Euthanasie et fin de vie

Introduction

Le terme « eutha­na­sie » vient du grec, eu, bon et tha­na­tos, mort. Il semble que le mot ait été créé par le phi­lo­sophe anglais Francis Bacon (16e siècle) qui esti­mait que le rôle du méde­cin était non seule­ment de gué­rir, mais d’at­té­nuer les souf­frances liées à la mala­die et, lorsque la gué­ri­son était impos­sible, de pro­cu­rer au malade une « mort douce et pai­sible » (Novum Organum)

L’un des prin­cipes essen­tiels du juge­ment que l’on doit por­ter sur l’euthanasie, et aus­si de façon plus large sur la mort, est celui mis en lumière par Pie XII, dans de mul­tiples inter­ven­tions auprès des pro­fes­sion­nels de san­té, après-​guerre. Ainsi lors d’un congrès de méde­cins et chi­rur­giens, il fit une allo­cu­tion, le 24 février 1957, où il rap­pe­la ce prin­cipe : « Dieu seul est maître de la vie et de l’existence. L’homme n’est donc pas maître ni pos­ses­seur mais seule­ment usu­frui­tier de son corps et de son exis­tence. » Et neuf mois plus tard, conscient des erre­ments de plus en plus fré­quents sur le sujet, Pie XII se vit dans l’obligation de rap­pe­ler de façon claire une consé­quence à ce prin­cipe, consé­quence qui appa­rait pour­tant évi­dente aux catho­liques : « toute forme d’euthanasie directe est illi­cite parce qu’on pré­tend alors dis­po­ser direc­te­ment de la vie. »

La majo­ri­té des états ne recon­naissent pas offi­ciel­le­ment l’euthanasie active (notion expli­quée plus bas). Cependant, les Pays-​Bas ont été le pre­mier pays au monde à en léga­li­ser la pra­tique, en 2001. La Belgique lui emboî­ta le pas en 2002 et, en 2008, alla même plus loin par son exten­sion aux per­sonnes pré­sen­tant des troubles psy­chia­triques. En 2014, tou­jours en Belgique, la sup­pres­sion de toute limite d’âge a léga­li­sé l’euthanasie des mineurs. En Suisse, l’euthanasie est inter­dite mais le sui­cide assis­té auto­ri­sé1. En France, l’euthanasie et le sui­cide assis­té sont offi­ciel­le­ment inter­dits mais la plu­part des recours judi­ciaires ont don­nés lieu à des non-​lieux ou des peines sym­bo­liques. La Cours euro­péennes des droits de l’homme (CEDH) se montre réti­cente à l’égard de l’euthanasie depuis qu’un recours por­té devant elle en 2002 sur un cas anglais l’a ame­né à légi­fé­rer en refu­sant de recon­naître à qui­conque « le droit à mourir ».

Historique rapide de la législation en France

Loi du 9 juin 1999 : Rien à signa­ler ; elle donne le droit à tout patient de pro­fi­ter de soins palliatifs.

Loi Kouchner du 4 mars 2002 (qui a abou­ti, dans la pra­tique, à la signa­ture d’un docu­ment avant inter­ven­tion, dans lequel on recon­nait avoir été infor­mé par le méde­cin de ce que l’on va subir).

La loi Leonetti du 22 avril 2005 : Cette loi dit vou­loir « évi­ter l’obstination dérai­son­nable » ; elle renou­velle l’obligation d’informer le patient ou la famille de son état ; elle demande que l’on prenne en compte un refus du trai­te­ment ; enfin, si le malade est incons­cient, la déci­sion d’arrêter un trai­te­ment jugé dérai­son­nable est pris par le méde­cin, après une pro­cé­dure col­lé­giale et écoute de la famille ; dans ce der­nier cas, les direc­tives anti­ci­pées sont impor­tantes. Cependant cette loi omet plu­sieurs points pour­tant capi­taux : elle ne veut pas défi­nir l’euthanasie ; l’obstination dérai­son­nable n’est pas non plus bien défi­nie et ouvre la porte à l’euthanasie pas­sive.
En effet, la notion « obs­ti­na­tion dérai­son­nable » fut intro­duite dans la loi, au détri­ment du terme « achar­ne­ment thé­ra­peu­tique », qui était l’expression pré­cé­dem­ment uti­li­sée dans le cadre de ce sujet. Fut en effet ajou­té à la loi de 2002, ce qui suit : « Les actes men­tion­nés à l’ar­ticle L. 1110–5 [pré­ven­tion, inves­ti­ga­tion ou trai­te­ment] ne doivent pas être pour­sui­vis lors­qu’ils résultent d’une obs­ti­na­tion dérai­son­nable. » Pour être moins agres­sive, l’expression n’en est pas moins redou­table. La suite de l’article per­met de com­prendre le venin conte­nu dans cette loi : « Lorsqu’ils appa­raissent inutiles, dis­pro­por­tion­nés ou lors­qu’ils n’ont d’autre effet que le seul main­tien arti­fi­ciel de la vie, ils peuvent être sus­pen­dus ou ne pas être entrepris. »

En intro­dui­sant « le seul main­tien arti­fi­ciel de la vie » sans aucune cir­cons­tance, on ouvre la porte à des inter­pré­ta­tions fran­che­ment euthanasiques.

