19 décembre 2009

Homélie de Mgr de Galarreta à La Reja : Un jugement sur les entretiens doctrinaux

Extrait du ser­mon, : le 19 décembre 2009, à la fin du ser­mon qu’il a pro­non­cé lors (Argentine), Mgr Alfonso de Galarreta est lon­gue­ment reve­nu sur les dis­cus­sions doc­tri­nales entre Rome et la Fraternité Saint-​Pie‑X

[…]

Le 26 octobre der­nier a eu lieu la pre­mière réunion avec la com­mis­sion romaine. Et si, bien évi­dem­ment, je ne peux pas rap­por­ter cer­tains détails, cer­taines cir­cons­tances ou cer­taines des choses qui ont été dites, je peux tou­te­fois vous dire ce qui s’est pas­sé dans les grandes lignes et ce que nous avons fait.

Cette pre­mière ren­contre fut rela­ti­ve­ment bonne. Je dis rela­ti­ve­ment parce que c’est bien en fonc­tion des cir­cons­tances dans les­quelles nous nous trou­vons, et selon les espé­rances que l’on peut avoir réel­le­ment. Ainsi, en consi­dé­rant ces cir­cons­tances et ce que l’on peut attendre, la réunion a été bonne.

Elle fut bonne, en pre­mier lieu, parce que ces contacts se sont situés clai­re­ment sur le plan doc­tri­nal. Il s’agit d’une com­mis­sion qui a pour objec­tif l’étude de cer­taines ques­tions doc­tri­nales, et qui n’a pas pour fina­li­té de consi­dé­rer, ni théo­ri­que­ment ni pra­ti­que­ment, quelque accord que ce soit, d’ordre pure­ment juri­dique, pure­ment cano­nique, pure­ment pra­tique. Cette question-​là est tota­le­ment exclue. Et cela a été bien pré­ci­sé. C’est une dis­cus­sion uni­que­ment et exclu­si­ve­ment située au plan doctrinal.

En second lieu, c’est une dis­cus­sion sur le Concile Vatican II et le magis­tère post­con­ci­liaire. Le magis­tère post­con­ci­liaire et le Concile. Les sujets, les thèmes que nous trai­te­rons ont été bien éta­blis. Ce sont ceux qui concernent toutes les ques­tions, tous les thèmes que nous cri­ti­quons depuis qua­rante ans, spé­cia­le­ment la liber­té reli­gieuse, les liber­tés modernes, la liber­té de conscience, la digni­té de la per­sonne humaine – comme on dit –, les droits de l’homme, le per­son­na­lisme, l’œcuménisme, le dia­logue inter­re­li­gieux, l’inculturation, la col­lé­gia­li­té (cet éga­li­ta­risme, ce démo­cra­tisme et cette des­truc­tion de l’autorité qui s’est intro­duite dans l’Église) ; ain­si que toutes ces ques­tions d’ecclésiologie qui ont tota­le­ment chan­gé la notion de ce qu’est l’Église : toutes ces ques­tions de l’auto-conscience de l’Église, de l’Église-communion, de l’Église-sacrement, de l’Église-Peuple de Dieu, toutes ces notions nou­velles sur la rela­tion entre l’Église et le monde.

Ensuite la ques­tion de la Messe, de la nou­velle Messe, du nou­veau Missel, de la réforme litur­gique, et d’autres thèmes encore. Nous nous sommes mis d’accord pour avoir une dis­cus­sion doc­tri­nale sur tous ces thèmes-là.

Et ce qui est le plus impor­tant – et qui a été bien éta­bli de manière très claire –, c’est que l’unique cri­tère com­mun et pos­sible de ces dis­cus­sions est le Magistère anté­rieur. Je le répète : l’unique cri­tère com­mun et pos­sible, l’unique cri­tère que nous accep­tons, et c’est une condi­tion sine qua non pour ces dis­cus­sions, c’est le magis­tère anté­rieur au Concile Vatican II, le Magistère de tou­jours, la Tradition.

Je consi­dère aus­si que ce fut un bon début, si l’on regarde la méthode qui a été adop­tée. Il y aura des réunions tous les deux ou trois mois : trois mois quand il s’agit d’un thème nou­veau, deux mois quand on pour­suit sur un même thème. Si nous com­men­çons sur un thème et que nous le conti­nuons, la réunion sui­vante peut se faire dans les deux mois. Mais si nous devons pré­pa­rer une nou­velle ques­tion, nous avons besoin de trois mois. Et il a été bien éta­bli que la Fraternité – la com­mis­sion que je repré­sente – pré­sen­te­ra la pre­mière un tra­vail sur un thème précis.

Par exemple, pour le mois de jan­vier, après un délai d’à peu près trois mois, nous trai­te­rons le thème de la nou­velle messe et du nou­veau Missel. Nous avons déjà pré­sen­té un tra­vail, une étude cri­tique à la lumière de la doc­trine de tou­jours, mon­trant tous les pro­blèmes que pose la nou­velle Messe à la foi catho­lique. C’est une étude de 45 pages. Ils [les experts romains] doivent nous répondre par écrit, et ensuite la dis­cus­sion orale, se fera sur la base de ces deux textes, laquelle don­ne­ra lieu aus­si à un docu­ment écrit.

Tout est enre­gis­tré, de leur côté comme du nôtre. Et, de plus, tout est fil­mé. Ainsi, bien que pour des rai­sons évi­dentes on ne puisse pas rap­por­ter tout ce que nous disons et étu­dions, sur tout il y aura un docu­ment – un témoi­gnage écrit, enre­gis­tré et fil­mé – devant vous, devant l’Église, devant Dieu.

À l’issue de chaque confron­ta­tion, on dresse comme un bilan qui dit s’il y a coïn­ci­dence [des points de vue] ou pas, et où est le pro­blème. On défi­nit, on affine, et après chaque ques­tion, on rédige un dos­sier qui est trans­mis aux autres membres de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, si le Préfet le juge conve­nable, à une autre Congrégation si ce dicas­tère est concer­né par le thème étu­dié, – par exemple, celui de la Messe sera bien sûr fait en col­la­bo­ra­tion avec la Congrégation de la Liturgie, du Culte divin. Et ensuite, sur tous les thèmes débat­tus, un dos­sier, un résu­mé rédi­gé par écrit – comme je l’ai dit –, est remis au Pape et au supé­rieur géné­ral de la Fraternité.

Encore une fois, cette com­mis­sion n’a pas pour objec­tif d’aboutir – ce qui serait néfaste – à une espèce d’accord doc­tri­nal. Non ! Nous allons sim­ple­ment don­ner un témoi­gnage de la foi, la défendre, faire le bien que nous pou­vons. Et de toute façon nous défen­drons l’honneur de Dieu, l’honneur de Notre Seigneur et l’honneur de l’Église, ce qui est l’essentiel, si vous avez bien com­pris ce que j’ai dit au début [de ce ser­mon] sur la média­tion et l’office du prêtre, et c’est ce qui en tout cas suffit.

Jusqu’ici, nos inter­lo­cu­teurs – je me réfère ici spé­ci­fi­que­ment à ceux qui échangent avec nous dans cette com­mis­sion – sont des per­sonnes avec les­quelles on peut par­ler, ils com­prennent notre lan­gage, ils com­prennent ce que nous disons, ils com­prennent très bien nos objec­tions. Et nous pou­vons par­ler paci­fi­que­ment et en toute liber­té. Cela est suffisant.

Si jusque là tout dépen­dait de notre cor­res­pon­dance à la grâce de Dieu, à par­tir de main­te­nant nous pour­rions dire que tout dépend entiè­re­ment de la grâce de Dieu. Parce que Dieu, Notre Seigneur, et seule­ment Lui, est le Maître inté­rieur qui peut illu­mi­ner les intel­li­gences et conver­tir. Seul Dieu peut tou­cher les cœurs. Nous allons là-​bas comme pour prê­cher – comme ce que je suis en train de faire ici –, mais tou­cher votre intel­li­gence ou votre cœur, seul Dieu peut le faire, et comme nous ne connais­sons pas les des­seins de Dieu, nous ne savons pas jusqu’où cela ira. Ce que nous savons cer­tai­ne­ment c’est qu’Il peut tout. À Dieu rien n’est impos­sible. Et Il peut conver­tir quand Il veut, comme Il veut, qui Il veut.

Je vous donne ces expli­ca­tions pour que vous ayez la tran­quilli­té et l’assurance néces­saires. Si ces cir­cons­tances qui me paraissent abso­lu­ment sûres chan­geaient, alors nous étu­die­rions si ces dis­cus­sions, ces contacts, doivent se pour­suivre ou non. Nous savons très clai­re­ment ce que nous ne sommes pas dis­po­sés à accep­ter. Si nous ne savons pas par­fai­te­ment com­ment les choses peuvent évo­luer, nous savons en revanche très clai­re­ment ce que nous n’avons pas l’intention de faire, en aucune manière.

Premièrement céder sur la doc­trine Et deuxiè­me­ment faire un accord pure­ment pra­tique. Avec ces condi­tions et les dis­po­si­tions qui sont les leurs d’accepter de mettre pour la pre­mière fois en dis­cus­sion le Concile – c’est la pre­mière fois qu’ils nous donnent la pos­si­bi­li­té de leur pré­sen­ter une cri­tique doc­tri­nale, pro­fonde, fon­dée sur le Magistère de tou­jours. C’est la pre­mière fois ! – il est clair que nous devons le faire.

Ensuite, Dieu dira ! La pru­dence nous montre ce que nous devons faire main­te­nant, mais non pas exac­te­ment ce que nous devons faire dans trois ou six mois, parce que les cir­cons­tances peuvent changer.

Quoiqu’il en soit, ce qui est clair pour nous c’est que la mis­sion de la Fraternité est essen­tiel­le­ment, avant toute chose, avant même d’aller à Rome, de don­ner un témoi­gnage de la foi. Nous devons conti­nuer, sau­ve­gar­der, trans­mettre, vivre le vrai sacer­doce catho­lique. Nous devons gar­der, défendre, vivre, trans­mettre le vrai sacri­fice de la Messe.

[…]

Mgr Alfonso de Galarreta

FSSPX Premier assistant général

Mgr Alfonso de Galarreta, né en Espagne en 1957, a été sacré évêque auxi­liaire de la Fraternité Saint-​Pie X le 30 juin 1988 par Mgr Marcel Lefebvre. Ayant exer­cé de nom­breuses res­pon­sa­bi­li­tés notam­ment comme Supérieur du dis­trict d’Amérique du Sud et direc­teur du sémi­naire de La Reja, il est actuel­le­ment Premier Assistant du Supérieur géné­ral de la Fraternité.