Les 15 et 16 janvier 2005 ont eu lieu la réouverture de l’église Sainte-Thérèse après les travaux de rénovation et la reprise du culte. Samedi 15 janvier, en présence de l’abbé Loïc Duverger (assistant du Supérieur de District), des abbés Claude Boivin et Laurent Serres-Ponthieu (anciens desservants), des frères Alphonse-Marie et Bernard-Marie (anciens paroissiens), de M. Philippe Marini, sénateur-maire de Compiègne, de M. Éric de Valroger, conseiller général du canton, de plusieurs officiels de la ville et des journalistes locaux, l’abbé Grégoire Celier, desservant de la communauté catholique traditionnelle de l’Oise depuis 1999, a rouvert les portes de l’église Sainte-Thérèse après les travaux de rénovation.
L’après-midi a commencé par un très beau concert de chants de Noël proposé par les trente-cinq choristes et musiciens du Chœur Saint-Michel sous la direction de l’abbé Jean-Yves Tranchet et du frère Dominique. Puis une plaque retraçant l’histoire de l’église Sainte-Thérèse a été dévoilée par le sénateur-maire, occasion pour l’abbé Celier de raconter plus au long cette émouvante histoire. Après quelques mots de conclusion du sénateur-maire, un apéritif amical a réuni les 300 participants, qui pouvaient durant ce temps visiter toute l’église, y compris les parties habituellement inaccessibles.
Assemblée
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Messe
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« Monsieur l’abbé de Cacqueray pendant la lecture de l’Evangile de la fête de saint Marcel 1er, Pape et martyr »
Le lendemain, dimanche 16 janvier, fête de saint Marcel Ier, l’abbé Régis de Cacqueray, Supérieur du District, a célébré la messe de reprise du culte, devant 250 personnes (l’église comporte en temps ordinaire 150 places assises).
Lors de son sermon, il a souligné qu’en une seule semaine, la Providence permettait à la Fraternité Saint-Pie X la réouverture de deux églises (Compiègne et Toulon), signe d’espérance au moment où tant d’églises se ferment.
Le repas de l’amitié chrétienne avec l’abbé de cacqueray
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Monsieur l’abbé Celier avec ses invités
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Après cette belle cérémonie, un repas dans les pièces en cave étonnamment bien mises en valeur a réuni 160 participants, tout à la joie d’être enfin « dans leurs murs » et de pouvoir développer désormais une authentique et complète vie paroissiale.
Histoire de l’église Sainte-Thérèse de Compiègne
Abbé Grégoire Celier, desservant.
essieurs les Abbés, Monsieur le Maire, Monsieur le Conseiller général, chers amis,
Monsieur Marini vient de dévoiler la plaque qui sera apposée dans quelques jours sur notre église, et que vous pourrez lire et admirer après ce discours. Cette plaque rappelle succinctement l’histoire de l’église Sainte-Thérèse qui, malgré sa relative jeunesse, s’insère profondément dans l’histoire de Compiègne au XXe siècle. C’est cette histoire de l’église Sainte-Thérèse que je voudrais retracer ici ce soir en quelques mots, afin que la mémoire n’en soit pas perdue.
Avant de commencer ce récit, je dois remercier deux personnes sans lesquelles il n’aurait pas été possible : M. Jean-Paul Besse, historien, auteur d’un Compiègne dans l’Histoire (DUC, 1992), qui a effectué à ma demande les recherches sur l’histoire de l’église ; Mlle Monique Collemant, trésorière de l’Association Saint-Pie X de l’Oise, qui a réalisé à ma sollicitation un très intéressant travail manuscrit sur l’histoire de la communauté catholique traditionnelle de l’Oise.
L’histoire de Sainte-Thérèse commence donc ici-même, dans ce faubourg de la Porte-Chapelle (appelé improprement aujourd’hui quartier Bellicart), sur les bords de l’Oise, au XIXe siècle, avec peut-être un enracinement encore plus ancien.
Comme tous les cours d’eau navigables, l’Oise connaît une activité de batellerie. Or, les bateaux ont besoin de cordages, et le plus pratique consiste à confectionner ces cordages au bord de l’eau, pour éviter des transports difficiles et coûteux. C’est donc bien naturellement que s’est établie ici la corderie Ouarnier, sur le terrain même où nous nous trouvons, au bord de l’Oise, au XIXe siècle, comme je l’ai dit, précédée peut-être par une autre corderie.
