Sermon de Mgr Tissier de Mallerais à St-​Nicolas le 2 février 2011

[Le ser­mon a été trans­crit en res­pec­tant le lan­gage par­lé et les intonations ]

Au nom du Père, du Fils et du Saint-​Esprit, ain­si soit-il.

Mes bien chers Frères,

Nous sommes tout à fait recon­nais­sants à la paroisse de Saint-​Nicolas-​du-​Chardonnet, et à son curé, de nous accueillir, d’ac­cueillir le sémi­naire de Flavigny pour cette céré­mo­nie de prise de soutane.

En cette Fête de la Sainte Vierge, de la Présentation de l’Enfant-​Jésus au Temple et de la Purification de Notre-​Dame, cette belle fête nous semble tout à fait adap­tée à cette prise de sou­tane. En effet, chers jeunes gens, vous venez vous offrir et vous consa­crer au Seigneur, comme la Sainte Vierge et saint Joseph appor­tant l’Enfant-​Jésus en ce temps-​là pour Le consa­crer, puisqu’Il était le pre­mier né de la Famille, le pre­mier né de la Sainte Vierge – et Il res­te­ra l’Unique de la Sainte Vierge – Il devait donc être consa­cré au Seigneur. Il était la part du Seigneur mais Il était déjà le Consacré par excel­lence depuis le pre­mier ins­tant de Son Incarnation, quand la divi­ni­té vint oindre tota­le­ment Sa Sainte Humanité pour en faire le prêtre par excel­lence, et ensuite la Sainte Vierge et saint Joseph devaient Le rache­ter pour pou­voir Le gar­der avec des pièces d’argent et le sacri­fice de deux colombes. Alors, ils firent le rite de rachat mais bien enten­du il n’é­tait pas ques­tion de Le reti­rer de Sa consé­cra­tion à Dieu. Jésus res­tait le Consacré, le Prêtre par excellence.

Hé bien, telles sont les dis­po­si­tions, chers amis, que vous avez aujourd’­hui de vous consa­crer à Dieu et de ne pas ensuite reti­rer cette consé­cra­tion. Vous allez pour cela revê­tir la sou­tane, l’ha­bit du clerc, bien que vous deviez seule­ment rece­voir la ton­sure dans un an. C’est l’ha­bit du clerc, l’ha­bit du futur prêtre et cette céré­mo­nie est très émou­vante pour vous, chers jeunes gens, qui, avec impa­tience, une sainte impa­tience, atten­dez depuis quelques mois ce moment de trans­for­mer l’ex­té­rieur de votre être qui cor­res­pon­dra à la trans­for­ma­tion inté­rieure qui s’est déjà pas­sée quand vous avez déci­dé d’en­trer au sémi­naire. Émouvante éga­le­ment pour vous, chères familles, qui allez voir évi­dem­ment vos gar­çons sous un autre aspect, un peu inti­mi­dant et en même temps très édi­fiant, et qui vous aide­ra vers Dieu.

Parlons un petit peu de la sou­tane et du témoi­gnage qu’elle signi­fie. Il est dit dans la pro­phé­tie du pro­phète Malachie, que nous avons lue tout à l’heure, et qui pré­fi­gure la pré­sen­ta­tion de Jésus au temple, que le Seigneur vien­dra Lui-​même dans Son Temple – c’est une façon nou­velle, spé­ciale – dans le but de puri­fier les Fils de Lévi, comme l’or et l’argent au feu afin qu’ils offrent à Dieu des sacri­fices comme aux jours antiques afin que le sacri­fice de Juda à Jérusalem, c’est à dire de l’Église, plaise au Seigneur. Donc il s’a­git d’une réno­va­tion du sacer­doce. Bien enten­du, dans la Sainte-​Ecriture, il s’a­git de la dis­pa­ri­tion du sacer­doce ancien et de l’ap­pa­ri­tion du sacer­doce de Notre-​Seigneur Jésus-​Christ. Mais aujourd’­hui , chers jeunes gens, cela signi­fie la conser­va­tion du sacer­doce de tou­jours. Aujourd’hui, le Seigneur, spi­ri­tuel­le­ment, revient en cette fête de la Présentation pour puri­fier les Fils de Lévi grâce à cette petite armée de la Fraternité Saint-​Pie‑X, grâce à Mgr Lefebvre, pour puri­fier le sacer­doce catho­lique et lui res­ti­tuer son iden­ti­té. Voilà la signi­fi­ca­tion pro­fonde de votre prise de sou­tane et vous en êtes bien conscients. Vous vou­lez plus tard par­ti­ci­per au sacer­doce authen­tique de Notre-​Seigneur Jésus-​Christ pour offrir un sacri­fice pur et saint et agréable à Dieu, à savoir le Sacrifice de la Croix, renou­ve­lé de façon non san­glante sur l’au­tel. C’est au tra­vail de la réno­va­tion du sacer­doce catho­lique que vous vou­lez tra­vailler. Telle est la mis­sion que la divine Providence nous a assi­gnée, sans mérite de notre part.

