Pie, évêque
Serviteur des serviteurs de Dieu
Pour perpétuelle mémoire.
Secouée par les flots en furie, la barque de Pierre, qui figure l’Eglise, ne peut être ébranlée par la crainte ni brisée par aucune tempête : car c’est Notre-Seigneur Jésus-Christ lui-même qui, par son Vicaire sur la terre, la gouverne et la conduit saine et sauve au port, encore que parfois le Christ, aux yeux des disciples de peu de foi, paraisse sommeiller. En vérité, en aucune autre époque peut-être ne s’éleva contre l’Eglise catholique du Christ une tempête comparable à celle qui au xvie siècle sévit furieusement contre elle. On vit alors l’Angleterre, jusque-là très attachée au Siège apostolique, elle qu’on avait appelée à très juste titre le douaire de Marie et le patrimoine de saint Pierre, troubler à son tour cette admirable unité de doctrine et de gouvernement de l’Eglise catholique, unité qui est en réalité la preuve visible la plus grande de notre foi. Cependant, même dans ce schisme si grave, Notre- Seigneur Jésus-Christ ne permit pas ce déchirement de sa tunique sans couture sans donner à son Epouse immaculée l’espoir certain d’une restauration glorieuse. De fait, à cette époque, en très grand nombre, des hommes et des femmes pleins de courage n’hésitèrent pas à s’exposer à la mort, à verser leur sang pour défendre énergiquement la foi catholique ainsi que la primauté supérieure de l’Eglise Romaine avec laquelle, à cause de sa haute prééminence, doit être d’accord toute. Eglise, comme l’affirme saint Irénée.
Parmi ces martyrs il faut mettre au premier, rang deux fils très illustres de la nation anglaise qui Nous est si chère : ils furent l’honneur et la gloire l’un des ministres sacrés, l’autre des laïcs Jean Fisher, cardinal de la Sainte Eglise Romaine et évêque de Rochester, puis Thomas More, grand chancelier d’Angleterre, brillent comme deux astres dans le ciel de l’histoire anglaise, proclament sans arrêt les véritables gloires ancestrales de la patrie, prient Dieu maintenant et instamment pour le retour si désiré des fidèles égarés à l’unité de la foi et à la maison du Père. Précisément dans son infinie bonté Dieu Nous a accordé de décerner en ce jour, à ces bienheureux martyrs, en vertu de la charge apostolique que Nous exerçons, les honneurs suprêmes réservés aux saints et de les proposer aux chrétiens comme des modèles de piété, de force et d’amour envers ce Siège apostolique. Tressaillant d’une immense joie, avec l’Eglise universelle et la très noble nation anglaise, volontiers Nous voulons consacrer à perpétuité, par Nos présentes Lettres décrétales, la mémoire de ces martyrs.
En conséquence, Nous parlerons brièvement, selon la Coutume, de la vie de ces deux athlètes du Christ, de leur martyre glorieux, ainsi que de tous les actes qui, conformément au droit, ont précédé leur présente canonisation.
C’est à Beverly, en Angleterre, en l’an 1469, que naquit Jean Fisher, de Robert et Agnès, marchands assez riches. A peine âgé de 7 ans, il perdit son père ; il reçut avec docilité l’éducation et tes soins que lui donnèrent sa mère et son beau-père. Il eut pour premier instituteur un prêtre, et déjà il l’emportait sur les enfants de son âge par son intelligence et par son application au travail. Il fréquenta ensuite l’Université de Cambridge, s’adonnant avec succès à l’étude des lettrés, de la dialectique, de la philosophie et de tous les arts libéraux. En 1487 il conquiert le grade de bachelier ès, arts et trois ans après celui de maître ès arts : en cette année 1491, il est, par le choix académique, l’un des deux duumvirs ou procureurs de son collège. Ordonné prêtre, il se livra avec tant d’application et de réussite aux études théologiques, qu’il fut considéré comme le premier de toute l’Université de Cambridge : le 5 juillet 1501, il reçut le titre de docteur et maître.
Remarquable par la science et la vertu, il remplit les fonctions de recteur du collège de Michael Housc, meublant l’esprit de ses élèves, avec une habileté consommée, non seulement de connaissances scientifiques, mais de règles de vie chrétienne. Professeur ensuite à l’Université de Cambridge dont il devint vice-chancelier par les suffrages unanimes de ses collègues, il exerça, jusqu’en 1503, cette charge avec le plus grand soin, recueillant l’approbation reconnaissante et publique de tous.
Cependant le renom de piété et de science de Jean Fisher s’était répandu de tous les côtés, même en dehors des milieux universitaires. Aussi la reine Marguerite, mère du roi Henri VII, le choisit-elle pour être son directeur spirituel et celui de sa famille. C’est pourquoi Jean renonça aux diverses charges ou emplois qu’il remplissait à l’Université. Plusieurs années durant, il se consacra tout entier aux exercices et aux devoirs de la piété, et surtout aux obligations de sa charge, sans doute honorable, mais également très lourde : la famille royale en retira les fruits les plus abondants. Le roi Henri VII, après avoir donné à ce prêtre si vertueux de fréquentes marques d’estime, le fit entrer dans le Conseil royal. A cette époque, comme l’étude des sciences sacrées paraissait se refroidir en Angleterre, Jean suggéra à la reine-mère, en vue de donner, aussi aux laïcs une sérieuse instruction religieuse, la fondation dans la ville de Cambridge de deux magnifiques collèges, dédiés l’un au Christ-Sauveur (Christ’s College), l’autre à saint Jean l’Evangéliste (St-John’s College). Lui-même fonda deux chaires de théologie, l’une à Cambridge, l’autre à Oxford, ainsi que plusieurs chaires de langue grecque et de langue latine. Il restaura l’Université de Cambridge ; après s’y être vu conférer chaque année, à partir de 1504, les fondions de chancelier, il reçut, dix ans plus tard, le titre de chancelier à vie.
