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Le cardinal Barbarin : « l’expression de la souffrance du pape »
Le cardinal Philippe Barbarin partage, dans le journal La Vie, sa réaction suite à la réception de la lettre du pape au sujet de la levée des excommunications.
Le pape a voulu reprendre l’ensemble de la question de la récente levée des excommunications, et son message est clair. Etre le « rocher de l’unité », tel est bien le cœur de la mission du successeur de Pierre, à qui Jésus, dans l’Evangile, demande de « fortifier ses frères dans la foi » (cf. Luc 22, 31).
Benoît XVI distingue clairement la dimension juridique de la mesure prise, qu’il aurait voulu « un geste discret de miséricorde », et le travail doctrinal qui est à faire maintenant avec les quatre évêques concernés. Les explications qu’il donne confirment ce qui avait été exprimé, le mois dernier, dans la note publiée par la Secrétairerie d’Etat.
Ce qui est nouveau et surprenant dans cette lettre, c’est l’expression de la souffrance du pape. Il s’en ouvre d’une manière si directe et simple, avec une telle humilité, qu’on ne peut pas ne pas en être touché. C’est vrai que, nous les évêques, nous recevons beaucoup de critiques, parfois violentes, et je ne m’étais pas rendu compte que l’effervescence médiatique qui a suivi cette affaire pouvait avoir causé chez lui une blessure aussi profonde. Je l’ai vu, à Rome, le lendemain de la publication de sa lettre, et la souffrance était visible sur son visage. Nous avons assurément à prier pour lui, comme il nous le demande.
Il nous appelle aussi et surtout à « faire corps » et à avancer avec lui, ce qui ne signifie pas mettre de côté notre esprit critique. Il me revient en mémoire cette phrase, ancienne, du cardinal Ratzinger : « De l’appartenance à l’Eglise, découle également un droit à la critique, qui cependant doit être toujours en premier lieu auto-critique » (Eglise, œcuménisme et politique, p. 16). C’est un conseil qui vaut pour nous comme pour lui, et il se l’applique à lui-même dans cette lettre. Il se montre lucide et reconnaît ouvertement qu’il y a eu, dans cette affaire, non seulement l’irruption désastreuse des déclarations de Mgr Williamson, mais des erreurs de communication, et même d’instruction du dossier.
Benoît XVI rend hommage à la délicatesse des amis juifs, qui ont rapidement « aidé à dissiper le malentendu et à rétablir l’atmosphère d’amitié et de confiance ». Nous aussi, nous pouvons remercier le grand Rabbin de France, M. Gilles Bernheim, pour les paroles respectueuses et fraternelles qu’il a eues à l’égard de la communauté catholique, le jour de son investiture, alors que le trouble médiatique était à son comble.
Qu’on n’oublie pas à quel point cela est cohérent avec les objectifs majeurs du saint Père. Dès le début, il avait indiqué que ce travail pour l’unité serait une des priorités de son pontificat. Je me rappelle ses paroles aussitôt après son élection, dans la chapelle Sixtine, alors qu’il nous expliquait les raisons du choix de son nom : « Mon pontificat sera un pontificat de réconciliation, de travail et de souffrance… »
Il reste donc une seule question, toute simple, adressée à ceux qui viennent de voir la main du pape se tendre vers eux : Oui ou non, reconnaissez-vous comme appartenant à la tradition et au Magistère de l’Eglise, l’enseignement du concile Vatican II et des papes, depuis Jean XXIII jusqu’à Benoît XVI ?
Les discussions vont commencer, et le combat spirituel sera certainement rude. A cette intention aussi, il nous faut prier maintenant : « En vérité, en vérité, je vous le dis, ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous le donnera » (Jean 16,23).
Propos recueillis par Joséphine Bataille in : La Vie, jeudi 19 mars 2009.