6 juillet 1976

Monition canonique du cardinal Baggio à Mgr Lefebvre le 6 juillet 1976

Monseigneur,

C’est le Saint-​Père qui me charge de vous adres­ser cette lettre. Elle veut être avant tout, de la part de Sa Sainteté et non au nom de Jésus-​Christ, une nou­velle expres­sion du très vif désir, et de l’ardente espé­rance éprou­vée depuis déjà bien long­temps, de vous voir enfin, après une reprise de conscience épis­co­pale et ecclé­siale, reve­nir sur vos pas et réta­blir cette com­mu­nion que, par votre atti­tude, vous venez encore de bri­ser plus ouver­te­ment, et pré­ci­sé­ment en la fête des saints apôtres Pierre et Paul.

Je ne veux pas tou­cher ici la ques­tion de la non-​observation des condi­tions aux­quelles doit se tenir un évêque qui pro­cède à l’ordination de sujets qui ne sont pas les siens, non-​observation pour laquelle le Code du droit cano­nique pré­voit lui-​même, aux canons 2373, 2374 et 985 §7, les sanc­tions opportunes.

Il m’incombe par contre, en exé­cu­tion d’une charge venue de plus haut, de consta­ter que, en pas­sant outre à l’interdiction expresse du Saint-​Père, clai­re­ment et légi­ti­me­ment mani­fes­tée dans les docu­ments des 12 et 25 juin der­nier et avec des inter­ven­tions fra­ter­nelles de per­sonnes qua­li­fiées, vous avez publi­que­ment déso­béi à cette inter­dic­tion en pro­cé­dant à l’ordination de plu­sieurs prêtres et de quelques « sous-diacres ».

Aussi, par la pré­sente moni­tion, je vous conjure de chan­ger d’attitude, de deman­der hum­ble­ment par­don au Saint-​Père, et de répa­rer le dom­mage spi­ri­tuel infli­gé aux jeunes ordon­nés et le scan­dale cau­sé au peuple de Dieu.

Je nour­ris la confiance que vous ne refu­se­rez pas de sai­sir la main que Sa Sainteté vous tend encore une fois.

Si pour­tant l’invitation devait s’avérer vaine et si une preuve de rési­pis­cence ne par­ve­nait pas à cette congré­ga­tion dans le délai de dix jours qui sui­vra le moment où vous rece­vrez ma lettre, il faut que vous sachiez que, en se fon­dant sur un man­dat spé­cial du Souverain Pontife, il sera du devoir de ce Dicastère de pro­cé­der à votre égard en vous infli­geant les peines qui s’imposent, confor­mé­ment au canon 2331, §1.

Je vous prie de croire que c’est avec une grande souf­france que j’ai écrit cette lettre à un confrère dans l’épiscopat, et je vous assure, Monseigneur, de mon res­pec­tueux dévoue­ment en N.S.

Cardinal Sebastiano Baggio, pré­fet de la Congrégation pour les évêques