Pudeur ou pudibonderie ?, par M. l’abbé Emeric Baudot – Juin 2018

Bien chers fidèles,

Il est par­fois des joies toutes simples, tel le plai­sir de voir des hommes et des femmes bien habillés qui élèvent les âmes de par leur tenue. Nous en avons l’exemple dans nos écoles de gar­çons et de filles où les édu­ca­teurs s’ef­forcent d’in­cul­quer ce sens de la ver­tu et du beau à leurs élèves. Cela ne devrait-​il plus être le cas dans nos paroisses ? Pourquoi y trouvons-​nous des hommes en tenue négli­gée, des femmes habillées selon les modes délé­tères actuelles ?

Sans évo­quer le rôle per­vers de cer­taines offi­cines qui veulent cor­rompre la femme chré­tienne pour avi­lir la socié­té et ain­si mieux la domi­ner, le natu­risme de la socié­té actuelle est clai­re­ment oppo­sé au dogme du péché ori­gi­nel. Si nous nions celui-​ci, il n’y a pas de rai­son pour ne pas trans­for­mer nos rues en salles de bains ! Dieu a pour­tant vou­lu nous révé­ler ce fait du péché de nos pre­miers parents et les consé­quences qui en décou­lèrent. Parmi celles-​ci, il y a notam­ment la bles­sure de la concu­pis­cence, à savoir l’a­mour désor­don­né des plai­sirs sen­sibles. Même après le bap­tême, nous avons beau­coup de mal à remettre de l’ordre en nous, à sou­mettre nos facul­tés sen­sibles à notre rai­son et à notre volonté.

Ainsi chez l’homme le sens de la vue pour­ront être source de beau­coup de ten­ta­tions et une mau­vaise image, une femme immo­deste pour­ra en pro­vo­quer de vio­lentes. L’apanage de la femme au contraire est plu­tôt de se faire regar­der, admi­rer (si pos­sible) et elle sera plus faci­le­ment pri­son­nière du regard des autres, de la mode, de la coquet­te­rie qui pour­ront la pous­ser jus­qu’à l’immodestie.

C’est la pra­tique des ver­tus, avec la grâce de Dieu, qui nous per­met­tra de com­battre ces ten­dances dues au péché ori­gi­nel et à nos mau­vaises habi­tudes. Dans ce domaine, ce sera sur­tout la ver­tu de tem­pé­rance, ver­tu qui fait que l’on use confor­mé­ment à la rai­son des choses qui flattent les sens. À cette ver­tu, se rat­tachent la pudeur, qui règle les actes exté­rieurs capables d’ex­ci­ter aux plai­sirs déshon­nêtes, et la modes­tie, qui règle entre autres les mou­ve­ments du corps, le port des vêtements.

Faisant cela, nous exer­ce­rons éga­le­ment la ver­tu de cha­ri­té ; elle nous fera évi­ter le péché de scan­dale, qui four­nit au pro­chain une occa­sion de ruine spi­ri­tuelle. Et la mode d’au­jourd’­hui en est bien sou­vent res­pon­sable. Le pape Pie XII l’é­vo­quait déjà dans un dis­cours du 22 mai 1941 à la jeu­nesse fémi­nine :

« Le bien de notre âme l’emporte sur celui de notre corps, et nous devons pré­fé­rer à l’a­van­tage de notre propre corps le bien de l’âme de notre pro­chain. Dès lors, ne voyez-​vous pas qu’il existe une limite qu’au­cune forme de mode ne peut faire dépas­ser, une limite au-​delà de laquelle la mode se fait source de ruines pour l’âme de la femme et pour l’âme d’au­trui ? (…) Oh ! com­bien jus­te­ment on a obser­vé que si cer­taines chré­tiennes soup­çon­naient les ten­ta­tions et les chutes qu’elles causent chez les autres par leurs toi­lettes et les fami­lia­ri­tés aux­quelles, dans leur légè­re­té, elles accordent si peu d’im­por­tance, elles s’é­pou­van­te­raient de leur responsabilité ! »

Souvenons-​nous que la vie chré­tienne est une lutte. Il nous faut gar­der la foi, mais aus­si la cha­ri­té sans laquelle celle-​ci est morte. Nous don­nons l’exemple de la tra­di­tion dog­ma­tique, litur­gique, don­nons aus­si celui de la tenue chré­tienne, pour la plus grande gloire de Dieu et le salut des âmes. Quant à la pudi­bon­de­rie, excès de pudeur, nul besoin d’en par­ler aujourd’hui…

Abbé Emeric Baudot, 1er Assistant du Supérieur du District de France de la FSSPX

Sources : Le Chardonnet n° 339 – Juin 2018 /​La Porte Latine du 13 juin 2018