Très érudit dans les sciences humaines, et divines, remarquable par ses éminentes vertus, brûlant de zèle pour le salut des âmes, plein d’ardeur pour prêcher la parole divine, particulièrement cher à tous les évêques d’Angleterre, Jean Fisher fut nommé par le roi Henri VII, en 1504, évêque de Rochester et confirmé dans cette nomination par des Lettres apostoliques de Jules II, Notre prédécesseur.
En remplissant avec la prudence et la vigilance les plus grandes la charge pastorale, le nouvel évêque prit soin de prémunir le troupeau qui lui était confié contre les erreurs luthériennes qu’on propageait alors. Dans ce but, il visita à plusieurs reprises chacune des paroisses de son diocèse, il accomplit avec beaucoup d’attention les autres fonctions épiscopales, surtout il combattit avec vigueur, tant par ses discours que par ses écrits, l’hérésie si pernicieuse. Jusqu’à son extrême vieillesse, malgré son mauvais état de santé et son tempérament peu robuste, il persévéra soigneusement dans cette façon de faire. Vaquant sans cesse au travail ou à la prière, il châtrait son corps par l’abstinence, le jeûne, le cilice, la discipline et autres pénitences. De quelle ardente charité il était embrasé à l’égard du prochain ! Sa bonté envers les pauvres et les malades en témoigne : il les visitait souvent dans leurs chaumières, leur distribuait des vivres et des aumônes, de sorte qu’on le considérait à bon droit comme le médecin de ceux qui souffraient, le bâton des boiteux, le défenseur de la veuve, le tuteur de l’orphelin, l’hôte très accueillant des voyageurs étrangers.
Très vif était l’amour dont son cœur brûlait pour Dieu. Lorsqu’il célébrait la messe, on vît souvent ses joues mouillées de larmes : tant dans ses prières que dans sa conversation ordinaire, il prononçait avec suavité le nom de Jésus. Il lui était agréable de s’entretenir des saintes Lettres et des choses divines. Fréquemment il réfléchissait et méditait sur la mort, et, dans la crainte que son esprit n’en perdit le souvenir, il désirait avoir sous les yeux, tant à l’autel où il célébrait que dans sa maison, une tête de mort, aimant à répéter que la pensée de la mort ne lui était jamais importuna. Sa conversation était affable, calme, modeste ; mais dans les choses qui intéressaient Dieu et l’Eglise, et qui à cette époque commençaient à être gravement menacées par certains hommes, il se montrait, contrairement à son habitude, sévère, intrépide et fort jusqu’à l’héroïsme.
Ce courage et cette grandeur d’âme apparurent très spécialement d’abord dans l’opposition à la nullité de mariage que le roi Henri VIII, emporté par un amour coupable et passionné pour Anne Boleyn, commençait à invoquer contre Catherine d’Aragon, son épouse légitime, puis dans l’affirmation et la défense de la primauté de l’Eglise Romaine. En effet, alors que presque tous les grands du royaume, dès le début, se prêtaient aux volontés du roi, Jean Fisher, le premier de tous, résista aux desseins iniques du monarque et aucun artifice ne put empêcher le courageux défenseur des lois du mariage de soutenir la juste cause de Catherine. Après que la reine eut été déclarée contumace par une sentence judiciaire injuste, seul, Jean, non sans courir un grand danger pour sa vie, déclara avec intrépidité, le 28 juin 1529, en présence des légats pontificaux et du roi, que, pour éviter la damnation de son âme et pour ne pas être infidèle au souverain, et après avoir mûrement pesé tous les arguments, il était dans l’obligation d’affirmer et de démontrer que le mariage d’Henri et de Catherine ne pouvait être dissous par aucune puissance divine ou humaine. Il ajouta qu’un disciple du Christ devait suivre les traces de Jean-Baptiste le Précurseur, qui n’hésita pas à braver la mort pour défendre les saintes lois du mariage. Ces paroles soulevèrent la colère du roi, qui se voyait ainsi ouvertement comparé à Hérode ; la réponse royale fût exprimée en termes certes injurieux, mais dénués de toute valeur probante. La haine du roi grandit encore lorsque l’évêque, plein de courage, s’efforça en raison même de sa charge de s’opposer aux lois hostiles à la religion catholique qui étaient peu à peu promulguées par le pouvoir royal.
Au mois d’octobre 1530, Henri VIII fit, pour la première fois, incarcérer, avec deux autres évêques, l’évêque de Rochester qui avait rejeté comme injuste la loi « sur les bénéfices ecclésiastiques » et à ce sujet en avait appelé au Souverain Pontife. Dans la suite, comme, dans une réunion du clergé d’Angleterre, le prélat avait été le seul à s’opposer fermement au vote véritablement lâche de tous ses collègues en faveur des deux lois du divorce, il fut pour ce motif placé sous la surveillance de l’évêque de Winchester depuis le 5 avril 1533 jusqu’au 13 juin suivant, jour où rendu à la liberté il revint vers ses chers diocésains. Peu de temps après, il fut accusé de trahison et condamné, étant absent, à la prison et à la confiscation de ses biens : la peine fut commuée par le roi lui-même en une amende en raison de la légèreté de l’accusation et l’évêque recouvra sa liberté. Cependant, dès ce moment, Anne Boleyn, qui, le 1er juin de la même année, avait ceint la couronne royale, continuait à nourrir une haine des plus vives contre le pieux prélat qui gardait une constante fidélité à la cause de la reine Catherine, aux droits de l’Eglise et surtout à la suprême autorité du Pontife romain ; elle ne lui laissait aucun répit. C’est pourquoi l’archevêque schismatique de Cantorbéry manda Jean Fisher à Londres afin qu’il prêtât le serment sacrilège prescrit par la loi. L’évêque refusa très courageusement de reconnaître soit la légitimité de l’union du roi avec Anne Boleyn ainsi que de l’enfant qui en était né, soit le titre de chef spirituel suprême de l’Eglise d’Angleterre et d’Irlande que le roi avait eu la téméraire audace de s’attribuer. En conséquence, ce même jour, il fut emprisonné à la Tour de Londres. Là, le courageux athlète du Christ, ainsi que Thomas More, attendit le suprême combat.