Mais c’est aus­si en ne vou­lant pas défi­nir (et dis­tin­guer) soin et trai­te­ment que cette loi Leonetti était viciée car elle laisse la porte ouverte à consi­dé­rer un soin légi­time et élé­men­taire (nutri­tion, hydra­ta­tion) comme un trai­te­ment, qui pour­rait alors être arrê­té car jugé dérai­son­nable (cf. le cas de Vincent Lambert). D’ailleurs la modi­fi­ca­tion de la loi en 2016 confirme cette crainte.

Enfin, la loi Claeys-​Leonetti du 2 février 2016 pré­cise la loi pré­cé­dente dans le sens d’un élar­gis­se­ment vers l’euthanasie, tout en refu­sant de la léga­li­ser. De plus, ins­pi­ré par l’affaire Vincent Lambert et la déci­sion du Conseil d’Etat du 24 juin 2014, le légis­la­teur a affir­mé que la nutri­tion et l’hy­dra­ta­tion arti­fi­cielles sont des trai­te­ments (et non des soins ordi­naires) sus­cep­tibles d’être arrê­tés au titre du refus de l’obstination dérai­son­nable. L’article L 1110–5 (« Lorsqu’ils appa­raissent inutiles, dis­pro­por­tion­nés ou lors­qu’ils n’ont d’autre effet que le seul main­tien arti­fi­ciel de la vie, ils peuvent être sus­pen­dus ou ne pas être entre­pris ») fut pré­ci­sé comme ceci : « confor­mé­ment à la volon­té du patient et, si ce der­nier est hors d’é­tat d’ex­pri­mer sa volon­té, à l’is­sue d’une pro­cé­dure col­lé­giale défi­nie par voie régle­men­taire. – La nutri­tion et l’hy­dra­ta­tion arti­fi­cielles consti­tuent des trai­te­ments qui peuvent être arrê­tés confor­mé­ment au pre­mier ali­néa du pré­sent article. » (Article L1110‑5–1 du Code de la san­té publique).

Les direc­tives anti­ci­pées prennent plus d’importance que sous la pre­mière loi, celle de 2005. Ces direc­tives anti­ci­pées expriment main­te­nant la volon­té (et non plus sim­ple­ment les sou­haits, comme en 2005) de la per­sonne malade concer­nant sa fin de vie. Toute per­sonne majeure peut en rédi­ger pour le cas où elle serait un jour hors d’é­tat d’ex­pri­mer sa volon­té. La plus grande place don­née à la volon­té du patient va dans le sens du sui­cide assis­té. Le rôle de la per­sonne de confiance est éga­le­ment élar­gi ain­si que le droit du patient à refu­ser les soins. Mais sur­tout, la grande nou­veau­té de la loi Claeys-​Leonetti c’est l’introduction d’un droit du patient à une séda­tion pro­fonde et conti­nue jusqu’au décès.

La loi de 2005 pré­voyait la pos­si­bi­li­té d’« une séda­tion admi­nis­trée en phase ter­mi­nale » qui n’avait comme objec­tif que de sou­la­ger, quitte à l’endormir tota­le­ment, un malade qui subis­sait une situa­tion de souf­france insup­por­table. Son objec­tif n’était pas de pro­vo­quer la mort mais de sou­la­ger le malade en le ren­dant incons­cient pour qu’il ne vive pas l’effroi de souf­france insup­por­table. Même si de fait, en rai­son de l’importance des doses néces­saires pour obte­nir cette séda­tion totale, bien sou­vent on accé­lé­re­rait la sur­ve­nue du décès. Bref ce n’était pas une eutha­na­sie c’était un soin pal­lia­tif légi­time. L’exemple clas­sique était celui-​ci : un patient souffre d’un can­cer avec un risque d’étouffement. Dès l’existence de ce risque, le méde­cin l’informe de la pos­si­bi­li­té de l’endormir si un jour il res­sent une sen­sa­tion d’étouffement insup­por­table. Si cette sen­sa­tion arrive, le méde­cin endort le malade avec son accord pour qu’il ne souffre pas. Le patient et le méde­cin acceptent – même si ce n’est pas leur but – que cette séda­tion en rai­son de la dose des pro­duits néces­saires puisse indi­rec­te­ment accé­lé­rer la sur­ve­nue du décès. Pie XII, nous le ver­rons, avait déjà exa­mi­né cette situa­tion et approu­vé sa mora­li­té en 1957.

En résu­mé dans la nou­velle loi Claeys-​Leonetti, est intro­duit un droit du malade incu­rable à exi­ger la « séda­tion ter­mi­nale » et l’arrêt des trai­te­ments comme moyen de se don­ner la mort sans souf­france. Et cela la morale natu­relle et catho­lique ne l’ont et ne pour­ront jamais l’accepter. Cette loi repose sur une incom­pré­hen­sion de la valeur de la souf­france humaine et donc dérive de la men­ta­li­té protestante.

