Saint Pie X

257ᵉ pape ; de 1903 à 1914

11 avril 1909

Lettre apostolique Martyrum purpurata sanguine

Béatification des trente-quatre martyrs de Chine, d’Annam et du Tonkin, François de Capillas, E.-Th. Cuénot, J.-P. Néel, P.-Fr. Néron, J.-Th. Vénard et leurs compagnons.

PIE X, PAPE

Pour per­pé­tuelle mémoire.

L’Église, cou­verte dès son ber­ceau de la pourpre du sang des mar­tyrs, n’a jamais, au cours des âges, ces­sé de don­ner au monde d’admirables leçons de cou­rage ; en aucun temps ne s’est close la série des invin­cibles ath­lètes du Christ, témoins par leur mort elle-​même de la véri­té de notre immor­telle foi. Depuis le xviie siècle jusqu’à nos jours, c’est l’empire de Chine qui a été par excel­lence la terre des mar­tyrs : le véné­rable ser­vi­teur de Dieu François de Capillas, prêtre et mission­naire de l’Ordre des Frères Prêcheurs, y ouvre les pages glo­rieuses de ces fastes, bien digne du titre de pro­to­mar­tyr de la Chine.

A ce valeu­reux sol­dat du Christ, comme com­pa­gnons de sa gloire et des hon­neurs de la béa­ti­fi­ca­tion qu’il va rece­voir, nous vou­lons asso­cier et des hommes ayant rang dans la hié­rar­chie ecclé­sias­tique, et des fidèles de toute condi­tion, et des femmes au mâle cou­rage, tous mis à mort en haine de la foi, au cours de la cruelle per­sé­cu­tion qui, sou­le­vée au milieu du siècle der­nier contre les fidèles du Christ en Chine et dans les pays voi­sins, le Tonkin et la Cochinchine, fit revivre les jours antiques, leurs féroces atro­ci­tés d’une part, leur cou­rage et leur constance invin­cibles, d’autre part. Et vrai­ment Nous avons plai­sir à unir dans le même triomphe et François de Capillas et ces vaillants héros qui, deux siècles après lui, sui­virent les traces de ce pro­to­mar­tyr et, sur cette terre qu’il avait vou­lu fécon­der par sa mort, mani­fes­tèrent d’une façon si écla­tante la véri­té de l’adage : « Le sang des mar­tyrs est une semence de chrétiens. »

Donnons dans leurs grandes lignes la vie et la mort glo­rieuse aux yeux du Seigneur de ces hommes.

Le véné­rable ser­vi­teur de Dieu François de Capillas naquit en 1607, à Baquerin-​de-​Campos, au dio­cèse de Palencia. Nobles et pieux, ses parents l’élevèrent dans la pié­té et la pra­tique de la ver­tu. A dix-​sept ans, dési­reux d’une vie plus par­faite, il entre dans la Famille domini­caine ; c’est au monas­tère de Saint-​Paul.- à Valladolid, qu’il fit son novi­ciat et ses études. Il n’é­tait que diacre quand, appre­nant que l’on récla­mait aux Philippines des ouvriers de l’Evangile, il deman­da et obtint de s’y rendre. Il arri­va à Manille en 1631, y reçut le sacer­doce et fut envoyé dans la pro­vince de Cagaia ; il y res­ta dix ans à tra­vailler au salut des âmes, sachant conci­lier très heu­reu­se­ment les exi­gences de l’apostolat et les règles de son Ordre. Comme l’athlète qui se pré­pare aux com­bats de demain par les exer­cices gym­niques, le véné­rable ser­vi­teur de Dieu pré­lu­dait à son mar­tyre en se fai­sant le bour­reau de son corps ; sou­vent, au plus fort des cha­leurs, il expo­sait aux piqûres des mous­tiques ses membres nus ; son som­meil était très court et il le pre­nait sur une croix de bois ; il pas­sait dans un hôpi­tal voi­sin ses jours et ses nuits pour y secou­rir les malades.

