Monsieur l’abbé Arnaud Sélégny
Secrétaire Général de la FSSPX
La Porte Latine : M. l’abbé, pourriez-vous nous présenter la fonction que vous occupez dans la Fraternité ?
Abbé Sélégny : Je profite tout d’abord de l’occasion qui m’est donnée pour remercier le réalisateur de La Porte Latine pour l’excellent travail qu’il accomplit à travers ce site. Il est sûr que cette forme d’apostolat du « net » est appelée à se développer dans le futur. Toutefois, il faut en apprécier les limites, tant du point de vue de l’impact que du point de vue du danger que la « navigation » peut représenter.
Quant à la fonction de Secrétaire général dans une société religieuse, elle ne doit pas être entendue comme celle des organisations nationales ou internationales telles que l’ONU, le COE ou le parti communiste. Autrement dit, ne me confondez pas avec Robert Hue, le pasteur Raiser ou Kofi Annan !
En fait le Secrétaire général exerce une fonction purement administrative au sein de la Fraternité. Il a pour charge de préparer et de rendre-compte des réunions du Conseil général, de tenir les archives et spécialement les dossiers individuels des membres, ainsi que de s’assurer de la régularité des différents actes qui ponctuent la vie de la société, tels que les engagements ou la tenue du Chapitre général. Mais il ne touche aucunement au nerf de la guerre, apanage de l’Economat général, poste occupé actuellement par M. l’abbé Baudot.
La Porte Latine : Votre situation vous permet ainsi de connaître à peu près tout de la Fraternité.
Abbé Sélégny : Certes, le fait d’ouvrer dans la proximité du Supérieur général pour l’aider à assumer sa mission lourde et difficile, amène une connaissance approfondie de notre Société, de ses membres, de ses joies, de ses difficultés et de ses peines. Mais n’attendez pas un scoop de ma part, car, comme j’aime à le rappeler, le mot secrétaire dérive de secret !
La Porte Latine : Cela doit être une fonction prenante que l’accroissement de la Fraternité ne doit pas rendre plus légère.
Abbé Sélégny : En effet, la Fraternité peut paraître à certains yeux comme un frêle esquif ballotté par la tempête conciliaire, mais elle commence en fait à être un vaisseau de taille respectable. Avec plus de 750 membres dont 453 prêtres, et un apostolat qui touche une soixantaine de pays, il n’y a pas de quoi chômer. De fait, l’élargissement du rayonnement de la FSSPX se mesure d’une part au renforcement des districts qui ouvrent des prieurés, des chapelles ou des écoles, ou bien doivent aussi aborder de nouveaux champs d’apostolat. En terme d’écoles pour prendre un exemple, la FSSPX scolarise plus de 3.000 élèves dans le monde, ce qui est très encourageant. Si l’on y ajoute les élèves inscrits dans les écoles amies de la tradition, ce nombre dépasse alors les 5.000. D’autre part, la Fraternité étend son apostolat à de nouveaux pays pour répondre aux demandes qui lui sont faites, soit par l’installation de nouvelles maisons, soit par une desserte régulière. C’est ainsi que ces deux dernières années, la Fraternité a ouvert un prieuré en Lituanie et au Kenya.
La Porte Latine : Pouvez-vous nous dire un mot de ces nouvelles implantations ?
Abbé Sélégny : Le prieuré de Lituanie a été ouvert l’année dernière : il fait partie d’un plan d’ensemble de l’apostolat dans les pays de l’Est qui touche la Pologne, la Biélorussie, la Russie, ainsi que les trois pays baltes : Estonie, Lettonie et Lituanie.
Ce dernier pays est le plus central, ayant une frontière commune avec 4 des cinq autres et n’est séparé du cinquième que par la Lettonie.