Les motifs invoqués pour autoriser l’euthanasie

1er motif : la pitié et la compassion pour la souffrance d’autrui

Ce motif, lar­ge­ment répan­du dans la socié­té moderne, a une ori­gine pro­tes­tante. C’est en effet un pas­teur épis­co­pa­lien, pro­fes­seur et théo­lo­gien pro­tes­tant, Joseph Fletcher2 qui l’a expo­sé et ren­du popu­laire dans les années 60. A peu près à la même époque que Pie XII, ce pro­fes­seur jus­ti­fiait à l’époque tout type d’euthanasie, du moment que c’est l’amour du pro­chain qui en est le moteur. Ainsi, l’amour du pro­chain, la pitié, la com­pas­sion pour­rait tout à fait jus­ti­fier d’aider quelqu’un à mettre fin à ses jours. Pour ce pas­teur pro­tes­tant donc, la fin jus­ti­fie les moyens. Pie XII n’avait pas atten­du les écrits de Joseph Fletcher pour mettre en garde contre cette fausse notion de com­pas­sion. Dès 1947, il écri­vait : « Nous pen­sons à cette ten­dance géné­reuse qui nous fait éprou­ver comme nôtres les sen­ti­ments d’autrui, com­pa­tir à leurs angoisses, par­ta­ger leurs peines. […] Dans l’ordre social, une pareille sen­si­bi­li­té aveugle l’esprit et lui fait sou­te­nir en théo­rie des thèses mons­trueuses, prô­ner des pra­tiques immo­rales et néfastes. N’en est-​ce pas une que cette fausse pitié qui pré­tend jus­ti­fier l’euthanasie et sous­traire l’homme à la souf­france puri­fi­ca­trice et méri­toire, non par un cha­ri­table et louable sou­la­ge­ment, mais par la mort telle qu’on la donne à un ani­mal sans rai­son et sans immortalité ? »

2e motif : la liberté humaine

En 1885, Nietzsche, dans son recueil Ainsi par­lait Zarathoustra, fai­sait déjà l’éloge de la « mort libre, qui vient de moi, parce que je le veux. » C’est l’orgueil humain pous­sé à l’extrême, orgueil atti­sé par le démon qui est « homi­cide depuis le début » et qui se joue ain­si de ces « héros » de l’humanité déchue, croyant être le maître de leur vie et de leur mort.

3e motif : la dignité humaine

Ce motif est lié à la fausse notion de liber­té humaine, éri­gée en prin­cipe direc­teur de tout l’agir. L’homme ne veut plus se voir dimi­nuer par la mala­die, la vieillesse ou la souf­france, et exige de pou­voir mou­rir avec digni­té, c’est-à-dire d’être eutha­na­sié quand il est encore en pleine pos­ses­sion de ses moyens.

4e motif : l’intérêt de la société

Ce motif fut mis en avant par Hitler en Allemagne, et a resur­gi de nos jours pour essayer de jus­ti­fier l’injustifiable. Hitler en effet, dès 1939, mit au point le pro­gramme aktion T4, appe­lé aus­si « pro­gramme d’eu­tha­na­sie ». C’était un véri­table pro­to­cole d’élimination des han­di­ca­pés phy­siques et men­taux. Son but était d’é­li­mi­ner ceux que les eugé­nistes et leurs par­ti­sans consi­dé­raient comme des far­deaux géné­tiques et finan­ciers pour la socié­té et l’Etat alle­mands : les per­sonnes atteintes de han­di­caps psy­chia­triques, neu­ro­lo­giques ou phy­siques. Hitler impo­sa le mot de « gna­den­tod » qui peut se tra­duire par « mort infli­gée par pitié » ou « mort misé­ri­cor­dieuse », pour faire pas­ser cette loi. Rappelons que dès 1940, le pape Pie XII fai­sait publier une com­mu­ni­ca­tion qui rap­pe­lait que : « il est inter­dit de tuer, sur ordre de l’autorité publique, des per­sonnes […] qui du seul fait d’une infir­mi­té psy­chique ou phy­sique, ne peuvent plus être utiles à la nation » (2 décembre 1940).

Questions de mots

1. Usufruitier

D’abord penchons-​nous sur la notion avan­cée par Pie XII pour expli­quer l’immoralité de prin­cipe de l’euthanasie, le terme d’usufruitier : « l’homme n’est pas maître ni pos­ses­seur mais seule­ment usu­frui­tier de son corps et de son existence. »

C’est un terme de droit natu­rel et humain qui découle du droit de pro­prié­té. Sans entrer dans les détails, l’usufruitier est celui qui peut user d’un bien, mais sans en être pro­prié­taire ; et dans cet usage, il a le droit d’aliéner les fruits de ce bien, c’est-à-dire de les don­ner à d’autres per­sonnes, dans la mesure bien sûr, où le droit natu­rel est res­pec­té. C’est ce prin­cipe qui règle les rap­ports de l’homme avec son propre corps et son exis­tence. Bien évi­dem­ment, vis-​à-​vis du corps et de l’existence des autres hommes, Pie XII rap­pe­lait que, décou­lant de ce prin­cipe, on peut encore moins dis­po­ser de la vie d’autrui. Ce serait faire acte d’euthanasie directe que de pré­tendre l’inverse.

