Divorcés-​remariés : le théologien australien McGavin propose un rescrit pour qu’ils puissent communier

Note de la rédac­tion de La Porte Latine :
il est bien enten­du que les com­men­taires repris dans la presse exté­rieure à la FSSPX
ne sont en aucun cas une quel­conque adhé­sion à ce qui y est écrit par ailleurs.

Hypothèse. Un res­crit qui per­met­trait de com­mu­nier. Il serait rédi­gé par l’é­vêque, en faveur d’un divor­cé rema­rié de son dio­cèse, après un exa­men atten­tif de son cas qui serait effec­tué en obéis­sant à des normes pro­mul­guées par le pape. C’est ce que pro­pose un théo­lo­gien aus­tra­lien pour remé­dier à la confu­sion actuelle, par Sandro Magister.

ROME, le 24 novembre 2015 – Si l’on en croit ce qui se dit un peu par­tout, le grand vain­queur du synode aurait été l’Église alle­mande, qui se situe à l’avant-​garde mon­diale en matière de réno­va­tion de la dis­ci­pline du mariage catholique.

Mais lorsque l’on entend ce que le pape François a dit aux évêques d’Allemagne venus à Rome en visite « ad limi­na », ven­dre­di 20 novembre, la conclu­sion que l’on en tire n’est pas que l’Église alle­mande est la plus avan­cée du monde, mais exac­te­ment le contraire. C’est la plus ravagée.

Le pape a tenu aux évêques alle­mands des pro­pos très sévères.

- Il a déplo­ré l’absence de « pro­fil catho­lique » dans les ins­ti­tu­tions cari­ta­tives et dans les écoles.
– Il a stig­ma­ti­sé la chute ver­ti­cale de l’assistance à la messe et la « dis­pa­ri­tion de la pra­tique » du sacre­ment de pénitence.
– il s’est plaint de « l’inauguration inces­sante de nou­velles struc­tures aux­quelles, en fin de compte, il manque un élé­ment : les fidèles ».
– Il a appe­lé les évêques à être des « maîtres de la foi », de cette foi qui est « trans­mise et vécue dans la com­mu­nion vivante de l’Église universelle ».
– Il a sou­li­gné que, dans les facul­tés de théo­lo­gie, « la fidé­li­té à l’Église et au magis­tère ne contre­dit pas la liber­té académique ».
– Il a rap­pe­lé que, dans les paroisses, « la pré­cieuse col­la­bo­ra­tion des fidèles laïcs ne peut pas deve­nir un suc­cé­da­né du minis­tère sacer­do­tal ou don­ner car­ré­ment l’impression que celui-​ci est une pos­si­bi­li­té par­mi d’autres », parce que « s’il n’y a pas de prêtre, il n’y a pas d’eu­cha­ris­tie ».- il a décla­ré qu’il fal­lait « pro­té­ger incon­di­tion­nel­le­ment la vie, depuis le moment de la concep­tion jusqu’à celui de la mort natu­relle », parce que « sur ce point nous ne pou­vons pas accep­ter de com­pro­mis, sans quoi nous devien­drions nous aus­si cou­pables de pra­ti­quer la culture du déchet ».

Cependant il y a une seule ques­tion que le pape n’a pas abor­dée : celle de l’accès des divor­cés rema­riés à la com­mu­nion. En Allemagne – mais pas seule­ment dans ce pays – c’est désor­mais une pra­tique cou­rante, auto­ri­sée dans les faits par un grand nombre d’évêques, indé­pen­dam­ment de ce qui a été dit au synode et sans attendre que le pape en tire – c’est à lui qu’incombe cette tâche – des déci­sions opérationnelles.

Parce que c’est bel et bien ce qui se passe. Le chan­ge­ment d’orientation radi­cal dans la dis­ci­pline rela­tive au mariage catho­lique que consti­tue l’accès des divor­cés rema­riés à la com­mu­nion est en train de deve­nir un phé­no­mène très répan­du, spon­ta­né et hors de tout contrôle, sans que Rome – qui a été le point de départ de ce pro­ces­sus – ait encore émis quelque direc­tive que ce soit.

