Lettre aux mamans n° 12

N° 12 – Juillet 2007

hère Madame,

En for­mant le cœur de votre enfant à la recon­nais­sance, vous lui appre­nez à sor­tir de lui-​même, à pen­ser aux autres et, du même coup, vous cor­ri­gez ce défaut de l’é­goïsme. Comme le cœur ne peut pas res­ter vide, l’é­goïsme cède­ra la place à la cha­ri­té. En effet, si vous ame­nez votre enfant à réflé­chir, par exemple, sur les dons reçus de Dieu, sa pre­mière pen­sée sera de recon­nais­sance ; ces­sant alors de tou­jours deman­der et de tendre la main pour rece­voir (encore ! car, d’une manière ou d’une autre, le cœur humain est insa­tiable !), il pren­dra ce qu’il a pour l’of­frir à Dieu (cela le condui­ra à com­prendre ce qu’est « offrir », « don­ner » et « faire des sacri­fices »). Son cœur appren­dra le secret « d’ai­mer ». Recevoir et offrir : accep­ter avec gra­ti­tude de rece­voir du ciel vers la terre les dons de Dieu, et les faire remon­ter vers Lui en offrande de l’homme : tel est le rythme de cette res­pi­ra­tion de l’âme qu’est la prière. Si vous com­pre­nez cela et que vous le faites pas­ser dans le cœur de votre enfant en priant avec lui, il aime­ra ce retour vers Dieu dans la prière. Il aime­ra prier. Et vous ver­rez que, de cette façon, vous aide­rez le cœur de votre enfant à s’é­pa­nouir et à être vrai­ment heu­reux. C’est ce que Dieu demande de sa créature.

Voyons com­ment Jésus nous montre le che­min et le bon exemple.

Jésus aime trou­ver chez ses dis­ciples l’es­prit de recon­nais­sance. Et ceci est pour nous un exemple concret et vivant. Si vous lisez les Evangiles ou les Epîtres, vous serez éton­née de voir com­bien Jésus aime la recon­nais­sance. Il y est sen­sible. Il l’a pra­ti­quée vis-​à-​vis de son Père et vis-​à-​vis des hommes. Il est Lui-​même « Action de grâces » vivante et éter­nelle. Je vous invite à relire le cha­pitre XVII de Saint Luc qui cite un épi­sode de la vie de Jésus où se trouve mise en relief la décep­tion du Maître devant l’in­gra­ti­tude des hommes. Il avait gué­ri dix lépreux, un seul est reve­nu sur ses pas pour remer­cier Notre-​Seigneur. Les neuf autres, où sont-ils ?

Quelle fut la plainte de Notre-​Seigneur à Sainte Marguerite-​Marie : « Voici ce cœur qui a tant aimé les hommes et qui en est si peu aimé ». Et ailleurs : « Ce qui m’est le plus sen­sible, c’est l’in­gra­ti­tude des hommes après tout ce que j’ai fait et souf­fert pour eux ». Que dirait Notre-​Seigneur aujourd’hui ?

Oui, Chère Madame, appre­nez à votre enfant à aimer Jésus. Un cœur recon­nais­sant est un cœur qui sait déjà aimer (parce qu’il sait répondre à un acte d’a­mour), qui s’ouvre au véri­table amour chré­tien qui est don de soi par amour pour Dieu qui est l’Amour en personne !

Pardonnez-​moi, Chère Madame, l’in­sis­tance que je porte sur ce point ; mais, je vois trop com­bien ceci est pas­sé sous silence dans l’é­du­ca­tion, parce que mal com­pris de la part des parents et des adultes en géné­ral. Pour mieux voir clair et com­prendre actuel­le­ment ces « choses », por­tons notre regard sur le Christ Jésus, notre modèle en tout.

Pour bien sai­sir l’im­por­tance que le Fils de Dieu attache à la recon­nais­sance, il faut se rap­pe­ler qu’Il est Lui-​même au sein de la Trinité, Action de grâces vivante et sub­stan­tielle. Rien de ce qu’Il reçoit du Père ne Lui échappe et tout devient pour Lui motif de gra­ti­tude et d’a­mour. Remarquez le lien entre la gra­ti­tude et l’a­mour. Bien mieux, Il s’offre Lui-​même, sans cesse à son Père en obla­tion de recon­nais­sance, vou­lant qu’il n’y ait rien en Lui qui ne soit de son Père et pour son Père.

En s’in­car­nant, Jésus n’a ces­sé de pro­cla­mer que tout ce qu’Il est Lui vient du Père. Toute sa vie ne fut qu’une immense action de grâces. Son grand désir, en venant sur terre, fut de nous faire com­prendre tout ce que nous devons à Dieu et nous ame­ner à Le remer­cier avec Lui. Que de pas­sages dans l’Evangile nous montrent la recon­nais­sance de Jésus envers son Père, et cette gra­ti­tude qu’Il loue quand les mira­cu­lés la Lui mani­festent. Ainsi, Il se montre sen­sible au moindre témoi­gnage de foi et de recon­nais­sance. Il pro­met de ne pas lais­ser sans récom­pense le verre d’eau don­né en son nom. Il assure du cen­tuple ceux qui auront pour Lui fait le moindre sacri­fice. Il s’en­gage à consi­dé­rer comme fait à Lui-​même le bien que nous ferons aux autres (exemple facile à uti­li­ser pour mon­trer à l’en­fant pour­quoi il faut tou­jours res­pec­ter son pro­chain, quel qu’il soit : atten­tion au langage !).