D’où une seconde notion à éclair­cir : celle d’euthanasie directe (et indirecte).

2. Distinction entre les types d’euthanasies

a) La vision moderne de l’euthanasie

De nos jours, par suite de l’évolution des lois pro-​euthanasie, beau­coup ont essayé de don­ner une clas­si­fi­ca­tion des eutha­na­sies, qui res­semble à celle du pas­teur Fletcher. Ainsi, trois cri­tères sont géné­ra­le­ment pro­po­sés (cf. Penser l’euthanasie, Jean-​Yves Goffi).

  • Le pre­mier cri­tère concerne ce qui cause l’euthanasie : il peut s’agir d’une action ou d’une omis­sion. Dans le pre­mier cas, on par­le­ra d’eutha­na­sie active (ou posi­tive), dans le second d’eutha­na­sie pas­sive (ou néga­tive).
  • Un deuxième cri­tère per­met­trait de dis­tin­guer eutha­na­sies directes et indi­rectes : dans les eutha­na­sies directes, l’action ou l’omission sont une condi­tion suf­fi­sante du décès du malade. Dans les eutha­na­sies indi­rectes, l’action ou l’abstention d’un acte ne sont pas une condi­tion suf­fi­sante du décès, mais y par­ti­cipe. C’est par exemple l’administration d’opiacées à forte dose, dose entraî­nant la mort ; ou cela peut être l’omission de l’alimentation et de l’hydratation, pro­vo­quant l’issue fatal de façon indirecte.
  • Un troi­sième cri­tère concerne la per­sonne eutha­na­siée elle-​même : consent-​elle, refuse-​t-​elle de consen­tir ou bien est-​elle hors d’état de consen­tir à l’acte qui met­tra fin à sa vie ?
1er cri­tère 2e cri­tère Type d’euthanasie : 3e cri­tère
Action Est suf­fi­sante pour cau­ser le décès Active directe Pour chaque type d’euthanasie, on dis­tingue entre volon­taire, contre la volon­té et en absence de volonté
N’est pas suf­fi­sante pour cau­ser le décès Active indi­recte
Omission Est suf­fi­sante pour cau­ser le décès Passive directe
N’est pas suf­fi­sante pour cau­ser le décès Passive indi­recte

En fait ces dis­tinc­tions, qu’on pour­rait appe­ler juri­diques, n’ont pas toutes le même inté­rêt dans le juge­ment moral à por­ter sur l’euthanasie. Elle laisse qua­si­ment sous silence l’intention de celui qui pose l’acte ou qui omet un acte néces­saire à la vie. Et sur­tout, ces notions refusent de prendre en compte la loi natu­relle. Par exemple, l’homme n’étant que l’usufruitier de son corps et de son exis­tence, que la per­sonne « eutha­na­siée » soit consen­tante ou non, ne change rien à la mora­li­té de l’acte : Il s’agit d’un meurtre ou d’un sui­cide assis­té, tous deux contraires au cin­quième com­man­de­ment de Dieu : « Tu ne tue­ras point ». Rappelons que la jus­ti­fi­ca­tion morale de ce com­man­de­ment est que le meurtre prive autrui du plus grand des biens, celui de la vie, qui est ici-​bas la condi­tion d’existence de tous les autres biens natu­rels et sur­na­tu­rels. Mais le meurtre lèse sur­tout le droit exclu­sif de Dieu sur la vie et la mort comme le rap­pe­lait Pie XII. Le sui­cide, et donc le sui­cide assis­té ajoute au meurtre, l’injure envers la socié­té, dont celui qui se sui­cide fait par­tie ; et injure envers Dieu, qui ne nous a pas don­ner pro­prié­té sur notre propre vie, mais uni­que­ment l’usage et l’administration, avec la charge de gar­der cette vie. Cela n’empêchera pas d’exposer sa vie au besoin, mais pour un plus grand bien, comme la défense de la patrie, ou de sa foi.

Pour le droit civil, la dis­tinc­tion essen­tielle est celle entre eutha­na­sie active – non léga­le­ment auto­ri­sée par la plu­part des états (cf. intro­duc­tion) – et eutha­na­sie pas­sive, sans tenir compte, comme on l’a vu, de l’intention de celui qui agit ou qui arrête une action néces­saire à la vie.