Alexandrine Ouarnier, unique héritière de la corderie, épousa Jean-Baptiste Debruxelles. La vie suivit son cours. La corderie était probablement, tout comme la batellerie, une industrie sur le déclin au début du XXe siècle. Jean-Baptiste Debruxelles mourut, laissant une veuve sans enfant. Finalement, Alexandrine Ouarnier, veuve Debruxelles, décéda elle-même en 1929.
Mais Mme Debruxelles était ce qu’on appelait alors une « bonne personne » et une « femme d’œuvres », profondément chrétienne et dévouée à son prochain. Mourant sans héritier, elle décida de léguer tous ses biens aux Hospices de Compiègne, à charge pour ceux-ci de créer, dans sa propriété sise alors entre la rue de Soissons, la route de Choisy (aujourd’hui du Bataillon de France), la rue du Petit-Canal (aujourd’hui du Lieutenant Ducloux) et la route de Soissons (aujourd’hui du président Clémenceau), une œuvre de bienfaisance (maison de retraite, orphelinat ou autre œuvre, au choix des légataires), œuvre devant porter le nom de Debruxelles-Ouarnier.
Les exécuteurs testamentaires désignés par Mme Debruxelles était le maire de l’époque, M. Robert Fournier-Sarlovèze, et un notaire, également administrateur des Hospices, Me Chéreau. Il fallut attendre de réaliser au moins une partie du capital de deux millions cinq cent mille francs compris dans le legs avant de commencer quelques travaux que ce soit.
Entre-temps, nommé en 1933, le nouveau curé de la paroisse Saint-Jacques, en charge de ce faubourg de la Porte-Chapelle, sentit le besoin d’une chapelle de secours pour ce quartier populeux et en plein développement. Averti de cette difficulté, M. Fournier-Sarlovèze offrit à l’archiprêtre de modifier les dimensions primitivement envisagées pour le petit oratoire de la future « Fondation Debruxelles », afin de réaliser du même coup la chapelle de secours désirée.
Les travaux de construction de l’immeuble de trois étages destiné à une maison de retraite commencèrent en 1936 pour s’achever au printemps 1939. La chapelle de secours fut également construite durant ce temps, mais seulement dans ses structures essentielles, les finitions devant advenir par après. La dépense totale de l’ensemble était estimée à un peu plus de dix millions de francs.
La commission des Hospices de Compiègne ayant jugé ne pouvoir assumer seule le fonctionnement de la Fondation, une convention fut signée le 1er avril 1939 avec l’Union féminine française, qui s’engageait à utiliser les locaux comme maison de retraite « pour des retraités et vieillards peu fortunés, moyennant un prix de pension aussi peu élevé que possible ». Cependant, dès juillet 1939, l’Union féminine française, invoquant des difficultés de mise en fonctionnement de la maison, renonça à son projet. C’est donc à l’Union des femmes de France, dépendant de la Croix-Rouge, que la commission des Hospices confia le bâtiment, en vue d’y installer un hôpital complémentaire.
Mais, le 3 septembre 1939, c’est le début de la Seconde Guerre mondiale. Cet événement imprévu va bouleverser tous les plans établis. Le 10 juin 1940, les troupes allemandes pénètrent dans Compiègne et occupent la Fondation Debruxelles où elles font cantonner leurs soldats. Ce n’est qu’en mars 1941 que les bâtiments seront libérés, y permettant l’installation de salles de chirurgie.
Après la Libération, la Fondation Debruxelles accueille une pension pour enfants et adultes. C’est la Caisse d’Allocations Familiales de la Région Parisienne qui, probablement dès la fin de la guerre, était devenue le locataire des lieux en remplacement de l’Union des Femmes de France. La chapelle de secours, pour sa part, attendue pourtant depuis 1933, n’était toujours pas en activité. Ce fut le député-maire de Compiègne de l’époque, M. Jean Legendre qui, en 1948, fit procéder aux ultimes travaux, notamment au plafonnage de la chapelle, et qui obtint de la Caisse d’Allocations Familiales que le chauffage soit assuré en même temps que celui du bâtiment principal.