Dans sa soif de répandre son sang pour le Christ, il pas­sa en Chine en 1642 : il y évan­gé­li­sa avec le plus grand suc­cès les villes de Fo-​Gan, Mo-​Yang, Ting-​Teu et les ter­ri­toires voi­sins ; il sem­blait ne pas con­naître la fatigue ; innom­brables furent les âmes qu’il gagna au Christ. La paix ne fut pas pour lui de longue durée ; bien­tôt les Tartares sou­mirent par les armes la vaste pro­vince du Fo-​Kien et la ville de Fo-​Gan elle-​même et alors s’ouvrit contre les chré­tiens une atroce persécution.

D’ailleurs, la guerre n’arrêta pas le zèle apos­to­lique du ser­vi­teur de Dieu. Les Tartares occu­paient la ville de Fo-​Gan ; le vice-​roi chi­nois vint à la tête d’une nom­breuse armée mettre le siège devant la ville pour la réduire. François, qui s’était offert eu vic­time pour les besoins de l’Eglise, n’hésita pas à entrer dans les murs de la ville assié­gée pour y exer­cer les fonc­tions de son minis­tère. Après avoir admi­nis­tré les sacre­ments aux malades, il s’en retour­nait, la nuit, par des che­mins détour­nés, vers les cachettes dans les­quelles il savait trou­ver asile, lorsqu’il fut arrê­té par des sol­dats et conduit au magis­trat. On le ques­tionne d’abord sur sa foi, il est traî­né de pré­toire en pré­toire ; avant le mar­tyre du fer, il subit le mar­tyre de la langue : on le charge de calom­nies et d’outrages. Ce fut bien­tôt après le cruel sup­plice des mar­teaux : on serre entre deux planches les pieds du patient jusqu’à rup­ture des os. Comme le cou­ra­geux ath­lète subis­sait sans même un gémis­se­ment cet hor­rible tour­ment, le juge qui le lui fai­sait infli­ger s’écria, péné­tré de stu­peur : « Es-​tu donc plon­gé dans les délices ? » Et le mar­tyr de répondre : « Mon corps souffre, sans doute, mais mon âme sur­abonde de joie parce que ces souf­frances me donnent quelque res­sem­blance avec le Christ. » A ces mots, il reçoit, en réponse, dix coups de rotin.

Le len­de­main, nou­vel inter­ro­ga­toire et sup­plice de la fla­gel­la­tion ; presque sans vie, il est traî­né en pri­son, où son aspect excite la pitié des pires cri­mi­nels, déte­nus là en atten­dant l’exécution de leur sen­tence de mort. Les gar­diens eux-​mêmes, pour évi­ter de lais­ser périr de faim, comme ils en avaient Tordre, cet homme inno­cent, facili­tèrent (accès auprès de lui à un chré­tien qui se char­geait de lui appor­ter sa nour­ri­ture ; l’homme de Dieu mit à pro­fit ces sen­ti­ments, moins pour son sou­la­ge­ment per­son­nel que pour leur salut ; il ouvrit à la lumière de la véri­té leurs yeux enté­né­brés, et bien­tôt la pri­son fut comme un temple du Dieu vivant.

Quelques jours après, il est de nou­veau frap­pé de verges. Un enne­mi du nom chré­tien, trans­fuge chi­nois res­té dans la ville, accu­sa calom­nieusement le véné­rable ser­vi­teur de Dieu de rela­tions secrètes avec les assié­geants. François était alors dans sa pri­son, médi­tant les mys­tères dou­lou­reux du saint rosaire ; on vient le sai­sir pour le conduire au com­man­dant de la gar­ni­son tar­tare. Celui-​ci, dans sa rageuse colère, lui ordonne de se mettre à genoux et éclate en malé­dic­tions effrayantes. Imitant la dou­ceur de l’Agneau divin, le véné­rable mar­tyr accepte sans une parole ces vio­lences inouïes, tout entier aban­don­né entre les mains de Dieu. Il périt par le glaive, et son âme prit son essor vers le ciel : c’était le 15 jan­vier 1648. Les Tartares jetèrent sa dépouille mor­telle hors des murs de la ville ; elle y res­ta deux mois expo­sée aux inclé­mences du ciel. Enfin, la ville tom­ba au pou­voir du vice-​roi de Chine, et l’on put recueillir ces restes pré­cieux et leur don­ner les hon­neurs du tom­beau ; la tête fut pla­cée à part.

