Première station : Jésus est condamné au tribunal de Pilate.
Innocent, Jésus est condamné à mort. Les juifs, Pilate, Hérode, la foule : tous ne font plus qu’un pour condamner Jésus. Et pourtant tous proclament son innocence. Judas lui-même avoue avoir livré le sang innocent.
C’est qu’au-delà des condamnations humaines, il est une autre réalité, toute divine. Le Christ ainsi livré n’est pas seulement victime, Il est surtout celui qui se donne, librement, d’une volonté pleine et entière. On ne lui enlève pas la vie, Il la livre : « Ma vie, nul de me l’ôte, c’est moi qui la donne ». Il est l’acteur principal de ce sacrifice, Il est prêtre ! Prêtre, Il donne sa vie pour le salut du monde, en rémission des péchés de tous : Ecce Agnus Dei, ecce qui tollit peccata mundi. Ainsi s’accomplit le sacrifice, là est le cœur du sacerdoce de Notre Seigneur Jésus-Christ. Prêtre, il sauve le monde.
O Jésus souverain Prêtre, nous Vous prions pour tous vos prêtres, afin que chacun d’eux se donne toujours plus à Vous, pour le salut du monde. Nous vous prions aussi pour que beaucoup de jeunes s’enthousiasment de votre sacerdoce qui sauve le monde ; qu’ils se donnent à Vous, pour qu’en eux Vous puissiez perpétuer ici-bas votre sacerdoce.
Deuxième station : Jésus est chargé du bois de la Croix.
« Mon Père, s’il est possible, que ce calice passe loin de moi ; cependant, non pas comme je le veux, mais comme vous le voulez. » Après s’être renoncé lui-même, voici que le Christ porte sa Croix. Il se donne non seulement en paroles, mais en actes : Il porte sa Croix jusqu’à l’ultime dénouement.
« Ce n’est pas ceux qui disent « Seigneur, Seigneur », mais ceux qui font la volonté de mon Père qui entreront dans le Royaume des Cieux » (Mt 7, 21). Pour avoir ainsi accompli la volonté concrète de son Père, Jésus nous ouvre les portes du Ciel.
O Jésus souverain Prêtre, nous Vous prions pour ceux qui ont l’honneur de Vous suivre dans le sacerdoce. Vous en avez fait les amis de la croix, et nous savons que parfois vous ne les ménagez pas. Nous vous prions, afin que toujours ils puisent dans votre amour la force d’embrasser la croix. Nous Vous le demandons, car de leurs croix offertes dépend notre pardon, de leur don concret d’amour dépend notre salut.
Troisième station : Jésus tombe une première fois.
Accablé en son humanité par une longue nuit d’agonie et d’ignominie, Notre Seigneur tombe. Il n’apparaît plus comme le Dieu fort et puissant, mais dans la fragilité humaine qu’Il a voulu revêtir. Loin de l’aider, les bourreaux se déchaînent, et à coups redoublés le forcent à se relever.
Parce qu’il demeure un homme, le prêtre aussi peut parfois tomber. Fils d’Eve, n’a‑t-il pas hérité tout autant que moi des blessures de l’humanité déchue ?
O Jésus souverain Prêtre, donnez-moi de ne jamais me comporter comme vos bourreaux, de ne jamais critiquer le prêtre fragilisé, de ne jamais l’accabler sous les coups acerbes de ma langue si souvent médisante. Loin d’épier sa chute d’un instant ou de m’arrêter à considérer ses défauts, donnez-moi de toujours contempler en lui votre visage. C’est pour moi que tous les jours il donne sa vie.
Quatrième station : Jésus rencontre sa Très Sainte Mère.
