Quelque part, un peu plus loin dans la montagne, nous découvrons aujourd’hui le baranguay Pelaez qui dépend aussi de Balingasag. Cinquième installation de la semaine.
Certains volontaires ont dormi là, dans le froid et le vent, avec des pierres pour lester leurs tentes. Les gens arrivent bien couverts, avec des blousons et des gros bonnets ; première fois que nous voyons cela aux Philippines !
Le docteur Ledoux ausculte la doyenne de la région : 104 ans, en bonne santé grâce à l’air sain des montagnes ! Il y beaucoup de cas de toux, mais les gens ont dans l’ensemble une bonne santé, sans doute due à l’air sain des montagnes.
Le rythme est soutenu aujourd’hui et les pharmaciennes ne font quasiment pas de pause à midi, nous voyons passer presque trois cents personnes, tandis que nous étions à un peu moins de deux cents les jours précédents. Il n’y a pas école, aussi les enfants sont nombreux à aller et venir, trop contents du moindre jeu que l’on peut faire avec eux.
16H : Rendez-vous au camp du 58e Bataillon d’Infanterie
INTERVIEW AVEC LE COMMANDANT DU CAMP
Combien êtes-vous dans ce camp ? Quel est votre rôle ?
Nous sommes environ 500, mais il y a un roulement entre les militaires en déplacement, sur place ou en congé. Nous avons un rôle important à jouer entre la population et le gouvernement, pour que la première voie d’un bon oeil le second.
Qu’attendez-vous d’une mission comme la nôtre ?
Justement qu’elle nous aide dans l’œuvre de pacification que le gouvernement essaie de développer depuis un an. La NPA (nouvelle armée populaire, formée de rebelles communistes qui montent les gens contre l’armée et l’Etat) a convaincu beaucoup de montagnards du Misamis oriental que le gouvernement n’en a rien à faire d’eux, qu’il ne s’occupe pas d’améliorer leur niveau de vie, etc. Alors, votre venue entre exactement dans notre plan ! Elle montre aux gens que nous soucions d’eux, et que nous faisons même venir des étrangers exprès pour eux ! En plus, ils se déplacent très peu et certains ne sont jamais allés en ville, donc les missions sont leur seul accès à la médecine.
De quoi vivent les gens ici ?
La végétation est très riche. Entre le riz, le maïs et les fruits, ils ont de quoi se nourrir. Il y a aussi tous les porcs et les poules en liberté que vous avez dû voir, et le poisson avec la proximité de la mer. La province essaie de développer l’industrie et le tourisme pour améliorer l’économie. Et contrairement à d’autres zones des Philippines, nous avons la chance de ne pas avoir trop de catastrophes naturelles ici, ce qui permet d’envisager les projets sur le long terme, notamment quelques travaux sur les routes et le réseau électrique.
Est-ce que la NPA représente encore un danger actuellement ?
Non, heureusement. Depuis deux ans, il n’y a plus de combats meurtriers, nous encourageons la population à se rapprocher des villes pour profiter de plus de confort. Mais cette armée populaire n’est pas encore dissoute, il reste quelques membres dans les montagnes qui exercent du chantage dès qu’ils peuvent pour récupérer de l’argent : si quelqu’un vient couper du bois dans leur zone, il doit payer, et s’il ne s’exécute pas, on lui brûle son bois pendant la nuit. Pareil sur la route, vous avez d’ailleurs peut-être vu à certains endroits des zones calcinées au bord du chemin ; ce sont des restes de véhicules brûlés par eux… Leurs interventions sont de plus en plus rares, mais quand ils agissent, ils sont sans pitié.
A ce propos, pour conclure cette journée, voici une anecdote que nous a rapportée Father Tim : il semblerait que la police et l’armée ne se soutiennent pas assez, elles s’affaiblissent au lieu de s’entraider. Il y a à peine cinq ans, un peu plus au sud de l’île, il y a eu un combat très meurtrier : trente-cinq policiers étaient en faction au milieu du maïs, et l’armée surveillait de son côté, un peu plus bas. Cinquante rebelles sont arrivés par en haut, sans bruit, connaissant par cœur leur territoire, et ont encerclé les policiers. Le combat était inégal, l’attaque faite en surprise, tous les policiers ont été tués sauf un… Et l’armée n’a pas bougé, loin d’imaginer le carnage qui se passait tout près.
Quant au rescapé, il a réussi à s’écarter du combat, s’est glissé dans une mare, est passé miraculeusement entre les balles des terroristes furieux qui tiraient dans l’eau. Il se trouve que c’était un ancien séminariste, et qu’il avait toujours sur lui son chapelet et son scapulaire. Il sait pertinemment qu’il doit son salut à la Sainte Vierge. Rosa Mystica, ora pro nobis !
Sources : Rosa Mystica 2020 /Jeanne de Vençay
Suite des reportages 2020
Accès au reportage n° 07 du samedi 22 février 2020
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