Chrétien qui viens ici ou par dévotion ou pour accomplir un vœu, admire la sainte Maison de Lorette vénérée dans le monde entier à cause des mystères divins et des miracles qui y ont été accomplis. C’est là qu’est née Marie, la Très Sainte Mère de Dieu, c’est là qu’elle fut saluée par l’ange, c’est là que s’est incarné le Verbe éternel de Dieu.
Tels sont les premiers mots de l’épigraphe composée par le pape Clément VIII et apposée sur le mur extérieur de la maison de Lorette. Une ancienne tradition veut en effet que la maison où a eu lieu l’Annonciation de l’Archange Gabriel à la Sainte Vierge ait été miraculeusement enlevée de Nazareth et portée à Lorette où s’élève aujourd’hui un grand sanctuaire.
Cette translation de la Santa Casa a attiré des foules de pèlerins aux siècles passés, mais à notre époque rationaliste, nombreux sont les esprits, y compris chez les catholiques, qui n’admettent pas le miracle. Les uns, comme Ulysse Chevalier [1] et Dom Leclercq [2], ont mis en doute dès le début du XXe siècle, l’authenticité de la Sainte Maison et donc bien sûr nient toute intervention miraculeuse. D’autres veulent bien voir dans la maison de Lorette la maison de la Sainte Vierge, mais ils refusent de croire à son transport miraculeux et cherchent des explications rationnelles à son déplacement [3].
Mais, des recherches scientifiques menées sur la Santa Casa ont révélé des données inconnues du problème. Et le débat est relancé. La maison de Lorette est-elle l’authentique maison de la Sainte Vierge ? Que penser de la tradition de sa miraculeuse translation ? Voilà les questions auxquelles nous tâcherons de répondre.
La maison de la Vierge à Nazareth
Il nous faut d’abord rassembler les informations existantes sur la maison de la Vierge à Nazareth.
Les fouilles menées à Nazareth ont pu montrer que les habitations de l’époque de Notre-Seigneur étaient généralement composées d’une seule pièce surmontant une grotte qui en constituait la cave [4].
Après l’Ascension de Notre Seigneur Jésus-Christ, la petite maison de la Vierge fut transformée en oratoire par les Apôtres, comme tous les lieux sanctifiés par la présence de Jésus [5]. Après avoir accordé aux chrétiens l’édit de paix religieuse de Milan (313), l’empereur Constantin et sa mère sainte Hélène firent édifier de somptueuses églises sur plusieurs lieux saints de la Palestine. L’une d’elle fut érigée sur la petite maison de Nazareth, qui avec la grotte contiguë, fut incluse dans la crypte d’une basilique. Un pèlerin de Plaisance écrivait en 570 : « domus Mariae basilica est » (la maison de Marie est une basilique) [6].
Lors de l’invasion de la Palestine par les Perses du roi Cosroes, en 615, puis par les Grecs dirigés par l’empereur Zimisces, en 975, la basilique de Nazareth fut épargnée. La sainte Maison resta donc ce qu’elle était au IVe siècle [7].
A la fin du XIe siècle, la Galilée fut envahie par les Sarrasins qui détruisirent la Basilique de l’Annonciation. Celle-ci fut peu après reconstruite par les Croisés. Mais la sainte Maison et sa grotte, étant incorporées dans la crypte, ne furent pas touchées par les destructions des musulmans. Les descriptions laissées par les pèlerins successifs en témoignent.
Nous avons des preuves certaines que la Sainte Maison était encore à Nazareth dans les années 1250–1290. Le roi de France saint Louis, fait prisonnier lors de la septième croisade par le Sultan d’Égypte, puis libéré, resta en Terre Sainte quelques années. Le 23 mars 1251, il quittait Saint-Jean‑d’Acre, avec son épouse Marguerite, pour se rendre en pèlerinage à Nazareth, où il arriva le 25 mars. Après avoir assisté à la messe à l’autel de l’Annonciation, il reçut la sainte communion [8].
En 1273, les Musulmans détruisirent la seconde Basilique érigée sur la sainte Maison. Mais comme celle-ci ne pouvait rien offrir à leur rapacité, elle resta intacte. Là encore, ce sont les témoignages des pèlerins des années 1263–1290 qui nous en assurent. Dans l’Itinerarium de Ricoldo Montecroce, qui put visiter la Sainte Maison à Nazareth en 1288 ou 1289, on lit ceci :
« A Nazareth, nous avons trouvé une grande église presque entièrement détruite, où rien ne restait des constructions précédentes, si ce n’est la cellule où la Vierge reçut l’annonce : le Seigneur l’ayant préservée en témoignage d’humilité et de pauvreté. »
Frère Bruno Bonnet-Eymard, C.R.C., n°317, nov. 1995, p.14
C’est en 1291, le 18 mai, que les Musulmans, s’emparant de Saint-Jean‑d’Acre, s’assurent la domination définitive de la Terre sainte.
