Mes bien chers amis,
Mes bien chers frères,
Nous nous réjouissons aujourd’hui et nous rendons grâces à Dieu, avec le cher M. l’abbé Carandino, à l’occasion de sa première messe solennelle. Il est bien juste que les séminaristes et que les prêtres chargés du séminaire se réjouissent. Le séminaire n’est-il pas fait pour faire des prêtres, de saints Prêtres.
Une ordination sacerdotale au séminaire, une première grand’messe, c’est vraiment l’aboutissement des études, l’aboutissement des efforts faits par les séminaristes pour devenir prêtre. On ne peut que s’en réjouir. Et pour vous, bien chers fidèles, que seraient les paroisses sans prêtre, sinon des paroisses mortes.
Vous attendez vous aussi des prêtres. Car vous avez besoin de ces intermédiaires entre Dieu et vous-mêmes : Sacerdos sacras res dat : (Le prêtre est) celui qui donne les Choses saintes.
Alors vous vous réjouissez aussi et à juste titre d’assister à ces ordinations et à participer à cette première grand’messe de ce cher M. l’abbé Carandino.
Pour vous, bien cher ami, je vous invite à cette occasion, à jeter un regard sur le passé, afin de rendre grâces au Bon Dieu de tout ce qui a préparé votre vocation, de tout ce qui a préparé ce jour de votre première messe solennelle.
Si quelqu’un peut se rendre compte de toutes les grâces reçues, c’est bien vous-même. Vous pouvez repasser les années depuis votre enfance, votre adolescence, votre chère famille chrétienne ici présente, vos parents, vos frères et sœurs. Les occasions qui vous ont été données de sentir en vous l’appel du Bon Dieu. Et puis un jour de vous sentir appelé à venir à Écône.
Que de grâces au cours de toutes ces années et à travers sans doute bien des hésitations, bien des épreuves, eh bien vous voici arrivé au but que vous avez recherché, particulièrement au cours des années passées au séminaire. Nous vous félicitons. Nous rendons grâces au Bon Dieu avec vous aujourd’hui d’une manière tout à fait profonde, d’une manière émue.
Mais si le sacerdoce et la première messe sont un but, c’est aussi un commencement. Désormais, laissant le passé au Bon Dieu et à sa Providence, vous devez regarder vers le futur. Alors si je puis à l’occasion de cette première messe, vous donner quelques conseils, vous donner quelques indications sur ce que vous allez rechercher et sur ce que vos professeurs, vos directeurs vous ont orienté au cours du séminaire, tout cela se résume en cette phrase, en cet adage : Sacerdos alter Christus : Le prêtre est un autre Christ. Alors demandons-nous ce qu’est Jésus-Christ, ce qu’est le Christ.
Eh bien, j’insisterai sur cette notion fondamentale de Notre Seigneur Jésus-Christ : Médiateur.
Notre Seigneur Jésus-Christ est le Médiateur. Les hommes avaient rompu avec Dieu. Dieu n’a pas voulu que cette rupture soit définitive. Dieu n’a pas voulu que ceux qu’il avait créés pour sa gloire ; que ceux qu’il avait créés pour leur bonheur soient définitivement éloignés de Lui. Alors Il s’est proposé, dans sa charité immense, dans sa miséricorde infinie, Il a voulu être ce Médiateur.
Aucun parmi les hommes ne pouvait être médiateur. Nous étions tous cette massa damnata, comme dit saint Paul, cette foule condamnée par notre faute. Et nous ne pouvions plus devenir ces médiateurs vis-à-vis de Dieu. Nous ne pouvions plus retrouver le chemin qui conduisait à Dieu. Seul Dieu Lui-même pouvait le faire.
Et alors, Il a réalisé ce mystère inconcevable, ce mystère qui est pour nous l’occasion d’actions de grâces incessantes, mais qui est le scandale pour ceux qui ne veulent pas croire : Dieu s’est fait homme. Oui, Il s’est incarné.
