Lettre aux mamans n° 19 – Septembre 2008

hère Madame,

Eduquer un enfant c’est se sanc­ti­fier soi-​même, car on doit régu­liè­re­ment faire son propre exa­men,… et se cor­ri­ger de ses mau­vaises habi­tudes, pour l’a­mour de Dieu et de l’enfant.

Après m’être entre­te­nue du com­por­te­ment, je vais, main­te­nant, vous par­ler du lan­gage.

Il y a, d’une part, le lan­gage peu cor­rect des adultes qui ne se maî­trisent pas ou peu et, d’autre part, le lan­gage des films, même dans les des­sins ani­més (avec brui­tages de toutes sortes,…. que les enfants repro­duisent, même en classe, et ceci par­fois sans en avoir plei­ne­ment conscience). Des parents se plaignent que l’en­fant revient de l’é­cole avec de nou­veaux « gros mots ». Pourtant, il suf­fit d’é­cou­ter les conver­sa­tions au retour des sor­ties de fin de semaine ou de vacances, et les com­men­taires sur les films vus chez tel cama­rade ou à la mai­son. Surveillez-​vous la forme d’é­du­ca­tion qu’offrent la télé­vi­sion, les films et autres moyens audio-​visuels, etc.,…… ? En lui per­met­tant de voir trop faci­le­ment des films « parce qu’ain­si il est sage ! », vous don­nez à l’en­fant le goût nocif d’en voir davan­tage (et même der­rière votre dos). Avec les moyens modernes qui évo­luent à une allure folle, vous abî­mez ain­si, par votre silence, l’âme et l’es­prit de votre enfant. Ces moyens déforment l’in­tel­li­gence de l’en­fant en lui don­nant la pos­si­bi­li­té de « croire qu’il apprend » et ceci de manière pas­sive sans faire mar­cher cette par­tie de l’âme qu’est l’in­tel­li­gence et du cer­veau qui est la réflexion. Autrement dit, sans peut-​être en avoir plei­ne­ment conscience, vous appre­nez à votre enfant la paresse de l’in­tel­li­gence. Etre intel­li­gent ne consiste pas à savoir beau­coup mais à être capable de réflé­chir, de rai­son­ner, de juger si c’est bien ou mal.

En règle géné­rale, pour les petits, voir des films, même des vidéos, n’est pas utile. Pourquoi ? Parce que l’en­fant (à par­tir de 3 ans envi­ron) vit dans les images mobiles, et, n’ayant pas ou peu conscience du temps (n’ayant pas de recul comme l’a­dulte), il prend à tort pour réel ce qu’il voit et entend pour la pre­mière fois. Et pire, il mime le lan­gage et les gestes qu’il enre­gistre très faci­le­ment. Or, il m’est arri­vé de voir cer­tains pas­sages d’un film (dit pour enfants), comique il est vrai, mais dont le lan­gage lais­sait à dési­rer. J’ai aus­si remar­qué com­bien de films à carac­tère reli­gieux étaient dan­ge­reux pour des enfants. Il y a quelques années ces films ne pou­vaient être vus qu’à par­tir de 12 ou 13 ans. Pourquoi ? Parce qu’un enfant ne peut pas por­ter de juge­ment sur l’ob­jec­ti­vi­té d’un film. J’ai consta­té par moi-​même que ces films pou­vaient com­por­ter des erreurs et des omis­sions. L” enfant confond alors le réel et l’i­ma­gi­naire et, faci­le­ment, se joue­ra des choses sérieuses et pren­dra pour réelles des ima­gi­na­tions. Réfléchissez‑y sérieu­se­ment, l’i­mage s’im­pose à lui et sa petite capa­ci­té de réflexion l’empêche de faire le tri. Ainsi, l’en­fant qui a vu « sait » et donc le caté­chiste « se trompe » et aura tort s’il ne dit pas la même chose que dans le film et l’en­fant ne se gêne­ra pas pour le lui faire savoir. Il ira même jus­qu’à dis­cu­ter pour prou­ver qu’il a rai­son. Voyez vous-​même, Chère Madame, en lais­sant la porte ouverte à la télé­vi­sion ou aux vidéos, dans votre mai­son, vous accep­tez que ce soit l’Etat non chré­tien qui ins­truise votre enfant, et, de ce fait, « déforme » son intel­li­gence. Croyez-​moi, c’est très dif­fi­cile de redres­ser cela après. Rappelez-​vous que for­mer est plus aisé que réformer !

