Vous avez choisi Rome, chers fils, comme lieu de réunion de la Conférence Internationale du Scoutisme Catholique, et c’est la première fois que vos dirigeants nationaux se rassemblent dans la Ville éternelle. Vous deviez d’ailleurs y traiter un sujet qui vous appelait de préférence près du Vicaire de Jésus-Christ : « L’apostolat dans et par le scoutisme ». Soucieux de répondre aux pressants appels que Nous avons adressés à tous les catholiques, vous voulez prendre toute la responsabilité, qui vous revient dans l’apostolat de l’Église, noble et généreuse résolution, tout à fait conforme à l’esprit du scoutisme.
Chacun sait en effet que, dès le début, la religion y a tenu la première place ; mais vous avez conscience également de ce que le catholicisme ajoute de force et de précision à l’œuvre éducatrice que vous poursuivez. Il ne s’agit pas seulement pour vous de former de meilleurs citoyens, plus actifs, plus dévoués au bien commun de la cité temporelle ; il faut aussi former de meilleurs fils de l’Église. Or dans l’Église catholique la mission apostolique descend de la hiérarchie aux fidèles, et de nos jours tous les fidèles, selon leurs moyens, sont appelés à collaborer à cet apostolat.
À vrai dire, les garçons ne sont pas à l’âge de l’apostolat organisé, mais ils doivent y être préparés.
L’expérience d’une trentaine d’années a amplement démontré la valeur formatrice du scoutisme. Que de belles figures de grands chrétiens, de héros et de chefs, que de vocations religieuses et sacerdotales ont pris naissance dans les Troupes ! Attentifs cependant à combattre les déviations possibles, vous avez constamment révisé les méthodes et rappelé les principes. Si le scout aime la nature, ce n’est pas en égoïste ou en dilettante, ou simplement pour y jouir de l’espace, de l’air pur, du silence, de la beauté du paysage ; s’il y prend le goût de la simplicité, d’une saine rudesse en opposition avec la vie artificielle des villes et les servitudes de la civilisation mécanisée, ce n’est pas pour fuir les obligations de la vie civile. S’il cultive d’excellentes amitiés dans un groupe choisi, ce n’est pas pour refuser les contacts et les services, bien au contraire. Rien ne serait plus éloigné de son idéal. S’il aime les réalités concrètes, ce n’est pas non plus par mépris des idées et des livres. Il a souci d’une culture complète et harmonieuse, en rapport avec ses talents et les nécessités actuelles.
Pour atteindre ce but, la Promesse d’observer la Loi scoute, avec la grâce de Dieu, est un levier puissant, qui soulève la jeunesse au dessus des faiblesses et des tentations. Basée sur les fondements de la loi naturelle, la Loi scoute, par l’éducation de l’effort, par la pratique quotidienne de bonnes actions volontaires, fait appel à la droiture et à la fidélité, dont les jeunes ont si grand désir et qu’ils sont heureux d’être aidés à garder fermement. Elle leur fait prendre en horreur la fraude, le mensonge, la dissimulation. Les jeunes, sentant grandir leurs forces, sont naturellement généreux ; ils veulent lutter, se mesurer aux difficultés ; ils éprouvent le besoin de donner, de se donner, de se dépasser, et trouvent dans la pratique de la vie en plein air et dans la recherche de l’habileté manuelle un aliment adapté à leur âge. La pureté, favorisée par un tel climat moral, leur est aussi nettement définie et donne à leur énergie la réserve et la délicatesse chrétiennes.
Qui pourrait nier l’opportunité d’une telle éducation dans une civilisation, où règne l’égoïsme, la défiance, la lâcheté, l’amour effréné du plaisir ?
Le premier apostolat des scouts est celui de l’exemple dans la Troupe. En se formant personnellement et collectivement, ils sont déjà au service de l’Église et façonnent l’instrument de leur apostolat futur. Plus les fondements qu’ils posent seront larges et profonds, plus l’édifice de leur vie chrétienne sera solide et imposant ; plus le rayonnement de leurs qualités sera étendue, plus on fera appel à leur compétence pour la gloire de Dieu et l’honneur de l’Église.
Mais cette formation doit dès leur jeune âge, par les méthodes concrètes d’observation et de réflexion qui leur conviennent, être ouverte sur les réalités sociales, naturelles et surnaturelles. Ils doivent apprendre à vivre dans la société moderne, et pour cela être prudemment informés sur ses structures, ses qualités et ses défauts. Ils doivent particulièrement se préparer à prendre dans leur milieu et dans leur communauté paroissiale la part d’influence et de responsabilité, dont ils sont capables. En somme, la formation du caractère, qui est la fin principale du scoutisme, doit avoir une orientation franchement sociale et apostolique. Elle doit préparer à servir le prochain à la fois dans les contacts personnels et dans les institutions civiles et religieuses.
L’amour, que les scouts ont toujours eu pour la Personne divine du grand Chef, qui est la Route, la Vérité et la Vie, doit demeurer leur lumière et le soutien de leurs efforts quotidiens.
C’est ce que Nous Lui demandons de tout cœur, afin qu’au jour des responsabilités Il les trouve toujours prêts. Que dès aujourd’hui, sur vous-mêmes ici présents, sur tous les groupements nationaux que vous représentez, sur les chefs, sur les aumôniers et sur tous les scouts descendent les grâces qu’implore Notre Bénédiction apostolique.
Source : D’après le texte des A.A.S., vol. XXXXIV (1952), n. 11 – 12, pp. 578 – 580.