et d’en tirer cette conclusion très concrète : « Où que nous soyons, nous pouvons aspirer à la perfection de la sainteté, en faisant tout converger vers ce progrès intérieur qui est le but même de notre vie terrestre. »
Ceux qui déplorent que leur existence ne soit qu’un assemblage de devoirs contradictoires, une juxtaposition d’obligations disparates, trouveront ici une ligne directrice, unificatrice et pacificatrice. Les autres demeureront incohérents, jusqu’au jour où ils s’apercevront qu’il faut « vivre comme on pense », sous peine de finir « par penser comme on a vécu ».
Ou pour compléter la célèbre affirmation de Paul Bourget : il faut vivre conformément à la foi, avant de regretter d’avoir conformé sa foi à ses mœurs. De la lecture méditée de ce livre, on retire une conviction forte : le devoir d’état chasse les états d’âme stériles et favorise les états de service féconds, sur lesquels nous serons jugés.
Francis Mugnier, Toute la vie sanctifiée. Le devoir d’état à l’école de saint François de Sales, Parthénon éd., 364 pages, 15 € – Site internet : http://www.editions-parthenon.com
Source : FSSPX.News