Protégez votre enfant contre ces agres­sions, car il est vul­né­rable et fra­gile. Votre res­pon­sa­bi­li­té est très grande. Comment y par­ve­nir ? Notamment, en sur­veillant ses fré­quen­ta­tions ; il faut écar­ter de lui cer­tains cama­rades qui l’en­traînent à des jeux mal­sains, à regar­der des films, à lire de mau­vais livres, bro­chures, bandes des­si­nées, et à uti­li­ser un lan­gage peut-​être gros­sier. D’où viennent les gros mots ? Il est per­mis de dire des films, mais aus­si des plus grands et des adultes qui ne se contrôlent pas lors d’une colère. Je rap­pelle que les films et images sont plus dan­ge­reux que les paroles et les écrits, car le livre donne le choc parce que l’on sait que cela peut être ima­gi­naire, tan­dis que l’i­mage donne le choc parce que cela semble tou­jours la réa­li­té. Donc, même la part irréelle du film passe comme « réelle » dans le cer­veau de l’en­fant. L’image est pho­to­gra­phiée dans la mémoire tan­dis qu’un écrit et une parole s’en­re­gistrent plus dif­fi­ci­le­ment parce qu’ils demandent la réflexion. Faites vous-​même ce test : êtes-​vous, à la fin d’une messe, tou­jours capable de répé­ter exac­te­ment ce que le prêtre a prê­ché ou seule­ment de pré­ci­ser « le thème » de la prédication ?

Que de pen­sées défor­mées sug­gé­rées aux jeunes ! Quel dan­ger ! Ne lais­sez pas la foi de votre enfant se perdre ou tout au moins s’a­moin­drir par ces infor­ma­tions anti-chrétiennes.

Une maman m’a deman­dé pour­quoi je par­lais de l’im­por­tance de l’é­du­ca­tion du cœur en pre­mier, avant celle de l’in­tel­li­gence ? C’est mal connaître la psy­cho­lo­gie du tout petit qui ne vit que par les sens et l’ins­tinct. Donc, le seul moyen de com­mu­ni­ca­tion avec « bébé » sera les sens ; aus­si il fau­dra com­men­cer par diri­ger ou for­mer la sen­si­bi­li­té. Le bébé a autant soif et faim de l’a­mour mater­nel que du lait. A ce moment de la vie il ne demande pas de connaître mais il a faim d’a­mour ! Chère Madame, don­nez tout votre amour à votre petit et ce sera pour lui une force équi­li­brante pour la vie. D’autre part, depuis le péché ori­gi­nel, notre âme étant bles­sée, nous devons faire « avec » une intel­li­gence bles­sée (nous sommes tous des igno­rants devant apprendre) et avec cette deuxième facul­té qui est la volon­té tout aus­si bles­sée. Or, il ne s’a­git pas de TOUT savoir, mais d’ap­prendre ce qui est néces­saire pour notre salut éter­nel, et en fonc­tion de ce but à atteindre. Or, la for­ma­tion du cœur est indis­pen­sable pour édu­quer la volon­té et, par la suite, sa conscience. L’enfant doit apprendre à vou­loir le bien et à refu­ser le mal, en consé­quence, à recon­naître ce qui est bien et non pas tout connaître. Cela évi­te­ra à votre enfant de cher­cher à tout savoir, même ce qui ne le regarde pas. Dans le cas contraire, vous encou­ra­ge­rez votre enfant à une curio­si­té inutile selon son âge, voire par­fois malsaine.

C’est dans les pre­mières années de son exis­tence que l’en­fant doit apprendre de sa maman à aimer le bien par amour pour Dieu qui est l’Amour et le Bien par excellence !