L’aumônier de l’Hôpital général, M. le chanoine Trousselle, accepta d’en être le chapelain, pour décharger le clergé de Saint-Jacques et, dès cette époque, la messe y fut célébrée chaque dimanche à 11 heures.
Mais en 1951, une pétition signée par 140 habitants du quartier suppliait Mgr l’évêque de Beauvais, Noyon et Senlis de proclamer sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus comme titulaire de la chapelle de la Fondation Debruxelles. Par sa réponse en date du 8 juin 1951, Mgr Félix Rœder donna son accord et, le dimanche 30 novembre 1952, accompagné notamment du curé de Saint-Jacques et du chanoine Trousselle, il vint bénir solennellement la chapelle et la dédier à la sainte de Lisieux. On remarquait dans l’assistance, en particulier, M. Jean Legendre, député-maire, et M. Amédée Bouquerel, sénateur de l’Oise.
Apparemment, de 1950 à 1967, les bâtiments servirent directement à la Caisse d’Allocations Familiales : s’agissait-il uniquement des services administratifs ? Existait-il en sus ou parallèlement des activités telles que maison d’enfants ou de vieillards ? Ceux qui ont connu cette période à Compiègne pourront sans doute nous renseigner. En 1967 ou 1968, en tout cas, s’ouvre à nouveau une pension pour personnes âgées. En 1976, un nouveau bâtiment, placé sous le patronage d’Alexis Carrel, est inauguré pour accueillir des malades invalides. Vers 1986, comme en témoignent des plans d’architecte en ma possession, plusieurs pavillons hospitaliers sont édifiés, reconstruits ou rénovés.
Pendant ce temps, la chapelle Sainte-Thérèse continue d’accueillir les fidèles. Mais deux événements vont successivement lui porter un coup fatal. Ce sera d’abord, à partir de 1959, la construction de l’église Saint-Éloi, située à quelques centaines de mètres d’ici et inaugurée en 1962. Ce sera ensuite, à la fin des années soixante, la crise qui frappe l’Église, avec notamment la raréfaction du clergé. Les messes deviennent moins régulières. Certaines activités spirituelles, telles que le chapelet, subsistent tant bien que mal, mais la chapelle meurt doucement. Cependant, il y a dix ans, il existait encore un petit reste d’activité spirituelle, puisque j’ai retrouvé, dans la sacristie, une bouteille d’eau de Lourdes datée de 1995.
Mais un danger beaucoup plus sérieux menace, à cette date, la chapelle Sainte-Thérèse : tout simplement la démolition. En effet, à la suite de l’inauguration du nouvel et magnifique Hôpital général à la périphérie de Compiègne, les 11 et 12 novembre 1995, la présence de ces pavillons hospitaliers en pleine ville est devenue inutile. Les Hôpitaux de Compiègne, propriétaires, décident donc de vendre le terrain et les bâtiments dans le cadre d’une opération de promotion immobilière. Les pavillons hospitaliers sont voués à la destruction (qui sera réalisée en 2001), pour bâtir à leur place la Villa Josephine et la résidence des Beaux Monts, tandis que le bâtiment Alexis Carrel, vidé de ses habitants et conservé seulement dans ses structures fondamentales, subit actuellement une profonde rénovation pour devenir une HLM sous le nom de « La Corderie ».
Reste la question de l’ancienne chapelle de la Fondation Debruxelles. Certains estiment qu’elle n’a pas grand intérêt et peut sans inconvénient être démolie. D’autres souhaiteraient la conserver. C’est finalement M. Marini qui va prendre la décision de la conserver, d’une part pour sauvegarder un élément de monumentalité dans cette partie de Compiègne moins bien pourvue, d’autre part parce que cette chapelle est déjà entrée dans l’histoire de la ville.
C’est ainsi que, le 15 février 2002, le Conseil municipal vote l’achat, pour l’euro symbolique, de la chapelle Debruxelles, étant précisé par la délibération du Conseil d’administration du Centre hospitalier, en date du 18 mai 2001, que sa destination de lieu de culte doit être maintenue. Apparemment, la Municipalité risque d’être plus embarrassée qu’autre chose de cet achat, car il serait nécessaire de rénover le bâtiment, et de plus il est fort douteux que l’évêque de Beauvais soit intéressé à le racheter ou à le reprendre. Mais, à cette date, Monsieur le Maire a sans doute déjà sa petite idée sur ce que pourrait devenir cette chapelle.
