Conférence de l’abbé Celier à Amiens le 16 novembre 2008

La com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle d’Amiens, qui a vécu pai­si­ble­ment pen­dant plus de vingt ans à la cha­pelle du Bon Pasteur, rue Daire, pro­prié­té du Conseil géné­ral, se trouve à la rue depuis un an et cherche un lieu de culte adap­té à ses besoins.

Des pro­prié­taires, com­mu­naux ou pri­vés, d’Amiens ou de ses alen­tours pos­sèdent sans doute des bâti­ments à des­ti­na­tion cultuelle qu’ils ont du mal à réno­ver, à entre­te­nir et à faire vivre.

La com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle d’Amiens lance donc un appel à ces pro­prié­taires : elle sol­li­cite une ren­contre pour leur faire des pro­po­si­tions, pour exa­mi­ner les offres éven­tuelles, pour recher­cher un ter­rain d’entente dont les deux par­ties pour­raient tirer un légi­time profit.

Des solu­tions légales, tech­niques, éco­no­miques, humaines existent. En témoignent aujourd’hui les églises réno­vées par les com­mu­nau­tés catho­liques tra­di­tion­nelles à tra­vers toute la France, par exemple à Marseille, à Compiègne, à Avignon, à Saintes, à Nice, à Thouars, à Boulogne sur Mer, à Toulon, à Chartres, à Saint-​Malo, à Versailles, à Saint-​Quentin, à Tours, à Aix en Provence, à Chamont, etc.

Les catholiques traditionnels : une réalité en France et à Amiens

Les catho­liques tra­di­tion­nels existent. A tra­vers toute la France, sinon à tra­vers le monde. Dans toutes les villes même sim­ple­ment moyennes de France, on trouve un groupe de catho­liques traditionnels.

Les catho­liques tra­di­tion­nels existent réel­le­ment. Ils ont des fidèles. Ils ont des prêtres, en par­ti­cu­lier ceux de la Fraternité sacer­do­tale Saint-​Pie X. Ils ont un culte, une vie, une com­mu­nau­té active, dyna­mique. Avec des enfants et des adultes, des hommes et des femmes, des jeunes et des moins jeunes, des savants et des igno­rants, des riches et des pauvres.

Les catho­liques tra­di­tion­nels ne sont pas un fan­tôme, un mirage. Ils sont pré­sents au cœur de la cité, ils sont visibles, ils sont un cer­tain nombre, nombre évi­dem­ment dif­fé­rent selon les lieux et les situa­tions, mais nombre cer­tain. On ne peut pas faire comme s’ils n’exis­taient pas.

La com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle d’Amiens, en par­ti­cu­lier, a démon­tré depuis un an, à la face de tous, de la manière la plus publique, qu’elle existe et qu’elle veut vivre. Tous les Amiénois ont pu consta­ter de leurs yeux qu’il ne s’a­git pas, selon une expres­sion ima­gée, d’un ras­sem­ble­ment qui pour­rait se tenir dans une cabine télé­pho­nique. Il s’a­git au contraire d’un vrai groupe, consti­tué, déter­mi­né, rela­ti­ve­ment nombreux.

La nécessité d’un lieu approprié à leur vie religieuse et cultuelle

Les catho­liques tra­di­tion­nels, pour mener leur vie de foi, pour exer­cer leur culte, ont évi­dem­ment besoin d’un lieu où se réunir. Les cir­cons­tances, sur les­quelles il n’est pas néces­saire de s’ap­pe­san­tir aujourd’­hui, font qu’ils n’ont pas actuel­le­ment un accès nor­mal aux églises de France, construites pour­tant en vue du culte qu’ils célèbrent.

Ce lieu où les catho­liques tra­di­tion­nels peuvent se ras­sem­bler et exer­cer le culte catho­lique tra­di­tion­nel, ce n’est pas n’im­porte quel lieu. C’est un lieu capable d’ac­cueillir, dans des condi­tions d’hy­giène, de sécu­ri­té et de tran­quilli­té une com­mu­nau­té de 100 fidèles, ou de 300, ou de 500, ou de 1000, quel­que­fois plus, un lieu pour rece­voir un ensei­gne­ment, pour prier, pour chan­ter, etc.