Cependant, en même temps que vous lui appre­nez le lan­gage, il est néces­saire d’éveiller son intel­li­gence, non pas en lui don­nant une trop grande quan­ti­té de connais­sances, mais en lui don­nant pro­gres­si­ve­ment, au fur et à mesure qu’il gran­dit, la soif de savoir. Si vous l’as­som­mez de connais­sances inutiles pour son âge et qu’il ne demande pas, vous ris­quez de sus­ci­ter une curio­si­té qu’il ne dis­tingue pas. Il faut le lais­ser réflé­chir et vous poser ces petites ques­tions pleines de fraî­cheur qui montrent cet éveil pro­gres­sif. J’insiste : il ne s’a­git pas pour l’en­fant de tout connaître (contrai­re­ment à ce que font incons­ciem­ment les parents qui pro­fitent des faci­li­tés que pro­curent les tech­niques actuelles), mais d’a­me­ner l’en­fant à faire fonc­tion­ner son cer­veau par la réflexion simple selon son âge et ses capa­ci­tés, puis à nour­rir dou­ce­ment cette facul­té en l’ha­bi­tuant, non pas à rece­voir des idées toutes faites de manière pas­sive (comme c’est le cas par l’i­mage) mais des connais­sances appro­fon­dies par sa propre réflexion. Il faut éveiller cette intel­li­gence à la mai­son, bien avant que l’en­fant ne vienne à l’é­cole. Car là, on lui deman­de­ra cette réflexion. S’il n’a reçu dans sa pre­mière enfance que des connais­sances « pas­sives », ima­gi­nez le mal qu’il aura à l’é­cole. N’encouragez pas « la paresse intel­lec­tuelle du cer­veau » entre­te­nue par ces moyens modernes.

En résu­mé, toute connais­sance n’est pas bonne : c’est à vous de dis­tin­guer, de choi­sir, d’être vigi­lante ; vous êtes la pre­mière gar­dienne de l’âme de votre petit enfant, ne l’ou­bliez pas !

Pour cela, apprenez-​lui très tôt l’o­béis­sance sans condi­tion. Petit, l’en­fant a natu­rel­le­ment confiance en sa maman. Profitez-​en pour « exi­ger » une véri­table obéis­sance dans le but de « faire plai­sir à maman », puis pro­gres­si­ve­ment pour Jésus. C’est à vous de sen­tir à quel moment il faut pas­ser à l’é­tape sui­vante. Votre vigi­lance est indis­pen­sable. Il n’est pas néces­saire, avec votre enfant tout petit, de lui don­ner des expli­ca­tions ou des rai­sons sur le pour­quoi de l’acte d’o­béis­sance que vous lui deman­dez. Si vous le faites, vous lui appren­drez à « dis­cu­ter » et donc à juger sur l’op­por­tu­ni­té ou non d’o­béir. Alors, il sera ame­né à choi­sir le plus facile : déso­béir pour suivre « son » caprice. Que de mamans se plaignent des déso­béis­sances de leurs enfants, y com­pris des très jeunes ! La rai­son en est cer­tai­ne­ment dans leur fai­blesse et le manque de per­sé­vé­rance. Pourquoi la per­sé­vé­rance ? L’enfant se calque selon la réac­tion des parents : il cal­cule, il observe, il cherche la « faille » et il joue des­sus. Que de parents ne résistent pas à la demande d’une per­mis­sion réité­rée de l’en­fant. Un enfant est capable, après un refus, de récla­mer plu­sieurs fois la même per­mis­sion à sa maman, et cela, dans la même jour­née,… jus­qu’à las­ser maman qui, fati­guée, la lui accorde. Il faut tout de suite faire com­prendre à l’en­fant que vous ne reve­nez pas sur une déci­sion prise posé­ment. Par là, vous vous ferez res­pec­ter par l’en­fant et mieux obéir. Cela doit se faire sans vio­lence (atten­tion au ton de la voix !) mais avec fer­me­té dans le lan­gage. Saint François de Sales, connu pour avoir reçu de la nature un tem­pé­ra­ment violent, employait la « douce fer­me­té » et obte­nait la sou­mis­sion des plus dif­fi­ciles de son trou­peau, et conver­tis­sait les héré­tiques. La « douce fer­me­té » dans le lan­gage, voi­là un moyen d’ap­prendre à l’en­fant com­ment soi­gner son lan­gage. De cette manière, il vous sera pos­sible d’exi­ger davan­tage de votre enfant car il vous respectera.

C’est ce que je vous sou­haite de tout cœur avec la grâce de Notre-​Seigneur et l’in­ter­ces­sion de sa Sainte Mère.

(à suivre)

Une Religieuse.