Une autre divi­sion qui a de l’importance dans le droit civil, est celle entre eutha­na­sie volon­taire et eutha­na­sie contre la volon­té ou en l’absence de volon­té du sujet.

b) La vision du protestant Joseph Fletcher

Pour Joseph Fletcher dont nous avons par­lé, l’euthanasie directe consiste à mettre fin aux jours de quelqu’un, par un acte posi­tif et déli­bé­rée ; et l’euthanasie indi­recte consiste à poser un acte ou à en omettre un, ce qui a pour consé­quence indi­recte, la mort de la per­sonne. Ce qui est impor­tant, c’est que pour Fletcher, les deux sont jus­ti­fiés quand c’est l’amour du pro­chain qui en est le moteur.

c) La vue catholique et la moralité des actes humains

Pour mieux com­prendre les dis­tinc­tions que l’on applique à l’euthanasie, dis­tinc­tions que Pie XII uti­li­sa lui-​même en par­lant d’euthanasie directe, il convient de reve­nir aux prin­cipes de la mora­li­té des actes humains, prin­cipes rap­pe­lés par saint Thomas d’Aquin et par tous les mora­listes catho­liques à sa suite.

Ce qui donne à l’acte humain sa mora­li­té, ce sont trois élé­ments : l’objet moral lui-​même ; les cir­cons­tances ; la fin de celui qui agit.
L’objet moral est ce vers quoi tend l’acte humain de par sa nature ; c’est ce qu’on appelle la finis ope­ris. Ce sont la loi natu­relle et le droit natu­rel qui fondent l’objet moral d’un acte (l’homme ne peut pas chan­ger cette moralité).

A cet objet moral s’ajoutent les cir­cons­tances par­ti­cu­lières dans les­quelles l’acte est posé. Ce sont des condi­tions morales qui ajoutent quelque chose ou par­fois, peuvent modi­fier la mora­li­té de l’acte.

Et puis, il y la fin de celui qui agit, qu’on appelle la finis ope­ran­tis, pour la dis­tin­guer de la finis ope­ris : elle a une très grande impor­tance car l’homme agit tou­jours en vue d’une fin.

Ainsi on peut dres­ser le tableau suivant :

Objet moral Fin de celui qui agit Acte
Indifférent + Bonne = Bon
Indifférent Mauvaise Mauvais
Bon Totalement mau­vaise Mauvais (la bon­té objec­tive de l’acte est détruit)
Bon Partiellement mau­vaise Double : à la fois bon et mauvais
Mauvais Mauvaise « Doublement » mauvais
Mauvais Bonne Peut être moins mauvais

Aussi, pour Pie XII, et pour la morale catho­lique, l’euthanasie directe, tou­jours inter­dite, est celle qui découle d’une volon­té déli­bé­rée de tuer le patient, quelle qu’en soit le motif, même sous cou­vert d’un bien, même deman­dé par le patient lui-​même. Il n’est évi­dem­ment jamais per­mis de faire un acte mau­vais en soi, quel que soit le bien espé­ré qui pour­rait en résul­ter. Saint Paul écrit en effet : « Ne fai­sons pas le mal pour qu’il en advienne un bien » (Rom 3.8.). Combien de fois Pie XII n’a‑t-il pas répé­té ce grand principe !

L’euthanasie indi­recte, et qui est pos­sible selon la morale catho­lique, est celle qui pro­voque la mort du patient sans volon­té de la don­ner. On voit par cette défi­ni­tion que la notion moderne d’euthanasie indi­recte ne cor­res­pond pas à la notion catho­lique uti­li­sant pour­tant les mêmes mots. L’exemple-type d’euthanasie indi­recte est l’administration d’un séda­tif ou d’un anal­gé­sique puis­sant pour cal­mer les dou­leurs, sachant que ce pro­duit peut pro­vo­quer à plus ou moins long terme la mort du patient.

La ques­tion qui se pose alors est de savoir s’il est per­mis de poser un acte dont il résul­te­ra à la fois un bien et un mal ? Est-​il per­mis par exemple d’injecter des anal­gé­siques puis­sants dont on sait qu’ils risquent aus­si de pro­vo­quer la mort du patient ? Pie XII a en par­tie répon­du à ces ques­tions et parle de ce qu’on appelle en moral, le volon­taire indi­rect ou le prin­cipe du double effet. Et par ses réponses, il a défi­ni aus­si les limites de l’acharnement thérapeutique.

3. Le principe du double effet ou le volontaire indirect

Quand on pose un acte qui a à la fois un effet bon et un effet mau­vais, on doit appli­quer ce que Pie XII appelle le prin­cipe du double effet, pour savoir si l’on peut ou non agir, du point de vue moral. Ce prin­cipe est d’une appli­ca­tion beau­coup plus large d’ailleurs que l’interruption ou non des appa­reils qui main­tiennent un patient (ou sim­ple­ment cer­tains de ses organes ?) en vie.