C’est aussi en 1291, le 10 mai, que la sainte Maison fait son apparition en Occident à Tersatz, près de Fiume.
L’histoire de la translation de la Santa Casa
Elle nous est surtout connue par l’ouvrage de Jérôme Angelita : Virginis Lauretanae historia, présenté au pape Clément VII le 19 septembre 1531. D’après cet auteur, la sainte Maison a été transportée par des anges de Nazareth à Tersatz, dans la nuit du 9 au 10 mai 1291. De là, elle est enlevée le 10 décembre 1294, elle traverse la mer Adriatique et vient se poser dans le territoire de Recanati, au milieu d’un bois de lauriers. Le 10 août 1295, nouveau déplacement : elle se retrouve sur le sommet d’une colline appartenant aux deux frères Antici. Et le 9 décembre de la même année, la ville de Recanati envoie un ambassadeur au pape Boniface VIII pour lui annoncer l’arrivée de la maison de Nazareth sur son territoire. Enfin, le 2 décembre 1295, quatrième et dernière translation de la Santa Casa, une centaine de mètres plus loin, sur la route qui conduit de Recanati à Porto Recanati.
Jérôme Angelita était secrétaire perpétuel de la commune de Recanati et il déclare s’appuyer, pour rédiger l’histoire de la Sainte Maison, sur les archives de Fiume et de Recanati.
Les premières critiques
Ce sont les protestants qui les premiers ont nié la possibilité d’une translation miraculeuse. Un évêque apostat, P.-P. Vergerio, passé au protestantisme, écrivit en 1554 un ouvrage dont le titre est significatif : « L’idole de Lorette ». Contre ses accusations, saint Pierre Canisius se fit le champion de l’authenticité de la Santa Casa.
Trois siècles plus tard, l’historien Ulysse Chevalier et Dom Leclercq reprennent la polémique à ce sujet, accusant Jérôme Angelita d’avoir forgé de toutes pièces l’histoire qu’il raconte et les dates qu’il donne.
La tradition
Commençons par examiner les sources orales de l’histoire de la maison de Lorette.
Dans les régions voisines de Tersatz et de Lorette, le récit du transfert miraculeux de la Santa Casa est largement répandu et la translation fêtée depuis longtemps. Dans les Marches, la nuit du 9 au 10 décembre, on se réveille à trois heures et on allume des feux en souvenir de ce miracle [9].
Le fait que cette tradition ait été admise jusqu’au protestantisme sans être contestée milite en faveur de son authenticité. L’époque de la translation, c’est-à-dire la fin du XIIIe siècle, est aussi celle du plus grand rayonnement de la chrétienté : c’est l’époque de saint Thomas d’Aquin, saint Bonaventure, Dante et de nombreux autres savants. S’il s’était agi d’une légende, l’autorité ecclésiastique aurait dénoncé le faussaire.
Or la tradition laurétaine a été admise par l’Église à l’époque. En outre, les hommes d’Église disposaient alors de documents qui peuvent nous manquer suite à des destructions : les archives de Recanati, par exemple, ont brûlé en 1322.
Par ailleurs, on peut se demander comment une légende qui décrit dans les détails quatre translations successives aurait pu naître sans fondement réel.
Les sources écrites de la translation
Quant aux sources historiques et archivistiques, il est vrai qu’elles sont tardives. L’événement a eu lieu en 1291 ; le premier récit que nous possédions n’est pas antérieur à 1460. C’est là d’ailleurs le principal argument des adversaires de l’authenticité, mais ce n’est pas un argument suffisant.
Le premier récit historique conservé est celui de Pierre Georges Tolomei de Teramano, gouverneur du sanctuaire de Lorette. Il a été écrit entre 1460 et 1470. La seconde relation historique est due au bienheureux Spagnoli, carme de Mantoue (1479 ou 1489). Il prétend avoir retranscrit, pour le préserver de l’oubli, un texte gravé sur une tablette apposée sur le mur de la Sainte Maison et qui aurait été usé par le temps [10].
