Note de la rédaction de La Porte Latine : il est bien entendu que les commentaires repris dans la presse extérieure à la FSSPX ne sont en aucun cas une quelconque adhésion à ce qui y est écrit par ailleurs. |
Nous vous présentons deux analyses différentes concernant l’instrumentum laboris du prochain synode sur la famille présenté à la presse le 23 juin 2015.
La première est celle du très progressiste La Vie qui évoque la « prudence » des rapporteurs mais ouvre la porte à de nouvelles possibilités qui sont contraires à la doctrine de l’Eglise sur le mariage. Ce faisant, elle prépare les esprits à des évolutions contre nature et donne raison à l’adage qui dit « qu’à force de vivre comme on pense, on finit par penser comme l’on vit ».
La seconde est celle du très conservateur et très « traditionaliste » Médias-Presse-Info qui ne cache pas son pessimisme et titre « l’ouverture de la communion aux divorcés remariés est prévue ».
Il rejoint en cela l’interrogation finale de M. l’abbé Christian Bouchacourt, Supérieur du Distrit de France de la FSSPX, qui conclue sa « Brève appréciation de la Bulle Misericordiae vultus » par ces mots : « Il est en outre à craindre que cette démarche, qui doit entrer en vigueur le 8 décembre prochain, à l’issue du prochain Synode annoncé pour l’automne, serve de caution aux décisions, qui auront été prises lors de cette assemblée. Si, ce qu’à Dieu ne plaise, celle-ci renie la morale et la discipline de l’Eglise sur plusieurs de ses points essentiels, en acceptant de donner la communion eucharistique aux divorcés remariés et adoptant une vision plus positive à l’égard des couples homosexuels, il est clair que les catholiques auront une quatrième bonne raison de contester le bien-fondé de la démarche annoncée par le pape François. Car alors, celle-ci apparaîtra comme la garantie d’un scandale public, auquel nul catholique ne saurait donner son approbation.[…] »
La Porte Latine
Analyse de La Vie : prudence et préparation des esprits
A moins de quatre mois du second Synode des évêques sur la famille, le Vatican a publié le 23 juin le document de travail pour cette nouvelle assemblée synodale. Il propose avec prudence plusieurs pistes de travail aux évêques qui se réuniront au Vatican du 4 au 25 octobre.
Le document de près de 80 pages, pour l’heure publié en italien, reprend tous les paragraphes de la Relatio Synodi d’octobre 2014, y compris les trois passages n’ayant pas obtenu la majorité requise des deux tiers : ceux sur l’accès aux sacrements de la pénitence et de l’eucharistie pour les divorcés remariés, sur la « communion spirituelle » et la « communion sacramentelle », et enfin sur « l’attention pastorale » à l’égard des personnes homosexuelles, rapporte l’agence Apic.
Document de travail
Le cardinal Peter Erdö, archevêque de Budapest et rapporteur général du synode, a tenu à préciser qu’il « s’agit des synthèses des propositions de l’Instrumentum laboris, pas de notre position idéologique ». Des propositions issues, en effet, des quelque 99 réponses et 359 « observations » envoyées par les conférences épiscopales du monde entier, des paroisses, associations familiales, organisations civiles, fidèles individuels, etc.
Prudent, le cardinal Erdö a ainsi estimé que ce synode, comme tous les autres, posait la question de l’essence même du christianisme. « Sommes-nous une religion naturelle que nous devons refléter de manière philosophique sur les expériences humaines », s’est-il ainsi demandé, ou bien « sommes-nous les disciples de Jésus-Christ, qui est une personne historique concrète avec des enseignements concrets ? » Reconnaissant que cet enseignement a toujours été « très exigeant », voire « scandaleux » déjà à l’époque du Christ, le cardinal Erdö a insisté sur la fidélité à la tradition de l’Eglise.
Crise de la famille
L’Instrumentum laboris, réalisé avec les réponses au questionnaire envoyé par Rome à travers le monde après le premier Synode d’octobre 2014, s’interroge sur la crise du mariage et de la famille, il encourage l’Eglise à annoncer « l’Évangile de la famille », il s’arrête sur le rôle majeur de la femme et souhaite une plus grande attention à l’égard des couples en crise.
Le document propose de nombreux points d’attention pour les pères synodaux face à un véritable « changement anthropologique » dans la société concernant le mariage et la famille. Il énumère les défis de la famille aujourd’hui, de la solitude à la précarité en passant par les répercussions de la « soi-disant révolution biotechnologique ». Il accorde une large place au rôle des femmes ainsi qu’à « la plus grande valorisation de leur responsabilité dans l’Eglise ». Il souligne par exemple le besoin croissant d’inclure les familles, en particulier la présence féminine, dans la formation sacerdotale.
L’Eglise entend accompagner ceux qui sont mariés civilement ou cohabitent dans « une découverte graduelle » vers l’union sacramentelle, souligne le document romain. Il préconise aussi une annonce du message chrétien avec « un langage qui suscite l’espérance » et « ne fait pas la morale, juge ou contrôle », tout en rappelant son enseignement moral. Le document encourage aussi des parcours pastoraux d’aide aux familles pour l’éducation à la sexualité.
Divorcés remariés
L’Instrumentum laboris évoque un consensus autour d’un « chemin pénitentiel » pour les divorcés remariés dont le premier mariage est déclaré nul et qui vivent dans la continence. Le document préconise en outre de « faire tomber » certaines interdictions faites aux divorcés remariés dans l’activité pastorale.
