Léon XIII

256ᵉ pape ; de 1878 à 1903

4 octobre 1897

Constitution apostolique Felicitate quadam

Sur la restauration de l'unité de l'ordre des frères mineurs

Léon, évêque

Serviteur des ser­vi­teurs de Dieu

Pour per­pé­tuelle mémoire

C’est, croyons-​Nous, par une faveur spé­ciale et non par l’ef­fet du hasard qu’il Nous a été don­né d’exer­cer jadis l’é­pis­co­pat dans l’Ombrie, mère et nour­ri­cière de François d’Assise, de pré­fé­rence à toute autre pro­vince de l’Italie. Nous y avons pris l’habitude de médi­ter avec amour la vie du Père séra­phique que ces lieux Nous appe­laient. Autour de Nous, de nom­breux sou­ve­nirs de sa vie et, pour ain­si dire, les traces de ses pas impri­més çà et là, Nous rap­pe­laient sa mémoire et même sem­blaient le faire revivre sous Nos yeux. Nous avons gra­vi à deux reprises les som­mets de l’Alverne ; contem­plant à nos pieds la région où François ouvrit les yeux à la lumière, où son âme fut déli­vrée des liens cor­po­rels, d’où, par lui, tant de bien­faits et tant de grâces se répan­dirent sur le monde entier, de l’Orient à l’Occident, Nous avons pu connaître plus com­plè­te­ment et avec plus d’exactitude la gran­deur de cet homme et l’importance de la mis­sion qui lui fut assi­gnée par Dieu.

Nous avons été séduit par l’idée et la forme des ins­ti­tu­tions fran­ciscaines ; voyant que leur ver­tu intime avait beau­coup contri­bué à éta­blir la vie chré­tienne et que cette ver­tu ne pou­vait s’affaiblir avec le temps, Nous avons don­né, durant Notre épis­co­pat à Pérouse, tous Nos soins à la res­tau­ra­tion et à la pro­pa­ga­tion du Tiers-​Ordre dont Nous fai­sons par­tie déjà depuis vingt-​cinq ans, afin d’accroître la pié­té chré­tienne et de conser­ver dans le peuple la pure­té de mœurs.

Nous avons appor­té au faîte de la hié­rar­chie catho­lique le même esprit et les mêmes réso­lu­tions prises dès cette époque.

Aussi, dési­rant voir fleu­rir le Tiers-​Ordre non seule­ment dans une région, mais par toute la terre, dans l’espoir que les effets en seront aus­si salu­taires qu’autrefois, Nous en avons tem­pé­ré les règles dans la mesure qui nous a paru néces­saire afin que cette dis­ci­pline, plus douce et mieux appro­priée à Notre temps, atti­rât et sédui­sît tous les chrétiens.

Les résul­tats ont suf­fi­sam­ment réa­li­sé Nos dési­rs et Nos espérances.

Néanmoins, notre affec­tion spé­ciale pour le grand saint François et ses œuvres deman­daient quelque chose de plus, et Nous avons réso­lu de l’accomplir avec l’aide de Dieu.

Le pre­mier Ordre fran­cis­cain attire aujourd’hui Notre atten­tion et Notre zèle, et il serait dif­fi­cile de trou­ver un sujet qui méri­tât mieux Nos soins vigi­lant et Notre affec­tueuse sollicitude.

Elle est célèbre, en effet, et bien digne de toute la bien­veillance du Siège Apostolique, cette famille des Frères Mineurs, nom­breuse et durable pos­té­ri­té du bien­heu­reux François.

Son fon­da­teur lui enjoi­gnit d’observer très reli­gieu­se­ment dans la suite des siècles toutes les lois, toutes les règles qu’il lui avait tra­cées ; et cet ordre ne fut pas inutile.

C’est à peine s’il existe une asso­cia­tion d’hommes qui ait don­né à la ver­tu tant d’observateurs fidèles ; à la foi chré­tienne, tant de hérauts au Christ, tant de mar­tyrs ; au ciel, tant de citoyens, et dans laquelle on ait comp­té tant d’hommes qui aient illus­tré et fait pro­gres­ser l’Eglise et la civi­li­sa­tion elle-​même par le moyen de ces arts qui valent à ceux qui y excellent la supé­rio­ri­té sur tout leur entourage.

Nul doute que cette pros­pé­ri­té n’eût été plus grande et plus con­tinue si les liens de l’union et de la concorde étaient tou­jours demeu­rés aus­si res­ser­rés qu’aux pre­miers jours de l’Ordre : car, plus une force est unie, plus elle est puis­sante, et c’est la sépa­ra­tion qui l’a­moin­drit [1].