En 1464, un décret du pape Paul II est le premier document pontifical à mentionner un transport miraculeux. Le 21 octobre 1507, une bulle de Jules II confirme intégralement la tradition.
C’est, comme nous l’avons vu, au début du XVIe siècle que Jérôme Angelita, secrétaire-archiviste de la République de Recanati, écrivit son histoire, qui est, parmi les ouvrages anciens sur la Sainte Maison, le plus intéressant.
Cependant, on dispose d’une autre source écrite : les récits des pèlerins en Terre sainte qui viennent confirmer a contrario les assertions des écrivains anciens : jusqu’au XIIe siècle inclus, ils parlent de la sainte maison de Nazareth. A la fin du Moyen Age, ils mentionnent seulement une grotte [11].
Le développement du pèlerinage
On est sûr qu’à la date de la publication de l’ouvrage de J. Angelita, le pèlerinage à Lorette existait depuis plus de deux cents ans : une bulle du pape Clément V, datée du 18 juillet 1310, mentionne un pèlerinage en Terre sainte effectué par le chevalier Charles-Louis de Schevenden. Or celui-ci, avant de partir, s’est rendu avec son épouse « aux pieds de la miraculeuse et divine Vierge Marie de Lorette » [12]. Il faut bien que les pèlerins aient eu un motif pour se déplacer du pays de Bade jusqu’à Lorette.
Le sanctuaire qui surgit à Lorette à la fin du XIIIe siècle, la naissance de la ville sur une colline jusque-là inculte et inhabitée, où se pressent désormais des foules de pèlerins, prouvent qu’un événement exceptionnel a eu lieu à cet endroit et à cette époque. Le professeur Carlo Cecchelli affirme dans son livre Mater Christi :
« A partir du Moyen Age, les documents ne laissent aucun doute : Lorette fut le centre de l’un des plus grands pèlerinages. Il est licite d’admettre qu’un événement surnaturel ait pu éclairer les origines de la Sainte Maison de Lorette ».
Cité dans Autenticità della S. Casa, p.46
L’iconographie
Plus anciens que les sources écrites connues sont les témoignages fournis par les artistes. La plus antique allusion à la translation miraculeuse de la Santa Casa se trouve dans le manuscrit des Heures de Jeanne d’Evreux, enluminé à Paris aux alentours de 1325, soit une trentaine d’années après l’événement. On y voit la Vierge Marie recevant l’annonce de l’archange Gabriel dans une petite maison soutenue par deux anges ailés qui semblent la soulever et la transporter [13].
Dans les Marches et en Ombrie, on trouve d’autres représentations peintes ou sculptées de la translation miraculeuse : la fresque de Gubbio, dans le couvent Saint-François, est datée du XIVe siècle par les experts, de même que celle de l’église Saint-Marc à Jesi.
Les données archéologiques
Pour compléter cet ensemble de renseignements, les fouilles pratiquées au XXe siècle, tant à Nazareth qu’à Lorette, ont apporté des preuves d’authenticité certaines. Les fouilles de Nazareth, entreprises en 1955 par le père Bellarmino Bagatti, ont permis de découvrir sous les fondations de l’église byzantine édifiée au Ve siècle, une église antérieure (IIe-IIIe siècles), spacieuse (si l’on en juge par le diamètre des colonnes retrouvées) et où il reste des vestiges d’un culte rendu à Marie : des graffiti tracés en araméen, grec et latin sur l’enduit qui recouvrait certaines pierres. On déchiffre notamment les deux premiers mots grecs de la salutation de l’Ange à Marie (cf. Lc I, 28) : XAIPE MAPIA (réjouissez-vous, Marie) [14].
A Lorette, les fouilles ont été menées entre 1962 et 1965. Sur les murs de la Casa, le Père Giuseppe Santarelli, recteur du sanctuaire, a relevé aussi des graffiti. Il en a envoyé des clichés, par correspondants interposés, à deux archéologues chevronnés du Studium biblicum franciscanum, les Pères Testa et Bagatti, sans révéler leur provenance. Les deux savants ont affirmé que ces graffiti étaient d’origine palestinienne et judéo-chrétienne.
La conclusion tirée par le Père Santelli est la suivante :
« Il n’est pas facile d’expliquer la présence à Lorette de graffiti qui, à l’examen, paraissent d’origine judéo-chrétienne, sans admettre que les pierres de la Santa Casa proviennent de Nazareth, comme le veut la tradition. »
Ce témoignage est d’autant plus flagrant que dans cette région des Marches, il n’existe pas de carrières. Toutes les autres constructions de Recanati et de Lorette sont en briques [15].