Afin de développer une « pastorale de la réconciliation et de la médiation » pour les couples séparés ou en difficulté, le texte suggère la création dans chaque diocèse de services gratuits d’information, de consultation et de médiation pour les couples séparés ou en crise. Un large consensus semble se dessiner en outre concernant un meilleur accès aux procédures pour la reconnaissance des cas de nullité matrimoniale.
A propos de l’indissolubilité du mariage, l’Instrumentum laboris précise d’abord que « l’Evangile de la famille offre un idéal de vie qui doit tenir compte de la sensibilité de notre époque et des difficultés effectives à maintenir des engagements pour toujours ». « Il faut alors une annonce qui donne de l’espérance et non qui écrase ».
S’il se refuse de trancher quant à l’accès à la communion eucharistique, le document romain invite cependant à faire tomber certaines exclusions qui touchent les personnes divorcées et remariées, dans le cadre des activités pastorales, comme de faire la catéchèse. Le document mentionne ensuite « un accord commun sur l’hypothèse d’un itinéraire de réconciliation ou un chemin pénitentiel placé sous l’autorité de l’évêque », toujours inscrit cependant dans une situation de continence et en vue de la « communion spirituelle ». De l’avis de certains, précise encore le document de travail, les prêtres pourraient évaluer eux-mêmes le parcours des divorcés remariés en vue de leur accès aux sacrements.
Couples de personnes de même sexe
Rappelant son opposition ferme au mariage des personnes de même sexe, il appelle néanmoins de ses vœux le développement de « projets pastoraux » spécifiques pour les homosexuels et leurs familles.
Sans jamais parler de couple homosexuel ni de famille homosexuelle, le document assure alors qu’il « serait souhaitable que des projets pastoraux diocésains réservent une attention spécifique à l’accompagnement des familles dans lesquelles vivent des personnes de tendance homosexuelle ou de ces personnes elles-mêmes ».
Alors que le questionnaire publié en décembre 2014 par le secrétariat général du Synode des évêques recommandait aux épiscopats du monde entier de donner des réponses qui s’éloignent d’une « pastorale appliquant purement la doctrine », ce document intermédiaire semble particulièrement prudent.
De son côté Médias-Presse-Info est plus catégorique et titre : « l’ouverture de la communion aux divorcés remariés est prévue »
» Le cardinal Lorenzo Baldisseri, Mgr Bruno Forte, archevêque de Chieti-Vasto (Italie), et le cardinal hongrois Peter Erdö, archevêque de Budapest (Hongrie), ont présenté aujourd’hui Instrumentum Laboris, le document préparatoire du Synode sur la famille qui doit s’achever en octobre 2015. Ce fut déjà Mgr Bruno Forte qui rédigea en 2014 lors du synode la rédaction, sur ordre du pape, des trois paragraphes les plus scandaleux et contraires à la Loi naturelle.
Le fond demeure mais la méthode change.
Le document rendu officiel, même s’il tente parfois de rappeler la doctrine de l’Eglise, est un condensé des revendications en opposition formelle avec l’ordre que Dieu a établi. Les quelques propositions d’orientations pastorales restent très vagues et proposent sans le dire franchement de contourner le magistère. C’est ainsi que le « chemin pénitentiel » est de nouveau proposé, qui viserait à travers un processus indéfini de pouvoir de nouveau accéder aux sacrements.
On y trouve aussi l’indication aberrante concernant les enfants adoptés par des homosexuels :
« Toutefois, au cas où les personnes qui vivent dans ces unions demandent le baptême pour l’enfant, les réponses, presque à l’unanimité, soulignent que le petit doit être accueilli avec le même soin, la même tendresse et sollicitude que ceux que reçoivent les autres enfants. De multiples réponses indiquent qu’il serait utile de recevoir des directives pastorales plus concrètes pour ces situations. Il est évident que l’Église a le devoir de vérifier les conditions réelles en vue de la transmission de la foi à l’enfant. Dans le cas où des doutes raisonnables sont nourris quant à la capacité effective d’éduquer chrétiennement l’enfant de la part des personnes de même sexe, il faudra en garantir le soutien approprié – comme cela est d’ailleurs requis pour tous les autres couples qui demandent le baptême pour leurs enfants. »
Ce dernier paragraphe montre hélas que le sentimentalisme domine : le problème n’est pas d’être gentil ou pas avec cet enfant, qui bien sûr est une créature de Dieu et pour lequel le Christ a donné sa vie, mais la question est de savoir si oui ou non cet enfant sera éduqué en adéquation avec le baptême qu’il aura reçu. Or il est évident qu’un enfant élevé dans un environnement contre nature ne pourra vivre en conformité avec le baptême tant qu’il ne sera pas sorti de cet environnement.
Au final, et ce sera le grand résultat de ce synode, les positions et les mentalités auront évolué. Aujourd’hui des prélats s’affichent ouvertement pour la communion aux divorcés remariés ainsi que pour la reconnaissance des duos homosexuels, à l’instar du cardinal Marx, président de la conférence épiscopale allemande. La doctrine a été relativisée, une nouvelle praxis est désormais tolérée car venant d’une revendication démocratique, celle « du peuple de Dieu ».
Xavier Celtillos, pour MPI
Sources : La Vie/Apic/MPI/LPL