Ce lieu ne peut donc être pure­ment et sim­ple­ment un lieu rési­den­tiel. Ce ne peut être sim­ple­ment un appar­te­ment ou une mai­son par­ti­cu­lière. Un tel choix n’as­su­re­rait ni l’hy­giène, ni la sécu­ri­té, ni la tran­quilli­té de tous.

Il faut un lieu par­ti­cu­lier, que l’on appelle un ERP, un « éta­blis­se­ment rece­vant du public ». Un ERP, en effet, est légi­ti­me­ment sou­mis à des lois et à des règle­ments spé­ci­fiques, qui ont pour but d’as­su­rer cette hygiène, cette sécu­ri­té et cette tran­quilli­té nécessaires.

Cependant, il faut avoir conscience que, dans le cas pré­sent, cet ERP ne sera pas un éta­blis­se­ment indus­triel ou com­mer­cial, ce ne sera ni une usine ni un maga­sin, ce ne sera ni un ciné­ma ni une salle de sports, ce sera un lieu de culte. Et donc, il aura des besoins spé­ci­fiques, des horaires spé­ci­fiques, un fonc­tion­ne­ment spécifique.

Les catholiques traditionnels ont su s’adapter à de multiples situations

Depuis presque 40 ans que dure la crise de l’Église dont cha­cun peut consta­ter la réa­li­té, depuis 40 ans donc que le catho­li­cisme tra­di­tion­nel a dû s’or­ga­ni­ser sous sa forme actuelle, il a, à tra­vers notre pays, eu recours à toutes les solu­tions rai­son­na­ble­ment envi­sa­geables pour créer les lieux de culte dont il avait besoin.

Les catho­liques tra­di­tion­nels ont, d’une part, construit des églises et des cha­pelles à par­tir de rien, sur des ter­rains à bâtir. Ils inau­gurent pré­ci­sé­ment une église nou­vel­le­ment construite same­di pro­chain, 22 novembre, au cœur de la ville de Rouen.

Les catho­liques tra­di­tion­nels ont, d’autre part, trans­for­mé pour leurs besoins spé­ci­fiques toutes sortes de bâti­ments : bâti­ments indus­triels, bâti­ments com­mer­ciaux, bâti­ments admi­nis­tra­tifs, bâti­ments agri­coles, bâti­ments sco­laires, bâti­ments rési­den­tiels, etc.

C’est une solu­tion, et la com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle d’Amiens l’en­vi­sage, évi­dem­ment, comme bien d’autres com­mu­nau­tés catho­liques tra­di­tion­nelles l’ont fait à tra­vers la France.

L’immense patri­moine reli­gieux de la France, fré­quem­ment sous-utilisé

Cependant, cette solu­tion, qui est envi­sa­geable, qui est pra­ti­cable, n’est pas for­cé­ment la meilleure.

Deux articles récents, l’un du quo­ti­dien La Croix, l’autre du Figaro (tous les deux du 10 novembre 2008), rap­pellent qu’il existe en France 45 000 églises com­mu­nales, aux­quelles s’a­joutent envi­ron 50 000 cha­pelles éri­gées en diverses cir­cons­tances et pour de mul­tiples causes. Ces bâti­ments ont été conçus pour le culte que les catho­liques tra­di­tion­nels célèbrent. Leurs dimen­sions, leurs spé­ci­fi­ci­tés, leur archi­tec­ture, leur déco­ra­tion, leur dis­tri­bu­tion cor­res­pondent par­fai­te­ment aux besoins des catho­liques traditionnels.

Dans une par­tie des cas, ces églises ou cha­pelles appar­tiennent à des pri­vés : congré­ga­tions reli­gieuses, mais aus­si per­sonnes pri­vées, asso­cia­tions diverses voire entreprises.

Mais, dans la majeure par­tie des cas, ces églises ou cha­pelles sont la pos­ses­sion des com­munes, soit comme lieux affec­tés au culte depuis la loi de sépa­ra­tion de l’Église et de l’État en 1905, soit comme monu­ments du domaine pri­vé de la com­mune, héri­tés d’une his­toire riche en vicissitudes.