La renom­mée de ce mar­tyr se répan­dit rapi­de­ment, et de nom­breux pro­diges vinrent la confir­mer. L’évêque de Manille s’en émut ; il avait com­men­cé à s’occuper de la cause ; il la trans­mit à Notre pré­dé­ces­seur Innocent X, de récente mémoire, deman­dant, en son nom et au nom des mis­sion­naires et des fidèles des Philippines et de l’empire de Chine, l’introduction du pro­cès de béa­ti­fi­ca­tion du véné­rable ser­vi­teur de Dieu François de Capillas. Mais, par un mys­té­rieux des­sein de Dieu, la cause fut inter­rom­pue ; ce n’est qu’en ces der­niers temps qu’elle fut reprise devant la S. Cong. des Rites et menée à bonne fin avec celles des vaillants cham­pions du nom chré­tien qui, en Chine et en Annam, eux aus­si, imi­tèrent au siècle der­nier le glo­rieux pro­to­mar­tyr François dans sa pas­sion, et que Nous avons, Nous le répé­tons, asso­ciés à sa gloire.

Au milieu du xixe siècle, en effet, s’ouvrit, dans les annales du mar­tyre, une nou­velle page, page san­glante, por­tant, tra­cée en carac­tères indé­lé­biles, comme épi­graphe, la divine pro­phé­tie : « Ils vous livre­ront à leurs tri­bu­naux, ils vous fla­gel­le­ront dans leurs syna­gogues, vous serez conduits à cause de moi devant les gou­ver­neurs et les rois pour me rendre témoi­gnage devant eux et devant les nations. » (Matth. x, 18.) Ce témoi­gnage ain­si ren­du, en ces jours tout proches de nous, non seule­ment par des hommes éle­vés au sacer­doce, mais aus­si par des fidèles de toute condi­tion et de tout âge, par des femmes même, ce témoi­gnage prouve excel­lem­ment que ni le fer, ni le feu, ni les assauts de tous genres ne sont capables de ren­ver­ser l’œuvre de Dieu. « C’en est fait de la foi chré­tienne ! » crient à l’envi les impies ; et voyez : cette foi se voit consa­crée par de nou­veaux pro­diges, sa vigueur se retrempe dans un sang nouveau.

Parlons d’abord de celui que sa digni­té nous fait pla­cer en tête de cette glo­rieuse pha­lange : c’est le véné­rable ser­vi­teur de Dieu Etienne-​Théodore Cuénot, évêque titu­laire de Métellopolis, Français, enfant du Séminaire des Missions étran­gères de Paris. Parti pour l’Annam, il y prê­cha la foi du Christ et rem­plit avec tant de zèle son rôle d’ouvrier de l’Evangile que, au bout de six ans à peine, il fut jugé digne de l’épiscopat et choi­si comme vicaire apostolique.

Cette labo­rieuse digni­té, il la sou­tint avec cou­rage et sagesse, mal­gré ses infir­mi­tés cor­po­relles, de 1835 à 1861. A ce moment sévis­sait la per­sé­cu­tion sus­ci­tée contre les chré­tiens par l’empereur Tu-​Duc. Le Vénérable fut pris et jeté dans une hor­rible étable d’éléphant ; il eut à subir de mul­tiples tour­ments et souf­frances ; peut-​être même, on peut le croire, fut-​il l’objet de ten­ta­tives d’empoisonnement ; c’est dans ces condi­tions qu’il ren­dit son âme à Dieu, le 14 novembre 1861 ; presque aus­si­tôt après, on appre­nait la sen­tence qui le condam­nait à la décapitation.

L’année sui­vante, Jean-​Pierre Néel, Français, lui aus­si, prêtre du même Séminaire, par­ti pour la Chine en vue du minis­tère apos­to­lique, fut accu­sé comme pré­di­ca­teur de la foi, enchaî­né et conduit au pré­toire ; on le lie à la queue d’un che­val qu’on lance ensuite au galop ; on l’accable de moque­ries et de tour­ments de tous genres ; il meurt enfin par la décapitation.

Vers la même époque, deux autres pré­di­ca­teurs de l’Evangile, Français encore, enfants, eux aus­si, du même Séminaire des Missions étran­gères de Paris, cueillirent la palme du martyre.