Dieu attend notre action de grâces en retour. Pourquoi ?
– parce que c’est simple jus­tice, étant don­né tout ce qu’Il a fait pour nous.
– parce que nous devons unir notre action de grâces à celle de Jésus : dans le taber­nacle et durant la Sainte Messe (ne l’ou­blions pas !).
– parce que notre recon­nais­sance Lui per­met d’être vis-​à-​vis de nous encore plus libé­ral.

N’avez-​vous jamais remar­qué vous-​même, lors­qu’on vous témoigne de la recon­nais­sance, com­bien vous aime­riez renou­ve­ler ce don ? C’est que la recon­nais­sance a le pou­voir « d’ou­vrir » le cœur. Il en est de même du Cœur de Dieu. Plus vous Le remer­ciez pour ses dons, plus Il désire encore vous don­ner. Tous les saints ont com­pris cela. Ils étaient des âmes rem­plies de recon­nais­sance (ado­ra­tion, louanges, action de grâces). Aussi, main­te­nant que ces âmes sont dans la Béatitude, elles sont deve­nues « puis­santes » sur le Cœur de Dieu. Prenez l’exemple de Saint Paul : « Je rends à Dieu de conti­nuelles actions de grâces…. En tout temps et à tout pro­pos, ren­dez grâces à Dieu… Que vous ayez à par­ler ou à agir, faites tout au nom du Seigneur Jésus ren­dant par Lui grâces à Dieu le Père ». Plus proche de nous, Ste Thérèse de l’Enfant-​Jésus disait : « Ce qui attire le plus de grâces du Bon Dieu c’est la recon­nais­sance, car si nous Le remer­cions d’un bien­fait, Il est tou­ché et s’empresse de nous en faire dix autres et si nous Le remer­cions encore avec la même effu­sion, quelle mul­ti­pli­ca­tion incal­cu­lable de grâces ! J’en ai fait l’ex­pé­rience ; essayez et vous ver­rez. Ma gra­ti­tude est sans borne pour tout ce qu’Il me donne et je Lui prouve de mille manières. » (Conseils et Souvenirs). Vous remar­quez : si Jésus fut si géné­reux envers Ste Thérèse, elle savait Lui prou­ver sa recon­nais­sance de « mille manières » ! ce qui n’est pas peu.

Mais le modèle par excel­lence, c’est celui de Notre-​Dame. Son Magnificat qui est un chant de louange et d’a­do­ra­tion, est en même temps l’ex­pres­sion la plus sublime du Merci : « Le Dieu Puissant a réa­li­sé en moi de grandes choses. Que puis-​je faire sinon exul­ter en bénis­sant le Très-​Haut qui s’est consti­tué mon salut ».

Ainsi, l’ac­tion de grâces est une atti­tude qui doit impré­gner toute notre vie. Comment voulez-​vous que l’en­fant apprenne la recon­nais­sance, s’il ne voit jamais ses parents en vivre ? Pour lui, la prière ne sera qu’une suite de « demandes ». Et plus tard, quand il sera ado­les­cent, n’é­prou­vant pas la néces­si­té de deman­der (parce qu’il a tout ! excep­té à l’é­poque des exa­mens,…) il risque fort d’a­ban­don­ner la prière, les sacre­ments… On ne prie pas pour soi, pour deman­der, mais pour rejoindre Dieu, com­mu­ni­quer avec Notre Père des cieux qui nous aime et que nous devons aimer. C’est dif­fé­rent ! Hélas, beau­coup de jeunes n’ont peut-​être pas reçu cet ensei­gne­ment dans leur pre­mière enfance. Quel dom­mage et quelle res­pon­sa­bi­li­té de la part des parents !

Dans la vie du chré­tien, l’ac­tion de grâces (ou la recon­nais­sance) doit être une atti­tude si fon­da­men­tale qu’elle doit être comme le signe qui le dis­tingue des païens. Aussi, c’est à sa dis­po­si­tion ins­tinc­tive à l’ac­tion de grâces que se recon­naît le chré­tien authen­tique. Puissions-​nous faire par­tie de ces chré­tiens selon le Cœur de Dieu qui trans­mettent ce tré­sor à la géné­ra­tion future…

(à suivre)

Une Religieuse.

Adresse cour­riel de la Lettre aux mamans sur l’éducation

Conseils de lecture :

Approfondir les Saintes Ecritures qui nous parlent de l’ac­tion de grâces. Relire l’Acte de répa­ra­tion au Sacré-​Cour de Jésus. Conseils et sou­ve­nirs de Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus.