N° 22 – Mars 2009
hère Madame,
Les Papes Pie XI et Pie XII ont insisté sur l’importance de l’éducation chrétienne « qui embrasse la vie humaine sous toutes ses formes : sensible, spirituelle, intellectuelle, morale, individuelle et sociale… pour l’élever, la régler, la perfectionner d’après les exemples et la doctrine du Christ. » (Pie XI dans son encyclique sur l’éducation chrétienne, que je vous invite à lire en entier).
L’enfant baptisé, en devenant membre de l’Eglise, fait partie du Corps mystique du Christ, et le germe de la Foi ayant été déposé dans son âme à l’instant où l’eau baptismale l’a engendré dans le Cœur de Dieu, Chère Madame, votre devoir est de faire grandir ce dépôt sacré dans l’âme de votre enfant. Vous devez lui apprendre à se conduire non seulement en chrétien, mais en « catholique ».
Alors qu’actuellement nous sommes dans un monde qui fait tout pour que l’homme se passe de Dieu, nous devons réagir et penser que toute éducation qui restreint ses vues à la vie purement naturelle de l’enfant, sans se préoccuper de sa destinée surnaturelle, doit être considérée comme déficiente et incomplète.
En quoi consiste la vie de chaque être humain, ou si vous préférez, la vie personnelle de l’homme ? Elle doit, sans conteste, passer par une maîtrise de soi.
C’est ce que vous devez enseigner à votre enfant, pas à pas, petitement, progressivement….. J’insiste beaucoup sur ce point, car le monde moderne influe tellement sur les enfants, même parfois sans que vous vous en rendiez compte, qu’il annihile et tue cette maîtrise en l’empêchant de se développer. Comment cela ? Tout simplement en remplaçant l’esprit de sacrifice qui « virilise » par les caprices qui affaiblissent la volonté au lieu de la faire progresser.
Pour cette raison, il faut, sans hésiter, corriger votre enfant, mais en agissant au bon moment, surtout pas à contretemps (selon votre humeur de l’instant) : il n’attend que cela au début pour savoir comment se diriger ou agir. Si, au contraire, vous le laissez faire au gré de ses caprices, vous le rendrez incapable, plus tard, d’agir autrement ; au lieu de le rendre fort contre ses mauvaises passions ou envies, et en acquiesçant sa façon de se comporter, vous affaiblissez sa volonté, et pire, vous ne lui apprenez pas à obéir à une volonté autre que la sienne. Et après que de fois j’entends ces paroles : « mon petit n’obéit pas et n’en fait qu’à sa tête ». A qui la faute ? Il vous appartient d’éveiller sa conscience entre le bien et le mal, pour lui permettre de se maîtriser dans ses actes et de refreiner ses envies, ses caprices en faisant, notamment, des sacrifices. Pour l’aider à se vaincre, dites-lui de faire cette action qui lui coûte en lui montrant le bon côté, combien cela vous fera plaisir et que c’est aussi pour l’amour de Jésus. Ainsi, vous éduquerez petit à petit sa volonté à désirer et rechercher le bien et à éviter de faire le mal. Il ne faut pas attendre l’âge de raison, en pensant que l’enfant ne comprend pas : c’est une erreur. Parlez au cœur de votre enfant dès la plus petite enfance. Quelle puissance d’action le Bon Dieu a mis dans le cœur des mamans, mais combien savent l’utiliser à bon escient.
Dans la maîtrise du corps, il faut commencer par des exercices sur les cinq sens externes au fur et à mesure que l’enfant en prend conscience et les découvre. C’est à vous de corriger les écarts et à lui inculquer comment bien les utiliser.
Quelques exemples pratiques vont illustrer mon propos :
Pour n’avoir pas repris l’enfant dès qu’il a été en âge de s’asseoir à table et s’y tient mal, que de difficultés après pour le redresser : il n’accepte plus la correction parce que jusqu’à présent, on l’a laissé faire ainsi à la maison. Bien sûr, il s’agit de le reprendre avec douceur mais aussi avec fermeté. C’est une œuvre de patience et de grande vertu pour la maman, car il faut recommencer tous les jours et à tous les repas, sans se lasser. Et c’est dur…, la persévérance est une chose difficile. C’est pourquoi il faut la demander chaque jour dans la prière.