Le pre­mier était Pierre-​François Néron ; après avoir exer­cé son zèle apos­to­lique en Annam, il fut char­gé de chaînes et jeté dans une cage dans laquelle il ne pou­vait ni se tenir debout ni se cou­cher ; trois mois durant, il subit cette dure cap­ti­vi­té ; au bout de ce temps, il fut frap­pé de verges ; le len­de­main de ce sup­plice, il ren­voie ceux qui lui offrent de la nour­ri­ture : « Ne m’en appor­tez plus, dit-​il ; désor­mais, je ne goû­te­rai plus aucun ali­ment ter­restre » ; il pro­lon­gea ce jeûne pen­dant vingt et un jours sans que ses forces dimi­nuassent. Enfin, la hache du bour­reau ter­mi­na glo­rieu­se­ment sa course terrestre.

L’autre était Jean-​Théophane Vénard ; il annon­çait la foi au Tonkin. Comme il refu­sait de fou­ler aux pieds la croix, il fut mis à mort, mais le glaive n’abattit sa tête qu’après plu­sieurs coups.

A cette liste, il faut ajou­ter sept prêtres indi­gènes aux­quels le glaive ouvrit la voie vers l’immortelle cou­ronne : ce sont les véné­rables ser­vi­teurs de Dieu Paul Loc, Pierre Luu, Jean Hoan, Pierre Qui, Paul Tinh, Laurent Huong, Pierre Khanh.

Il en reste d’autres encore, ceux-​là simples fidèles, la plu­part coad­juteurs des prêtres ou caté­chistes, qui périrent par divers sup­plices et ren­dirent témoi­gnage à la foi par leur pas­sion et leur mort. Ceux-​ci périrent par le glaive : le méde­cin François Nguyen, Michel Ho Dinh Hy, pré­fet des palais royaux ; François Trung, offi­cier ; Pierre Van, Jérôme Lou Tin Mey, Laurent Ouang, Joseph Tchang, Paul Tchen, Jean-​Baptiste Lo, Martin Ou, Jean Tchen. Ceux-​là furent pen­dus : Joseph Le Dang Thy, offi­cier ; Emmanuel Phung, Joseph Tchang Ta Pong. D’autres furent frap­pés et cruel­le­ment tor­tu­rés jusqu’à ce que la mort s’ensuivît : ain­si Paul Hanh, auquel on arra­cha les chairs de la cuisse trois fois avec des tenailles froides, trois fois avec des tenailles rou­gies au feu. D’autres encore furent jetés en exil, mal pire que la mort elle-​même : à peine avaient-​ils atteint le lieu de leur relé­ga­tion qu’ils mou­rurent de faim, de soif, dévo­rés par la ver­mine : tels furent André Nam Thnong et Joseph Luu.

Il y eut des femmes aus­si qui souf­frirent avec un cou­rage invin­cible : telles deux jeunes filles, Agathe Lin et Lucie Y, qui eurent pour com­pagne Marthe Ouang, veuve ; elles conquirent toutes trois la palme du mar­tyre par le glaive ; telle encore Agnès Le Thi Thanh, femme d’un sei­gneur nom­mé De : traî­née bru­ta­le­ment en pri­son, elle y fut si cruel­le­ment frap­pée et déchi­rée par les coups qu’elle ren­dit peu après le der­nier soupir.

Tous ces ath­lètes furent una­ni­me­ment, et d’une façon constante, consi­dé­rés comme de vrais mar­tyrs de la foi du Christ ; nous en avons à témoin, en par­ti­cu­lier, la pieuse véné­ra­tion avec laquelle, de toutes parts, on recher­cha et on gar­da leurs reliques ; les miracles qui s’accomplirent vinrent appor­ter comme leur confirmation.