Au mois de novembre 1534 fut solennellement promulguée en Angleterre la loi concernant la suprématie royale dans les affaires spirituelles, suprématie qu’Henri VIII s’était déjà arrogée précédemment, ainsi que Nous l’avons dit ci-dessus. La loi avait pour sanction la peine capitale. A cette date le roi envoya au prisonnier plusieurs évêques et laïcs de haut rang pour venir à bout de sa résistance indomptable : toutes les tentatives essayées furent vaines : de ce nombre se trouvait l’affirmation mensongère et impudente que Thomas More avait lui-même résolu de prêter le serment exigé. Par représailles, le 2 janvier 1535, le diocèse de Rochester fut déclaré vacant et son évêque dépouillé de tous les privilèges épiscopaux : le 7 mai suivant, après un nouvel interrogatoire mené avec fourberie, Jean déclara avec intrépidité que le roi n’était d’aucune façon le chef suprême de l’Eglise d’Angleterre. Cette déclaration avait été extorquée au prisonnier par des hommes perfides en présence d’un seul témoin. Cependant le roi n’osait pas encore condamner l’évêque. Le Pape Paul III, Notre prédécesseur, voulant honorer la constance invincible de Jean Fisher et sa fidélité à l’égard du Saint-Siège, l’avait créé cardinal-prêtre du titre de Saint-Vital, dans le Consistoire tenu le 20 mai. Rendu encore plus furieux, le roi interdit de remettre au prisonnier le chapeau cardinalice envoyé ; de plus, sur son ordre, on outragea le Saint-Siège dans les églises ; on rapporte même qu’il dit qu’il ferait en sorte de priver Jean de la tête sur laquelle devait reposer le chapeau, ou encore, selon d’autres, qu’il enverrait à Rome la tête du prélat pour qu’elle y reçût le chapeau.
Epuisé par de multiples incommodités et privations, éprouvé par la maladie, privé de la réception des sacrements par suite d’une cruelle interdiction, le martyr du Christ fut, le 17 juin, traîné devant le tribunal, accusé de trahison pour avoir refusé au roi l’autorité spirituelle suprême qui appartient au seul Pontife romain. Comme l’évêque continuait à affirmer et à défendre énergiquement les droits de Dieu et de l’Eglise, il fut condamné à la mort infâme des traîtres ; dans la suite cette peine fut commuée par le monarque en celle de la décapitation. Lorsqu’il sortit de la salle du tribunal, le prisonnier apparut plein de joie comme s’il venait d’un banquet ; pendant qu’on le reconduisait au cachot, un grand nombre de fidèles en larmes l’accompagnaient implorant sa bénédiction.
Après quatre jours, que le serviteur de Dieu passa dans une parfaite tranquillité d’âme et en s’adonnant à une prière ardente, se leva enfin la clarté suprême du jour triomphal. Le 22 juin, fête de saint Alban, premier martyr d’Angleterre, le gouverneur de la prison communiqua de bon matin au prisonnier que l’heure de son supplice était proche : par des paroles assez embarrassées il l’exhorta à ne pas supporter avec peine, puisqu’il était déjà un vieillard et comme tel ne pouvait plus vivre longtemps, d’être privé de la vie en ce jour avant midi en vertu d’un décret royal. Avec sérénité le vieillard répondit qu’il rendait volontiers grâces au roi qui, par une sentence capitale, le délivrait de cette existence caduque et pleine d’angoisses. Il demanda qu’on lui permît de prendre encore un peu de repos. Au bout de deux heures et plus, on vint le réveiller. Comme s’il allait à des noces, il voulut revêtir ses meilleurs habits et quitta la prison vers 9 heures. Ouvrant alors le saint Evangile qu’il avait en mains, il y lut ces versets de saint Jean (xvii, 3–5) : « Or, la vie éternelle, c’est qu’ils vous connaissent, vous, le seul vrai Dieu, et celui que vous avez envoyé, Jésus-Christ. Je vous ai glorifié sur la terre, j’ai achevé l’œuvre que vous m’avez donnée à faire ; et maintenant, vous, mon Père, glorifiez-moi auprès de vous, de la gloire que j’avais auprès de vous, avant que le monde fût. » Souverainement réconforté par ces paroles, il fut porté au lieu du supplice. Quand il fut sur l’échafaud, il adressa d’une voix ferme et intrépide les paroles suivantes à la foule massée : « Chrétiens, mes frères, je suis venu en ce lieu pour y mourir pour la foi de l’Eglise catholique. Mais je rends grâces à Dieu ; avec son appui, j’ai gardé jusqu’ici tout mon sang-froid, n’éprouvant aucun tremblement, ne ressentant aucune horreur de la mort. C’est pourquoi je vous demande à tous de m’aider, par vos prières auprès de Dieu, à demeurer au moment du trépas ferme et fidèle à la foi catholique. Je prie avec instance le Dieu immortel de daigner, dans sa bonté et sa clémence infinies, garder le roi sain et sauf et son royaume intact : en toutes choses qu’il inspire et suggère au roi des desseins justes et salutaires. » Ces paroles et d’autres semblables furent prononcées avec beaucoup d’ardeur, une gravité aussi distinguée que vénérable, une voix ferme et vibrante, un cœur joyeux et heureux. A genoux, l’évêque adressa à Dieu d’autres prières, entre autres l’hymne Te Deum et le psaume In te, Domine, speravi. Ensuite, les yeux et les mains levés vers le ciel, cet homme saint et innocent posa le cou sur le billot et présenta sa tête au bourreau qui la trancha facilement d’un seul coup de hache. La tête fut aussitôt exposée sur le pont de Londres où se trouvaient déjà les têtes de plusieurs moines Chartreux qui avaient été, eux aussi, mis à mort peu de jours auparavant, pour la foi catholique et la primauté du Pontife de Rome : au bout de quatorze jours elle fut d’une manière impie jetée dans la Tamise. C’est ainsi que l’invincible héros de la foi, Jean Fisher, deux fois revêtu de l’éclat de la pourpre, justement comparé à saint Jean- Baptiste, le Précurseur, obtint la palme du martyre.
