L’ignorance n’excuse pas tout.
La législation civile enseigne que nul n’est censé ignorer la loi. Cela signifie que chaque citoyen devrait connaître l’ensemble des textes législatifs et réglementaires existant dans l’ordre juridique. Avec plus de 300 000 articles en vigueur, le plus studieux des juristes ne relèverait pas un tel défi.
Il nous est déjà tous arrivé de commettre une infraction alors qu’on ignorait la limite fixée par la loi. De fait, l’application de cet adage est impossible car personne n’a le temps et les capacités de connaître l’ensemble des lois. Cependant, ce principe doit être conservé pour le bon fonctionnement de la justice. Sinon, il suffirait d’invoquer l’ignorance de la loi pour échapper à toute peine. Ce serait trop facile et l’ordre social serait vite bafoué.
Au niveau de la morale catholique, en est-il de même ?
Pour commettre un péché, il faut savoir que l’on transgresse la loi. Par conséquent, si l’on commet un péché sans savoir que c’en est un, nous ne sommes responsables d’aucune faute morale. Par exemple, si un chasseur tue un ami en pensant que c’est un ours, il n’a pas commis le péché d’homicide. L’ami en question n’a donné aucun signe de sa présence : on ne pouvait le soupçonnait là.
Mais ne croyons pas qu’il suffit d’ignorer la morale pour éviter de faire un péché. Il existe bien un péché d’ignorance. En effet, il peut arriver de se mettre volontairement dans une situation d’ignorance pour agir plus tranquillement, sans que notre conscience nous fasse des reproches. Cette ignorance dont on peut facilement sortir est coupable. Le Père Garrigou Lagrange, sage théologien, nous livre une illustration : « un étudiant en médecine se laisse aller gravement à la paresse, il est pourtant, comme par hasard, reçu docteur ; mais il ignore bien des choses élémentaires de son art qu’il devrait connaître, et il lui arrive d’accélérer la mort de certains de ses clients, au lieu de les guérir. Il n’y a pas là de péché directement volontaire, mais il y a certainement une faute indirectement volontaire, qui peut être grave, et qui peut aller jusqu’à l’homicide par imprudence ou par grave négligence. »
Par conséquent, l’ignorance n’excuse pas tout. Elle est un mal que l’on doit combattre par l’étude de la doctrine, par des bonnes lectures. Il ne faudrait pas s’installer confortablement dans cette ignorance. Elle deviendrait une aubaine permettant de pécher plus facilement. Quand on se dirige vers un but, on doit connaître tout ce qui peut nous faire manquer ce but.
Le pape saint Pie X a combattu toute sa vie le mal de l’ignorance en remettant en valeur le catéchisme. Évêque de Mantoue, il promet une prime en argent à qui lui aura suggéré les méthodes les plus simples et efficaces pour enseigner le catéchisme. En paroisse, à la direction du séminaire, partout il enseigne le catéchisme, persuadé qu’un chrétien sans connaissance religieuse viendra tôt ou tard à abandonner la foi. La paresse conduit à l’ignorance qui elle-même amollit notre foi au point de nous rendre hostile à la religion.
Notre intelligence est bien souvent encombrée de théories hasardeuses, de connaissances inutiles. De même que nous avons des yeux pour voir, ainsi nous avons une intelligence pour connaître la vérité. Approfondir les vérités les plus hautes de notre foi, meubler notre intelligence des vérités éternelles, voilà notre perfection.
Source : L’Aigle de Lyon n° 376