L’intervention que l’on peut lire ci-​dessous – elle prête à dis­cus­sion mais elle est d’un inté­rêt cer­tain – est une réac­tion rai­son­née à cette dérive spon­ta­née. Son auteur est un théo­lo­gien aus­tra­lien, Paul A. McGavin, qui n’a jamais dis­si­mu­lé qu’il sou­hai­tait des inno­va­tions à pro­pos de la dis­ci­pline en matière de mariage catho­lique. Mais à condi­tion que l’on ne touche pas à la doc­trine de l’indissolubilité.

Son opi­nion, en effet, est que « la doc­trine est uni­ver­selle, » tan­dis que « la dis­ci­pline prend en compte les cir­cons­tances par­ti­cu­lières et les res­pon­sa­bi­li­tés morales des per­sonnes, y com­pris en cas d’échecs ». Et la tra­di­tion de l’Église latine recon­naît effec­ti­ve­ment à la chaire de Pierre l’au­to­ri­té qui lui per­met de concé­der des excep­tions aux lois uni­ver­selles, y com­pris en matière de mariage.

C’est ce qui se pro­duit déjà, par exemple, avec le « pri­vi­lège pétri­nien », en ver­tu duquel le pape peut dis­soudre un mariage « contrac­té et non consom­mé ». Et c’est ce qui pour­rait éga­le­ment se pro­duire – ce que sou­haite McGavin – dans le cas d’autres situa­tions matri­mo­niales complexes.

Le pou­voir d’autoriser de telles excep­tions devrait, d’après le théo­lo­gien aus­tra­lien, être éten­du à chaque évêque. Mais seule­ment avec des « normes » pré­cises, rédi­gées par Rome, qui en régi­raient l’utilisation et avec un « res­crit » final qui serait for­mu­lé par l’évêque de manière publique pour chaque cas. Parce que, à défaut d’une telle régle­men­ta­tion, la confu­sion et le laxisme n’auraient plus de limites et qu’ils fini­raient par démo­lir éga­le­ment la doctrine.

La dis­tinc­tion existe déjà, dans le droit cano­nique actuel, entre les lois géné­rales, qui sont appli­cables à tout le monde, et les actes admi­nis­tra­tifs indi­vi­duels, qui concernent des cas spécifiques.

Parmi ces actes admi­nis­tra­tifs il y a le res­crit, qui est défi­ni de la manière sui­vante par l’article 59 § 1 du code de droit canonique :

« Par res­crit, on entend l’acte admi­nis­tra­tif don­né par écrit par l’autorité exé­cu­tive com­pé­tente, par lequel, à la demande de quelqu’un, est concé­dé selon sa nature propre un pri­vi­lège, une dis­pense ou une autre grâce ».

Dans le texte ci-​dessous McGavin, après avoir pré­sen­té des argu­ments en faveur de ses idées, pro­pose jus­te­ment un modèle de res­crit par lequel un évêque pour­rait auto­ri­ser un divor­cé rema­rié à rece­voir la com­mu­nion, au terme d’un exa­men atten­tif de son cas, effec­tué selon les normes pro­mul­guées par Rome.

Le père McGavin est un prêtre du dio­cèse de Canberra et Goulburn, en Australie. Il a été pro­fes­seur d’économie et pré­sident de la Business School de l’Université de Nouvelle-​Galles du Sud. Il s’est spé­cia­li­sé en théo­lo­gie du Nouveau Testament, a été curé d’une paroisse et il est actuel­le­ment aumô­nier catho­lique de l’Université de Canberra.