Quinze jours plus tard, par le même supplice et pour la même très noble cause, la couronne du martyre allait orner le front de Thomas More, grand chancelier d’Angleterre. Sa sainte vie et sa mort glorieuse méritent d’être aussi rappelées brièvement.
Thomas More naquit à Londres en 1478 ; son père, Jean, était avocat ; sa mère se nommait Agnès Graunger. Il reçut de ses parents une éducation sévère et attentive à laquelle d’ailleurs il répondit docilement, se montrant à mesure qu’il grandissait obéissant et aimable. Dès son jeune âge, il se fît remarquer par sa vive intelligence, et à peine adolescent il fut admis parmi les familiers de Jean Morton, cardinal-archevêque de Cantorbéry et chancelier du royaume d’Angleterre. Le cardinal avait à son endroit une estime telle qu’il aimait à dire qu’il pressentait à propos de ce, jeune homme des choses extraordinaires. Bientôt il l’envoya à Oxford pour étudier les arts libéraux dans cette célèbre Université. Là, suivant les leçons de Thomas Linacre et de Guillaume Grocyn, professeurs des plus remarquables, Thomas More fit les plus grands progrès en particulier dans la connaissance de la langue latine, qu’il arriva dans la suite à parler avec autant d’aisance que sa langue maternelle et qu’il écrivait avec élégance, il étudia aussi avec grande application la langue grecque et le français, y joignant l’histoire, la géométrie, les mathématiques et la musique. Mais son père, jurisconsulte et avocat, désirait voir son fils suivre la même carrière. Aussi, après, quelques années, il le fit revenir à Londres pour y étudier la jurisprudence et obtenir le diplôme d’avocat. A cette époque, Thomas More donna dans l’église Saint-Laurent de Londres une série de leçons sur le De Civitate Dei de saint Augustin : il s’y montrait à la fois, et à un degré remarquable, orateur, philosophe, historien et poète. Mais tout en s’occupant des arts libéraux et d’études juridiques, il perfectionnait ses connaissances au sujet de la religion catholique et se livrait sérieusement à la pratique de la piété et des autres vertus : dans sa profession d’avocat, il était vraiment désintéressé, étranger à toute pensée d’avarice, et s’efforçait de concilier harmonieusement les droits de la justice la plus stricte avec ceux de la charité la plus aimable.
Encore jeune homme, il songea à entrer dans l’Ordre franciscain, puis à embrasser l’état sacerdotal. Il passa quatre années environ chez les Chartreux de Londres, partageant habituellement leurs veilles, leurs austérités et leurs exercices religieux. Il revêtit alors uni cilice que, pendant tout le reste de sa vie, il portait à certains jours ou à des époques déterminées : il prenait aussi de sérieuses disciplines ; grandes furent sa piété envers Dieu, sa charité envers le prochain, sa tempérance, sa frugalité, sa mortification envers lui-même ; c’est ainsi qu’il vivait dans le monde dans la sobriété, la justice et le culte de Dieu. Sur les conseils de son confesseur, il épousa à l’âge de 27 ans Jeanne Colt qui lui donna quatre enfants : Marguerite, Cécile, Elisabeth et Jean. Six ans après, sa femme mourut. Désireux de procurer à ses enfants les soins qui leur étaient nécessaires, il, épousa alors une veuve, Alice Middleton, avec qui il vécut toujours dans une admirable entente.
Vers l’année 1524, il s’établit aux environs de la ville de Londres, sur la colline qu’on appelait Chelsea, sur les bords de la Tamise. Il habitait une vaste et belle maison dans laquelle se trouvaient une chapelle privée et une bibliothèque. Là, en compagnie des siens et de ses proches, More consacrait ses journées à l’étude des arts et des lettres et à la pratique de la piété. Né et fait pour l’amitié, il recevait ses amis avec la plus grande cordialité, aussi avait-on très justement appelé sa maison le domicile des muses, celui de toutes les vertus et de toutes les formes de la charité. Son principal souci fut d’inculquer à ses enfants et petits-enfants non seulement la science des lettres, mais plus encore celle de la religion ; matin et soir, jamais il n’omit de faire la prière en commun avec toute sa famille ; pendant les repas, il faisait lire, comme c’est d’usage dans les monastères, des livres de spiritualité, et parfois il expliquait le sens caché de ce qu’on lisait ; les jours de fête, foulant aux pieds tout respect humain, il ne rougissait pas d’assister avec les siens aux cérémonies liturgiques en y apportant son concours ; bref, il n’y avait aucune vertu digne d’un chrétien d’une profonde piété dans laquelle il n’excellât.