C’est ce qu’avait très bien aper­çu et vou­lu évi­ter l’esprit pru­dent qu’était saint François quand il for­ma la Société de ses dis­ciples, les consti­tuant en un seul corps uni par des liens indissolubles.

Quel fut son vrai but et que fit-​il quand il pro­po­sa une seule règle que tous devraient obser­ver sans aucune excep­tion de temps ni de lieu, et quand il ordon­na que tous seraient sou­mis et obéi­raient à un seul Supérieur général ?

La pré­oc­cu­pa­tion prin­ci­pale du Saint fut tou­jours de main­te­nir la concorde ; c’est ce que confirme for­mel­le­ment son dis­ciple Thomas de Celano : Son désir inces­sant, dit-​il, son sou­ci per­pé­tuel fut de main­tenir entre les Frères le lien de la paix, afin que ceux qu’avait atti­rés le même esprit, ceux qu’avait engendres le même père, fussent dou­ce­ment réchauffes sur le sein de la même mère [2].

Mais on connaît assez les évé­ne­ments qui suivirent.

Soit parce que la volon­té de l’homme est incons­tante, soit parce que dans une socié­té nom­breuse les carac­tères sont d’ordinaire bien dif­fé­rents, soit parce que, dans le cours des temps, les situa­tions s’étaient peu à peu modi­fiées, il arri­va que par­mi les Franciscains, ceux-​ci pré­fé­raient un genre de vie, ceux-​là un autre.

Cette union très étroite que François avait eue en vue et qu’il avait pour­sui­vie, dont il avait vou­lu faire pour les siens un devoir sacré, repo­sait sur ces deux bases : le culte de la pau­vre­té volon­taire et l’i­mi­ta­tion des exemples du Saint dans l’exercice des autres vertus.

C’étaient là les carac­tères dis­tinc­tifs de l’Institut fran­cis­cain et les prin­cipes de sa conservation.

Quelques dis­ciples sou­hai­tèrent de gar­der cette pau­vre­té abso­lue qui fut l’u­nique amour de ce grand Saint durant toute sa vie d’au­tres, qui la jugèrent trop pénible, pré­fé­rèrent y appor­ter de légers tempéraments.

De là une sépa­ra­tion qui don­na nais­sance aux Observantins, et aux Conventuels.

De même, les uns vou­lurent imi­ter vaillam­ment et rigi­de­ment l’austère inté­gri­té et les hautes et magni­fiques ver­tus que François avait pous­sées jusqu’au pro­dige ; d’autres pré­fé­rèrent le suivre moins ardem­ment et avec plus de modération.

Les pre­miers for­mèrent la famille des Frères Capucins, et ce fut l’origine d’une sépa­ra­tion en trois groupes.

Néanmoins, l’Ordre ne fut pas épui­sé pour cela, et per­sonne n’i­gnore que les reli­gieux de cha­cune des obser­vances que nous venons d’énumérer ont brillé dans l’Eglise par leurs mérites émi­nents et l’éclat de leurs vertus.

En ce qui concerne les Conventuels et les Capucins, Nous ne décré­tons abso­lu­ment rien de nouveau.

Ces deux Ordres ont actuel­le­ment le droit de suivre une règle spé­ciale : ils conser­ve­ront ce droit à l’avenir.

La pré­sente Lettre regarde seule­ment ceux qui, du consen­te­ment du Siège Apostolique, ont un rang et des hon­neurs supé­rieurs aux autres et portent plus spé­cia­le­ment le nom de Frères Mineurs que leur a don­né Léon X [3].

Les membres de cet Ordre ont aus­si obser­vé une règle qui n’est pas la même pour tous sur cer­tains points.

Assurément, ils se sont effor­cés d’observer les pres­crip­tions des lois com­munes, mais les uns plus rigou­reu­se­ment, les autres moins.

C’est ce qui don­na lieu, on le sait, à quatre groupes dif­fé­rents : les Observantins, les Réformés, les Déchaussés ou Alcantarins, les Récollets. Et cepen­dant la Société ne fut pas entiè­re­ment détruite.

Bien que, par ses pri­vi­lèges, consti­tu­tions et usages, chaque famille dif­fère des autres, et que cha­cune ait ses novi­ciats spé­ciaux, toutes néan­moins, vou­lant main­te­nir le prin­cipe de l’union pri­mi­tive, ont tou­jours conti­nué à obéir à un seul et même supé­rieur qu’ils appellent, sui­vant leur droit, Ministre géné­ral de tout l’Ordre des Mineurs [4].