O Jésus, en ce long chemin de croix, Vous vous êtes associé Notre-Dame, votre très sainte Mère. Elle est là, au bord du chemin, sur votre route ; mais aussi sur la route de tout prêtre, l’accompagnant sur le long chemin de sa vie sacerdotale. Car vous l’avez associée à tout prêtre : « Femme, voici ton Fils », lui avez-vous dit en désignant saint Jean, tout jeune prêtre. « Et celui-ci la prit chez lui. » Qui dira l’intimité spirituelle existant entre Notre-Dame et le prêtre ?
O Jésus souverain Prêtre, par vos mérites et ceux de votre Très Sainte Mère, nous Vous demandons pour tous vos prêtres non seulement une chasteté de corps, mais plus encore une chasteté de cœur, une virginité d’âme à l’instar de Notre-Dame. Apprenez-nous à respecter cette virginité d’âme, à ne pas nous accaparer le prêtre par une affectivité simplement humaine. Car c’est dans leur chasteté d’âme qu’ils fécondent Dieu dans les pauvres fils d’Ève.
Cinquième station : Simon de Cyrène aide Jésus à porter la Croix.
Jésus-Christ ne voulut pas être seul à porter sa croix. Quoique seul Rédempteur, Il s’est fait aider par Simon de Cyrène. De même, Notre-Seigneur n’a pas voulu laisser seul le prêtre dans le magnifique accomplissement de sa tâche sacerdotale. A beaucoup d’âmes non consacrées, il propose d’être des Simon des Cyrène, des âmes qui à leur place participeraient spirituellement, et pourquoi pas matériellement, au grand mystère confié au prêtre, celui de la Rédemption. A ces âmes, il est simplement demandé d’être données intérieurement, et parfois extérieurement dans la dépendance du prêtre.
O Jésus souverain Prêtre, montrez-nous la beauté de notre devoir d’état de père ou de mère de famille, d’étudiant ou d’enfant ; à le vivre fidèlement par amour de l’Église et pour le salut des âmes. Ainsi nous deviendrons des Simon de Cyrène, secondant spirituellement le prêtre dans son œuvre sanctificatrice. Donnez-nous aussi de savoir l’aider concrètement, à chaque fois que le besoin s’en fera sentir.
Sixième station : Sainte Véronique essuie la Face de Jésus.
Le sang, les coups et la poussière défigurent la face de Jésus. A sa place, à sa manière, Véronique vole au secours de Jésus. Et le miracle s’accomplit, son voile est marqué de la divine effigie.
Souvent, le visage de l’Église est comme défiguré par les insultes et outrages que ses ennemis lui assènent sans vergogne, parfois même de l’intérieur. A l’image de sainte Véronique, ayons un grand amour de l’honneur de l’Église, de l’honneur du sacerdoce ; quoiqu’il en soit de la faiblesse des hommes. L’ardeur que nous mettrons à défendre cet honneur nous fera découvrir la beauté de l’Église en sa divine splendeur.
Septième station : Jésus tombe une deuxième fois.
Jésus, à nouveau, tombe. La foule crie. Cette meute de chiens hurlants semble se repaître de son sang. Ils ne savent pas que bientôt, les prêtres consacreront quotidiennement le sang du Christ, in remissionem peccatorum. Et nombre de ces chiens d’aujourd’hui, une fois convertis, viendront boire de ce sang, mais dans l’humilité du repentir. Ainsi ils obtiendront la vie éternelle, par le ministère du prêtre : « Celui qui mange ma chair et bois mon sang à la vie éternelle ».
Beaucoup crient aujourd’hui contre la papauté et le sacerdoce. Beaucoup croient l’Église arrivée à sa décisive agonie, et s’en réjouissent. Mais parmi tous ceux-là, plusieurs se laisseront finalement vaincre par le mystère d’amour de la croix rédemptrice. « Seigneur, pardonnez-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». En effet, « Ils nous croient mourants, alors que nous sommes plein de vie ; ils nous tiennent pour tristes, quand nous sommes toujours joyeux ; comme n’ayant rien, tandis que nous possédons tout » (2 Co 6, 10).