Mgr Lefebvre a tou­jours été péné­tré du besoin de sanc­ti­fier le sacer­doce. Quand, il y a cin­quante ans, il a assis­té aux pre­mières mani­fes­ta­tions de la laï­ci­sa­tion du sacer­doce, des prêtres quit­tant leur sou­tane en 1960, eh bien, il a déci­dé, dès qu’il serait libre, de fon­der un sémi­naire tra­di­tion­nel pour conti­nuer le sacer­doce authen­tique de Notre-​Seigneur Jésus-​Christ.
Votre sou­tane est riche d’en­sei­gne­ment, chers jeunes sémi­na­ristes. Notre fon­da­teur, dans les sta­tuts de la Fraternité et aus­si dans dif­fé­rents écrits, nous décrit les fruits mer­veilleux de la sou­tane que, mal­heu­reu­se­ment, les prêtres modernes adop­tant le cler­gy­man ou l’ha­bit civil, ont com­plè­te­ment per­dus de vue. Je me sou­viens très bien que Mgr Lefebvre nous disait : « Votre sou­tane est votre habit reli­gieux parce que le prêtre est le reli­gieux de Dieu ».

Donc considérez-​vous comme des reli­gieux, spi­ri­tuel­le­ment ; votre sou­tane est votre habit reli­gieux, donc vous ne la quit­te­rez pas. Sauf s’il y a des per­sé­cu­tions qui vous obligent à la quit­ter, mais sinon vous la gar­de­rez. C’est votre habit reli­gieux qui exprime par consé­quent que vous vous reti­rez du monde, que vous êtes mis à part par le Seigneur pour reve­nir dans le monde et prê­cher aux fidèles. Et c’est pour cela que le monde va vous détes­ter. Le monde n’aime pas la sou­tane. La sou­tane exprime la sépa­ra­tion du monde. Le prêtre n’é­tant plus un homme comme les autres, il est reti­ré du monde comme dit Jésus dans le dis­cours après la Cène : « Je vous ai reti­rés du monde, et ensuite : Je vous envoie à nou­veau dans le monde ». Donc il y a cette sépa­ra­tion que vous avez déci­dée en entrant au sémi­naire qui est, eh bien, un renon­ce­ment, un sacri­fice, déjà. Vous renon­cez à une vie de famille, vous renon­cez à un mariage légi­time. Vous renon­cez à cer­taines joies du monde qui sont licites. C’est un sacri­fice. Vous le savez. Et ce sacri­fice dure­ra toute votre vie. Voyez la Sainte Vierge : Elle est heu­reuse en enten­dant les paroles de foi et de joie du vieillard Siméon qui s’ex­clame : « Seigneur, enfin je vois Votre Sauveur que j’at­ten­dais toute ma vie, main­te­nant je n’ai plus qu’à mou­rir de joie », la joie de votre don à Notre-​Seigneur Jésus-​Christ et en même temps la peine de la Sainte Vierge enten­dant ces paroles de Siméon : « Un glaive de dou­leur per­ce­ra votre âme ». Et que cet Enfant sera comme un signe de contra­dic­tion. Vous serez un signe de contra­dic­tion, chers amis, par votre sou­tane. Souvent, vous enten­drez des rica­ne­ments, des cri­tiques, des moque­ries, peut-​être même quel­que­fois de la part de prêtres. Mais vous ne rou­gi­rez pas de votre sou­tane. Vous en ferez une pro­fes­sion. C’est ce que Mgr Lefebvre disait. Mgr Lefebvre disait : « La sou­tane est un témoi­gnage et une pré­di­ca­tion, un ser­mon, sans parole », parce qu’elle prêche la pré­sence de Jésus dans le monde ; dans un monde laï­ci­sé, Jésus est tou­jours pré­sent et veut régner. Voilà votre pro­fes­sion silen­cieuse. Elle prêche aus­si la péni­tence par sa cou­leur noire, par sa forme ample qui cache les formes du corps. Elle prêche la péni­tence, le renon­ce­ment ; voi­là cette pré­di­ca­tion que le monde, le monde mau­vais qui appar­tient au démon n’aime pas, et que vous donnerez.