Quoi qu’il en soit de cette divi­sion en quatre branches, si elle a empê­ché d’es­pé­rer les biens plus abon­dants qu’aurait pro­cu­rés l’union par­faite, elle n’a pas du moins détruit la dis­ci­pline ; bien plus, cha­cune ayant eu pour fon­da­teurs et pour membres des hommes pleins d’ar­deur pour le salut des âmes, émi­nents par leurs ver­tus et leur sagesse, elles ont méri­té la bien­veillance et la faveur des Pontifes Romains.

C’est à ces causes qu’elles durent leur force et leur fécon­di­té, c’est par elles qu’elles purent renou­ve­ler les exemples des anciens Fran­ciscains. Mais est-​il une seule ins­ti­tu­tion humaine que la vieillesse ne vienne pas un jour affai­blir ? L’expérience enseigne que la pra­tique de la ver­tu par­faite qui, à l’o­ri­gine et dans les pre­mières années, des Ordres reli­gieux, est d’ordinaire si rigou­reuse, se relâche peu à peu et que, le plus sou­vent, l’ar­deur pre­mière dis­pa­rait avec le temps.

A ces causes de décré­pi­tude et de relâ­che­ment qu’apportent tou­jours les années et qui se trouvent natu­rel­le­ment dans toutes les asso­cia­tions humaines, est main­te­nant venue s’ajouter une force de des­truc­tion exté­rieure. Nous vou­lons par­ler des cruels orages qui bou­le­versent la catho­li­ci­té depuis plus d’un siècle, et qui se sont natu­rel­le­ment abat­tus sur les troupes auxi­liaires de l’Eglise, c’est- à‑dire les Ordres reli­gieux d’hommes. Est-​il une région, un rivage qui n’ait pas vu leurs membres dépouillés, chas­sés, humi­liés, maltraités ?

Si nous n’a­vons pas vu ces Ordres com­plè­te­ment détruits, c’est là un pro­dige que nous ne pou­vons attri­buer qu’à la grâce divine.

Mais, par suite de ces causes réunies, ils ont subi une grave atteinte.

Fatalement, ce double obs­tacle devait relâ­cher l’u­nion, affai­blir la dis­ci­pline, comme s’affaiblit la vie dans un corps malade.

De là, la néces­si­té d’une restauration.

Certes, dans les divers Ordres reli­gieux, il n’a pas man­qué d’hommes qui, spon­ta­né­ment et avec un zèle louable, se sont effor­cés de gué­rir ces sortes de plaies dont Nous venons de par­ler, et de rame­ner leur Institut à l’état pri­mi­tif. Mais les Frères Mineurs, mal­gré leur plus vif désir, ne peuvent que dif­fi­ci­le­ment atteindre ce but, ou même cela leur est impos­sible, parce qu’on déplore l’ab­sence, par­mi leurs membres, d’un accord parfait.

En réa­li­té, le Général de l’Ordre n’a pas sur toutes ces familles reli­gieuses un pou­voir com­plet et abso­lu ; quelques règles spé­ciales leur per­mettent d’éluder cer­tains de ses actes et de ses ordres.

Cet état de chose four­nit tou­jours un pré­texte à ceux qui ne veulent pas se soumettre.

En outre, ces diverses branches, bien que réunies en un seul Ordre et consti­tuant en quelque sorte un seul tout, sont divi­sées en pro­vinces dif­fé­rentes ; elles ont des mai­sons de novi­ciat dis­tinctes ; il en résulte que cha­cune est por­tée à agir pour ses propres inté­rêts et à les faire pas­ser avant ceux du corps tout entier, de telle façon que cha­cun ne s’occupant que de soi-​même, cette situa­tion crée faci­le­ment des obs­tacles aux grands avan­tages de la communauté.

Enfin, il est à peine besoin de rap­pe­ler les contro­verses et les dis­cussions qu’en­gen­draient sou­vent la varié­té des groupes, la diver­sité des consti­tu­tions, la dis­pa­ri­té des études ; si les mêmes causes sub­sis­taient, elles pour­raient rame­ner presque quo­ti­dien­ne­ment les mêmes difficultés.

Or, qu’y a‑t-​il de plus funeste que la dis­corde ? Une fois enra­ci­née quelque part, elle détruit les prin­ci­pales sources de vie et mené à a ruine les entre­prises les plus florissantes.