Un acte pastoral et administratif sous mandat du pape, sans changements doctrinaux ou canoniques, par Paul Anthony McGavin

En matière de mariage/​divorce/​remariage, la nou­velle situa­tion qui résulte de la publi­ca­tion du motu pro­prio « Mitis judex Dominus Jesus » par le pape François et de celle de la « Relatio » du synode de 2015 pour­rait abou­tir à un désac­cord entre la doc­trine et la pra­tique et rendre plus urgente encore la publi­ca­tion par le Saint-​Père de lignes direc­trices post-​synodales claires.

La pré­sente note pro­cède à l’exa­men d’une pro­po­si­tion de « normes » du Saint-​Siège pour des actes pas­to­raux et admi­nis­tra­tifs ne com­por­tant pas de chan­ge­ments doc­tri­naux ou cano­niques. Cette pro­po­si­tion est com­plé­tée à la fin de l’article par un modèle de lettre-​rescrit épiscopale.

Le pape François a devan­cé la « Relatio » du synode extra­or­di­naire de 2014 (cf. n° 48) lorsqu’il a ins­ti­tué, le 14 sep­tembre 2014, une com­mis­sion char­gée d’étudier la sim­pli­fi­ca­tion des pro­cé­dures d’annulation ; ensuite il a devan­cé le synode de 2015 par son motu pro­prio « Mitis judex Dominus Jesus », publié le 8 sep­tembre 2015 et qui entre­ra en vigueur le 8 décembre 2015. On peut don­ner deux exemples dans lequel cette sim­pli­fi­ca­tion résout des dif­fi­cul­tés que l’on ren­con­trait dans les pro­cé­dures juri­diques qui étaient employées jusqu’à présent.

Premier exemple : les sim­pli­fi­ca­tions intro­duites par ces révi­sions cano­niques per­mettent de par­ve­nir plus faci­le­ment à une « cer­ti­tude morale » (nou­veau canon 1687 § 1) dans l’identification juri­dique d’un empê­che­ment diri­mant, tel que l’instabilité men­tale au moment où le mariage a été contrac­té. Autre exemple : les pro­cé­dures cano­niques sim­pli­fiées peuvent dimi­nuer la pro­ba­bi­li­té que la recherche d’une annu­la­tion soit frei­née par la crainte d’aggraver des conflits conju­gaux anté­rieurs et des bles­sures qui pour­raient ame­ner de nou­veaux conflits de droit civil à pro­pos de ques­tions telles que la garde des enfants et/​ou les contacts avec les enfants.

En bref, la légis­la­tion sim­pli­fiée faci­lite un accès aux tri­bu­naux qui reflète mieux les situa­tions pas­to­rales et de droit civil com­plexes qui se pré­sentent de nos jours. Le motu pro­prio « Mitis judex Dominus Jesus » éta­blit une unique phase de pro­cé­dure (nou­veau canon 1671 § 2) et admet qu’il y ait un seul juge [1] dans les pro­cé­dures qui se déroulent dans le cadre des tri­bu­naux ecclé­sias­tiques (nou­veau canon 1673 § 4). De plus il pré­voit, dans les cas les plus clairs, une pro­cé­dure abré­gée de déter­mi­na­tion judi­ciaire de l’an­nu­la­tion d’un mariage direc­te­ment par l’évêque (nou­veau canon 1683). En un cer­tain sens, cette der­nière solu­tion repré­sente un retour au genre de gou­ver­ne­ment épis­co­pal qui exis­tait avant que n’apparaisse la pra­tique des tri­bu­naux ecclé­sias­tiques séparés.

Certaines per­sonnes ont expri­mé leur crainte que cette solu­tion ne rende pos­sible le « divorce » pré­sen­té comme une ” »annu­la­tion ». Ce point de vue n’est pas cor­ro­bo­ré par le motu pro­prio. Dans ce texte le pape affirme à trois reprises le prin­cipe de l’« indis­so­lu­bi­li­té » du lien sacré du mariage et, en ce qui concerne la pro­cé­dure juri­dique épis­co­pale abré­gée, il parle du « très grand soin [que le pas­teur prend] de l’unité des catho­liques avec Pierre dans la foi et la dis­ci­pline ». De plus le nou­veau canon 1683 limite l’utilisation de la pro­cé­dure juri­dique épis­co­pale abré­gée aux cas dans les­quels les époux sont d’accord pour deman­der la nul­li­té et où les témoi­gnages écrits sub­stan­tiels ne néces­sitent pas d’enquêtes plus approfondies.