O Jésus, Souverain Prêtre, ouvrez leurs yeux, guérissez la cécité de leur cœur, et par la puissance de votre croix, ramenez-les à la vraie foi.
Huitième station : Les filles de Jérusalem pleurent sur Jésus
Jésus console les filles de Jérusalem : « Ne pleurez pas sur moi, mais sur vous et vos enfants. Car si l’on traite ainsi le bois vert, qu’en sera-t-il du bois sec ? » Jésus console : « Ne pleurez pas » ; mais Jésus est clair en ses menaces, en ses appels à la componction : « Pleurez sur vous et vos enfants, car si l’on traite ainsi le bois vert, qu’en sera-t-il du bois sec ? »
O Jésus Souverain Prêtre, donnez à tout vos prêtres autant de douceur que de fermeté face à l’erreur et au mal ; alliez en eux bonté et vérité, qu’ils soient embrasés de foi et consumés de charité. D’eux, vous avez fait nos guides et nos pasteurs pour parvenir jusqu’au Ciel. Faites que nous sachions reconnaître votre voix à travers la leur, et quand Vous parlez, Vous obéir à travers eux.
Neuvième station : Jésus tombe une troisième fois.
Plus que les douleurs physiques, ce sont les souffrances morales de l’agonie qui ont le plus affaibli Jésus. Et, au sortir de la ville, tandis que déjà apparaît le Golgotha, Notre-Seigneur tombe à nouveau.
Qui dira les souffrances secrètes du prêtre, les tentations du désert et de la solitude ? Celles où le prêtre, souffrant profondément des péchés ou de la médiocrité de son peuple, est assailli par le démon du découragement ?
O Jésus, c’est pour chacun d’eux que nous Vous prions. Sans nous en rendre compte, nous sommes la cause de leurs souffrances. Nous les savons aussi en butte à la haine toute particulière et ô combien insidieuse du démon. Faites que jamais ils ne se lassent ni ne se découragent, mais qu’ils nous mènent jusqu’au sommet du Golgotha, c’est-à-dire au sommet de l’amour divin.
Dixième station : Jésus est dépouillé de ses vêtements.
O Jésus souverain Prêtre, en cette station, nous vous demandons bien sûr pardon pour ces prêtres qui se sont rendu indignes du sacerdoce, qui par leurs mauvaises mœurs sont devenus objet de scandale et non plus de Rédemption.
Mais en cette station, nous venons aussi prier pour tous les prêtres dont on méprise la dignité sacerdotale, pour tous ceux qui sont persécutés, pour tous ceux qui, quelquefois du fond de leur prison, offrent en union avec vous l’extrême dénuement extérieur auquel on les a réduits. Seigneur, dans l’excès de leurs tribulations, gardez-les forts, gardez-les saints. Ils sont la gloire de votre sacerdoce, gardez-les sans tache.
Onzième station : Jésus est cloué à la Croix.
Jésus est attaché à la Croix. Désormais, le prêtre et la croix sont inséparables. Le prêtre est l’homme de la croix. A la suite de saint Paul, ils redisent chacun en eux-mêmes : « Pour moi, je complète en ma chair ce qui manque à la Passion du Christ pour son Corps qui est l’Église. »
O Jésus Souverain Prêtre, donnez-nous de marcher à leur suite et à votre suite en cette voie royale de la croix. Apprenez-nous, à l’exemple de vos prêtres, à ne pas faire de la croix une réalité négative, pesante et aride, mais un instrument de don et d’amour, de victoire et de Rédemption. Donnez-nous, jusque dans nos croix, une vraie fierté de votre croix !
Douzième station : Jésus meurt sur le bois de la Croix.