Il est donc néces­saire de for­ti­fier et de conso­li­der l’Ordre des Frères Mineurs en sup­pri­mant la dis­per­sion de ses forces.

Cette néces­si­té est d’au­tant plus impé­rieuse que le cou­rant du siècle est en faveur des carac­tères et des mœurs popu­laires, et qu’un Ordre de reli­gieux, popu­laire par son ori­gine, son genre de vie et ses ins­ti­tu­tions, fait augu­rer de grandes choses.

En effet, ceux qui ont la répu­ta­tion d’être popu­laires peuvent beau­coup plus faci­le­ment se don­ner et se dévouer au peuple en agis­sant et en tra­vaillant pour le salut commun.

Nous savons per­ti­nem­ment que les Frères Mineurs use­ront effi­ca­ce­ment et avec zèle de cette occa­sion qui leur est offerte de se rendre utiles, si les cir­cons­tances les trouvent forts, pré­pa­rés, orga­ni­sés comme il convient.

Tandis que Nous réflé­chis­sions mûre­ment à ce sujet, Nous Nous rap­pe­lions Nos pré­dé­ces­seurs qui, chaque fois qu’il le fal­lut, ne man­quèrent jamais de sau­ve­gar­der l’exis­tence des dis­ciples de saint François et d’ai­der à leur pros­pé­ri­té d’une manière adap­tée aux circonstances.

Nous vou­drions faire de même avec le même zèle et une égale bien­veillance, non seule­ment pour l’ac­com­plis­se­ment de Notre charge, mais aus­si pour les motifs indi­qués plus haut.

Or, notre époque Nous a sem­blé deman­der abso­lu­ment que l’Ordre soit rame­né à ?on ancienne union et à son orga­ni­sa­tion unique. Ainsi tout motif de dis­si­dence et de dis­cus­sion écar­té, toutes les volon­tés seront reliées entre elles par l’au­to­ri­té et la direc­tion d’un seul, et consé­quem­ment l’Ordre repré­sen­te­ra la forme consti­tutive que son fon­da­teur et légis­la­teur avait en vue.

Nous avons aus­si exa­mi­né deux points, dignes cer­tai­ne­ment de consi­dé­ra­tion, mais qui ne Nous ont pas paru assez impor­tante pour retar­der d’une façon quel­conque la réa­li­sa­tion de Notre pro­jet : il s’a­git de la néces­si­té d’a­bo­lir les pri­vi­lèges de cha­cune de ces familles et de sou­mettre uni­for­mé­ment aux règles d’une même dis­ci­pline tous les Frères Mineurs dont Nous par­lons, en quelque lieu qu’ils se trouvent.

Sans doute, ces pri­vi­lèges furent oppor­tuns et féconds à l’é­poque où ils furent deman­dés ; main­te­nant, les temps ayant chan­gé, loin d’être utiles, ils paraissent plu­tôt gêner l’ob­ser­va­tion de la règle.

De même, il eût été dif­fi­cile et inop­por­tun d’im­po­ser à tous une règle unique tant que les diverses familles des Frères Mineurs étaient sépa­rées par de très notables dif­fé­rences de dis­ci­pline inté­rieure ; il en est tout autre­ment aujourd’­hui qu’elles ne dif­fèrent que par de légères nuances.

Toutefois, nous rap­pe­lant les tra­di­tions et les usages de nos pré­décesseurs, vu la très grande impor­tance de cette affaire, nous avons deman­dé la lumière du conseil et la pru­dence du juge­ment, sur­tout à ceux qui étaient capables de juger la ques­tion avec com­pé­tence. D’abord, en 1895, les repré­sen­tants de tout l’Ordre des Frères Mineurs s’étant réunis à Assise en un Chapitre pré­si­dé par le feu car­dinal Ægidius Mauri, arche­vêque de Ferrare, délé­gué par Nous, Nous avons ordon­né qu’on deman­dât à chaque délé­gué son avis sur l’u­nion pro­je­tée de toutes les familles franciscaines.

Le plus grand nombre se pro­non­ça en faveur de l’union.

Bien plus, le Congrès choi­sit quelques-​uns de ses membres pour tra­vailler à la rédac­tion d’une Constitution qui serait com­mune à tous, si le Siège Apostolique sanc­tion­nait la fusion.