L’analyse chimique (faite en aveugle par le professeur Ratti de l’université de Rome en 1871) de deux pierres provenant de Nazareth et deux autres de Lorette, avait déjà fourni des renseignements convergents. La composition des quatre pierres était la même et elle différait de celle des pierres qu’on peut trouver aux alentours de Lorette, sur le Mont Conero ou ailleurs.
En outre, le Père Santarelli indique bien que les fouilles menées dans les années 1960 ont « confirmé certaines données de la tradition, comme l’absence de fondations propres à la Santa Casa et son implantation au milieu d’une voie publique. » [16] Angelita, déjà au XVIe siècle, avait signalé ce fait remarquable : la Maison tient debout sans fondations. Il est donc évident qu’elle n’a pas été bâtie sur place. Les maisons de Nazareth s’appuyaient directement sur le rocher et n’avaient pas besoin de fondations ; mais ce n’est pas le cas pour les autres maisons de la région de Lorette. On constate en outre pour la Santa Casa un certain nombre de reprises en sous-œuvre, antérieures aux grands travaux du XVe siècle, et qui témoignent du souci de conserver l’édifice.
Le « noyau originel » de celui-ci, comme dit le Père Santelli, est formé de trois murs s’élevant en lit de pierres jusqu’à une hauteur de trois mètres. Des briques ont été ajoutées ensuite pour les exhausser [17].
La Santa Casa est en tous points conforme aux maisons remises au jour depuis 1968 lors des célèbres fouilles de Capharnaüm, notamment la maison de saint Pierre retrouvée sous les fondations de l’église octogonale. Dépourvues de réelles fondations, les maisons de Capharnaüm étaient sans étage et ne dépassaient guère les trois mètres.
En mars 1968, un sondage effectué dans le mur occidental de la Santa Casa, immédiatement au-dessous de la « fenêtre de l’ange », afin de prélever des échantillons de mortier pour analyse, révéla une cavité. On y découvrit une monnaie de Ladislas d’Anjou-Durazzo, roi de Naples (1376–1414) murée au milieu d’autres objets [18]. Parmi eux des morceaux de coquille d’œuf d’autruche. Or, d’une part, l’autruche vivait autrefois et vit encore en petit nombre près de la mer Morte ; d’autre part, depuis le temps des croisades, l’œuf d’autruche était placé dans les églises de Palestine à titre d’ornement. Et cet usage fut importé en Occident par les croisés, comme l’atteste par exemple le retable de Piero della Francesca (1420–1492) où l’on voit la vierge et l’Enfant entourés de saints et d’anges avec un œuf d’autruche suspendu dans l’abside au-dessus d’eux. Selon les bestiaires du Moyen Age, les œufs d’autruche, déposés par la femelle sur le sable, étaient portés à maturation par le soleil : figure de l’enfantement virginal du Verbe de Dieu fécondé par le soleil de l’Esprit Saint dans le sein de Marie [19].
Les arguments moraux
Comme le disait déjà Paul II dans sa bulle, en 1464, les miracles qui ont eu lieu à Lorette sont innombrables. Au XXe siècle, les guérisons miraculeuses ont fait l’objet d’études scientifiques. On a pu en recenser 18 cas rien qu’entre 1936 et 1943.
Enfin, on relève les noms de 39 saints et 22 bienheureux qui ont été pèlerins à Lorette, de saint François de Sales, qui y a renouvelé son vœu de chasteté, à sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. Est-il possible que Dieu ait permis que ses amis les plus chers se trompent dans leur foi dans la Sainte Maison ?
Plusieurs souverains pontifes ont manifesté un grand intérêt pour Lorette, lui octroyant des privilèges et faveurs spirituelles et prenant des dispositions pour l’embellissement du sanctuaire. Beaucoup parmi eux se sont rendus en pèlerinage à Lorette. Dès 1375, Grégoire XI parle des nombreux miracles que la Vierge opère à Lorette et concède des indulgences spéciales pour les pèlerins certains jours de l’année [20].
Dans l’épigraphe que Clément VIII a fait apposer en 1598 sur la paroi de la Santa Casa, on trouve un témoignage de sa foi en la translation miraculeuse : « Cette maison fut transférée par les anges depuis la Palestine une première fois en Dalmatie, à Tersatz, l’an 1291, sous le pontificat de Boniface VIII. » [21]
La question de la translation
On dispose donc d’un faisceau de preuves qui convergent en faveur de l’authenticité de la maison de Lorette. Celle-ci vient bien de Nazareth et il s’agit bien de la maison de Notre-Dame. Reste à savoir comment elle a fait le voyage.