« Mon Père, je remets mon âme entre vos mains. Puis, poussant un grand cri, Jésus rendit l’esprit. »
« Si le grain ne meurt, il demeure seul. Mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruits » (Jn 12, 24). O Jésus Souverain Prêtre, par les mérites infinis de votre mort, nous venons Vous demander en cette station la grâce de nous donner très nombreuses vocations religieuses et sacerdotales. Sans prêtres nous ne sommes rien, sans prêtres nous ne pouvons rien pour notre salut. Donnez à l’Église de saints prêtres capables d’embraser le monde ; donnez à beaucoup d’âmes la soif de la vie consacrée, afin qu’elles deviennent autant d’auxiliaires du prêtre dans l’œuvre de la Rédemption.
Et si vous donnez à ma famille la grâce de choisir un de ses membres pour qu’il Vous soit consacré, que ce soit comme prêtre, comme frère, ou comme religieuse, déjà je Vous l’offre tout entier, et Vous remercie de cet immense honneur qu’ainsi Vous donnerez à ma famille.
Treizième station : Jésus est descendu de la Croix et remis à sa Mère.
Descendant le corps de la croix pour le remettre à sa mère, Nicodème n’ose lui prononcer la terrible parole : « Voici ton fils », même si hélas la terrible réalité est là. Mais elle n’est pas que là. « Voici ton fils » : cette parole, elle l’a entendue, mais de la bouche de Jésus. Elle désignait saint Jean, prêtre depuis la veille. Quoique mort, et avant même sa résurrection, Jésus n’a donc pas totalement quitté sa très sainte Mère. La présence agissante et aimante de Jésus auprès d’elle se perpétuera désormais à travers le prêtre, à travers tout prêtre ; pour la très sainte Vierge, qui jour après jour communiera de la main de saint Jean, comme pour nous tous.
« Voici ton fils » : à juste titre, Marie peut être appelée Mère du sacerdoce. Au jour de l’Incarnation, son sein virginal fut la cathédrale de la première ordination sacerdotale. Or celle-ci ne s’est accomplie que par son oui. A cet instant, l’humanité sainte conçue en son sein fut revêtue du sacerdoce souverain. Tous les prêtres du monde ne font que participer à cet unique sacerdoce. Marie, arche d’alliance, s’est donc vue confiée le sacerdoce du Nouveau Testament, chacun des prêtres : « Voici ton Fils ».
Les longues années qui la séparent encore de l’Assomption, Marie va les consacrer à prier pour l’Église et pour ses fils de prédilection, les prêtres. O Marie, Notre-Dame du Clergé, en cette station nous nous associons à votre prière pour les prêtres, plus spécialement pour ceux à travers qui la présence aimante et sanctifiante de Jésus a œuvré en nous.
Quatorzième station : Jésus est descendu de la Croix et mis au tombeau.
Dans leur prétention, les hommes placent des gardes au tombeau, pour que Jésus mort ne revienne pas à la vie. Dans son amour, Jésus aussi place ses gardes, afin que plus jamais sa présence vivifiante ne meure sur cette terre. Le prêtre est le gardien de la présence de Dieu sur terre, gardien du tabernacle, gardien de Jésus caché au plus profond de l’âme en état de grâce. Par le prêtre, grâce au prêtre, s’accomplit cette magnifique parole de Jésus : « Et voici que je suis avec tous les jours, jusqu’à la fin des temps ».
Ô Jésus, je ne voudrais pas quitter ce chemin de croix, où s’est accompli votre acte sacerdotal par excellence, sans vous remercier pour votre sacerdoce, sans vous remercier de nous avoir donné vos prêtres. Dans le cœur-à-cœur avec vous, Jésus, c’est aussi eux que secrètement que je voudrais remercier. Sans votre sacerdoce perpétué en eux, c’est moi qui aujourd’hui serais enseveli dans le plus profond tombeau de ma puante misère.
Ô Jésus, merci ! Donnez-nous de saints prêtres, donnez-nous beaucoup de saints prêtres, donnez-nous toujours plus de saints prêtres et de saintes vocations religieuses.
Abbé Patrick de la Rocque, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X
Source : La Porte Latine d’avril 2020