Pie XII

260ᵉ pape ; de 1939 à 1958

8 décembre 1939

Instruction visant certaines cérémonies pratiquées en Chine

La dif­fi­cile ques­tion des rites chi­nois qui sou­le­va de longues contro­verses au XVIIIe trouve un abou­tis­se­ment tar­dif dans la pré­sente instruction.

L’on sait par­fai­te­ment qu’en Extrême-​Orient, cer­taines céré­mo­nies autre­fois liées à des rites païens n’ont plus aujourd’hui, par suite des chan­ge­ments appor­tés par les siècles dans les mœurs et les idées, qu’une signi­fi­ca­tion pure­ment civile de pié­té envers les ancêtres, d’amour pour la patrie, ou de poli­tesse dans les rap­ports sociaux.

C’est pour­quoi cette Sacrée Congrégation de la Propagande a don­né en 1935 et en 1936, avec l’approbation du Souverain Pontife Pie XI d’heureuse mémoire, aux Ordinaires de Mandchourie et de l’empire japo­nais, confor­mé­ment au canon 22 du Code de droit cano­nique, de nou­velles règles mieux adap­tées à la situa­tion actuelle.

Récemment, dans leur réunion plé­nière du 4 de ce mois de décembre, les émi­nen­tis­simes Pères, membres de cette même Congrégation de la Propagande, ont exa­mi­né la ques­tion de savoir s’il n’y avait pas lieu d’adopter la même façon d’agir dans les pays où l’on consta­tait que le temps avait pro­duit les mêmes chan­ge­ments de situation.

Après avoir pesé atten­ti­ve­ment le pour et le contre et deman­dé l’avis des per­sonnes pru­dentes et expertes, les émi­nen­tis­simes Pères ont déci­dé de faire les décla­ra­tions suivantes :

1. Etant don­né qu’à plu­sieurs reprises le gou­ver­ne­ment chi­nois a expli­ci­te­ment pro­cla­mé que cha­cun est libre de pro­fes­ser la reli­gion de son choix et qu’il n’a aucu­ne­ment l’intention de por­ter des lois ou des ordon­nances en matière reli­gieuse et que, par consé­quent, les céré­mo­nies pres­crites ou accom­plies par les auto­ri­tés publiques en l’honneur de Confucius n’ont pas pour but de rendre un culte reli­gieux, mais uni­que­ment de pro­mou­voir et de rendre l’honneur qui convient à un per­son­nage illustre, ain­si que l’hommage dû aux tra­di­tions des ancêtres, il est per­mis aux catho­liques d’assister aux céré­mo­nies qui s’accomplissent devant l’image ou la tablette de Confucius, dans les monu­ments éle­vés en son hon­neur ou dans les écoles.

2. C’est pour­quoi il n’est pas défen­du de pla­cer dans les écoles catho­liques, sur­tout si les auto­ri­tés l’ordonnent, l’image de Confucius ou la tablette qui porte son nom, ni de la saluer d’une incli­na­tion de tête. Si jamais l’on crai­gnait le scan­dale, le catho­lique aura soin de décla­rer la droi­ture de son intention.

3. On peut admettre que les fonc­tion­naires et les élèves catho­liques, ayant reçu l’ordre d’assister à des céré­mo­nies publiques qui paraissent être des actes de super­sti­tion, y assistent pour­vu que, confor­mé­ment au canon 1258, ils se com­portent d’une manière pas­sive et ne par­ti­cipent qu’à l’hommage qu’on peut, à bon droit, regar­der comme pure­ment civil. Ils décla­re­ront, comme plus haut, leur inten­tion, chaque fois que la chose paraî­tra néces­saire pour écar­ter toute fausse inter­pré­ta­tion de leur geste.

4. On tien­dra pour licites et hon­nêtes les incli­na­tions de tête et autres mani­fes­ta­tions de res­pect civil devant les défunts ou les images des défunts et même devant la tablette qui porte le nom du défunt.

D’autre part, les émi­nen­tis­simes car­di­naux consi­dé­rant que le ser­ment sur les rites chi­nois impo­sé par la consti­tu­tion Ex quo sin­gu­la­ri (11 juillet 1742) du pape Benoît XIV, à tous les prêtres « dans l’empire chi­nois, les royaumes et les pro­vinces proches ou limi­trophes » ne concorde pas par­fai­te­ment avec les normes récentes édic­tées par cette Sacrée Congrégation, et qu’en outre ce ser­ment est deve­nu aujourd’hui, comme moyen dis­ci­pli­naire, abso­lu­ment super­flu, du fait qu’ont ces­sé, comme cha­cun sait, les vieilles contro­verses sur les rites chi­nois et que du reste les mis­sion­naires et les autres prêtres n’ont nul­le­ment besoin de la contrainte d’un ser­ment pour obéir promp­te­ment et filia­le­ment au Saint-​Siège, ont déci­dé de sup­pri­mer l’obligation de ce ser­ment, par­tout où il était en usage soit en Chine, soit ailleurs. Les autres pres­crip­tions du Souverain Pontife Benoît XIV qui n’ont pas été modi­fiées par des ins­truc­tions plus récentes, par-​dessus tout celle qui défend de dis­cu­ter la ques­tion des rites chi­nois, res­tent en vigueur.

A l’audience du 7 décembre 1939, ces déci­sions des émi­nen­tis­simes cardi­naux ont été sou­mises, par le car­di­nal sous­si­gné pré­fet de la Propagande, à notre Saint-​Père le pape Pie XII. Sa Sainteté a dai­gné les approu­ver toutes et les ratifier.

Source : Documents Pontificaux de S. S. Pie XII, Edition Saint-​Augustin Saint-​Maurice – D’après le texte latin des A. A, S., XXXII, 1940, p. 24 ; cf. la tra­duc­tion fran­çaise des Actes de S. S. Pie XII, t. II, p. 296.