Certains obser­va­teurs ont décrit la « Relatio » du synode de 2015 comme un « chef d’œuvre d’ambigüité ». Or le car­di­nal George Pell a défen­du les para­graphes 84–86 de la « Relatio » comme « non ambi­gus », même s’ils sont consi­dé­rés par cer­taines per­sonnes comme « insuf­fi­sants ». Lorsqu’elle parle du mariage, la « Relatio » fait un usage répé­té du mot « indis­so­lu­bi­li­té » (aux para­graphes 1, 40, 48, 49, 84) et il est cer­tai­ne­ment incon­tes­table que l’unité et la sta­bi­li­té du lien matri­mo­nial ont été accueillies par l’Église, depuis son com­men­ce­ment, comme un ensei­gne­ment du Seigneur enra­ci­né dans le des­sein ori­gi­nel de Dieu, « dès l’origine » (Mc 10, 6 ; Gn 1, 27). De même il est cer­tai­ne­ment incon­tes­table que la rup­ture inten­tion­nelle du lien matri­mo­nial consti­tue un péché grave : « Quiconque répu­die sa femme et en épouse une autre… » (Mc 10, 11). À ce sujet, comme l’a dit le car­di­nal Pell, il y a eu un « consen­sus massif ».

Et cepen­dant, il est indu­bi­table que, en dehors du synode, un large consen­sus s’est éga­le­ment mani­fes­té à pro­pos d’une inter­pré­ta­tion par­ti­cu­lière de la cita­tion de « Familiaris consor­tio » n° 84 – « Les pas­teurs doivent savoir que… ils ont l’obligation de bien dis­cer­ner les diverses situa­tions » – qui est incor­po­rée dans le para­graphe 85 de la « Relatio ».

Avant le synode, les évêques alle­mands ont décla­ré qu’ils avaient le sen­ti­ment de ne pas avoir besoin de l’im­pri­ma­tur de Rome pour émettre des décrets pas­to­raux en Allemagne. Après le synode, une idée cou­rante est que des déci­sions pas­to­rales peuvent être prises au niveau local sim­ple­ment par les prêtres, dans le for interne sacra­men­tel. Mais sans des « normes » éma­nant du Saint-​Siège il serait plus dif­fi­cile pour les évêques d’endiguer les pra­tiques du cler­gé qui affai­blissent la doc­trine rela­tive au mariage et qui atté­nuent le rap­port néces­saire entre la doc­trine et la discipline.

Des déve­lop­pe­ments indé­si­rables de ce genre se sont mul­ti­pliés là où il y a une fusion/​confusion entre la doc­trine et la dis­ci­pline. La doc­trine est uni­ver­selle ; la dis­ci­pline, quant à elle, prend en compte les cir­cons­tances par­ti­cu­lières et les res­pon­sa­bi­li­tés morales des per­sonnes, y com­pris en cas d’échecs. En bref, la doc­trine est géné­rale, comme le caté­chisme, tan­dis que la dis­ci­pline cor­res­pond à des situa­tions spé­ci­fiques et qu’elle a pour but l’é­di­fi­ca­tion des fidèles et la conver­sion des com­por­te­ments par­ti­cu­liers, plu­tôt que le trai­te­ment de situa­tions générales.

