Encore Vatican II

On l’en­tend par­fois expli­ci­te­ment, et plus sou­vent encore implicitement :

Encore Vatican II ? Vous nous res­sas­sez tou­jours ces vieille­ries ? Mais c’est com­plè­te­ment dépas­sé ! Le Concile, c’est une dis­pute pré­his­to­rique ! Laissons les morts enter­rer les morts, et inté­res­sons nous à la vie de l’Eglise d’aujourd’hui.

J’aimerais pou­voir par­ta­ger ces vues opti­mistes, et dire que Vatican II appar­tient au pas­sé. Les anciens Romains pos­sé­daient la cou­tume de la dam­na­tio memo­riae. Après le règne d’un empe­reur par­ti­cu­liè­re­ment cala­mi­teux, on s’at­ta­chait a faire dis­pa­raitre toute trace de son pas­sage. II serait bon, en effet, que I’Eglise pro­cède á la dam­na­tio memo­riae de Vatican II.

Nous en sommes loin. Pour les auto­ri­tés offi­cielles, « le Concile » par excel­lence, par anto­no­mase, est d’une actua­li­té tou­jours plus pres­sante : l’in­fla­tion des cita­tions de Vatican II dans les docu­ments eccle­sias­tiques en est la preuve tan­gible. Pour ne prendre qu’un seul exemple, le Catéchisme de I’Eglise catho­lique contient plus de 800 réfé­rences au Concile, pour moins de 600 pages de texte.

Le Concile est mal­heu­reu­se­ment loin d’être mis au ran­cart. Prévaut au contraire I’etat d’es­prit défi­ni par le pape Paul VI dans sa lettre du 29 juin 1975 à Mgr Lefebvre :

Le concile Vatican II ne fait pas moins auto­ri­té, il est même sous cer­tains aspects plus impor­tant encore que celui de Nicée.

Or, si nos pays connaissent une « apos­ta­sie silen­cieuse » (parole de Jean-​Paul II) alors que « la barque de I’Eglise fait eau de toutes parts » (parole de Benoit XVI) en rai­son de « l’au­to­dé­mo­li­tion de I’Eglise » qui y a fait entrer les « fumées de Satan » (paroles de Paul VI), n’est-​ce pas pré­ci­sé­ment en rai­son de cette obs­ti­na­tion à main­te­nir coûte que coûte au cœur de la vie de I’Eglise un concile dont les consé­quences sont si dramatiques ?

Comment la Fraternité Saint-​Pie X pourrait-​elle alors se sous­traire à ce « minis­tère cri­tique » des erreurs conci­liaires dont l’a si visi­ble­ment char­gée la Providence en cette tra­gique crise ?

C’est pour­quoi, à tra­vers col­loques et sym­po­siums, nous conti­nuons et conti­nue­rons de plus en plus à ana­ly­ser, à éclai­rer, à cri­ti­quer les erreurs conci­liaires. Non seule­ment une telle étude n’est pas « dépas­sée » (cri­tère etrange quand il s’a­git de la véri­té), mais elle devient chaque jour plus urgente, car ces erreurs ménent l’Eglise la ruine et les âmes à la damnation.

Certains défen­seurs auto­pro­cla­més de Mgr Lefebvre affirment tou­te­fois que, dans sa cri­tique de Vatican II, la Fraternité Saint-​Pie X se dur­cit de plus en plus, deve­nant ain­si infi­dèle à l’es­prit de son vene­rable Fondateur.

Puisque ceux-​ci pré­tendent suivre « fidè­le­ment » Mgr Lefebvre mais pas sa Fraternité « infi­dèle », nous décla­rons, pour les ras­su­rer, faire entié­re­ment nôtres, à pro­pos des erreurs de Vatican II, les paroles mêmes de notre Fondateur, pro­non­cées solen­nel­le­ment durant le Concile, à la face de I’Eglise, le 9 sep­tembre 1965, bien avant la sup-​posée « déviance » de la Fraternité (cf. J’accuse le Concile, p. 93) :

Cette consti­tu­tion pas­to­rale [Gaudium et spes] n’est ni pas­to­rale, ni éma­née de l’Eglise catho­lique : elle ne paît pas les hommes et les chré­tiens de la véri­té évan­gé­lique et apos­to­lique et, d’autre part, jamais l’Eglise n’a par­lé ain­si. Cette voix, nous ne pou­vons pas l’é­cou­ter, parce qu’elle n’est pas la voix de l’Epouse du Christ. Cette voix n’est pas la voix de l’Esprit du Christ. La voix du Christ, notre Berger, nous la connais­sons. Celle-​ci, nous l’i­gno­rons. Le vête­ment est celui des bre­bis ; la voix n’est pas celle du Berger, mais peut-​être celle du loup. J’ai dit.

Abbé Régis de Cacqueray†
Supérieur du District de France

(Editorial extrait de Fideliter n° 168 )

Capucin de Morgon

Le Père Joseph fut ancien­ne­ment l’ab­bé Régis de Cacqueray-​Valménier, FSSPX. Il a été ordon­né dans la FSSPX en 1992 et a exer­cé la charge de Supérieur du District de France durant deux fois six années de 2002 à 2014. Il quitte son poste avec l’ac­cord de ses supé­rieurs le 15 août 2014 pour prendre le che­min du cloître au Couvent Saint François de Morgon.