Les car­di­naux de la Sacrée Congrégation des Evêques et Réguliers, qui, d’ac­cord avec les car­di­naux appar­te­nant à la Sacrée Congréga­tion de la Propagande, Nous avaient vive­ment approu­vé au cours de toutes ces négo­cia­tions, exa­mi­nèrent avec un très grand soin les actes du Chapitré d’Assise et tous les argu­ments allégués.

Ayant ensuite exa­mi­né et cor­ri­gé, sui­vant qu’il parut utile, la Constitution récem­ment éla­bo­rée, ils décla­rèrent deman­der eux- mêmes que, toute dis­tinc­tion de famille sup­pri­mée, l’Ordre fût recons­ti­tué régu­liè­re­ment dans l’unité.

Nous recon­nûmes donc, sans hési­ter, que cette union était abso­lument avan­ta­geuse et utile, et qu’elle était conforme au but de son très saint fon­da­teur, aus­si bien qu’à la volon­té divine.

Dans ces condi­tions, par Notre auto­ri­té apos­to­lique et en ver­tu de la pré­sente lettre, Nous décla­rons avoir rame­né et Nous rame­nons l’Ordre des Frères Mineurs, par­ta­gé jus­qu’à ce jour en diverses asso­cia­tions, à l’u­ni­té et à la pleine et par­faite com­mu­nau­té de vie, en sorte qu’elles ne forment plus qu’un seul et unique corps, toute dis­tinc­tion de famille étant supprimée.

I. Les noms d’Observantins, Réformés, Déchaussés ou Alcantarins, Récollets sont sup­pri­més. L’Ordre s’ap­pel­le­ra Ordre des Frères Mineurs sans autre qua­li­fi­ca­tif, selon l’ins­ti­tu­tion de son Père saint François.

Il sera gou­ver­né par un seul Général.

Il obéi­ra aux mêmes lois.

II sera régi par la même admi­nis­tra­tion, confor­mé­ment aux récentes Constitutions, que nous ordon­nons à tous d’ob­ser­ver en tout lieu avec la plus grande constance et la plus grande fidélité.

II. Tous les sta­tuts, pri­vi­lèges et droits spé­ciaux dont les familles par­ti­cu­lières usaient et jouis­saient indi­vi­duel­le­ment, et abso­lu­ment toutes les par­ti­cu­la­ri­tés ten­dant à pro­duire d’une façon quel­conque une dif­fé­rence ou une dis­tinc­tion, sont frap­pés de nullité.

Sont excep­tés les droits et pri­vi­lèges rela­tifs à des tierces per­sonnes, qui sont confir­més ain­si que le demandent la jus­tice et l’équité.

III. Tous revê­ti­ront le même cos­tume et auront le même aspect extérieur.

IV. Pour le gou­ver­ne­ment de tout l’Ordre, de même qu’il n’y a qu’un seul Ministre géné­ral, il n’y aura qu’un seul Procureur, un seul Secrétaire, un seul Postulateur pour la cause des saints.

V. Désormais, tous ceux qui pren­dront régu­liè­re­ment l’ha­bit des Frères Mineurs, tous ceux qui pro­non­ce­ront les vœux simples ou solen­nels, seront sou­mis aux nou­velles Constitutions et à tous les devoirs qui en découlent.

Si quel­qu’un refuse de se sou­mettre à ces Constitutions, il lui est inter­dit de por­ter l’ha­bit reli­gieux, de pro­non­cer les vœux, de faire sa profession.

VI. Si une Province ne se sou­met pas à ces lois et pré­ceptes, aucun novi­ciat ne pour­ra y être éta­bli, et nul ne pour­ra y faire sa pro­fes­sion religieuse.

VII. On pour­ra, dans chaque pro­vince, réser­ver spé­cia­le­ment une ou deux mai­sons pour les reli­gieux dési­reux d’une plus haute per­fection et qui vou­draient s’a­don­ner à la vie dite contem­pla­tive. Ces mai­sons seront régies par les nou­velles Constitutions.

VIII. Si des reli­gieux ayant pro­non­cé leurs vœux solen­nels refusent, pour de justes motifs, d’accepter la dis­ci­pline éta­blie par cette lettre, ils pour­ront, avec l’a­gré­ment et sous l’autorité des évêques, se reti­rer dans cer­taines mai­sons de l’Ordre.

IX. Le droit de chan­ger les limites des pro­vinces ou d’en dimi­nuer le nombre, si la néces­si­té l’exige, appar­tien­dra au Ministre géné­ral conjoin­te­ment avec les Définiteurs géné­raux, après tou­te­fois qu’on aura deman­dé l’avis des Définiteurs de ces provinces.