Mais sans « normes » pour la dis­ci­pline, le dan­ger du laxisme aug­mente. Laisser la dis­ci­pline sim­ple­ment aux prêtres, c’est ouvrir la porte à des pra­tiques dis­pa­rates de la part de confes­seurs ayant mal inter­pré­té ce qu’a dit le pape lors de la clô­ture du synode de 2014 à pro­pos de ceux qui mani­festent ce ” »rai­dis­se­ment hos­tile » qui est « la ten­ta­tion des zélés, des scru­pu­leux, des empres­sés et de ceux que l’on appelle ‘tra­di­tion­na­listes’ ». Lorsque de tels pro­pos ne sont pas inter­pré­tés de manière équi­li­brée, ils peuvent favo­ri­ser la dif­fu­sion d’une dis­ci­pline déta­chée de la doc­trine. Cela sou­ligne la néces­si­té de « normes », que je vais main­te­nant argumenter.

Le » consen­sus mas­sif » mani­fes­té par le synode porte sur l’enseignement de tou­jours en matière de mariage et sur sa pré­sence cohé­rente dans le droit cano­nique. Cependant, ce point étant consi­dé­ré comme acquis, il existe des « pri­vi­lèges de foi » (cf. canon 59 § 1) qui, dans la tra­di­tion latine sont réser­vés au Saint-​Siège en tant qu’exercice du pri­vi­lège pétri­nien par le légis­la­teur. Ce qui est en ques­tion ici, c’est la conces­sion d’une faveur qui est en dehors de la loi, mais qui n’abroge pas celle-​ci : un acte « admi­nis­tra­tif », plu­tôt qu’un acte « juri­dique » [2].

De tels actes admi­nis­tra­tifs peuvent trai­ter des situa­tions cano­ni­que­ment irré­gu­lières et effec­ti­ve­ment désor­don­nées, à pro­pos des­quelles il est pru­dent de don­ner une réponse pas­to­rale modé­rée. Les mots-​clés sont « modé­rée » et « pru­dent » ; or exer­cer un trai­te­ment admi­nis­tra­tif qui soit modé­ré et pru­dent exige des « normes ». Dans le cas pré­sent, l’évêque serait le « modé­ra­teur » et son action serait régie par des « normes » édic­tées par le Saint-​Siège pour régler la conces­sion par le pape de pou­voirs per­met­tant à l’évêque d’effectuer des actes admi­nis­tra­tifs et pas­to­raux qui – dans des cir­cons­tances déter­mi­nées – per­met­traient à des per­sonnes qui, pour des rai­sons com­plexes, ne sont pas en mesure de régu­la­ri­ser leur situa­tion matri­mo­niale d’accéder à la com­mu­nion sacramentelle.

Les « normes » pro­po­sées [3] éma­ne­raient du Saint-​Siège et elles pour­raient inclure :

1. la recon­nais­sance par le requé­rant (ou par les requé­rants) du com­man­de­ment divin de per­ma­nence et d’unicité du mariage ;

2. la recon­nais­sance par le requé­rant (ou par les requé­rants) de l’histoire de l’échec de son mariage, avec ses péchés, ses erreurs humaines et ses drames, ain­si que des leçons qu’il en a tirées ;

3. l’indication écrite, par le délé­gué de l’évêque – qui serait dans ce cas un expert en théo­lo­gie pas­to­rale et pra­tique – du régime de péni­tence et de répa­ra­tion sui­vi par le requé­rant (ou par les requé­rants), ain­si que l’opinion de ce délé­gué selon laquelle ce régime aurait eu une durée appropriée ;

4. l’indication écrite, par l’official dio­cé­sain, de l’évaluation cano­nique qu’il fait du dos­sier, ain­si que du fait qu’il consi­dère que cette affaire ne pour­rait pas être réglée par la voie judiciaire ;

5. l’indication écrite, par le délé­gué de l’évêque, de l’évaluation de l’im­pact pas­to­ral qu’aurait la conces­sion d’une telle faveur sur les contextes sociaux et ecclé­siaux du requé­rant (ou des requé­rants), par­mi les­quels les contextes parois­siaux locaux ;

6. la des­crip­tion des cir­cons­tances dans les­quelles ces pou­voirs peuvent être uti­li­sés comme moyens d’accueillir dans la pleine com­mu­nion avec l’Église catho­lique des per­sonnes qui, étant en situa­tion d’irrégularité matri­mo­niale, relè­ve­raient du droit cano­nique latin et ne seraient donc pas en mesure d’être plei­ne­ment accueillies dans l’Église ;

7. un compte-​rendu de l’usage de ces pou­voirs par l’évêque devra être adres­sé chaque année au Saint-Siège.