Pour comprendre l’idée qui trotte dans la tête de Monsieur Marini, il faut revenir en arrière de quelques années, très précisément à la fin des années soixante.
Dans l’Église, le début du concile Vatican II, en 1962, inaugure une décennie de profonds bouleversements, dans tous les domaines, depuis la théologie jusqu’au costume du prêtre. Le changement qui frappera le plus les catholiques (comme les non-catholiques, au demeurant), c’est la modification profonde de la messe, en 1969, par l’introduction d’une messe nouvelle dans sa langue (le français au lieu du latin), dans ses rites et dans sa théologie sous-jacente (l’aspect sacrificiel étant gommé, voire omis).
Cette réforme de la messe va susciter, dans le monde entier, des réactions d’incompréhension et de refus, et c’est ainsi que vont se constituer ceux que l’on appelle souvent les « catholiques traditionalistes » ou « catholiques de Tradition », qui se caractérisent notamment par l’attachement à la messe dite « traditionnelle », tout simplement la messe qui était célébrée par le pape, les évêques et tous les prêtres de rite latin durant le concile Vatican II.
Le combat pour le maintien de la Tradition catholique dans le département de l’Oise, et à Compiègne en particulier, est ancien et bien enraciné. L’une des principales raisons en est qu’à la limite ouest du département, un simple curé de village devint très vite l’un des ténors de la résistance catholique. Il s’agissait, vous l’avez reconnu, de l’abbé Louis Coache, alors curé de Montjavoult.
Toutefois, l’abbé Coache ne fut pas le seul prêtre du diocèse de Beauvais à maintenir la Tradition contre vents et marées. L’abbé Gentilhomme, curé d’Agnetz, l’abbé Henrio, curé de Morienval, l’abbé Garnier, curé du Bois-Saint-Denis à Chantilly, en particulier, gardent toute la reconnaissance des fidèles pour l’hospitalité de leurs églises et de leur foi, sans oublier l’abbé Boidart, du diocèse voisin de Soissons, qui vint bien souvent suppléer ses confrères.
C’est en 1978, à Saint-Léger d’Agnetz, que quelques fidèles profondément attachés à la Tradition catholique décidèrent la création d’une association. La première manifestation publique de l’Association Saint-Pie X de l’Oise eut lieu le 1er juillet de la même année, par la célébration d’une messe tridentine en l’église de Hodenc-en-Bray, messe assurée par l’abbé Jean Robin. Par ailleurs, l’Association fit paraître des avis dans la presse afin de se faire connaître, elle commença à diffuser un bulletin (qui en est aujourd’hui à son 82e numéro), et son Bureau obtint audience de l’évêque du diocèse, sans résultat cependant.
Des messes furent organisées par l’Association dans diverses salles à Senlis, Clermont, Compiègne, ainsi qu’une procession du Saint-Sacrement à Vendeuil. L’Association put ensuite disposer de l’église de Maulers chaque dimanche après-midi, à charge pour elle de trouver un prêtre disponible. Malheureusement, le curé de Maulers, l’abbé Georges Delattre, mourut en 1983, léguant ses biens à la Fraternité Saint-Pie X, laquelle n’avait pas à l’époque les moyens de desservir régulièrement cette communauté.
Après encore bien des déboires, le maire de Compiègne, alors M. Jean Legendre, mit à la disposition de l’Association Saint-Pie X de l’Oise la chapelle Saint-Nicolas, monument situé en centre ville et doté, en particulier, d’un superbe retable en bois de près de 100 m². Et c’est le 1er septembre 1985 qu’eut lieu la première messe à Saint-Nicolas, avec la desserte régulière assurée désormais par les prêtres de la Fraternité Saint-Pie X.
Le 4 mai 1986, Mgr Marcel Lefebvre, fondateur de la Fraternité Saint-Pie X, fut reçu solennellement à la mairie de Compiègne par M. Philippe Marini, alors premier adjoint (représentant M. Legendre empêché) et aujourd’hui maire de Compiègne.