Très appliqué, comme nous l’avons dit plus haut, à l’étude des arts libéraux, très versé aussi dans la connaissance des saintes Lettres et de la littérature profane, il composa plusieurs ouvrages pour défendre la vérité et porter les âmes à la dévotion ; il écrivit un grand nombre de lettres dans lesquelles, véritablement gênant pour les hérétiques, ainsi qu’il aimait à se qualifier lui- même, il défend d’une façon intrépide la foi et la religion contre les erreurs des novateurs. Il s’était acquis, par sa remarquable science et ses vertus éclatantes, au plus haut point l’estime de tous, même celle du roi Henri VIII ; aussi commença-t-on à l’employer quand il s’agit d’affaires publiques à traiter ou à négocier. D’abord membre du Parlement, il fait partie, en 1515, d’une ambassade envoyée en Flandre ; deux ans après, il est en France pour une mission officielle. En 1518, il est membre du Conseil privé du roi, puis ensuite speaker de la Chambre des Communes, chancelier du duché de Lancastre, et enfin, au mois d’octobre 1529, il est nommé, à la vive et universelle satisfaction de tout le royaume, grand chancelier d’Angleterre. Dans l’accomplissement de ces diverses charges, il se fit remarquer par une extraordinaire fidélité et application. Plus il se trouvait élevé par la dignité, l’autorité ou l’honneur, plus il apparaissait constamment et merveilleusement supérieur à tout le monde par sa modestie, la probité de son caractère, sa patience, ses sentiments toujours humains, n’ayant en vue qu’une seule chose : servir de son mieux le roi et le peuple, mais plus encore le Roi des rois.
Les choses paraissaient devoir marcher ainsi doucement, lorsque Henri VIII, emporté par son violent amour pour Anne Boleyn, voulut à tout prix faire déclarer illégitime son mariage avec la reine Catherine. C’est pourquoi, à plusieurs reprises, il interrogea Thomas More sur ce divorce d’avec la reine. Ne doutant pas le moins du monde de la validité et de l’indissolubilité du mariage que le roi avait contracté avec Catherine, le chancelier ne donna jamais son adhésion au dessein du monarque. Son attitude ne fut pas différente lorsque, pour obéir à sa conscience, il travailla de tout son pouvoir, avec l’évêque de Winchester, Etienne Gardiner, pour faire repousser par la Chambre des Lords la loi injuste sur la soumission du clergé : il agit de même quand Henri VIII chercha à se faire reconnaître par ses sujets comme le chef suprême de l’Eglise d’Angleterre, revendiquant qu’on lui donnât ce titre. Quand il s’aperçut que le roi, dans son obstination, voulait épouser Anne Boleyn et obtenir pour cette affaire des avis favorables de la part des Universités et de la Chambre des Lords, pour ne pas être contraint d’agir en quelque chose contrairement aux lois de Dieu et de l’Eglise, Thomas, le 16 mai 1532, se démit spontanément, mais au grand regret de tous les bons citoyens, de son poste de chancelier, dignité qui venait immédiatement après la dignité royale. Dès lors, il mena près des siens une vie tranquille, s’adonnant d’une façon habituelle aux exercices de piété, aux entretiens spirituels, à des lectures édifiantes ; il préparait avec assiduité son âme à soutenir le combat suprême qu’il prévoyait. De fait, deux ans après, au mois de février, il fut cité en justice. On l’accusa d’avoir publié un écrit contre le divorce du roi. Il se défendit de telle façon que, tout en faisant avec franchise profession de foi catholique, il réussit à écarter tout à fait cette calomnieuse imputation. Cependant, la colère du roi à son égard augmentait de violence. On eut recours aux menaces pour l’amener à admettre comme légitime le second mariage royal. Il refusa nettement. Comme le duc de Norfolk lui rappelait les paroles connues : La colère du prince, c’est la mort, il répondit avec autant de promptitude que de fermeté : N’y a‑t-il, Milord, rien d’autre que cela ?… Entre vous et moi il y a cette seule différence, à savoir que je mourrais peut-être aujourd’hui, tandis que vous, vous mourrez peut-être demain.
Pendant ce temps, cette même année, le 4 avril, qui était le Samedi-Saint, parvint à Londres la nouvelle du jugement rendu par le Pape Clément VII concluant en faveur de la validité du mariage du roi Henri VIII avec la reine Catherine. Le 13 avril suivant, Thomas More comparaissait devant les juges ou commissaires royaux en vue du serment à prêter au sujet de la loi relative à la succession royale en Angleterre. Ce serment (dans son préambule) renfermait aussi la négation de l’autorité suprême du Pontife romain. L’ex-chancelier déclara qu’il était, à la vérité, prêt à reconnaître ce qui avait été établi touchant l’ordre de la succession royale, mais nullement ce qui affirmait la non-existence de l’autorité pontificale en Angleterre. Peu de jours après, le 17 avril, il fut emprisonné à la Tour de Londres où il devait rester jusqu’à sa mort, c’est-à-dire jusqu’au 6 juillet de l’année suivante (1535).