Toute cette liturgie de l’Avent nous prépare à ce rappel de l’Incarnation de Notre Seigneur. L’Ange dit à Marie : « Oui, un fils naîtra de vous et vous l’appellerez Jésus ». Vous l’appellerez Jésus, c’est-à-dire le Sauveur. Le Sauveur, il n’y en a pas d’autre. C’est-à-dire le Médiateur, Celui qui va faire le pont entre l’humanité et Dieu. Notre Seigneur est donc, par essence même, le Médiateur. Et il ne peut pas y en avoir d’autres. Puisqu’il réunit en une même Personne et la nature humaine et la nature divine. Ce lien intime dans la Personne de Notre Seigneur Jésus-Christ de l’humanité et de la divinité en fait le Médiateur-né, de toute l’humanité vis-à-vis de Dieu.
Et Il a voulu nous manifester cette médiation, d’une manière toute particulière dans son Saint Sacrifice du Calvaire s’offrant Victime à son Père pour le rachat de nos âmes.
Et voilà ce qu’est le prêtre : Sacerdos alter Christus. Le prêtre est donc lui aussi un médiateur, grâce à la médiation de Notre Seigneur Jésus-Christ, participant à la médiation de Notre Seigneur JésusChrist, il va devenir lui aussi un Pontife, celui faisant le pont entre l’humanité et Dieu.
De même qu’il ne peut pas y avoir de salut en dehors de Notre Seigneur Jésus-Christ qui est le seul Médiateur ; de même désormais il ne pourra pas y avoir de salut sans passer par les prêtres chargés de communiquer le salut aux âmes. C’est du moins la voie normale et ordinaire que Jésus a voulue. C’est Lui qui a fondé le sacerdoce.
C’est lui qui a voulu s’associer et se choisir des hommes pour en faire des prêtres, pour qu’ils soient médiateurs et qu’ils continuent l’œuvre qu’il a commencée ici-bas.
Et vous allez la continuer, bien cher ami, vous allez la continuer surtout, par le Saint Sacrifice de la messe. De même que Notre Seigneur s’est offert sur la Croix pour le salut des âmes, eh bien, vous montez à l’autel pour continuer ce Sacrifice et répandre les grâces du Calvaire sur les âmes.
Car il n’y a qu’un médiateur, nous, nous ne sommes que des participants au Médiateur. Nous ne sommes pas essentiellement médiateurs, nous ne pouvons pas l’être. Ce n’est que par la grâce de Notre Seigneur que nous participons à sa médiation, par la grâce du sacerdoce, par le caractère sacerdotal qui nous est donné.
Alors, ce sera dans l’avenir, votre rôle. Quel rôle sublime, extraordinaire. Que le Bon Dieu veuille bien se choisir des personnes qui participent à sa médiation ; qui participent d’une certaine manière aussi, à son seul Sacerdoce ; qui participent à sa royauté ; qui participent à sa sainteté afin de répandre les dons du salut, les dons de sanctification, aux âmes.
C’est cela qui sera votre préoccupation désormais : sauver les âmes. Notre Seigneur a dit que sans le baptême de l’eau et de l’Esprit, personne ne peut rentrer dans le royaume des Cieux. Alors vous baptiserez ; vous ferez ce que les apôtres ont fait tout de suite après la Pentecôte : ils ont baptisé ; ils ont sanctifié les âmes ; ils les ont unies à Notre Seigneur Jésus-Christ ; ils leur ont communiqué la vie divine, la vie de la grâce.
Et c’est cela qui compte. Et c’est en cela qu’il faut avoir la foi. La foi dans la médiation et dans l’unique médiation et dans l’unique Médiateur. Et donc il faut que (le prêtre) ait confiance dans la grâce de la Rédemption obtenue par Notre Seigneur Jésus-Christ. Et qu’il ait confiance que cette grâce sauve les âmes ; que cette grâce transforme les âmes, communique la vie divine aux âmes.