Or, nous le savons, la pra­tique reli­gieuse n’est plus ce qu’elle était. Désormais, ces dizaines de mil­liers d’é­glises et de cha­pelles connaissent sou­vent un faible taux d’u­ti­li­sa­tion, voire sont tota­le­ment inoccupées.

En consi­dé­rant cet état de fait, il est légi­time de se deman­der s’il est prio­ri­taire d’ar­ra­cher un bâti­ment rési­den­tiel ou com­mer­cial à sa des­ti­na­tion propre, à son uti­li­té sociale et éco­no­mique, pour le trans­for­mer à grand-​peine en un bâti­ment cultuel, alors que peut-​être un bâti­ment cultuel, fait pour cela, se trouve à l’a­ban­don ou sans uti­li­sa­tion à peu de distance.

Un patri­moine que l’on s’ef­force de pré­ser­ver… mais pour quelle utilité ?

Depuis vingt ou trente ans, à tra­vers la France, les muni­ci­pa­li­tés ont fait de gros efforts et ont consen­ti de lourds inves­tis­se­ments pour réno­ver et mettre en valeur leur patri­moine immo­bi­lier, notam­ment leurs églises et chapelles.

Cependant, un bâti­ment, même refait à neuf, s’il n’est pas vivant et uti­li­sé régu­liè­re­ment, ne tar­de­ra pas à se dégra­der. De plus, si ces inves­tis­se­ments n’ont pour résul­tat que de conser­ver de vieilles pierres, sans que le bâti­ment mani­feste une uti­li­té réelle, il est à craindre que l’ef­fort des muni­ci­pa­li­tés ne s’é­puise et ne se décourage.

Par ailleurs, les res­sources des muni­ci­pa­li­tés ne sont pas illi­mi­tées : dans un cer­tain nombre de cas, des bâti­ments, notam­ment d’o­ri­gine cultuelle, ne peuvent être réno­vés et entre­te­nus conve­na­ble­ment, mal­gré la bonne volon­té des élus.

Les catho­liques tra­di­tion­nels n’ont évi­dem­ment ni la pré­ten­tion, ni les moyens de résoudre tous les pro­blèmes d’en­tre­tien de toutes les églises ou cha­pelles de France. Mais puis­qu’ils existent, ils peuvent au moins contri­buer à en résoudre quelques-​uns, et per­mettre à cer­tains bâti­ments d’o­ri­gine cultuelle de conti­nuer à vivre, voire à revivre après un cer­tain abandon.

D’un côté, donc, il existe des pro­prié­taires pri­vés ou muni­ci­paux sou­vent embar­ras­sés devant la charge d’un bâti­ment cultuel qu’ils ne peuvent ni ne veulent détruire, en rai­son de son carac­tère his­to­rique, patri­mo­nial, légal, etc., et que cepen­dant ils ont du mal à réno­ver et à entre­te­nir. De l’autre côté, il existe une com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle qui cherche un lieu de culte ; qui, bien sûr, pour­rait se rési­gner à le construire ou à le réno­ver à par­tir d’un bâti­ment non cultuel exis­tant, mais à qui il sem­ble­rait pré­fé­rable de trou­ver un lieu de culte déjà construit pour cela, afin que les efforts finan­ciers et humains soient orien­tés plus vers la res­tau­ra­tion, l’embellissement et l’en­tre­tien que vers une trans­for­ma­tion qu’il serait pos­sible d’éviter.

Les catho­liques tra­di­tion­nels peuvent repré­sen­ter une solution

Cette com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle pos­sède la volon­té et les moyens de réa­li­ser l’é­ven­tuelle res­tau­ra­tion d’un bâti­ment d’o­ri­gine cultuelle. Elle peut, non seule­ment le res­tau­rer mais, au fil du temps, l’embellir, par le légi­time sou­ci d’a­voir le lieu le plus digne pour le culte qu’elle célèbre. C’est ce qui s’est réa­li­sé à Marseille, à Compiègne, à Avignon, à Saintes, à Nice, à Thouars, à Boulogne sur Mer, à Toulon, à Chartres, à Saint-​Malo, à Versailles, à Saint-​Quentin, à Tours, à Aix en Provence, à Chamont, etc., comme le mani­feste clai­re­ment le film qui a été projeté.

