Saint Pie X

257ᵉ pape ; de 1903 à 1914

23 janvier 1904

Lettre apostolique In præcipuis

Sur l'Académie romaine de saint Thomas d'Aquin

PIE X, PAPE

Ad per­pe­tuam rei memoriam.

Il n’est pas un seul juste appré­cia­teur des choses qui ne place par­mi les pre­miers sujets de louange à l’adresse de Léon XIII, d’heu­reuse mémoire, Notre pré­dé­ces­seur, ce fait que, ayant entre­pris de réfor­mer les études du jeune cler­gé et de les adap­ter aux besoins du temps pré­sent, il ait dès l’abord consa­cré tous ses efforts à res­tau­rer la méthode de saint Thomas d’Aquin. Frappé, en effet, de la nou­velle orien­ta­tion des esprits et consta­tant quel cré­dit pre­naient chaque jour cer­tains pro­cé­dés, nul­le­ment conformes à la véri­té catho­lique, de phi­losopher et de dis­cu­ter sur les plus graves ques­tions, il esti­ma de son devoir d’écarter avec pru­dence le dan­ger qui en décou­lait pour les étu­diants ecclé­sias­tiques ; d’autant plus qu’il avait remar­qué que la méthode tra­di­tion­nelle des études, approu­vée par le juge­ment de l’Eglise et l’usage des siècles, avait fai­bli en beau­coup de points par suite du désir de s’attacher aux formes plus récentes. C’est pour­quoi, aux ins­ti­tu­tions et aux pré­ceptes de la phi­lo­so­phie chré­tienne et de la théo­lo­gie, il don­na à nou­veau pour chef et pour maître le Docteur angé­lique, dont le génie sublime avait pré­pa­ré des armes on ne peut plus puis­santes, même à cette époque, pour la défense de la véri­té et la réfu­ta­tion de mul­tiples erreurs ; puisque, mieux que per­sonne, saint Thomas avait rap­pro­ché et déve­lop­pé avec une abon­dance inouïe les sages prin­cipes qu’il avait recueillis dans les écrits des Pères et des Docteurs de l’Eglise, des­ti­nés à demeu­rer utiles dans tous les temps. — Toutefois, ce Pontife ne dédai­gna en aucune façon les véri­tables pro­grès de la science engen­drés par l’activité des esprits modernes ; bien au contraire, per­sua­dé que le cler­gé ne pou­vait digne­ment tenir son rang s’il n’était pour­vu d’une science abon­dante, il vou­lut que leur instruc­tion sur les plus graves sujets fût enri­chie des don­nées oppor­tunes de l’érudition.

Pour aider à la res­tau­ra­tion de la méthode tho­miste, qu’il avait pres­crite dans ses lettres Encycliques Æterni Patris, il ins­ti­tua plus tard dans cette ville de Rome, qui devait même en ce point don­ner l’exemple au monde catho­lique, une Académie spé­ciale, à laquelle il don­na le nom de saint Thomas d’Aquin, et dont le but était d’expliquer, de défendre, de pro­pa­ger la doc­trine du Docteur angé­lique, spé­cia­le­ment en phi­lo­so­phie. Avec muni­fi­cence il assu­ra à l’Académie des reve­nus annuels, suf­fi­sants pour assu­rer son exis­tence. Il lui concé­da de plus le pou­voir, sem­blable à celui accor­dé aux autres Universités ou Facultés, d’élever au grade de doc­teur en phi­lo­so­phie ceux de ses étu­diants qui, le cours de leurs études étant ache­vé, auraient, en un solen­nel exa­men, don­né de leur savoir un satis­fai­sant témoi­gnage. Enfin, en l’an­née 1895, modi­fiant les sta­tuts pro­vi­soires qu’il avait impo­sés à l’Académie, il lui fixa défi­ni­ti­ve­ment les règles dont l’expé­rience avait démon­tré la convenance.

Pour Notre part, dès le début de Notre pon­ti­fi­cat, pla­cé en des temps peut-​être plus hos­tiles encore que ceux du pas­sé à la sagesse tradition­nelle de nos pères, Nous avons esti­mé abso­lu­ment indis­pen­sable de main­te­nir scru­pu­leu­se­ment les pres­crip­tions de Notre illustre prédé­cesseur tou­chant l’enseignement de la phi­lo­so­phie et de la doc­trine tho­miste, et Nous por­te­rons Notre sol­li­ci­tude à les déve­lop­per dans l’espoir de fruits plus abon­dants. Pour cela, Nous vou­lons que l’Aca­démie romaine de Saint-​Thomas, qui tient à bon droit la pre­mière place par­mi les autres ins­ti­tu­tions de cette sorte, s’épanouisse sous Notre pro­tec­tion comme elle le lit sous celle toute par­ti­cu­lière de Léon XIII.

Nous savons, en effet, avec quel zèle et quel pro­fit les membres de cette Académie s’adonnent au labeur qui leur est confié, soit eu ajou­tant de doctes com­men­taires à la doc­trine de Thomas d’Aquin, soit en déve­lop­pant ses pen­sées et en dédui­sant de ses sen­tences des conclu­sions nou­velles, soit en esti­mant à la lumière de ses prin­cipes les affirma­tions des phi­lo­sophes récents. Aussi les félicitons-​Nous volon­tiers pour l’aide puis­sante qu’ils apportent aux véri­tables pro­grès de la philosophie.

Mais, afin que la pra­tique conti­nue n’apporte aucun relâ­che­ment à leur très noble ému­la­tion, Nous vou­lons que Notre parole et Notre auto­ri­té donnent à leurs volon­tés une vigueur nou­velle dans l’accom­plissement de leur tâche. Et cette exhor­ta­tion ne s’adresse pas seule­ment à ceux dont Nous avons par­lé, mais, comme il convient, à tous ceux qui enseignent la phi­lo­so­phie dans les écoles catho­liques de l’uni­vers entier, en sorte qu’ils aient soin do ne s’écarter jamais de la voie et de la méthode de Thomas d’Aquin et de s’y affer­mir avec soin chaque jour. Et Nous insis­tons vive­ment auprès de tous pour qu’ils consacrent leur saga­ci­té et leurs tra­vaux à com­battre viri­le­ment ce fléau com­mun de la rai­son et de la foi qui se répand par­tout : Nous vou­lons dire le néo-​rationalisme, dont la per­ni­cieuse influence doit être écar­tée à tout prix, par­ti­cu­liè­re­ment de la jeu­nesse ecclésiastique.

D’ailleurs, Nous rati­fions et confir­mons tous et cha­cun des sta­tuts, biens, pri­vi­lèges et droits que Notre pré­dé­ces­seur a don­nés et attri­bués à l’Académie romaine de Saint-​Thomas, contra­riis non obs­tan­ti­bus quibuscumque.

Donné à Rome, près de Saint-​Pierre, sous l’anneau du Pêcheur, le 23 jan­vier, fête de saint Raymond de Pennafort, en l’année 1904, de Notre pon­ti­fi­cat la première.

Louis, card. Macchi.

11 avril 1909
Béatification des trente-quatre martyrs de Chine, d’Annam et du Tonkin, François de Capillas, E.-Th. Cuénot, J.-P. Néel, P.-Fr. Néron, J.-Th. Vénard et leurs compagnons.
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11 avril 1909
Béatification du Vénérable Jean Eudes, mission­naire apostolique, fondateur de la Congrégation de Jésus et Marie et de l’Ordre de la B. V. M. de la Charité.
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