Le synode allemand déjà dépassé par le cardinal Zuppi

Le cardinal Matteo Maria Zuppi. Crédit : wikimedia

Au moment du synode sur la famille qui a conduit à Amoris lae­ti­tia, la com­mu­nion aux divor­cés rema­riés, avec ou sans par­cours péni­ten­tiel, était déjà une réa­li­té répan­due depuis des décen­nies dans une grande majo­ri­té de paroisses et de dio­cèses du monde entier.

Alors que nous sommes scan­da­li­sés par le synode alle­mand et ses pro­po­si­tions de révo­lu­tion morale, en fait, « l’expérience ecclé­siale » est déjà au-​delà du débat.

On sait que dans le sys­tème moder­niste, l’autorité inter­vient tar­di­ve­ment pour mettre un cachet sur ce que l’expérience com­mune, la vie ecclé­siale, la dia­lec­tique interne des par­ties, a fait depuis long­temps du patri­moine com­mun de la com­mu­nau­té des croyants. Pour ceux qui ne sont pas d’accord, il y aura un temps de tolé­rance jusqu’à la pro­chaine étape.

La chasteté avant le mariage : choix courageux ou commandement ?

Certes, le Dicastère pour les laïcs et la famille a publié un docu­ment d’“itinéraires” pour la pré­pa­ra­tion au mariage – avec une pré­face du pape François – où la chas­te­té est défi­nie comme un choix que l’Eglise doit avoir le cou­rage de pro­po­ser aux fian­cés. Pas un com­man­de­ment, évi­dem­ment, mais une pos­si­bi­li­té qui doit être pro­po­sée avec courage.

On ne peut pas dire que les auto­ri­tés romaines brillent par leur confiance dans la puis­sance de la grâce. Il est main­te­nant consi­dé­ré comme acquis que cer­tains dis­cours moraux doivent res­ter des idéaux que cer­tains peuvent choi­sir de suivre, mais pour les masses, d’autres che­mins doivent être trouvés.

C’est exac­te­ment le dis­cours qui se cache der­rière Amoris lae­ti­tia. D’une cer­taine manière, les com­man­de­ments sont deve­nus des conseils évan­gé­liques de perfection.

Nouveaux chemins « humainement viables »

Un dis­cours très simi­laire a été tenu par Ratzinger dans son livre Lumière du monde (LEV 2010), au sujet de la contra­cep­tion au sein du mariage : « Les pers­pec­tives d’Humanae vitae res­tent valables, mais c’est une autre chose de trou­ver des moyens humai­ne­ment viables.

« Je crois qu’il y aura tou­jours des mino­ri­tés qui sont inti­me­ment per­sua­dées de la jus­tesse de ces pers­pec­tives, et qui, en les vivant, en seront plei­ne­ment satis­faites au point de deve­nir des modèles fas­ci­nants à suivre pour les autres. »

Ainsi, le rejet de la contra­cep­tion et la chas­te­té avant le mariage nous sont pré­sen­tés comme des modèles, que cer­tains peuvent vivre avec épa­nouis­se­ment, mais pas comme des « voies humai­ne­ment viables ». Après tout, en matière de morale, le synode alle­mand ne parle pas très différemment.

Et en plus, il semble que dans le dio­cèse du car­di­nal Matteo Maria Zuppi, le nou­veau pré­sident de la Conférence épis­co­pale ita­lienne, membre émi­nent de Sant’Egidio et can­di­dat à la papau­té, on expé­ri­mente des voies qui peuvent être sui­vies par tout le monde.

Le cas de Bologne : messe d’action de grâce pour une union gay

Le 11 juin der­nier, dans la ville de Budrio, près de Bologne, un couple homo­sexuel est allé « s’unir civi­le­ment » à la muni­ci­pa­li­té. Puis, comme ils appar­te­naient à un groupe pas­to­ral de « catho­liques gays » appe­lé “In cam­mi­no” – “En che­min”, ils se sont ren­dus à l’église pour célé­brer une « messe d’action de grâce », pré­si­dée par le direc­teur du bureau dio­cé­sain pour la famille, avec leur groupe, de nom­breux autres prêtres pré­sents et concélébrant.

Il n’est pas néces­saire ici d’examiner l’extrême gra­vi­té de cet acte, qui remer­cie Dieu pour le mal et pro­voque le scan­dale évident d’approuver l’union civile de deux per­sonnes qui ont déci­dé de vivre publi­que­ment de manière péche­resse – elles n’étaient mani­fes­te­ment pas dignes du cou­rage de la pro­po­si­tion de choi­sir la “chas­te­té”.

La bénédiction de Zuppi

Cependant, il faut sou­li­gner com­ment, face à une réac­tion évi­dente de nom­breux milieux catho­liques, la Curie de Bologne a acti­ve­ment défen­du la céré­mo­nie en ques­tion, en inven­tant une série de dis­tinc­tions spécieuses.

La messe n’était pas en action de grâce pour le couple nou­vel­le­ment « marié », mais pour le don de la foi que toute la com­mu­nau­té gay par­tage ; en outre, la messe d’action de grâce ne serait cer­tai­ne­ment pas une « béné­dic­tion » du couple, inter­dite par la Congrégation pour la doc­trine de la foi.

La dis­tinc­tion de la curie concer­nant le fait d’accompagner éga­le­ment les per­sonnes ayant des « ten­dances homo­sexuelles » semble ridi­cule en pré­sence du scan­dale d’une union civile entre deux per­sonnes qui se pré­sentent comme un couple d’amoureux.

Distinctions pha­ri­saïques mises à part, toutes inven­tées après coup – alors que le curé local avait sim­ple­ment dit qu’« une béné­dic­tion ne doit être refu­sée à per­sonne ! » – les pho­tos et les vidéos montrent com­ment les deux per­sonnes sont entrées dans l’église en pro­ces­sion, entou­rées de proches en tenue, avec des pho­to­graphes et des fleurs, et ont été reçues par le cler­gé et assises sur un banc réser­vé. Après la com­mu­nion, les deux per­sonnes ont reçu un « tablier » en cadeau de la part du célé­brant pour les remer­cier de leur enga­ge­ment envers le groupe.

La dia­lec­tique moder­niste frappe à nou­veau : la Congrégation pour la doc­trine de la foi inter­dit par un docu­ment la béné­dic­tion des unions homo­sexuelles (mars 2021), en repro­po­sant un « bel idéal ». Le synode alle­mand, en revanche, en dis­cute librement.

Entre-​temps, les groupes « pro­phé­tiques » mettent déjà tout en pra­tique dans l’expérience concrète de la vie de l’Eglise, tou­jours défen­due et bénie par l’autorité. Un scé­na­rio déjà vu de nom­breuses fois, à com­battre à la racine – le moder­nisme – et pas seule­ment dans ses épi­phé­no­mènes, pour le moment les plus « extrêmes ».

Source : FSSPX​.News