Certains critiques rejettent l’explication miraculeuse fournie par Angelita et la tradition. Ils proposent la thèse du transport humain : les Croisés auraient emporté la maison en Occident, et l’auraient reconstruite pierre à pierre. A l’appui de cette explication, ils trouvent dans le Chartularium culisanense, conservé à Naples, la liste des biens reçus en dot par Marguerite, fille du despote d’Epire Nicéphore Ier Angelo Comnène, qui épousa Philippe II d’Anjou, prince de Tarente, fils de Charles II, roi de Naples, en septembre 1294. Or cette liste mentionne des « saintes pierres extraites de la maison de Notre-Dame, la Vierge Mère de Dieu. » [22]
Néanmoins, il faut noter que la préposition latine « ex » peut très bien indiquer que d’un tout a été prélevée une partie, de telle façon que les « petras ablatas » pourraient n’être que quelques pierres enlevées de la Maison par dévotion.
La thèse du transport humain se heurte aussi aux obstacles matériels. La sainte Maison était encore à Nazareth en 1288–1289. A l’époque, les Musulmans étaient partout vainqueurs en Palestine. La situation était plus que critique pour les chrétiens. Comment auraient-ils pu transporter à dos d’ânes un matériel de 100 à 200 tonnes ? Où auraient-ils trouvé une armée pour protéger une telle expédition ? On n’a aucune trace historique d’une telle décision. Aurait-elle échappé à l’autorité ecclésiastique ? Et dans l’hypothèse d’une reconstruction, comment explique-t-on la présence des graffiti dont nous avons parlé ?
En outre, si la Sainte Maison a été réédifiée à Lorette, elle l’a été d’une façon contraire à toutes les règles urbanistiques du Moyen Age. Elle est posée, sans fondations, au milieu d’une voie publique, qui est une ancienne voie romaine. Peut-on admettre que l’autorité publique ait toléré une construction en ce lieu ? Ce serait contraire au bon sens. Et là aussi, on n’a aucune trace dans les archives.
Pour conclure sur ce sujet passionnant, rappelons-nous que la translation miraculeuse n’est pas un dogme de foi mais que, comme le disait l’Archange Gabriel à la Très Sainte Vierge Marie, le jour de l’Annonciation, « rien n’est impossible à Dieu ». Les historiens primitifs parlaient d’un transport des anges. Le pape Pie IX écrivait que la maison de Nazareth avait été transportée « par vertu divine très loin ». Quant à sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, qui l’avait visitée pendant son pèlerinage en Italie, elle pensait que la Sainte Vierge l’avait transportée elle-même.
Lorette était autrefois un des sanctuaires les plus fréquentés d’Europe et nous pouvons être sûrs qu’on y obtient toujours des grâces nombreuses et de choix.
Abbé Pierpaolo-Maria Petrucci
- Chevalier (Ulysse), Notre-Dame de Lorette : Etude historique sur l’authenticité de la Santa Casa, Paris : 1906, 519 p.[↩]
- Leclercq (Dom Henri), Dictionnaire d’archéologie chrétienne et de liturgie, article Lorette, tome IX (1930), col. 2473.[↩]
- C’est le cas de l’Abbé Georges de Nantes, dans son bulletin La Contre-Réforme Catholique au XXe siècle, n°317 de novembre 1995.[↩]
- Congrégation universelle de la Sainte Maison, La tradition de Lorette, Lorette : 1978, p. 27.[↩]
- D’Anghiari (P. Angelo Maria), Autenticità della S. Casa, p. 15–16.[↩]
- La tradition de Lorette, p. 27.[↩]
- Autenticità della S. Casa, p.16.[↩]
- Ibidem, p. 20.[↩]
- Autenticità della S. Casa, p.12[↩]
- Ibidem, p. 34[↩]
- Ibidem, p. 47[↩]
- C.R.C., n°317, p.3[↩]
- La tradition de Lorette, p. 7.[↩]
- C.R.C., n°317, p.4[↩]
- Ibidem.[↩]
- Ibidem, p. 8[↩]
- Ibid.[↩]
- Ibidem, p. 10 à 12[↩]
- Ibidem, p. 10 à 12[↩]
- Autenticità della S. Casa, p.24[↩]
- Ibidem, p. 60[↩]
- C.R.C., n°317, p.12–13.[↩]