Les prêtres de la Fraternité Saint-Pie X se succédèrent : de 1985 à 1990, l’abbé Claude Boivin (présent parmi nous) ; de 1990 à 1995, les abbés Carlo Cecchin et Guillaume de Tanoüarn ; de 1995 à 1996, l’abbé Laurent Serres-Ponthieu (présent parmi nous) ; de 1996 à 1997, les abbé Paul Ricquier et Pierre Barrère ; de 1997 à 1999, l’abbé Jacques Berrou ; depuis le 15 août 1999, l’abbé Grégoire Celier.
Lorsque j’arrive à Compiègne, après onze ans passés à desservir la communauté traditionnelle de La Chapelle d’Angillon, près de Bourges, puis deux ans celle d’Angers, je découvre une communauté solide et vigoureuse, bénéficiant d’un cadre liturgique exceptionnel mis à sa disposition à titre gratuit par la municipalité de Compiègne. Pour moi, qui n’ait connu jusqu’ici que des chapelles de fortune, c’est un immense progrès.
Cependant, à la lumière de mes expériences précédentes, et par l’analyse d’autres situations où des mairies ont prêté des chapelles à la Fraternité Saint-Pie X, je perçois assez vite que la magnifique et priante chapelle Saint-Nicolas, qui a permis à la communauté de se constituer et de grandir, présente des inconvénients notables. Elle est, en effet, utilisée toute la semaine pour des réunions profanes. Chaque dimanche, il faut donc installer entièrement le mobilier liturgique rangé dans une simple armoire. La chapelle ne possède pas le Saint-Sacrement, bien entendu : il est alors difficile d’apporter la communion aux malades et personnes âgées. Pour tout événement imprévu (notamment les enterrements), la communauté dépend de la disponibilité des lieux. Il n’existe ni sacristie, ni salle de catéchisme, ni salle de réunion pour la paroisse. Enfin et surtout, étant accueillie gracieusement par la municipalité, la communauté peut du jour au lendemain se retrouver à la rue, si un événement quelconque rend la chapelle indisponible (situation qui se présentait de fait quelques dimanches dans l’année, et tout récemment durant un mois complet).
Toutefois, je ne souhaite pas prendre de décision hâtive, je réfléchis, je prospecte dans Compiègne et me renseigne sur les possibilités, je cherche la meilleure solution durant dix-huit mois.
Le 11 mars 2001, M. Philippe Marini est réélu au premier tour. Je prends alors ma décision : il faut qu’avant six ans, fin de ce nouveau mandat, nous soyons chez nous, dans nos murs. Le 3 avril suivant, je provoque une réunion avec mes supérieurs de la Fraternité Saint-Pie X afin de savoir si mon projet reçoit leur approbation, et s’ils sont près à nous épauler techniquement et financièrement. Après leur réponse positive, je convoque le 23 juin une réunion avec dix fidèles, pour lancer les recherches. Pour l’anecdote, je note que cinq de ces fidèles ont, entre-temps, quitté Compiègne pour des raisons professionnelles et suivent notre aventure de loin : preuve que cette église Sainte-Thérèse est vraiment le fruit de toute une communauté, dans sa continuité, et non le caprice de telle ou telle personne.
Nous décidons de commencer par essayer de trouver des bâtiments d’origine ecclésiastique, afin de proposer à la municipalité de les louer ou de les acheter. Dans une première approche, nous en sélectionnons trois : la chapelle des Capucins, qui venait d’être restaurée ; la chapelle Debruxelles ; et la chapelle de l’ancien hôpital Saint-Joseph. Nous préparons soigneusement notre dossier, notre argumentaire, et demandons audience à Monsieur Marini.
Celui-ci reçoit le dimanche 21 octobre 2001 deux paroissiens accompagnés du frère Alphonse-Marie (ancien employé de la Mairie de Compiègne). Le principe d’une demande officielle pour l’achat ou la location d’une des trois chapelles est accepté par M. Marini, même si le choix de la chapelle qui sera retenue n’est pas encore fixé. M. Marini mandate M. Nicolas Leday, maire-adjoint, pour suivre le dossier. Et c’est le 26 novembre 2001 qu’au cours d’une nouvelle réunion entre M. Leday et deux paroissiens, la proposition officielle de vente de la chapelle Debruxelles à la Fraternité Saint-Pie X est faite par la Mairie de Compiègne.