Quatre condi­tions sont néces­saires (il faut les 4) pour qu’un acte cau­sant à la fois un bien et un mal soit licite :

  1. L’action posée est en elle-​même bonne ou indif­fé­rente (finis ope­ris) ;
  2. L’effet bon est immé­diat c’est-à-dire qu’il n’est pas cau­sé et ne découle pas de l’effet mauvais ;
  3. La fin de celui qui agit est bonne (finis ope­ran­tis) ;
  4. Les rai­sons de poser l’acte sont pro­por­tion­nel­le­ment graves (car n’oublions pas qu’un mal en découle tout de même). Ces rai­sons doivent être d’autant plus grandes que 
    1. le mal indi­rec­te­ment cau­sé est grave ; 
    2. l’action posée influe de façon pro­chaine sur la mal causé ; 
    3. le mal cau­sé est certain ; 
    4. l’obligation d’empêcher le mal est forte (on agit ex offi­cio).

L’acharnement thérapeutique

Pie XII a en effet expri­mé de façon claire l’attitude catho­lique face au pro­blème de l’acharnement thé­ra­peu­tique, pro­blème que ce Souverain Pontife expo­sait sous la forme de deux ques­tions : « a‑t-​on le droit, ou même l’obligation, d’utiliser les appa­reils modernes de res­pi­ra­tion arti­fi­cielle dans tous les cas, même dans ceux qui, au juge­ment du méde­cin, sont consi­dé­rés comme com­plè­te­ment déses­pé­rés ? En second lieu, a‑t-​on le droit ou l’obligation d’enlever l’appareil res­pi­ra­toire, quand, après plu­sieurs jours, l’état d’inconscience pro­fonde ne s’améliore pas, tan­dis que, si on l’enlève, la cir­cu­la­tion s’arrêtera en quelques minutes ? » (Pie XII, Discours sur les Problèmes de la Réanimation, 24 novembre 1957)

Si les cir­cons­tances ont quelque peu chan­gé en cin­quante ans, essen­tiel­le­ment d’ailleurs sur la dis­tinc­tion entre moyens ordi­naires et moyens extra­or­di­naires de main­te­nir un être humain en vie arti­fi­ciel­le­ment, les prin­cipes eux res­tent immuables : « la rai­son natu­relle et la morale chré­tienne disent que l’homme (et qui­conque est char­gé de prendre soin de son sem­blable) a le droit et le devoir, en cas de mala­die grave, de prendre les soins néces­saires pour conser­ver la vie et la san­té. Ce devoir, qu’il a envers lui-​même, envers Dieu, envers la com­mu­nau­té humaine, et le plus sou­vent envers cer­taines per­sonnes déter­mi­nées, découle de la cha­ri­té bien ordon­née, de la sou­mis­sion au Créateur, de la jus­tice sociale et même de la jus­tice stricte, ain­si que de la pié­té envers sa famille. Mais il n’oblige habi­tuel­le­ment qu’à l’emploi des moyens ordi­naires (sui­vant les cir­cons­tances de per­sonnes, de lieux, d’époques, de culture), c’est-à-dire des moyens qui n’imposent aucune charge extra­or­di­naire pour soi-​même ou pour un autre. Une obli­ga­tion plus sévère serait trop lourde pour la plu­part des hommes, et ren­drait trop dif­fi­cile l’acquisition de biens supé­rieurs plus impor­tants. La vie, la san­té, toute l’activité tem­po­relle, sont en effet subor­don­nées à des fins spi­ri­tuelles. Par ailleurs, il n’est pas inter­dit de faire plus que le strict néces­saire pour conser­ver la vie et la san­té, à condi­tion de ne pas man­quer à des devoirs plus graves » (Pie XII, Discours sur les Problèmes de la Réanimation, 24 novembre 1957).

Ensuite Pie XII en vient à don­ner la solu­tion pra­tique au pro­blème sou­le­vé : « l’anesthésiologue a le droit, dans tous les cas d’inconscience pro­fonde, même dans ceux qui sont com­plè­te­ment déses­pé­rés au juge­ment d’un méde­cin com­pé­tent, d’utiliser les appa­reils modernes de res­pi­ra­tion arti­fi­cielle, même contre la volon­té de la famille. Mais il n’en a pas l’obligation, à moins que ce ne soit l’unique moyen de satis­faire à un autre devoir moral cer­tain. Les droits et les devoirs du méde­cin sont cor­ré­la­tifs à ceux du patient. Le méde­cin, en géné­ral, ne peut agir, que si le patient l’y auto­rise expli­ci­te­ment ou impli­ci­te­ment (direc­te­ment ou indi­rec­te­ment). La tech­nique de réani­ma­tion, dont il s’agit ici, ne contient en soi rien d’immoral ; aus­si le patient – s’il était capable de déci­sion per­son­nelle – pour­rait l’utiliser lici­te­ment et, par consé­quent, en don­ner l’autorisation au méde­cin. Par ailleurs, comme ces formes de trai­te­ment dépassent les moyens ordi­naires, aux­quels on est obli­gé de recou­rir, on ne peut sou­te­nir qu’il soit obli­ga­toire de les employer. […] S’il appa­raît que la ten­ta­tive de réani­ma­tion consti­tue en réa­li­té pour la famille une telle charge qu’on ne puisse pas en conscience la lui impo­ser, elle peut lici­te­ment insis­ter pour que le méde­cin inter­rompe ses ten­ta­tives, et le méde­cin peut lici­te­ment obtem­pé­rer. Il n’y a en ce cas aucune dis­po­si­tion directe de la vie du patient, ni eutha­na­sie, ce qui ne serait jamais licite ; même quand elle entraîne la ces­sa­tion de la cir­cu­la­tion san­guine, l’interruption des ten­ta­tives de réani­ma­tion n’est jamais qu’indirectement cause de la ces­sa­tion de la vie, et il faut appli­quer dans ce cas le prin­cipe du double effet et celui du volon­ta­rium in cau­sa » (Pie XII, Discours sur les Problèmes de la Réanimation, 24 novembre 1957).