Dès lors que l’on n’a plus la foi, ni dans l’unique Médiateur qui est Notre Seigneur Jésus-Christ, ni dans la grâce que Notre Seigneur Jésus-Christ est venu apporter pour nous sauver et les moyens par lesquels Il nous communique cette grâce, alors on recherche des moyens humains, purement humains, des moyens inventés par les hommes pour soi-disant sauver les hommes. C’est une grave erreur. Ce sont des moyens qui n’en sont pas, qui sont hors des moyens prévus par la Providence de Dieu.
Mais si au contraire nous avons vraiment la foi dans ce Médiateur unique et dans tous les moyens qu’il a prévus pour sauver les âmes, alors quel que soit le résultat de nos efforts ; quel que soit le succès de notre apostolat, nous savons que nous réalisons la volonté du Bon Dieu. Nous savons que nous continuons l’apostolat de Notre Seigneur Jésus-Christ. Et que seul Il peut ressusciter les âmes, seul Il peut sanctifier les âmes. Et c’est cela qui fait aujourd’hui la consolation des prêtres qui ont gardé encore la foi.
Bien malheureux sont les prêtres qui ne croient plus à l’évangélisation telle que Notre Seigneur l’a prévue et telle qu’il l’a voulue. Qu’ils ne croient plus aux moyens de sanctification que Notre Seigneur Jésus-Christ a institués, c’est cela qui fait toute la crise de l’Église.
C’est cela qui fait la différence entre ceux qui n’ont plus la foi en Notre Seigneur et ceux qui l’ont gardée, comme nous voulons la garder ; comme nous supplions Dieu de nous la garder, pour le bien des âmes, pour le salut des âmes.
Tout au cours des dernières décades nous avons pu voir et nous lisions encore ces dernières semaines au réfectoire, sur cette crise du clergé. Nous voyons le prêtre abandonner sa foi dans le salut voulu par Notre Seigneur Jésus-Christ et par les moyens que Notre Seigneur Jésus-Christ a institués. C’est le fond de la crise que nous vivons aujourd’hui.
Ah ! gardons la foi en Notre Seigneur Jésus-Christ ; gardons la foi en cet unique Sauveur.
Unus Mediator Jésus Christus
Unus Salvator Jésus Christus
Unus Magister Christus
Voici ce que nous devons penser, voilà ce que nous devons garder profondément dans nos âmes afin de faire un ministère fructueux, un ministère fécond en union avec Notre Seigneur Jésus-Christ. C’est cela que les fidèles attendent de nous. C’est cela que les séminaires doivent réaliser : cette union profonde à Notre Seigneur Jésus-Christ qui est notre Tout ; sans Jésus nous ne pouvons rien. Il l’a dit Lui-même : Quia sine me nihil, potestis facere (Jn 15,5), dit Notre Seigneur. Alors ayons confiance en Lui.
Et malgré les difficultés dans lesquelles l’apostolat de nos jeunes prêtres se réalise aujourd’hui, eh bien, bien chers amis, vous aurez des consolations. Il y a encore de belles âmes. Il y a encore des âmes qui cherchent à être unies au Bon Dieu. Il y a encore des âmes qui ont la foi. Et cela vous consolera. Cela vous aidera vous-même, à vous maintenir dans cette foi qui vous a été enseignée ici au séminaire et, dans ce désir de sainteté et de sanctification si nécessaire aux prêtres.
Enfin nous vous remettons à la très Sainte Vierge Marie, Médiatrice aussi : Marie Médiatrice, c’est par elle que toutes les grâces qui vont descendre sur les fidèles par vos mains, par vos paroles désormais, paroles des sacrements, paroles du Saint Sacrifice de la messe, toutes ces grâces qui vont descendre sur les fidèles, viendront par Marie.
Alors ayez confiance en la très Sainte Vierge Marie, tournez vos regards vers elle et elle vous aidera à accomplir un bel apostolat.
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.