De plus, la Fraternité compte déjà un prêtre lituanien, ce qui facilite notre installation, sans compter un séminariste au séminaire de Zaitzkofen et plusieurs pré-séminaristes. Mais je préfère laisser M. l’abbé Stehlin, supérieur de la Maison autonome de Pologne et des Pays de l’Est, parler sur ce sujet car il doit, à ce que je sais, vous présenter son apostolat le mois prochain(***).
Je ne voudrais cependant pas quitter la région sans dire un mot de l’apostolat en Ukraine. En fait, dans ce pays, nous avons » seulement » un travail de soutien de la Fraternité Saint Josaphat, fondée voici trois ans, et rassemblant des prêtres catholique de rite slavon, l’un des rites orientaux, qui veulent combattre pour la tradition de l’Eglise. Cette communauté a fondé un séminaire et une branche féminine. Des prêtres de la Fraternité vont assurer bon nombre de cours aux séminaristes qui sont maintenant au nombre de 17. Le supérieur, le Père Basile, est curé de deux paroisses de plusieurs milliers de fidèles. Depuis quelques mois, le cardinal Husar, un ocuméniste déclaré, a commencé une enquête sur cette Fraternité. Il a déjà suspendu un membre et excommunié un autre. Il s’attaque à l’heure actuelle au supérieur. Mais ce dernier montre une pugnacité remarquable. Il a publié pour sa défense un livre vigoureux qui retrace la persécution de la tradition en Ukraine, ainsi que l’histoire de la défense de la Tradition dans l’Eglise latine par Mgr Lefebvre et la FSSPX, ainsi que l’action de Mgr de Castro-Mayer et de Mgr Lazo. Il justifie son action par l’état de nécessité. De plus, il a organisé dans sa paroisse une journée d’adoration et de réparation. Il a demandé à ses paroissiens de le soutenir par une collecte de signatures : il en a recueilli 6.300 ! Dans la seconde, il a encore obtenu 1.830 de plus. La Fraternité Saint Josaphat a par ailleurs construit une église, placée sous le patronage du Christ Roi pour permettre l’apostolat du prêtre déjà excommunié et chassé de sa paroisse. Ces nouvelles sont réjouissantes et nous font espérer des fruits abondants pour cette Fraternité.
Prions et soutenons ces amis qui veulent participer à la défense de l’Eglise occupée.
Quant à l’ouverture du prieuré du Kenya, elle permet à la Fraternité de s’installer dans un pays d’Afrique noire anglophone, pour faire le pendant de notre mission du Gabon en Afrique équatoriale francophone. Les deux pays sont d’ailleurs situés à peu près sous la même latitude. Le nombre de fidèles est bien évidemment moins élevé qu’au Gabon, mais le terreau est bon, car l’esprit traditionnel s’est maintenu chez nombre de catholiques kenyans, et la formation doctrinale reçue est souvent vraiment bonne. De plus, des vocations sérieuses se présentent en nombre respectable. Cette mission, avec la bénédiction de Dieu, pourrait aussi rayonner sur l’Ouganda (pays majoritairement catholique), sur la Tanzanie (peu catholique), et sur le Rwanda, qui est catholique également, mais est francophone. Les prêtres de la Fraternité doivent souvent être bilingues ! Ils ont aussi besoin de notre soutien, car une fondation est chose toujours difficile.
La Porte Latine : Et dans l’avenir, la Fraternité a‑t-elle de nouveaux projets d’installation ?
Abbé Sélégny : Pas dans un futur proche. Pour la suite, cela dépendra du Maître de la moisson que nous devons prier afin qu’il nous accorde de nombreuses vocations. Nous devons lui rendre grâce pour cette année qui a vu 60 entrées dans nos séminaires, ce qui est un chiffre très respectable. Demandons pour eux la persévérance, afin qu’ils puissent augmenter nos forces au service de l’Eglise et de son Chef divin.
(***) : entretien du mois prochain avec M. l’abbé Stehlin, supérieur de la Maison autonome de Pologne et des Pays de l’Est