Ni les tentations de tout genre jointes aux intérêts humains, en particulier les larmes des siens, la tendre affection de sa fille Marguerite, ses larmes et ses gémissements, ni la mise à l’encan de tous ses biens, ni les arguments de ses amis et de ses concitoyens les plus éminents, ni les affronts et les menaces de ses adversaires, ni la malpropreté et les rigueurs du cachot, ni la faim, ni la persécution, ni le péril d’une mort imminente, ne purent le troubler et changer la décision de son âme. Il demeura au contraire plein de gaieté, n’hésitant pas à composer un opuscule intitulé : « Il ne faut pas craindre de mourir pour la foi » ; en sorte que sa captivité fut considérée comme une profession de foi continuelle et même déjà comme un véritable martyre. Pendant ce temps la loi dont Nous avons parlé plus haut, sur la suprématie spirituelle du roi, avait été promulguée : la peine capitale était portée contre ceux qui refusaient de reconnaître cette suprématie. Anne Boleyn ne cessait pas d’exciter avec plus d’acharnement que jamais le roi contre Thomas More. C’est pourquoi Henri voulut à tout prix que le prisonnier prêtât le serment prescrit par la loi, ce que Thomas refusa nettement de faire. Le 1er juillet 1535, il comparut en conséquence devant le tribunal. Il y fut accusé de haute trahison pour les motifs suivants : il a refusé de se soumettre à la loi sacrilège sur la suprématie spirituelle du roi en Angleterre ; il a écrit à Jean Fisher une lettre dans laquelle il l’engage à garder le silence ; enfin parce qu’il a dit que cette loi sur la trahison ressemble à un glaive à deux tranchants : quiconque y souscrit perd son âme, quiconque la repousse s’expose à être privé de la vie du corps. Bien que Thomas se fût très habilement défendu contre ces accusations, on le condamna cependant à la mort très atroce des traîtres. Cette sentence fut, dans la suite, commuée par le roi en la peine de la décapitation. Après qu’elle eut été prononcée, Thomas, pour décharger sa conscience, exprima librement et de la façon la plus nette sa pensée sur cette loi, et s’adressant aux juges il prononça un magnifique discours ; il y parla si bien de la violation des droits de Dieu et de l’Eglise, de la primauté spirituelle du Pontife romain sur l’univers chrétien, que l’on pouvait dire en toute vérité : « C’est l’Esprit-Saint qui lui a inspiré ce qu’il a proclamé. » Il termina cette profession de foi en souhaitant à ses juges iniques le sort de saint Etienne et de saint Paul ; de même que Paul, autrefois persécuteur d’Etienne, est maintenant son associé dans la gloire du ciel, ainsi lui et ses juges présentement en désaccord sur cette terre, puissent-ils être de même en complet accord dans le siècle futur et avoir tous les mêmes sentiments dans une parfaite charité.
Ramené à la prison, Thomas More consacra les derniers jours de sa vie à méditer les choses d’en haut, à la prière et à des pénitences corporelles. Le 5 juillet il envoya à sa fille Marguerite son cilice, sa discipline avec une lettre écrite au charbon ; il y exprimait les sentiments les plus tendres pour tous les siens, et pour ses amis ; en même temps il disait sa joie de mourir pour une si noble cause, montrant que son esprit était tout occupé de Dieu et ne goûtait plus que les choses célestes et que son âme était tout à fait tranquille. Le jour suivant, c’est-à-dire la veille de la fête de saint Thomas de Cantorbéry et jour octave des saints apôtres Pierre et Paul, comme il l’avait ardemment désiré, on lui annonça de très bon matin que, par ordre du roi, la sentence le condamnant à la peine capitale serait exécutée avant 9 heures ; il en fut reconnaissant envers le monarque. Continuant à méditer la Passion du Christ, il sortit de la prison en se hâtant comme s’il allait à une fête et portant à la main une croix rouge. Conduit au lieu du supplice, il adressa au peuple venu en foule quelques paroles, le prenant à témoin qu’il mourait, comme il le dit, dans l’Eglise et pour l’a foi de l’Eglise catholique, serviteur loyal du roi, mais avant tout du Dieu tout-puissant. Il remercia le bourreau et l’embrassa, demanda à tous les assistants de prier Dieu pour lui et pour son roi. Ensuite il s’agenouilla et récita pieusement le Miserere. L’ayant achevé, tout rayonnant de joie et allègrement il livra sa tête au bourreau. Ainsi, comme Jean Fisher peu de jours auparavant, Thomas More à son tour mourut martyr pour la cause de la sainteté du mariage chrétien et de la suprématie spirituelle, la prérogative que seul le Pontife romain possède. Par ordre du roi, la tête du martyr fut exposée au bout d’un pal sur le pont de Londres ; environ un mois après elle devait être jetée dans le fleuve, lorsque la fille aînée de Thomas More, Marguerite, l’obtint du bourreau à prix d’argent. Le corps fut enseveli dans la chapelle de Saint-Pierre, sur la colline de la Tour : là avaient été déposés les restes de l’évêque de Rochester que Thomas avait eu le mérite d’avoir pour ami dans la vie et pour très noble compagnon dans l’obtention de la palme du martyre.