De plus, l’ex­pé­rience montre qu’une com­mu­nau­té vivante, donc pré­sente et atten­tive, est la meilleure garan­tie pour l’en­tre­tien d’un bâti­ment de ce genre. Une tuile qui tombe, une fuite d’eau, la panne d’un chauf­fage : les pro­blèmes sont très vite détec­tés, et la volon­té de main­te­nir le bâti­ment dans le meilleur état est présente.

Pour prendre l’exemple de l’é­glise Sainte-​Thérèse de Compiègne dont je suis le des­ser­vant, comme vous avez pu le voir dans le film, la messe n’y est célé­brée, pour le moment, que le dimanche. Cependant, l’é­glise est visi­tée chaque jour. La mis­sion du visi­teur (un parois­sien ou une parois­sienne, selon les jours) consiste bien sûr à prier, mais aus­si à faire un tour de l’é­glise pour véri­fier qu’il ne s’y passe rien d’a­nor­mal. S’il y a un quel­conque pro­blème, comme c’est arri­vé une ou deux fois depuis quatre ans, j’en suis aver­ti dans la demi-​journée et je peux inter­ve­nir sans délai.

Enfin, une com­mu­nau­té vivante, qui uti­lise le bâti­ment selon sa des­ti­na­tion spé­ci­fique, le culte catho­lique, redonne à ce bâti­ment un sens à la fois his­to­rique et réel ; lui fait recou­vrer sa place natu­relle dans la vie de la cité ; lui per­met d’être com­pris et appré­cié par tous ceux qui vivent autour, ain­si que par ceux qui, au cours de leurs péré­gri­na­tions, ont l’oc­ca­sion de le décou­vrir. Il ne s’a­git plus alors d’un monu­ment mort, d’un sou­ve­nir éteint, d’un simple ves­tige du pas­sé : c’est une réa­li­té actuelle qui se pour­suit et qui vit.

Et les Amiénois, en par­ti­cu­lier, ont clai­re­ment expri­mé le sou­hait que leurs monu­ments reli­gieux res­tent vivants et soient habi­tés et uti­li­sés par une com­mu­nau­té dyna­mique, lors­qu’ils ont répon­du si nom­breux, et si vite, à la col­lecte de signa­tures sur ce sujet.

Un appel de la com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle d’Amiens

La com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle d’Amiens a uti­li­sé durant plus de vingt ans un tel bâti­ment, la cha­pelle du Bon Pasteur, rue Daire, pro­prié­té du Conseil géné­ral. Malheureusement, en rai­son de la vente de l’en­semble immo­bi­lier au Conseil régio­nal, elle s’est retrou­vée assez bru­ta­le­ment sans lieu de culte. Les péri­pé­ties de l’an­née écou­lée ont été suf­fi­sam­ment rela­tées par la presse locale pour qu’il soit inutile d’y revenir.

La com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle amié­noise lance donc aujourd’­hui un appel à tous ceux, pro­prié­taires pri­vés comme muni­ci­pa­li­tés, qui dis­po­se­raient d’un bâti­ment à voca­tion cultuelle inuti­li­sé ou sous-​utilisé. Cette com­mu­nau­té est prête à vous ren­con­trer, à vous faire des pro­po­si­tions, à exa­mi­ner avec soin vos offres éven­tuelles, à recher­cher un ter­rain d’en­tente dont les uns comme les autres pour­raient tirer un légi­time pro­fit : les actuels pro­prié­taires, en béné­fi­ciant de la réno­va­tion et de l’en­tre­tien d’un de leurs bâti­ments ; les catho­liques tra­di­tion­nels, en béné­fi­ciant d’un lieu de culte adap­té où ils pour­raient vivre au milieu de la cité, dans la paix et la tranquillité.

Il n’y a pas de pro­blème, il n’y a que des solutions

Rappelons que, sur le plan légal, l’é­ven­tail des pos­si­bi­li­tés est fort large puisque, à tra­vers la France et au cours du temps, les divers pro­prié­taires, muni­ci­paux ou pri­vés, ont recou­ru à toutes les formes de mise à dis­po­si­tion : vente pure et simple ; bail clas­sique ; bail emphy­téo­tique ; mise à dis­po­si­tion en échange d’un loyer sym­bo­lique ; mise à dis­po­si­tion gra­tuite, etc. Dans tous les cas, si un pro­prié­taire envi­sage une mise à dis­po­si­tion, une solu­tion légale pour­ra être trouvée.