Le pro­cès fut donc intro­duit devant la S. Cong. des Rites, et l’on y adjoi­gnit la cause depuis long­temps en sus­pens du véné­rable ser­vi­teur de Dieu François de Capillas. Toutes les infor­ma­tions juri­diques mûre­ment conduites et dûment closes pour l’une et l’autre causes, Nous avons, par un décret du 2 août 1908, solen­nel­le­ment décla­ré la cer­ti­tude du mar­tyre et le bien fon­dé du pro­cès de mar­tyre, non moins que la réa­li­té des pro­diges ou miracles confir­mant lumineu­sement le mar­tyre lui-​même du véné­rable ser­vi­teur de Dieu François de Capillas, et des véné­rables ser­vi­teurs de Dieu Etienne-​Théodore Cuénot, évêque de Métellopolis ; Jean-​Pierre Néel, Pierre-​François Néron, Théophane Vénard, mis­sion­naires apos­to­liques, et leurs com­pagnons, mis à mort par les ido­lâtres en haine de la foi.

Pour don­ner à la cause le cou­ron­ne­ment nor­mal, il restait- à exa­mi­ner si les véné­rables ser­vi­teurs de Dieu pou­vaient de tuto être ran­gés au nombre des bien­heu­reux. La ques­tion fut posée, dans l’assemblée géné­rale de la S. Cong. des Rites tenue devant Nous le 24 novembre de la même année, par Notre cher Fils Joseph-​Calasanz Vives y Tuto, car­di­nal de la sainte Eglise romaine, rap­por­teur de la cause, pour le véné­rable ser­vi­teur de Dieu François de Capillas ; pour les véné­rables ser­vi­teurs de Dieu E.-Th. Cuénot, évêque, J.-P. Néel, P.-Fr. Néron, Th. Vénard, mis­sion­naires apos­to­liques, et leurs com­pagnons de mar­tyre, elle fut posée dans la même assem­blée par Notre cher Fils Dominique Ferrata, car­di­nal de la sainte Eglise romaine ; tous, et les car­di­naux de la S. Cong. des Rites, et les Consulteurs pré­sents, répon­dirent una­ni­me­ment, pour l’une et l’autre cause, par l’affirmative. Pour Nous, Nous Nous abs­tînmes de faire connaître ce jour-​là Notre sen­ti­ment, esti­mant devoir redou­bler Nos prières afin d’obtenir sur Nous le secours de la divine Sagesse pour por­ter Notre sen­tence dans une affaire de cette gra­vi­té. Enfin, après l’avoir fait avec ins­tances, le 13 décembre de cette même année, IIIe dimanche de l’Avent, après le Saint-​Sacrifice de la messe, en pré­sence de Nos chers Fils Joseph-​Calasanz Vivès y Tuto et Dominique Ferrata, cardi­naux de la sainte Eglise romaine, et rap­por­teurs des deux causes ; du car­di­nal Séraphin Cretoni, de glo­rieuse mémoire, pré­fet de la S. Cong, des Rites ; de Notre véné­rable Frère Diomède Panici, arche­vêque titu­laire de Laodicée et secré­taire de la même Congrégation, et enfin du R. P. Alexandre Verde, pro­mo­teur de la sainte Foi, Nous avons décla­ré qu’on pou­vait de tuto pro­cé­der à la solen­nelle béa­ti­fi­ca­tion de tous les mar­tyrs ci-​dessus énu­mé­rés, et Nous avons, par un double décret don­né à la même date, pro­mul­gué Notre sentence.

Dès lors, tou­ché des prières de l’Ordre des Frères Prêcheurs tout entier, de la Société des Missions étran­gères de Paris, des évêques et des vicaires apos­to­liques du Tonkin, de la Cochinchine et de la Chine, qui veillent sur le trou­peau du Christ en ces pays fécon­dés parle sang de ces mar­tyrs, sur l’avis de Nos véné­rables Frères les car­di­naux de la sainte Eglise romaine membres de la S. Cong. des Rites, par les pré­sentes, en ver­tu de Notre auto­ri­té apos­to­lique, Nous per­met­tons de don­ner désor­mais le titre de bien­heu­reux au véné­rable ser­vi­teur de Dieu François de Capillas, prêtre, mis­sion­naire, de l’Ordre des Frères Prêcheurs, pro­to­mar­tyr de Chine, et aux véné­rables ser­vi­teurs de Dieu E.-Th. Cuénot, évêque de Métellopolis ; J.-P. Néel, P. Fr. Néron, Th. Vénard, mis­sion­naires apos­to­liques, et leurs com­pa­gnons, ci-​dessus énu­mé­rés, mis à mort par les impies ido­lâtres en haine de la foi ; leurs corps, leurs restes ou reliques pour­ront être expo­sés à la véné­ra­tion publique, mais non cepen­dant être por­tés dans les pro­ces­sions solen­nelles ; leurs images pour­ront être ornées de rayons.