Dès que les événements dont Nous avons parlé jusqu’ici, quoique d’une façon trop succincte, furent connus” dans le monde catholique, rien d’étonnant qu’on ait considéré, déjà aussitôt après leur mort, Jean Fisher et Thomas More comme étant, à très juste titre, du nombre des martyrs chrétiens, non seulement en raison de la remarquable sainteté de leur vie, mais beaucoup plus parce qu’ils avaient dans leur mort glorieuse répandu leur sang pour la foi catholique. Il en fut ainsi pour un grand nombre d’autres chrétiens anglais qui, à cette époque et pour, la même cause, affrontèrent courageusement la mort. Très peu de temps après leur trépas, le 26 juillet 1535, dans des Lettres adressées à l’empereur Charles-Quint et au roi très chrétien François Ier, Notre prédécesseur Paul III n’hésitait pas à écrire ce qui suit : Voilà que soudain le roi Henri, et cela Nous le relatons avec la plus profonde douleur, a fait publiquement subir à l’évêque de Rochester, illustre par sa vertu, célèbre par son savoir, vénérable par son âge avancé, gloire et ornement du clergé du royaume d’Angleterre comme des autres nations, de la main du bourreau, le dernier supplice réservé aux malfaiteurs et aux criminels. Toutes ces choses sont, à la vérité, souverainement à déplorer, mais la cause de la mort doit l’être plus fortement. C’est en effet pour Dieu, pour la religion catholique, pour la justice, pour la vérité que cet homme si saint a été mis à mort, car il ne défendait pas seulement, comme autrefois Thomas, archevêque de Cantorbéry, les droits d’un seul et d’un particulier, mais ceux de l’Eglise universelle. Pour la même cause, Henri a infligé ou va certainement infliger le même supplice à un grand nombre d’autres clercs ainsi qu’à des religieux. Parmi ces victimes, on compte Thomas More. Il n’était pas, il est vrai, clerc, mais simple laïc ; il excellait cependant dans la connaissance des sciences et des lettres sacrées et n’eut pas peur d’affirmer publiquement la vérité.
Nos prédécesseurs Grégoire XIII, dans les Lettres apostoliques Quoniam divinae bonitati du 23 avril 1579 ; Sixte-Quint, dans la Constitution apostolique Afflictae et crudeliter du 3 septembre 1586, et Urbain VIII dans les Lettres apostoliques Non semper terrena felicitas du 30 mars 1626, ont parlé avec les plus grands éloges de ces mêmes martyrs, en même temps que de ceux très nombreux mis à mort à cette époque pour la foi orthodoxe. Dans son très précieux ouvrage sur la béatification des serviteurs de Dieu et la canonisation des bienheureux, Benoît XIV apporte les exemples d’un grand nombre de fidèles qui ont péri par ordre du roi Henri VIII et de la reine d’Angleterre Elisabeth : les écrivains ecclésiastiques les appellent martyrs, bien que les causes concernant leur martyre n’aient jamais été introduites près la Congrégation des Rites. Le même Pape parle aussi en termes excellents de nos deux athlètes du Christ. Voici ce qu’il écrit de Jean Fisher : Tout le monde sait déjà que par les ouvrages qu’il publia il a éclairé la piété des catholiques, il a réfuté dans un livre remarquable les doctrines perverses des hérétiques, principalement celles de Martin Luther ; enfin, emprisonné en même temps que Thomas More, sur l’ordre d’Henri VIII, roi d’Angleterre, lequel, après avoir été un homme et un roi d’un grand mérite, s’était transformé en une bête féroce et en un monstre, il a présenté sans trembler sa tête à la hache du bourreau, refusant de donner son adhésion à la loi par laquelle ce même prince se disait, chef suprême de l’Eglise et voulait être tenu comme tel. Au sujet de Thomas More, Benoît XIV écrit ceci : S’il est permis de mêler des faits récents à des événements anciens, l’exemple du martyr Thomas More semble pouvoir être utile, bien qu’il n’ait pas encore été reconnu par l’Eglise. Le Sénat anglais avait porté un décret reconnaissant le roi comme chef de l’Eglise d’Angleterre. Thomas ne pouvait approuver pareille loi. A cause de cela et d’autres choses alléguées contre lui, le juge concluait que Thomas combattait une loi du royaume, rejetait l’autorité royale, était coupable du crime de lèse-majesté. Le chancelier qui avait succédé à More et le duc de Norfolk l’interpellèrent, lui promettant le pardon du roi si, comme ils le disaient, Thomas voulait revenir à de meilleurs sentiments et renoncer à son obstination. Mais celui-ci répondit à cette proposition : « Je suis sincèrement très reconnaissant à Vos Seigneuries polir la bonté qu’elles me témoignent, cependant je prie avec instance le Dieu tout-puissant de me si bien confirmer dans les sentiments orthodoxes où je me trouve que j’y persévère jusqu’à la mort. »
Ces intrépides hérauts et défenseurs de la foi et de la suprématie de l’Eglise Romaine, non seulement furent considérés et désignés comme de véritables martyrs du Christ par leurs contemporains et par ceux qui vécurent après eux, parmi lesquels on compte un grand nombre de personnages illustres, remarquables par leur vie sainte et par leur science, des hommes politiques habiles, des historiens, des humanistes, des théologiens et même plusieurs adversaires de la religion, mais on les entoura aussi de marques de vénération. Le Pape Grégoire XIII, nommé plus haut, donna l’exemple ; il autorisa plusieurs pratiques qui appartiennent au culte public et ecclésiastique en l’honneur de ces confesseurs de la foi. Bien plus, il permit qu’on utilisât dans la consécration des autels les reliques de ces martyrs à défaut de reliques des saints martyrs anciens. C’est encore lui qui s’occupa de faire peindre à fresque, dans l’église Saint-Etienne le Rond, au mont Cœlius, à Rome, la passion ou les tortures des martyrs chrétiens. Avec sa permission, aux frais d’un certain Georges Gilbert, Je peintre Nicolas Circignagno reproduisit dans les magnifiques peintures destinées à l’église du Collège anglais de Rome, église dédiée à la Très Sainte Trinité sous le vocable de saint Thomas de Cantorbéry, tous les personnages anglais qui, depuis les débuts de la conversion de l’Angleterre jusqu’à ce jour, avaient enduré la mort pour la foi catholique. Ce fait est relaté dans les annales du Collège à la date correspondante. A la fin du xviiie siècle, ces peintures furent entièrement détruites par une main ennemie ; mais, avec l’approbation du même Pontife, des reproductions au moyen de planches gravées sur cuivre en avaient été faites à Rome en 1584. La vingt-septième planche reproduit le martyre de Jean Fisher et de Thomas More, et on y lit leur éloge ainsi libellé :
Jean Fisher, évêque de Rochester en Angleterre, nommé cardinal, irréprochable dans sa conduite et dans sa doctrine, d’une très illustre renommée, est puni de mort par Henri VIII parce qu’il défendait l’autorité pontificale, — Thomas More, parfait chevalier, ayant exercé la suprême magistrature du royaume, remarquable par sa prudence, son érudition, la pureté de ses mœurs et par sa douceur, est décapité sur l’ordre même du roi pour la même cause. Tous deux sont la gloire de la nation anglaise le premier est l’honneur du clergé, le second l’honneur du laïcat.