Ce qui conclut main­te­nant cette note est le modèle d’une lettre-​rescrit qu’un évêque pour­rait écrire en appli­ca­tion des pou­voirs qui ont été décrits et des « normes » qui régissent ces pouvoirs.

MODÈLE DE LETTRE-RESCRIT

Adresse de l’évêché
Date
Prot. n°. …

Destinataire

Acceptation d’une demande de rescrit

Cher …,

Je suis heu­reux de vous écrire, suite à votre requête datée du … et de ma pré­cé­dente lettre datée du …, concer­nant votre demande d’accès à la com­mu­nion eucha­ris­tique, que je suis en mesure de l’accueillir, selon les normes approu­vées par le Saint-​Père qui me donnent le pou­voir de gérer cette faveur. J’ai donc le pou­voir d’agir en ce qui concerne la démarche de récon­ci­lia­tion et de péni­tence que vous avez entre­prise au cours de la période …, sous la direc­tion de votre curé … et avec la col­la­bo­ra­tion du père …, qui exerce dans ce dio­cèse les fonc­tions de res­pon­sable de la théo­lo­gie pas­to­rale et pratique.

Il m’a été confir­mé que vous aviez eu recours à tous les moyens pou­vant contri­buer à la récon­ci­lia­tion des par­ties concer­nées, comme le montre le rap­port qui m’a été remis par le père …, que votre situa­tion actuelle se pré­sente comme stable et qu’elle com­porte des obli­ga­tions et des enga­ge­ments qui sont géné­ra­le­ment connus dans votre com­mu­nau­té locale et qui ne sont pas en oppo­si­tion avec les lois et régle­men­ta­tions civiles rela­tives à ces ques­tions. Les docu­ments écrits ont été réexa­mi­nés éga­le­ment par l’official de ce dio­cèse, et j’ai pris connais­sance avec atten­tion de son rap­port, afin de par­ve­nir à me faire une opi­nion à pro­pos du pré­sent acte admi­nis­tra­tif pastoral.

Les docu­ments de cette pro­cé­dure de récon­ci­lia­tion com­prennent votre décla­ra­tion de fidé­li­té à l’en­sei­gne­ment de l’Église catho­lique, tel qu’elle l’a reçu de Notre Seigneur, en ce qui concerne le carac­tère unique et contrai­gnant du lien matri­mo­nial entre un homme et une femme. L’établissement de ce res­crit est fon­dé sur votre adhé­sion publique à la doc­trine qu’enseigne l’Église en matière de mariage et sur les aveux que vous avez faits au for interne à pro­pos des défaillances et/​ou des drames qui ont bou­le­ver­sé votre situa­tion matri­mo­niale pré­cé­dente, qui ne peut plus être rétablie.

Je ne vous demande pas de por­ter sur la place publique un pas­sé dou­lou­reux et le pro­ces­sus de récon­ci­lia­tion qui a sui­vi, mais je vous demande seule­ment – lorsque la néces­si­té s’en fera sen­tir – de témoi­gner que vous avez entre­pris des par­cours sous la direc­tion de votre évêque, qui l’ont per­sua­dé d’émettre un res­crit pour votre retour à la com­mu­nion eucha­ris­tique selon les normes indi­quées lorsque les pou­voirs épis­co­paux m’ont été confé­rés par le Saint-​Siège, ain­si que votre adhé­sion publique à l’en­sei­gne­ment de l’Église en ce qui concerne le saint mariage.

