Lettre aux parents, amis et bienfaiteurs
Pour lire toute la lettre : nouvelles, activités, projets !
Editorial de l’abbé Bernard de Lacoste
Voyage fantastique dans la vraie vie
Il y a quelques mois, raconte Le Figaro du 28 février dernier, des parents américains se sont lancés dans une aventure bouleversante : ils ont décidé de vider leur maison de tous les écrans : télévisions, ordinateurs, consoles de jeu, iPod, smartphones, etc., afin de voyager avec leurs enfants dans la vraie vie. Les débuts ont été extrêmement difficiles pour Anni, 18 ans, Bill, 15 ans, et Sussy, 14 ans. Le sevrage des adolescents fut comparable à la cure de désintoxication suivie par les toxicomanes, tant les liens de dépendance avec les écrans étaient
tenaces. Trois mois plus tard, quels étaient les résultats ?
Les professeurs ont noté une nette amélioration des résultats scolaires des adolescents, explicable par trois raisons : d’abord, la capacité d’attention des enfants s’est développée de façon spectaculaire. Ensuite, la disparition des écrans a mis fin à un gaspillage de temps considérable, pour donner plus de temps à l’étude personnelle et à la saine détente. Enfin, les enfants étaient moins fatigués pendant les cours. En effet, les scientifiques ont montré pourquoi l’abus d’écran perturbe le sommeil et engendre une fatigue chronique : la dopamine est une hormone sécrétée pour induire le sommeil. Or, le rayonnement émis, par les diodes des écrans peut interrompre la fabrication de la dopamine. Voilà pourquoi ceux qui regardent un écran avant de se coucher ont du mal à s’endormir.
La mère de famille s’est réjouie de cette expérience. N’ayant plus d’ordinateur, elle a noté au stylo sur une feuille de papier : « Mes enfants sont devenus capables de lire pendant des heures et non plus des minutes, d’avoir des conversations plus longues avec des adultes et de se projeter au-delà du moment présent. L’un a repris avec passion l’étude de son instrument de musique, l’autre dont la chambre était un bac à linge sale géant a retrouvé le sens de l’ordre, la troisième se mit à cuisiner et à écrire un roman ». La vie de la famille s’en trouva également bouleversée : « Nous sommes plus proches les uns des autres », affirma l’aînée de la fratrie. Par exemple, ils ne fuyaient plus les repas pour retourner dans leur bulle multimédia mais s’attardaient à table pour discuter. Enfin, ils se mirent à fréquenter leurs amis pour de vrai, ce qui n’est pas anodin : des études montrent en effet que les neurones dédiés aux rapports humains des individus qui ont grandi avec les nouvelles technologies sont souvent sousdéveloppés, si bien qu’ils ont des carences dans certaines aptitudes sociales telles que l’écoute compréhensive du prochain.
Nous voulons ajouter un dernier bienfait de cette expérience originale. Si nous voulons nous livrer à une activité intellectuelle profonde, et plus encore si nous cherchons à élever notre âme vers Dieu dans la prière, alors il est indispensable de résider dans la vraie vie, c’est-à-dire d’éteindre écrans et téléphones portables. C’est la condition nécessaire à toute vie intérieure digne de ce nom. Les nouvelles technologies ont fabriqué une humanité spirituellement appauvrie parce que l’homme ne parvient plus à en être le maître. Vivant à la surface de son âme, prêt à répondre au premier signal de son portable, il est devenu incapable de se concentrer et de se recueillir audelà de quelques minutes. Il ignore la signification des mots méditation et contemplation. Seul le chrétien qui, quelques heures par jour, parvient à s’isoler de ces appareils, pour élever son regard vers le ciel, dans le silence de son cœur, seul ce chrétien est capable de mener une vie pleinement humaine. Dominant les machines, son âme est libre. Avec la grâce de Jésus-Christ, il pourra devenir un saint. Alors il expliquera aux autres qu’il faut qualifier de barbare et de décadent le peuple devenu incapable de maîtriser l’usage des nouvelles technologies.
Nous ne prétendons pas que ces appareils sont intrinsèquement pervers. Nous rappelons simplement cette vérité que la relation qui unit l’homme à la machine est comparable à celle qui unit le maître à son animal domestique. Quand la relation est inversée, on parle de révolution. Comment qualifier l’être humain devenu l’esclave de son caniche ? Cette situation ridicule et dramatique se rencontre hélas bien souvent chez les jeunes, à leur insu. Elle est surtout dangereuse : lorsque le dompteur du cirque est dominé par le tigre, il est physiquement en péril de mort. Lorsque l’être doué d’intelligence est dominé par une machine, au point de ne plus pouvoir l’éteindre, il est spirituellement en péril de mort. Il est alors urgent de prendre énergiquement des mesures radicales. Que saint Joseph nous en
donne la force !
Les prêtres et les professeurs de l’école Saint-Bernard offrent à tous ceux qui le souhaitent un voyage inoubliable dans la vraie vie. Aller simple, évidemment !
Abbé Bernard de Lacoste, Directeur