Le pape a introduit dans l’Église de Dieu ce qui revient au divorce

Le huit sep­tembre der­nier, dans l’in­dif­fé­rence presque géné­rale, le pape a intro­duit dans l’Église de Dieu ce qui revient au divorce. Honte à ceux qui se taisent ! Honte aux chré­tiens qui convo­le­ront en des noces adul­tères sous cou­vert de l’au­to­ri­té pon­ti­fi­cale ! Honte aux prêtres qui pro­non­ce­ront des sen­tences inva­lides et sacri­lèges de nul­li­té de mariage !

Comment le pape s’y est-​il pris ? Il est tout sim­ple­ment pas­sé par une notion catho­lique qui appar­tient à l’en­sei­gne­ment de l’Église sur le mariage, mais pour la défor­mer, la défi­gu­rer et la pro­fa­ner.

Ce n’est pas la pre­mière fois que la hié­rar­chie conci­liaire agit de la sorte. Déjà, par exemple, les nova­teurs s’é­taient empa­rés de l’as­pect com­mé­mo­ra­tif de la sainte messe, ain­si que de « la par­ti­ci­pa­tion des fidèles à la litur­gie » pour intro­duire une pen­sée qui n’est pas catho­lique. Car s’il est vrai que la messe com­mé­more le sacri­fice san­glant du Calvaire, et qu’il est essen­tiel que les bap­ti­sés n’as­sistent pas aux saints mys­tères comme de simples spec­ta­teurs, c’est une tra­hi­son de réduire l’Eucharistie à la com­mé­mo­ra­tion du mys­tère pas­cal par le peuple de Dieu sous la pré­si­dence du prêtre. Non, la messe est un acte sacri­fi­ciel offert par le prêtre seul.

Alors que cer­tains pro­gres­sistes comme le car­di­nal Kasper auraient vou­lu que l’on recon­naisse tout sim­ple­ment le divorce à la manière des Orthodoxes ou des Protestants, il a été jugé plus pru­dent de l’in­tro­duire, dans les faits, par la notion d’empêchement de mariage. En effet le mariage est un contrat auquel l’Église peut appo­ser des condi­tions de légi­ti­mi­té ou même de vali­di­té. On com­prend bien, par exemple, qu’en rai­son d’un trop jeune âge, ou de consan­gui­ni­té, ou d’hon­nê­te­té publique, des chré­tiens soient empê­chés de se marier. Si mal­gré ces empê­che­ments, le mariage a été célé­bré, il est pos­sible d’a­voir recours à l’au­to­ri­té ecclé­sias­tique qui, après juge­ment, pour­ra décla­rer sa nul­li­té, exi­ger que les faux époux se séparent et les auto­ri­ser à se marier pour de bon.

Cette pro­cé­dure extra­or­di­naire est mal­heu­reu­se­ment deve­nue cou­rante dans l’Église conci­liaire. Le pape Jean-​Paul II, en effet, avait intro­duit un nou­vel empê­che­ment aux contours mal défi­nis : le manque de matu­ri­té. Que de futurs parents soient des per­sonnes res­pon­sables, tout le monde le sou­haite, mais sur quels cri­tères dira-​t-​on que tels époux n’é­taient pas assez mûrs lors­qu’ils ont échan­gé solen­nel­le­ment leurs consen­te­ments ? Ce sont ain­si des mil­liers de juge­ments incer­tains ou scan­da­leux qui ont été pro­non­cés par des tri­bu­naux ecclé­sias­tiques depuis 1983.

Le pape François est allé beau­coup, beau­coup plus loin. Par le motu pro­prio « Mitis Judex », il a réfor­mé la par­tie du droit cano­nique qui règle les pro­cé­dures en nul­li­té de mariage. Il a abo­li le carac­tère obli­ga­toire du double juge­ment qui per­met­tait une rigueur et une cer­ti­tude incom­pa­ra­ble­ment plus grandes. Il a sur­tout accor­dé « pleine valeur de preuve » aux décla­ra­tions for­mu­lées par les par­ties. Ce sont ain­si les rai­sons sub­jec­tives qui vont pré­va­loir sur le mariage et le bien commun.

Mais ce n’est pas tout. Le motu pro­prio parle de « cas où l’af­fir­ma­tion selon laquelle le mariage serait enta­ché de nul­li­té est sou­te­nue par des argu­ments par­ti­cu­liè­re­ment évi­dents » et où la pro­cé­dure sera encore abré­gée, l’é­vêque seul étant le juge ultime. Huit exemples sui­vis d’un « et cæte­ra » sont envi­sa­gés. Deux d’entre eux, selon la théo­lo­gie catho­lique, pour­raient consti­tuer, en effet, un motif de nul­li­té, mais les autres jamais ! Ils pour­raient éven­tuel­le­ment être uti­li­sés pour cor­ro­bo­rer d’autres élé­ments qui seraient de vraies rai­sons, mais les pré­sen­ter ain­si c’est encou­ra­ger des couples qui n’y auraient jamais pen­sé à obte­nir de l’Église (disons d’hommes d’Église) l’an­nu­la­tion de leur mariage.

Remarquons enfin que dans ce motu pro­prio, il n’est pas fait men­tion des enfants… Seul l’é­pa­nouis­se­ment des époux semble comp­ter, confor­mé­ment à l’en­sei­gne­ment conci­liaire. Paradoxalement, cette nou­velle légis­la­tion sera à l’o­ri­gine de mil­liers de drames familiaux.

Que Dieu nous délivre de la misé­ri­corde conciliaire !

Abbé Thierry GAUDRAY, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X

Source : Le Carillon n° 174 de novembre 2015