Il en est de même si le bâti­ment recèle des tré­sors archi­tec­tu­raux ou artis­tiques qui doivent res­ter à la dis­po­si­tion du public. Outre que l’u­ti­li­sa­tion d’un bâti­ment par la com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle signi­fie ipso fac­to son ouver­ture fré­quente, voire quo­ti­dienne, au public, il est tout à fait pos­sible d’en­vi­sa­ger, dans des cas spé­ci­fiques, des conven­tions par­ti­cu­lières d’oc­cu­pa­tion et d’ou­ver­ture. A Thouars, col­lé­giale clas­sée aux Monuments his­to­riques et qui béné­fi­cie actuel­le­ment d’un pro­gramme de réno­va­tion qui asso­cie la Fraternité Saint-​Pie X, la ville, le dépar­te­ment et l’État, une ouver­ture pour diverses mani­fes­ta­tions cultu­relles (et au pre­mier chef la jour­née du Patrimoine) est contrac­tuel­le­ment prévue.

Notons que l’é­ven­tuelle réno­va­tion d’un bâti­ment qui appar­tient au patri­moine d’un quar­tier, d’une ville, d’une région, sou­vent après un mal­heu­reux aban­don (avec toutes ses consé­quences fâcheuses), ou du moins après une fer­me­ture pro­lon­gée pour rai­son de sécu­ri­té ou d’ab­sence de per­son­nel, per­met à ce quar­tier, à cette ville, à cette région, de se réap­pro­prier une par­tie de leur his­toire et de leur mémoire. Au milieu des autres monu­ments et lieux remar­quables, ce bâti­ment rede­ve­nu vivant par­ti­ci­pe­ra à la renom­mée cultu­relle et tou­ris­tique de la ville.

Cette éven­tuelle réno­va­tion fera évi­dem­ment appel aux entre­prises locales, de même que l’en­tre­tien régu­lier du bâti­ment, ce qui per­met­tra de créer ou de main­te­nir des emplois pré­cieux, par­ti­cu­liè­re­ment en ces temps de crise économique.

De la même manière, la venue des fidèles pour les divers offices ne pour­ra man­quer de contri­buer au déve­lop­pe­ment, ou du moins au main­tien du petit com­merce éta­bli dans les alen­tours. Il est de noto­rié­té publique que les boulangeries-​patisseries éta­blies près des églises ont tou­jours fait leurs meilleures affaires le dimanche matin à l’is­sue de la messe. Sur ce point en par­ti­cu­lier, la com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle est réel­le­ment… traditionnelle.

Enfin, il est évident que si la France est aujourd’­hui laïque, ses racines sont pro­fon­dé­ment chré­tiennes, catho­liques. Qu’au cœur de la cité soit pro­po­sé à ceux qui le dési­rent, dans un cadre adap­té, et dans un cli­mat de paix et de res­pect mutuel, le culte qui a ryth­mé la vie de nos ancêtres, le culte qui a façon­né notre lan­gage et notre men­ta­li­té, le culte qui a impré­gné notre culture et notre his­toire, ce sera un signe de conti­nui­té, de cohé­sion entre les géné­ra­tions, de volon­té d’as­su­mer l’hé­ri­tage reçu même en s’é­lan­çant vers l’avenir.

L’exemple d’une ville assez proche : l’é­glise Sainte-​Thérèse de Compiègne

Pour finir sur une note très concrète, je vou­drais vous par­ler de ce que nous avons fait non loin d’Amiens, à Compiègne, avec l’é­glise Sainte-Thérèse.

Une ensemble hos­pi­ta­lier, la fon­da­tion Debruxelles, n’a­vait plus d’u­ti­li­té depuis la construc­tion et l’ou­ver­ture, en 1995, du nou­vel hôpi­tal situé dans la péri­phé­rie de Compiègne. Cette fon­da­tion com­pre­nait des pavillons médi­caux, une rési­dence de per­sonnes âgées et une cha­pelle dédiée à Sainte-​Thérèse de Lisieux. Il fut déci­dé par la muni­ci­pa­li­té de démo­lir les pavillons pour vendre le ter­rain ; de relo­ger les per­sonnes âgées et de réha­bi­li­ter la rési­dence pour en faire du loge­ment social ; et de conser­ver la chapelle.