Le lundi 3 décembre, accompagné de M. Bertrand Mailley, notre conseiller pour l’immobilier, je visite pour la première fois la chapelle Debruxelles, que je n’ai vue jusqu’ici que de l’extérieur. Je suis frappé immédiatement par deux points essentiels : la chapelle est beaucoup plus vaste vue de l’intérieur que ce qu’elle paraît de l’extérieur ; elle est en bon état général, et convient parfaitement à notre projet. Dès ce moment, ma décision est prise : ce sera « Oui ».
C’est le 27 février 2002 que lors d’une réunion à la Mairie, M. l’abbé Loïc Duverger, bien meilleur négociateur que moi, tombera d’accord avec M. Leday sur le prix et les conditions. Ceci permet, le 28 juin 2002, le vote par le Conseil municipal du principe de la vente de la chapelle Debruxelles à la Fraternité Saint-Pie X.
Mais nous nous heurtons à une difficulté : en raison des circonstances, la chapelle Debruxelles ne possède pas de parvis, or la sortie directe sur la rue pose un réel problème de sécurité. Il faudrait que les copropriétaires de la Villa Josephine, alors en construction, acceptent de nous vendre un petit morceau de terrain à l’extrémité de la chapelle. M. Leday passe alors la main à M. Raymond Viault, autre membre du Conseil municipal, pour tous les aspects juridiques. Le 17 décembre 2002 a lieu en présence de M. Viault une assemblée générale extraordinaire des copropriétaires de la Villa Josephine, qui vote le principe de la vente d’un terrain de 69 m² destiné à devenir notre parvis.
Toutes les conditions sont donc réunies pour la vente, et je rêve déjà du début des travaux. C’est que jusqu’ici je n’ai jamais fréquenté de notaires : je vais donc apprendre à leur école la patience. Après diverses péripéties dont je vous passe le détail, ce ne sera que le 27 novembre 2003, un an après, que l’achat par la Fraternité, tant de la chapelle Debruxelles à la Mairie de Compiègne que du parvis à la Villa Josephine, pourra être signé.
Le permis de construire, déposé dans l’intervalle, est accordé le 10 décembre 2003, et déjà je rêve du début des travaux. Si j’ignorais jusqu’ici ce qu’est un notaire, j’ai déjà participé à deux chantiers avec l’excellent architecte que j’ai choisi, M. Michel Bodin. Je pense donc que nous ne rencontrerons pas de difficultés particulières, mais je me trompe. Le choix des entreprises sera plus long et plus difficile que prévu. Malgré mon impatience, le premier coup de pioche ne sera donné que le 23 juin 2004, six mois après la vente.
Toutefois, si le chantier a tardé à démarrer, je dois avouer que, sous la vigilante direction de M. Bodin et le contrôle de M. Mailley, il s’est parfaitement déroulé et que les entreprises sélectionnées m’ont donné toute satisfaction. Citons-les pour leur faire honneur. Il s’agit de l’entreprise Conte pour le gros œuvre, de l’entreprise Delcourt pour la charpente-couverture, de l’entreprise AMTH pour la menuiserie, de l’entreprise Goiseau-Leclère pour l’électricité, de l’entreprise Pageot pour les grilles de protection, de M. Didier Vigreux pour le sanitaire-chauffage, de l’entreprise Top-Décor pour les peintures, de l’entreprise Huchez pour la cloche, de l’entreprise Houssard pour les bancs, de l’entreprise Blase-Langlois pour la plaque, sans oublier M. Galoin et les membres de l’atelier de vitrail sis à l’école des Beaux-Arts pour la réfection des six premiers vitraux.
Le 20 décembre, six mois seulement après le début d’un chantier finalement assez complexe et interrompu par les vacances d’été, l’église Sainte-Thérèse nous était livrée. Le 24 décembre au soir, je couchais pour la première fois dans l’appartement du prêtre, après cinq années de nuits à l’hôtel. Durant ces cinq années, j’avais été accueilli très sympathiquement près du pont de Solférino par M. et Mme Verdy, à l’hôtel de Flandres, hôtel que je vous recommande vivement : cependant, de coucher pour la première fois dans mon lit changeait tout.