En ver­tu de la même auto­ri­té, Nous per­met­tons en leur hon­neur la réci­ta­tion de l’office et la célé­bra­tion de la messe du com­mun des mar­tyrs sui­vant les rubriques du bré­viaire et du mis­sel, soit romain, soit domi­ni­cain, avec les orai­sons propres approu­vées par Nous. Mais la réci­ta­tion de cet office et la célé­bra­tion de cette messe ne sont accor­dées, pour le véné­rable François de Capillas, qu’au dio­cèse de Palencia, où il naquit ; à celui de Valladolid, où il entra dans la Famille domi­nicaine ; à l’archidiocèse de Manille, où il com­men­ça ses tra­vaux apos­to­liques dans la vigne du Christ, et enfin aux vica­riats apo­stoliques de la pro­vince de Fo-​Kien, où il subit le mar­tyre, et à tous les monas­tères et églises de l’Ordre domi­ni­cain, de l’un et de l’autre sexe. Pour les véné­rables E.-Th. Cuénot, évêque, J.-P. Néel, P.-Fr. Néron, Th. Vénard et leurs com­pa­gnons, Nous l’accordons dans toutes les mai­sons et églises de la Société des Missions étran­gères de Paris dans le monde entier pour tous les fidèles, tant sécu­liers que régu­liers, tenus à la réci­ta­tion des heures cano­niales. Quant à la messe, Nous l’accordons pour tous les prêtres sécu­liers et régu­liers qui célé­bre­ront dans les églises où l’on célé­bre­ra la fête de ces, Bienheureux, cela con­formément au décret 3862 Urbis et Orbis de la S. Cong. des Rites du 9 décembre 1895.

Enfin, Nous per­met­tons que, dans les églises sus­dites, dans le monde entier, les solen­ni­tés de la béa­ti­fi­ca­tion de ces véné­rables ser­viteurs de Dieu soient célé­brées selon le décret ou ins­truc­tion de la S. Cong. des Rites en date du 16 décembre 1902, rela­tif au tri­duum qui doit être célé­bré solen­nel­le­ment dans l’année de la béa­ti­fi­ca­tion. Nous ordon­nons que ce tri­duum ait lieu aux jours que fixe­ra dans le cou­rant de l’année l’au­to­ri­té légi­time, une fois ces solen­ni­tés ache­vées dans la basi­lique Vaticane.

Nonobstant les consti­tu­tions et ordon­nances apos­to­liques, ain­si que les décrets de non culte, et en géné­ral toutes choses contraires quelles qu’elles soient ; et Nous vou­lons que dans toutes les contes­ta­tions même judi­ciaires, il soit accor­dé aux exem­plaires même impri­més des pré­sentes lettres, pour­vu qu’ils portent la signa­ture du secré­taire delà S. Cong. des Rites et qu’ils soient munis du sceau du pré­fet, la même foi qui serait due à l’ex­pres­sion de Notre volon­té par pré­sen­ta­tion de ces lettres elles-mêmes.

Donné à Rome, près de Saint-​Pierre, sous Panneau du Pêcheur, le 11 avril 1909, de Notre Pontificat la sixième année.

R. card. Merry del Val, secré­taire d’Etat.

L. † S.

[Rome, 8 sept. 1909]

Source : Actes de S. S. Pie X, t. 6, p. 105, La Bonne Presse

13 décembre 1908
Prononcé après la lecture des décrets de béatification des Vénérables Jeanne d'Arc, Jean Eudes, François de Capillas, Théophane Vénard et ses compagnons.
  • Saint Pie X
11 avril 1909
Béatification du Vénérable Jean Eudes, mission­naire apostolique, fondateur de la Congrégation de Jésus et Marie et de l’Ordre de la B. V. M. de la Charité.
  • Saint Pie X