En effet, la mai­rie sou­hai­tait gar­der un petit élé­ment de monu­men­ta­li­té dans ce quar­tier plus récent et cer­tai­ne­ment pas aus­si favo­ri­sé sur le plan social et archi­tec­tu­ral que d’autres par­ties de Compiègne. Cependant, main­te­nir cette cha­pelle posait des pro­blèmes dif­fi­ci­le­ment solubles. D’une part, Compiègne, qui béné­fi­cie déjà d’un patri­moine cultuel pres­ti­gieux mais coû­teux à entre­te­nir, ne pou­vait s’en­ga­ger dans de nou­veaux frais pour réha­bi­li­ter cette cha­pelle. D’autre part, l’u­sage poten­tiel de cette cha­pelle était fort limi­té puisque les hôpi­taux de Compiègne, pour res­pec­ter les inten­tions de la fon­da­trice, Madame Debruxelles, avaient fait ins­crire dans le contrat de vente à la muni­ci­pa­li­té que cet édi­fice ne devait ser­vir qu’au culte catholique.

C’est alors que la com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle de Compiègne s’est rap­pro­chée de la muni­ci­pa­li­té, pro­po­sant de rache­ter cette cha­pelle, de la réha­bi­li­ter et de la main­te­nir pour le culte. Après une négo­cia­tion per­met­tant d’as­su­rer les inté­rêts légi­times des deux par­ties, la cha­pelle, qui avait été ache­tée par la mai­rie pour un euro sym­bo­lique, nous fut reven­due pour 91 000 euros, cet argent, au demeu­rant, étant rever­sé immé­dia­te­ment aux hôpi­taux de Compiègne.

Puis, durant l’an­née 2004, nous avons entiè­re­ment réno­vé le bâti­ment en fai­sant appel, bien enten­du, aux divers corps de métier de la ville et de la région.

Enfin, en jan­vier 2005, nous avons inau­gu­ré l’é­glise Sainte-​Thérèse, qui depuis ce moment pour­suit son exis­tence au cœur de la cité, dans une conti­nui­té his­to­rique et archi­tec­tu­rale avec tout son passé.

Nous sommes même allés plus loin. L’église Sainte-​Thérèse est ornée de grandes rosaces en vitrail, mais qui n’a­vaient jamais été ache­vées, faute sans doute de finan­ce­ment. Depuis 2005, avec l’aide d’une asso­cia­tion muni­ci­pale, nous réno­vons et ter­mi­nons ces vitraux selon leur esprit ini­tial. Sur quatre rosaces, trois sont désor­mais ache­vées, la qua­trième étant actuel­le­ment en cours de réno­va­tion. Il nous res­te­ra ensuite à réno­ver les six vitraux plus petits situés au-​dessus de l’au­tel, et ce monu­ment aura non seule­ment retrou­vé son état ori­gi­nel, mais acquis une splen­deur que les aléas de l’his­toire ne lui avaient pas per­mis encore de trouver.

Oui, cela est pos­sible (avec un peu de bonne volon­té réciproque)

Pour conclure, je vou­drais dire qu’a­vec un peu de bonne volon­té réci­proque les choses sont pos­sibles, que des solu­tions qui conviennent à tous peuvent être pro­po­sées, que la com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle d’Amiens doit pou­voir trou­ver un lieu pour vivre sa vie et célé­brer son culte tout en don­nant satis­fac­tion au pro­prié­taire, com­mu­nal ou pri­vé, d’un bâti­ment à des­ti­na­tion cultuelle.

Et mon espé­rance est que, très vite, se des­sine un ter­rain d’en­tente avec un tel pro­prié­taire, com­mu­nal ou pri­vé, pour redon­ner une vie nou­velle à un monu­ment à voca­tion cultuelle ins­crit dans l’his­toire d’Amiens ou de ses envi­rons, et pour per­mettre à la com­mu­nau­té catho­lique tra­di­tion­nelle d’Amiens de retrou­ver enfin une vie nor­male après un an d’errance.

Abbé Grégoire Celier 

Amiens, le 16 novembre 2008