La sou­tane est pre­miè­re­ment un témoi­gnage, une pré­di­ca­tion, ensuite la sou­tane éloigne les esprits mau­vais et ceux qui leur sont sou­mis, disait Mgr Lefebvre. Le démon ne sup­porte pas la sou­tane. Elle éloigne les esprits mau­vais. Vous ne pour­rez pas vous per­mettre d’al­ler n’im­porte où avec la sou­tane. Elle vous pro­té­ge­ra de tas d’oc­ca­sions, de quan­ti­té d’oc­ca­sions de péchés aux­quels on est expo­sé dans le monde et aux­quels le prêtre ne peut pas s’ex­po­ser. Gardez la sou­tane, la sou­tane vous gar­de­ra. Ensuite, la sou­tane attire les âmes bien nées, même les âmes qui ne croient pas, même les incroyants, la sou­tane attire les cœurs, la sou­tane attire les âmes droites et géné­reuses. Souvent, vous enten­drez dire cela : ah, enfin, un vrai prêtre ! Quelqu’un dans la rue vous dira : « ah, enfin, un vrai prêtre ! Je ne savais pas que cela exis­tait encore ! Moi je ne suis pas pra­ti­quant, on vous dira, mais si je viens à mou­rir, c’est vous que j’ap­pel­le­rai à mon che­vet. » Voilà, un vrai prêtre ! Vous enten­drez cela parce que les âmes bien nées sont atti­rées par l’homme de Dieu que vous serez.

Et par consé­quent, disait Mgr Lefebvre, en cela la sou­tane faci­lite gran­de­ment l’a­pos­to­lat. Quand on voit un prêtre, tout de suite, je me sou­viens un jour, j’é­tais dans la rue à Paris. Une maman et son enfant qui me croisent et le petit me montre du doigt – ça ne se fait pas ! – en disant : Jésus, Jésus ! Il avait rai­son, ce petit, et la maman disait chut ! Chut ! Tais-​toi ! Je disais : non, il a rai­son. Le prêtre c’est Jésus. La sou­tane faci­lite l’a­pos­to­lat. Elle montre Jésus. Alors qu’un prêtre camou­flé ne montre plus Jésus. Il a du mal à entrer en conver­sa­tion avec ses com­pa­triotes. Un prêtre en civil, com­ment peut-​il adres­ser la parole à quel­qu’un ? Il est camou­flé ! Vous ne serez pas des prêtres camou­flés. Elle faci­lite l’a­pos­to­lat. Un jour, j’é­tais dans l’a­vion, c’é­tait juste après la des­truc­tion des tours de New-​York. Évidemment dans l’a­vion, on n’é­tait pas à l’aise à ce moment-​là. Alors, celui qui était à côté de moi, le pas­sa­ger me dit : Je suis en sécu­ri­té avec vous. Voilà, il avait com­pris que j’é­tais prêtre. Une autre fois, à l’aé­ro­port de Buenos-​Aires, bon, j’é­tais en sou­tane et puis quel­qu’un vient : « Padre, est-​ce que vous pour­riez me confes­ser ? Voilà, j’ai mon avion mais je lui dis : allons‑y quand même. Nous allons nous asseoir sur un banc dans un coin et j’ai enten­du la confes­sion. Une confes­sion magni­fique que je ne vous racon­te­rai pas, mais une grâce, une grâce extra­or­di­naire. Il allait prendre son avion et moi aus­si. Voilà, la sou­tane fait des merveilles.

Alors, chers amis, gar­dez votre soutane !

Quelques petits mots à l’a­dresse des familles des chers amis ita­liens qui sont par­mi nous : [ Voir ou écou­ter les ser­mons audio ou vidéo de ce ser­mon].

Vive la sou­tane ! Et vive votre futur sacer­doce sous la pro­tec­tion de la Très Sainte Vierge Marie, la Mère du prêtre et par consé­quent, la Mère du futur prêtre.

Au nom du Père, du Fils et du Saint-​Esprit, ain­si soit-il.

Mgr Bernard Tissier de Mallerais

FSSPX Évêque auxliaire

Mgr Bernard Tissier de Mallerais, né en 1945, titu­laire d’une maî­trise de bio­lo­gie, a rejoint Mgr Marcel Lefebvre dès octobre 1969 à Fribourg et a par­ti­ci­pé à la fon­da­tion de la Fraternité Saint-​Pie X. Il a assu­mé d’im­por­tantes res­pon­sa­bi­li­tés, notam­ment comme direc­teur du sémi­naire d’Ecône. Sacré le 30 juin 1988, il est évêque auxi­liaire et fut char­gé de pré­pa­rer l’ou­vrage Marcel Lefebvre, une vie, bio­gra­phie de réfé­rence du fon­da­teur de la Fraternité.