Mais une fois que ces moyens ont été uti­li­sé et ont été effi­caces, qu’en est-​il de « débran­cher » quelqu’un qui a été main­te­nu en vie et qui ne demeure en vie que grâce à des appa­reils ? Pie XII conti­nue : « Ainsi avons-​Nous déjà répon­du pour l’essentiel à la deuxième ques­tion : Le méde­cin peut-​il enle­ver l’appareil res­pi­ra­toire avant que ne se pro­duise l’arrêt défi­ni­tif de la cir­cu­la­tion ? Il faut répondre affir­ma­ti­ve­ment, comme Nous l’avons déjà expliqué. »

Réponses claires de Pie XII, mais réponse, en tout cas pour la deuxième réponse, qui peut nous sur­prendre. Pie XII semble auto­ri­ser l’arrêt de l’appareil res­pi­ra­toire alors qu’il reste des signes de vie chez le patient. En fait, c’est la notion de moyens extra­or­di­naires qui a varié depuis Pie XII. Le res­pi­ra­teur arti­fi­ciel était quelque chose de vrai­ment extra­or­di­naire à son époque. Cinquante ans plus tard ce n’est plus le cas. Quand aujourd’hui on « débranche » un patient, cela nor­ma­le­ment ne concerne que l’intubation dite pro­fonde mais pas la simple assis­tance res­pi­ra­toire (moyen ordi­naire). Il est tout à fait légi­time de sup­pri­mer une intu­ba­tion pour voir si le malade res­pire spon­ta­né­ment encore (avec la simple assis­tance res­pi­ra­toire). Et si ce n’est pas le cas, en tant que catho­lique, on n’est pas tenu de réin­tu­ber (moyen extraordinaire).

Réponse aux motifs pro-euthanasie

L’euthanasie directe est donc un crime, les motifs avan­cés en sa faveur ne peuvent qu’être des sophismes. L’utilité de la socié­té en est un : éli­mi­ner les indi­vi­dus soit-​disant inutiles ou cou­teux pour la socié­té, c’est tom­ber dans le tota­li­ta­risme le plus abject, qui fait du « tout » le seul abso­lu, et qui a pour prix de broyer les individus.

« Choisir sa mort », c’est aus­si refu­ser la mort que la Providence nous a pré­pa­rée : naître comme je veux, en éprou­vette, mou­rir comme je veux, par auto-​délivrance : c’est la même révolte contre l’ordre natu­rel, le même esprit de rébel­lion contre Dieu.

« En finir avec une vie qui n’a plus de sens » parce qu’elle se sait condam­née, avec une « vie dégra­dée » par des souf­frances aiguës, avec une « vie amoin­drie » par l’état d’inconscience : autant de sophismes ! – La vie ter­restre trouve son sens dans la vie éter­nelle ; même souf­frante ou incons­ciente, la per­sonne conserve sa digni­té d’être créée à l’image et à la res­sem­blance de Dieu, la digni­té d’un « être d’éternité ». C’est pour­quoi, dit Pie XII (aux méde­cins chi­rur­giens, 13 février 1945), « le méde­cin mépri­se­ra toute sug­ges­tion qui lui sera faite de détruire la vie, si frêle et si humai­ne­ment inutile que cette vie puisse paraître ».

Regard chrétien sur la mort et la souffrance

Dans tout cela, il ne faut pas non plus oublier ce que l’Eglise catho­lique nous enseigne sur la souf­france et sa valeur rédemp­trice. C’est un dis­cours incom­pré­hen­sible aux pro­tes­tants, puisque pour eux, Jésus-​Christ a souf­fert ample­ment pour nous et que ce serait blas­phème que de voir dans nos souf­frances, une valeur rédemp­trice car elle insi­nue­rait que le Christ n’a pas réel­le­ment offert un sacri­fice suf­fi­sant pour répa­rer tous les péchés. Et c’est pour­quoi le méde­cin pro­tes­tant, tout autant que ceux qui se disent athées, s’insurge contre doc­trine catho­lique qui rap­pelle les bien­faits de la souf­france pour le salut de l’âme.

