Regnavit a ligno Deus !
Dieu règne par la Croix !
Chers Amis et Bienfaiteurs,
endre le monde catholique, rendre la propriété à son propriétaire, la création à son créateur, les âmes à leur Rédempteur et juge, la société à son Seigneur et Roi, en prêchant et en portant la Croix du Christ, telle fut l’œuvre des apôtres, telle est la mission de l’Église jusqu’à la fin des temps. La prédication de la Croix victorieuse fut la principale préoccupation de l’Apôtre des Gentils : « la doctrine de la Croix est une folie pour ceux qui se perdent, mais pour nous qui sommes sauvés, elle est une force divine » (I Cor. 1,18). Et on lit quelques versets plus loin : « nous prêchons un Christ crucifié, scandale pour les juifs et folie pour les Gentils, mais pour ceux qui sont appelés, soit Juifs, soit Grecs, puissance de Dieu et sagesse de Dieu » (I Cor. I, 23–24).
Cet unique fondement de notre foi et d’une vie chrétienne, le concile Vatican II ne l’a pas seulement oublié, il l’a gravement ébranlé par une trahison : l’assimilation à l’esprit du temps ; le monde a été laïcisé, il est devenu laïque, il faut qu’il demeure laïque !
Voulez-vous quelques exemples ?
– L’esprit de combat est brisé par un appel à la collaboration avec tous les hommes de toutes idéologies pour bâtir un monde meilleur, contrairement aux instructions du Saint Esprit par la bouche de l’apôtre saint Paul : « Ne tirez pas au même joug que les infidèles. Car quelle société y a‑t-il entre la justice et l’iniquité ? Quel accord entre le Christ et Bélial ? Ou quelle part a le fidèle avec l’infidèle ? » (II Cor. VI, 14–15).
– Le décret conciliaire sur les missions cite bien l’envoi des apôtres en mission par le Seigneur en Mc XVI, 16, en revanche le passage décisif de l’Épître aux Romains, au chapitre X, n’est pas cité.
– Les négateurs des dogmes de l’Église et ceux qui se sont séparés d’elle ne sont plus qualifiés d’hérétiques ni de schismatiques ; manque inouï de charité, qui, en leur taisant la vérité, les prive du salut éternel.
– Quant aux fins dernières : la mort, le jugement, le Ciel, l’enfer, le purgatoire, dont la grandeur fait justement trembler, ou bien elles ne sont plus mentionnées, ou bien leur contenu se trouve défiguré.
Sur de tels fondements ne pouvaient s’édifier qu’une société totalement sécularisée et l’affreuse rencontre des religions réalisée à Assise, atmosphère dans laquelle les représentants et les héritiers du Concile se sentent visiblement à l’aise ! Ici et là, il est vrai, ils maintiennent encore la morale naturelle, une certaine discipline ecclésiastique ainsi que les obligations des individus envers Dieu ; mais ils ne veulent plus d’un monde catholique, d’institutions publiques fondées dans le Sang de Jésus-Christ. Le cardinal Casaroli parle d’une « heure heureuse » en signant le nouveau concordat avec l’Italie qui laïcise ce pays, c’est-à-dire le rend athée. Dieu ne règne plus par le bois de la Croix, le « Mysterium Crucis » est éliminé par l’esprit conciliaire de sécularisation, ou mieux de citériorité.
Chers amis et bienfaiteurs, voilà où nous en sommes ; il est important de le saisir, au moment où, à la suite de la visite du cardinal Gagnon en novembre et décembre 1987, nous attendons de Rome des propositions concernant la place qu’occuperont dans l’avenir les œuvres de la Tradition. Quelle que soit la solution, Monseigneur Lefebvre a déjà formulé à plusieurs reprises trois exigences indispensables :
1. Une indépendance pratique vis-à-vis des évêques locaux jointe à un règlement qui assure l’activité de la Tradition dans les diocèses.
2. Un petit organisme à Rome, par exemple un secrétariat, qui représente les intérêts de la Tradition.
3. La nomination de plusieurs évêques issus de la famille de la Tradition.
La Rome actuelle, caractérisée par l’esprit d’Assise, satisfera-t-elle de pareilles demandes ! A vue humaine cela semble exclu, mais rien n’est impossible à Dieu. Mgr Lefebvre a en tout cas annoncé la consécration d’au moins trois évêques auxiliaires pour le 30 juin et ceci non par révolte contre le Pape ni pour établir une hiérarchie parallèle ni pour se séparer de Rome, mais afin seulement que le pauvre et humble Homme des douleurs règne de nouveau par sa Croix dans la sainteté du sacerdoce, de la vie religieuse, de la famille et des États catholiques. C’est aussi dans ce but que le nouveau séminaire qui doit ouvrir ses portes en Australie le 4 mars, premier vendredi du mois, sera placé sous le patronage de la Sainte-Croix.
Compagnons du Crucifié, nous voulons être « comme Israël au milieu des nations perverses, comme les Macchabées, ou encore ces saints réformateurs du clergé : saint Charles Borromée, saint Vincent de Paul, saint Jean Eudes, Monsieur Olier ; nous voulons former une armée décidée à tout prix à demeurer catholique, face à la déchristianisation qui s’opère à l’extérieur et à l’intérieur de l’Église » (Lettre de Mgr Lefebvre à un Cardinal).
Le salut du monde se trouve dans la Croix du Christ et dans la Croix du Christ seule. La Croix est notre unique espoir. « In hoc signo vinces – Par ce signe tu vaincras ».
Chers amis, nous comptons sur votre prière persévérante, votre charité miséricordieuse et vos aumônes généreuses. En retour, Jésus, Marie et Joseph vous béniront, vous et vos familles.
Rickenbach, 1er dimanche de Carême, le 21 février 1988.
Abbé Franz Schmidberger,
Supérieur Général
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