Chers Amis et Bienfaiteurs,
ous les maux de notre temps découlent de cette grande hérésie des modernes : la prétendue autonomie de l’homme. « L’homme est libre envers la vérité qui est Dieu, envers la loi de Jésus-Christ et envers la foi de l’Eglise, dit le libéral. « Je puis penser, dire et faire ce que je veux, comme il me plaît, ni Dieu, ni aucune autorité n’a à me faire aucune prescription. Aussi soutient-il la neutralité ou l’incompétence de l’Etat dans le domaine religieux, l’égalité fondamentale des religions dans l’œcuménisme. Dans son langage il n’est question que de supprimer la transcendance et l’atmosphère surnaturelle de nos sanctuaires et de leurs cérémonies, que d’éducation anti-autoritaire en famille et à l’école, de féminisme et d’émancipation dans le rapport des sexes, que de liberté radicale de pensée, de parole, d’opinion et de presse en société. Il est anarchiste et révolutionnaire.
L’attitude catholique est à l’opposé : ouverture de l’esprit à la vérité objective qui s’affirme souveraine et à elle seule (car de l’erreur on ne peut pas vivre), soumission à la loi de Jésus-Christ, acceptation sans réserve de la foi avec toutes ses conséquences. Le catholique se soumet toujours, partout et en tout à l’ordre objectif de la création et de la rédemption établi par le Dieu trinitaire ; il sait que la vérité le rend libre tandis que la liberté ne le rend pas nécessairement vrai ! Une telle attitude nous est présentée par Marie, Joseph et l’Enfant Dieu ; de tels exemples sont donnés par les saints à travers tous les siècles ; c’est là la doctrine des papes et des conciles.
Quoi d’étonnant à ce que, pour les responsables à Rome ou sur les sièges épiscopaux, dans l’Eglise et dans l’Etat, Monseigneur Lefebvre et la Fraternité Sacerdotale fondée par lui signifient une sérieuse menace pour leur programme libéral, un constant et vivant reproche ? « Traquons le Juste, puisqu’il nous incommode, car il est contraire à notre manière d’agir, il nous reproche de violer la loi, il nous accuse de démentir notre éducation. Il prétend posséder la connaissance de Dieu et se nomme lui-même fils du Seigneur. Il est pour nous la condamnation de nos pensées, sa vue seule nous est insupportable. Car sa vie tranche sur celle des autres et ses voies sont toutes différentes. Il nous compte comme une monnaie de mauvais aloi, et il s’écarte de nos sentiers comme de souillures ; il exalte le sort final du juste et se vante d’avoir Dieu pour Père. Voyons donc si ses paroles sont vraies et examinons ce qui lui adviendra et nous saurons quelle sera l’issue de son existence ; car s’il est vraiment fils de Dieu, Dieu l’assistera et le délivrera des mains de ses adversaires. Soumettons-le aux outrages et aux tourments afin de connaître sa douceur et d’éprouver sa patience. Condamnons-le à une mort honteuse, car selon ce qu’il dit, Dieu aura soin de lui » (Sagesse, II, 12–20). Et l’auteur inspiré poursuit : « Telles sont leurs pensées, mais ils se trompent, car leur malice les a aveuglés ».
C’est pour servir l’Eglise et l’économie objective du salut que Mgr Lefebvre a procédé le 30 juin aux sacres épiscopaux historiques à Ecône, sans aucune intention de schisme, sans la moindre pensée de se séparer du successeur de Pierre. Cet acte courageux reçoit aujourd’hui le témoignage de ses fruits :
– Le primat de la foi brille à nouveau dans les esprits et dans l’Eglise.
– Les entretiens futurs avec Rome ne se dérouleront plus sous la pression du temps ; les questions doctrinales brûlantes pourront et devront être traitées avant tout règlement pratique.
– L’esprit de combat et d’affirmation publique de la foi se trouve substantiellement fortifié chez les fidèles de tradition.
– La lampe de nos sanctuaires ne s’éteindra pas, car l’enfantement de nouvelles générations de prêtres se poursuit : S. Exc. Mgr Tissier de Mallerais a imposé les mains à sept jeunes gens le 25 septembre à Ecône ; S. Exc. Mgr Fellay à trois autres le 1er octobre à Zaitzkofen. S. Exc. Mgr de Galarreta ordonnera à son tour quatre prêtres le 10 décembre à la Reja et S. Exc. Mgr Williamson un autre le lendemain, en Australie.
Nous avions un besoin pressant de ces nouveaux collaborateurs ; car nos prêtres sont partout surchargés. En outre les fidèles de plus de dix pays nous demandent la grâce d’une fondation. Pouvons-nous prendre devant Dieu la responsabilité de les renvoyer aux calendes grecques ? Le souci de la foi dans ces pays nous préoccupe jour et nuit : Guatemala, Brésil, Japon, Corée, Nouvelle-Guinée et Philippines, pour n’en nommer que quelques-uns. Les catholiques d’Europe et d’Amérique du Nord ne pourraient-ils pas réciter chaque jour un mystère du Rosaire ou offrir une communion mensuelle pour ces peuples ?
Dieu merci, la Divine Providence nous a envoyé cette même année 1988 beaucoup de vocations. Pour la première fois le nombre des nouvelles entrées au séminaire, chez les Frères, les Sœurs et les Oblates s’élève à près de cent. Cela seul n’est-il pas une preuve indéniable de l’authenticité de l’Œuvre ? Comment donner une explication purement humaine à une telle croissance au milieu de tant de contradictions et de persécutions ?
Sans doute avons-nous aussi, en relation avec les sacres épiscopaux, perdu quelques prêtres et séminaristes, à vrai dire peu nombreux mais, comme toute vocation a une valeur infinie, toute défection nous touche sensiblement et nous afflige profondément. Ces aveugles pourront-ils encore se convertir au dernier moment, avant de tomber tout à fait dans l’abîme entrouvert ? Nous prions pour cela.
Nous sommes d’autant plus heureux d’apprendre l’union intime des évêques d’Ukraine et de leurs fidèles avec Mgr Lefebvre et la Fraternité. N’est-ce pas très prochainement que les six évêques confesseurs de la foi vont, cette année encore, consacrer la Russie au Cœur Immaculée de Notre-Dame, de manière déprécative, en la fête de l’Immaculée Conception ? Préparons-nous avec zèle à cet important événement pour l’Eglise et les peuples.
Chers amis et bienfaiteurs, après les sacres, notre attention porte principalement sur l’édification intérieure de notre Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X. Il s’agit pour nous, selon notre vocation, de renouveler l’esprit sacerdotal en nous-mêmes et dans la vie du clergé de toute l’Eglise. Nous voulons continuer la vie sacerdotale de Jésus-Christ au saint sacrifice de la Messe et au Très Saint Sacrement de l’autel, dans sa pauvreté, sa chasteté et son obéissance, jusqu’à la fin des temps, afin de sanctifier ainsi les âmes.
Que la Bienheureuse Vierge Marie, qui prépara pendant trente-trois ans le divin Agneau du sacrifice et le mena finalement à l’autel de la Croix, daigne nous introduire tous dans l’esprit de l’œuvre de l’éternel et souverain Prêtre ! Que saint Joseph nous aide à rester fidèles à la mission de renouveau du sacerdoce et à l’accomplir avec un ardent dévouement.
Orate fratres, orate sine intermissione. Priez, frères, priez sans relâche.
En la fête de la Maternité de la Bienheureuse Vierge Marie, le 11 octobre 1988
Abbé Franz Schmidberger
Supérieur Général
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