Pour le chré­tien, la mort appa­raît aus­si comme une libé­ra­tion : déli­vrance des souf­frances d’abord, souf­frances inhé­rentes à cette vie d’ici-bas ; libé­ra­tion du péché, ensuite et sur­tout. Il est de foi que le péché n’a pas droit de cité au Ciel. Peut-​être cela pour­rait paraître acci­den­tel aux yeux de cer­tains. Mais au contraire, pour celui qui s’évertue, avec la grâce de Dieu, de Lui plaire, savoir qu’on ne L’offensera plus est une grande source de joie, par oppo­si­tion à la tris­tesse issue d’avoir offen­sé Dieu et qui fai­sait s’exclamer saint Paul : « je ne fais pas le bien que je veux et je com­mets le mal que je ne veux pas. […] Malheureux homme que je suis ! Qui me déli­vre­ra de ce corps qui me voue à la mort ? »3.

Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus raconte quatre mois avant sa mort, un court dia­logue qu’elle a eu avec l’aumônier du car­mel : là aus­si trans­pa­raît bien cette convic­tion que la mort est une déli­vrance : « Mr Youf (l’aumônier du car­mel de Lisieux à l’époque) m’a dit encore : êtes-​vous rési­gnée à mou­rir ? Je lui ai répon­du : Ah ! Mon Père, je trouve qu’il n’y a besoin de rési­gna­tion que pour vivre. Pour mou­rir, c’est de la joie que j’éprouve. »4

Il est évident que cette aspi­ra­tion à être libé­ré du péché dont parle saint Paul ou saint Jean de la Croix, n’est pas sou­mise à la volon­té du mou­rant ou d’un tiers, mais à celle uni­que­ment de Dieu, qui seul est le maître de la vie et de la mort.

En conclu­sion nous lais­se­rons la parole au Père Pierre-​Thomas Dehau, o.p., qui illustre par­fai­te­ment la valeur de la souf­france dans notre vie ici-​bas dans son livre Le contem­pla­tif et la Croix :

« Dieu a vu cette mer­veille qui n’est pos­sible qu’à, la nature humaine : souf­frir et mou­rir par amour. La nature angé­lique ne peut pas mou­rir, et elle ne peut souf­frir que par puni­tion du péché. Les bons anges n’ont jamais souf­fert ; les mau­vais anges souffrent, mais c’est un châ­ti­ment. Les natures supé­rieures à l’homme, peuvent aimer mais ne peuvent ni souf­frir, ni mou­rir par amour, et si les ani­maux, eux, souffrent et meu­rent ; ce ne peut être par amour. Il n’y a donc que la nature humaine qui puisse faire cela : sai­gner et pleu­rer par amour. Le ciel tout entier, et même le ciel tel qu’il est main­te­nant, avec Jésus dans tout l’é­clat de sa résur­rec­tion et de son ascen­sion glo­rieuse, avec la Vierge Marie, ne peut plus don­ner ni une larme, ni une goutte de sang. […] Il faut vous sou­ve­nir de ces motifs si vous vou­lez com­prendre quelque chose de ce que le Seigneur demande à cer­taines âmes très géné­reuses, tout en les lais­sant entiè­re­ment libres. Il n’a­vait que trente-​trois ans à pas­ser en ce monde, c’est trop court pour quel­qu’un qui a une soif infi­nie de souf­frances… N’oublions jamais que Notre-​Sei­gneur ne peut plus souf­frir, ne peut plus méri­ter que par nous. Ne lui refu­sons pas ce service. »

Abbé Thierry Legrand

Sources : La Porte Latine du 11 décembre 2019

  1. La prin­ci­pale dis­tinc­tion tient à l’as­so­cia­tion du patient dans le pro­ces­sus de fin de vie. Dans le cas de l’eu­tha­na­sie, la déci­sion d’a­bré­ger les souf­frances d’un patient atteint d’une mala­die incu­rable est non seule­ment prise par le corps médi­cal mais éga­le­ment exé­cu­tée par lui. Lors d’un sui­cide médi­ca­le­ment assis­té, c’est le patient lui-​même qui effec­tue l’acte pro­vo­quant la mort. []
  2. Pour infor­ma­tion, ce pro­fes­seur fut le pré­sident de l’Euthanasia Society of America (plus tard appe­lée la Société pour le droit de mou­rir) de 1974 à 1976. Il est connu aus­si pour sa théo­rie de l’éthique de situa­tion, selon laquelle ce sont les cir­cons­tances et uni­que­ment elles qui donnent la valeur morale à un acte ; les règles d’agir n’étant pas abso­lues. Le seul abso­lu serait l’amour du pro­chain. C’est lui qui garan­ti­rait la mora­li­té des actes, mais cha­cun étant libres, selon les prin­cipes pro­tes­tants, d’interpréter les exi­gences de cet amour à la lumière de sa conscience et des cir­cons­tances par­ti­cu­lières à chaque acte. []
  3. Romains 7,19 ;24 []
  4. Carnet Jaune, 6 juin 1897 []