Et le 15 et le 16 janvier 2005, aujourd’hui et demain, l’église rouvre ses portes et reprend le culte catholique.
Nous voici donc dans nos murs. Ce n’est pas que tout soit absolument fini : nous n’avons eu que quelques jours pour nettoyer les restes du chantier, transporter nos affaires et nous installer. Vous excuserez donc le caractère inévitablement sommaire de l’installation. Il reste encore de multiples nettoyages et encausticages à réaliser dans les mois à venir, ainsi que des petits aménagements, comme la mise en place du gisant de sainte Thérèse que vous pourrez admirer pour le moment à la sacristie. Nous avons commandé à certaines entreprises quelques travaux complémentaires, comme la réalisation et la mise en place d’une grille de communion, à l’endroit même où je me trouve. Sans oublier, lentement mais sûrement dans les années à venir, la rénovation de tous les vitraux de l’église.
Nous voici donc dans nos murs. Mais ceci ne s’est pas fait tout seul. Près de cinq cents bienfaiteurs, dispersés sur toute la France, nous ont aidés avec générosité, le plus souvent sans que nous les connaissions. Nous leur devons une vive reconnaissance, et nous n’aurons garde de les oublier dans nos prières. Pour suppléer à ce qui manquait, nous devons remercier la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X et les supérieurs du District de France, dont l’aide a été indispensable : nous n’oublierons pas de remercier ces autres bienfaiteurs, et de prier pour eux. Enfin, cette magnifique aventure n’aurait pas été possible sans la générosité, la disponibilité, le travail, les prières et les sacrifices de tous les paroissiens, que je veux remercier de m’avoir soutenu et accompagné durant ces quatre années.
Nous voici donc dans nos murs. Mais nous ne devons pas croire que ce soit principalement grâce à nos efforts. C’est bien du Ciel que nous avons reçu cette grâce. Nos actions de grâces doivent d’abord se tourner vers sainte Jeanne d’Arc et vers les bienheureuses carmélites, patronnes et protectrices de Compiègne. Elles doivent se tourner vers saint Nicolas, patron de la chapelle qui nous a accueillis durant vingt années, et vers sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, patronne de l’église qui nous accueille désormais. Elles doivent surtout se tourner vers Notre Seigneur Jésus-Christ et vers sa sainte Mère.
C’est donc dans un esprit d’action de grâces que le culte reprendra solennellement demain, après environ dix années d’interruption. Vous êtes cordialement invités à cette première messe, célébrée par M. l’abbé Régis de Cacqueray, Supérieur du District de France de la Fraternité Saint-Pie X, à 10 h demain matin. Le culte reprendra : en fait et en droit. Le culte reprendra en fait, puisque désormais, la messe sera de nouveau célébrée ici chaque dimanche et fête à 10 h. Mais le culte reprendra surtout en droit, puisque la messe qui sera célébrée ici sera exactement celle pour laquelle cette église a été bâtie, celle qu’a célébrée Mgr Félix Rœder, celle qu’a célébrée M. le chanoine Trousselle, celle qu’ont célébrée tous les prêtres qui ont desservi cette église jusqu’en 1970.
Et pour manifester cette continuité, la messe de demain sera célébrée avec un missel d’autel en parfait état, que j’ai trouvé lorsque j’ai vidé la sacristie avant les travaux, un missel que vous pourrez voir tout à l’heure dans la sacristie. Ce missel date de 1958, une année qui représente beaucoup pour moi, disons-le en passant. Ce missel nous donne la messe qui était célébrée durant le concile Vatican II, la messe célébrée sous Pie XII, la messe célébrée par le Curé d’Ars, la messe célébrée par saint Vincent de Paul, la messe de tous les siècles, mais aussi la messe d’aujourd’hui et de demain, parce qu’elle est la messe éternelle, la messe catholique, renouvellement non sanglant du sacrifice de la Croix. C’est pour cette messe que cette église a été construite, c’est pour cette messe que nous avons restauré cette église, et c’est pour cette messe que cette église servira, de longues années j’espère, et pourquoi pas de longs siècles.
Je vous remercie de votre attention.
Compiègne, le samedi 15 janvier 2005.
Abbé Grégoire Celier †