De plus en plus je remarque combien la mauvaise tenue des enfants devient générale. N’est-ce pas l’habitude trop facilement accordée de se « vautrer » dans les fauteuils ou sur son lit qui engendre cette tenue ? Alors que lui expliquer comment s’asseoir en se tenant droit sans se coucher sur la table pour écrire, et j’en passe, est un moyen de l’éclairer pour qu’il devienne maître de son corps à son niveau. Mais ceci est la première étape dans l’éducation de la maîtrise du corps et elle est très négligée aujourd’hui. On s’en rend compte, notamment, dans la tenue des enfants à la Messe le dimanche ! L’enfant est souvent abandonné à lui-même, il gesticule dans tous les sens, se roule au sol, circule inutilement dans l’allée, monte éventuellement sur les bancs et la personne qui en a la charge laisse faire, alors qu’un regard ou un petit geste suffirait pour le retenir. Je ne doute pas que ce regard ou ce geste doit être renouvelé autant que nécessaire. (La persévérance et la patience de l’éducateur manquent trop souvent). Si l’exercice était de mise à la maison, l’enfant ne verrait aucun problème qu’il en soit ainsi à l’église, à l’école et dans d’autres lieux. Dans la tête de l’enfant il faut qu’il y ait une continuité, et que la même chose lui soit demandée partout. Sinon cela engendrera de la confusion dans les ordres reçus, et l’effort étant trop grand, il préfèrera revenir à « ses envies ou caprices » et vous l’aiderez à tort à l’enraciner dans sa volonté propre.
Je me rappelle que lorsque j’étais en classe primaire, nos maîtresses étaient assez sévères (entendez par là qu’elles faisaient usage de fermeté) en ce qui concerne le maintien. Pendant les cours, elles passaient dans les rangs pour redresser gentiment l’une ou l’autre qui s’était relâchée dans sa position. Car l’oubli de l’enfant n’est pas une faute : et la maman (ou l’éducateur-maître par exemple à l’école) est là pour le lui rappeler. Si cet exercice était fait dès le plus jeune âge, il n’y aurait pas autant de difficultés à réussir. L’enfant est plus docile quand il est petit, quel que soit son caractère. C’est à la maman que revient le rôle de faire acquérir cette docilité. La maman doit savoir perdre du temps au début, elle le regagnera par l’obéissance du petit. Croyez-moi, il est toujours plus aisé de travailler dans une terre vierge que dans un terrain parsemé de pierres et de ronces, comme de confectionner un habit dans un tissu neuf que de défaire un vêtement et récupérer le tissu pour en faire un autre. Ainsi en est-il de l’apprentissage de la maîtrise de soi. Former est plus aisé que réformer.
Un autre exemple : le langage. Apprenez à votre enfant qu’il y a des moments pour parler, et d’autres pour garder le silence. A table, ne pas parler tous en même temps, mais savoir écouter son voisin, ses parents, son petit frère. Lui faire comprendre qu’il doit attendre son tour. Quelle maîtrise ! Beaucoup trop d’enfants parlent sans cesse à tort et à travers et interviennent même dans des conversations qui ne les concernent pas. L’enfant parle parce qu’il a envie de dire quelque chose sans penser qu’une autre personne, adulte ou enfant, peut avoir également à s’exprimer.
Aussi, il est bon de faire patienter votre enfant pour lui apprendre à penser à son prochain,. à écouter, à être plus attentif à l’autre, à attendre (mais, si vous accédez à tous ses désirs, même parfois avant qu’il demande…, quel grand dommage vous lui faites).
Il en est de même pour les yeux. L’enfant veut tout voir et y est malheureusement habitué (les yeux trop libres et non guidés par la maîtrise de soi) Il est curieux de tout, à tel point qu’il devient incapable de combattre une curiosité qui serait négative et l’entraînerait au péché. Et cela est une des raisons de l’inattention de l’enfant dans son travail. La curiosité le distrait sans cesse de l’essentiel et le rend faible pour résister. Que de professeurs se plaignent dans toutes les classes à ce propos. Pour vous aider à comprendre un des motifs de l’inattention de votre enfant, je vous invite à lire un petit livre qui vient de paraître (La télévision ou le péril de l’esprit d’Isabelle Doré – chez Clovis).
Si vous n’apprenez pas ces petites choses essentielles, votre enfant souffrira – dans son adolescence et plus tard – de rencontrer de grandes difficultés à contrôler ses sens externes. Il faut commencer par cette maîtrise, afin de continuer ce même travail sur les facultés internes que sont l’intelligence et la volonté.
Chère Madame, que la Très Sainte Vierge Marie vous accompagne dans cette immense tâche auprès de votre enfant surtout dans ce monde où tout est axé vers un matérialisme effréné qui dénature le développement normal et harmonieux de la vie sensible de l’enfant par ces excès incontrôlés.
(à suivre)
Une Religieuse.