X. Lorsque le Ministre géné­ral et les autres reli­gieux pré­po­sés jus­qu’à ce jour à l’administration de l’Ordre entier se seront tous démis de leurs charges, Nous vou­lons, pour le cas pré­sent, que la nomi­na­tion du nou­veau Ministre géné­ral dépende de Notre autorité.

Les Définiteurs géné­raux et ceux qui rem­plissent les charges plus impor­tantes, élus d’or­di­naire au Chapitre géné­ral de l’Ordre, seront dési­gnés cette fois par la Sacrée-​Congrégation des Evêques et Régu­liers, après qu’on aura deman­dé l’avis des Définiteurs géné­raux actuels.

En atten­dant, le Ministre géné­ral et les Définiteurs géné­raux con­tinueront à exer­cer leurs charges respectives.

Nous Nous réjouis­sons d’avoir pu, grâce à la Providence, consa­crer par un mou­ve­ment durable Notre pié­té et Notre dévo­tion ancienne envers le bien­heu­reux François, et Nous ren­dons à la bon­té divine de spé­ciales actions de grâces de ce que, en Notre extrême vieillesse, elle a bien vou­lu réser­ver cette conso­la­tion à la viva­ci­té de Nos désirs.

C’est avec bon espoir que Nous sup­plions et adju­rons tous les Frères Mineurs de se sou­ve­nir des exemples de leur grand fonda­teur ; que les mesures que Nous décré­tons pour leur bien com­mun ravivent l’ar­deur de leur zèle et leur amour de la vertu.

Qu’ils marchent digne­ment dans la voca­tion à laquelle ils ont été appe­lés, en toute humi­li­té et dou­ceur, arec patience, se sup­portent les uns les autres, avec cha­ri­té, atten­tifs à conser­ver l’u­ni­té d’es­prit et dans le lien de la paix [5].

Nous décré­tons que la pré­sente Lettre, avec tout ce qu’elle con­tient, ne pour­ra jamais être infir­mée ou cri­ti­quée pour cause de sup­pres­sion ou d’in­ter­po­la­tion ou pour manque d’intention de Notre part ou tout autre défaut.

Elle est et sera tou­jours valide et dans toute sa force, et devra être invio­la­ble­ment obser­vée in judi­cio et extra par toute per­sonne, quelle que soit sa digni­té ou sa prééminence.

Nous décla­rons vain et nul tout ce qui pour­ra être fait par qui que ce soit pour y intro­duire un chan­ge­ment quel­conque, en ver­tu de quelque auto­ri­té ou sous quelque pré­texte que ce soit, sciem­ment ou incons­ciem­ment, non­obs­tant toutes dis­po­si­tions contraires, même celles qui ont droit à une mis­sion spé­ciale, dis­po­si­tions aux­quelles, par la plé­ni­tude de Notre pou­voir, en par­faite connais­sance de cause et de Notre propre mou­ve­ment dans la mesure indi­quée par ce qui pré­cède, Nous déro­geons et décla­rons qu’il a été déro­gé expressément.

Nous vou­lons que les exem­plaires de cette Lettre, même impri­més mais signés de la main d’un notaire et munie du sceau par un digni­taire ecclé­sias­tique, fassent foi de Notre volon­té comme le ferait la pré­sente Lettre si on la mon­trait elle-même.

Personne n’au­ra donc le droit d’af­fai­blir ou de contre­car­rer témé­rairement cette Constitution en ce qu’elle dis­pose, unit, limite, déroge et com­mente. Si quel­qu’un ten­tait de le faire, qu’il sache qu’il encourt l’in­di­gna­tion du Dieu tout-​puissant et des bien­heu­reux apôtres Pierre et Paul.

Donné à Rome, auprès de Saint-​Pierre, le 4e jour des Nones d’octobre, l’an de l’Incarnation du Seigneur 1897, de Notre Pontificat le vingtième.

C. Card. Aloisi-​Masella Pro-​Datarius
A. Card. Macchi

Visa
De Curia I. De Aquila e Vicecomitibus

LocoPlumbi.

Reg. in Secret. Brevium.

I. Cugnonius

Notes de bas de page
  1. S. Th., 2a 2æ q. xxx­vii, art. 2 ad 3m.[]
  2. Vita secun­da, P. iii, ch. cxxi.[]
  3. Const. Ite et vos, le 4 des cal. de juin 1517.[]
  4. Ibid.[]
  5. Éphés., iv, 1–3.[]