Je serai pré­sent à la cathé­drale le soir du … et je serai heu­reux de vous conduire au sacre­ment de péni­tence avant la sainte messe que je célé­bre­rai à … heures et au cours de laquelle je serai heu­reux de vous don­ner moi-​même la sainte com­mu­nion. Je vous prie de prendre contact avec mon secré­taire par­ti­cu­lier …, pour vous mettre d’accord avec lui. Si tout cela n’est pas pos­sible, vous pour­rez pré­sen­ter cette lettre-​rescrit au curé de votre paroisse, afin qu’il puisse lui don­ner effet de ma part.

Je désire vous féli­ci­ter de votre per­sé­vé­rance grâce à laquelle l’Église a pu vous accor­der cette faveur et j’unis mes prières aux vôtres, pour que vous pro­gres­siez dans la grâce de Dieu. Priez pour moi afin que je puisse faire preuve de sagesse, de pru­dence et de cou­rage dans ma vie et dans mon minis­tère d’évêque.

Sincèrement vôtre dans le Christ,

+ …

Évêque de …

Sources : www.chiesa/Traduction fran­çaise par Charles de Pechpeyrou, Paris, France

Notes de bas de page

  1. Dans le cas où il y a un juge unique, la pré­sence de deux asses­seurs est éga­le­ment requise (nou­veau canon 1676 § 3).[]
  2. Il est bon de savoir qu’il y a des actes « admi­nis­tra­tifs » qui sont juri­diques et régis par le droit cano­nique, de même que les actes cano­niques sont régis par une norme « pas­to­rale » plus géné­rale : le « salus ani­ma­rum », le salut des âmes (canon 1752). Comme l’indique le titre de cet article, les actes »admi­nis­tra­tifs » et « pas­to­raux » font réfé­rence à des actes qui sont extra-​juridiques, en ce sens qu’ils accordent une faveur concé­dée sous l’au­to­ri­té du légis­la­teur.[]
  3. Les conces­sions de faveurs régies par des « normes » sont fon­dées sur ce qui est indi­qué dans les nou­veaux canons 1675 (« Le juge, avant d’accepter la cause, doit avoir la cer­ti­tude que le mariage a irré­pa­ra­ble­ment échoué, de sorte qu’il soit impos­sible de réta­blir la vie conju­gale com­mune ») et 1691 § 1 (« Dans la sen­tence, les par­ties seront avi­sées des obli­ga­tions morales et même civiles aux­quelles elles peuvent être tenues l’une envers l’autre et envers leurs enfants en ce qui concerne le devoir de sub­sis­tance et d’éducation »). L’insertion du point 3 dans ces « normes » impli­que­rait nor­ma­le­ment des pro­ces­sus de »for interne » et des docu­ments à « accès res­treint », mais il n’inclurait pas le « for interne sacra­men­tel ». L’insertion du point 4 vise, pour sa part, à garan­tir que les requêtes qui peuvent, de manière plus appro­priée, être trai­tées cano­ni­que­ment soient réorien­tées vers des trai­te­ments judi­ciaires, sur­tout lorsque la sim­pli­fi­ca­tion des pro­cé­dures d’annulation rend plus facile la décou­verte d’une solu­tion juri­dique pour les cas dif­fi­ciles. Dans l’expression « mariage/​divorce/​remariage », les mots « divorce » et « rema­riage » doivent dans ce cas être com­pris uni­que­ment en réfé­rence au droit civil (nou­veau canon 1671 § 2), dans la mesure où ces « normes » n’anticipent ni un divorce (« dis­so­lu­tion ») ecclé­sial, ni un mariage ecclé­sial ulté­rieur. Dans cer­tains cas par­ti­cu­liers, les « normes » régi­raient les pro­cé­dures pour la conces­sion pas­to­rale de faveurs dans des situa­tions de dis­cor­dance entre droit civil et droit ecclé­sias­tique, et elles ne doivent pas être per­çues comme offrant une solu­tion juri­dique à l’a­no­ma­lie de situa­tions confuses.[]