Comme toutes ces choses se sont faites dans une église romaine ouverte à tous, et sous le regard vigilant des Pontifes romains, elles sont certainement une preuve du culte public qui était rendu à ces martyrs. Ce culte a continué, plus ou moins actif, mais d’une façon constante cependant, jusqu’à nos jours. A bon droit, à cause des induits spéciaux de Pontifes romains concernant les martyrs d’Angleterre plus anciens qui, de 1535 à 1583, moururent pour la foi catholique et pour la suprématie du Pape sur toute l’Eglise, et dont des fresques jadis peintes, par ordre de Grégoire XIII, dans l’église de la Très Sainte Trinité du Collège anglais de Rome, et gravées ensuite sur cuivre, dans la même ville, en 1584, avec l’autorisation privilégiée de ce même Pontife, représentaient les supplices, Léon XIII, Notre prédécesseur d’illustre mémoire, déclara solennellement, par un décret de la Congrégation des Rites sacrés, le 29 décembre 1886, en la fête de saint Thomas de Cantorbéry dont les martyrs ci-dessus ont imité avec tant de vaillance la foi et la constance, que l’existence d’un indult public ecclésiastique était certaine, c’est-à-dire que le cas exceptionnel (béatification équipollente), prévu par les décrets du Pape Urbain VIII de sainte mémoire, se vérifiait. En conséquence, les cinquante-quatre martyrs dont les noms sont cités dans le décret, et en tête desquels figurent ceux de Jean Fisher et de Thomas More, furent élevés aux honneurs des bienheureux. Quant à Nous, par les Lettres apostoliques Atrocissima tormenta, datées du 15 décembre 1929, Nous avons solennellement béatifié cent trente-six autres athlètes du Christ, tous mis à mort de la façon la plus cruelle, entre 1541 et 1680, pour la foi catholique, apostolique et romaine et pour la primauté spirituelle des successeurs de l’apôtre saint Pierre. Puis, par les Lettres Pro tuenda, du 22 décembre 1929, Nous avons encore donné le titre de bienheureux à Jean Ogilvie, martyrisé en Ecosse pour la même cause.
Mais, à l’approche du quatrième centenaire de la mort glorieuse des bienheureux Jean Fisher et Thomas More, le cardinal François Bourne, archevêque de Cantorbéry, prélat illustre, récemment décédé, et d’accord avec lui de très nombreux personnages d’une éminente dignité, les cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, tous les archevêques et évêques d’Angleterre, d’Ecosse et d’Irlande, chacun avec son clergé et son peuple, et dans le monde catholique, le plus grand nombre de prélats, d’Universités, de collèges, de Séminaires, d’Instituts religieux, enfin une foule d’autres personnes, peut-être deux cent mille et plus, parmi lesquelles se trouvaient des non-catholiques bien connus, Nous adressèrent des suppliques Nous demandant avec instance de conférer les honneurs de la canonisation à ces deux bienheureux martyrs si éminents.
Nous avons très volontiers accueilli ces vœux. En conséquence, Nous avons prescrit à la Sacrée Congrégation des Rites, d’abord de soumettre les actes du martyre de ces bienheureux à un examen très rigoureux, parce que lorsque la cause de confirmation de culte fut traitée, cette question particulière ne fut pas examinée, étant donné qu’à cette époque le droit canonique ne l’exigeait pas. La section historique de la Congrégation des Rites, en particulier, a reconnu l’évidence du martyre de ces deux héros, tant au point de vue du fait matériel que de sa formalité intrinsèque, c’est-à-dire à la fois en ce qui concernait les deux victimes et le prince persécuteur. Aussi, le 29 janvier de l’année courante (1935), s’est tenue en Notre présence la Congrégation générale. Notre cher fils Raphaël-Charles Rossi, cardinal de la Sainte Eglise Romaine, ponent ou rapporteur de la Cause, y soumit à la discussion le doute suivant : si, dans le cas et en vue de l’effet en question, il constatait du martyre des bienheureux Jean Fisher, cardinal, et Thomas More, de la raison de ce martyre ainsi que de prodiges ou miracles survenus depuis qu’on avait autorisé le culte de ces mêmes Bienheureux. Après que chacun de ceux qui étaient présents, cardinaux, officiers, prélats et Consulteurs, eut exprimé son sentiment, Nous décidâmes d’attendre le 10 du mois suivant pour faire connaître Notre pensée, voulant entre temps implorer, pour une affaire d’une telle importance, des lumières plus abondantes. Au jour fixé (10 février), Nous mandâmes près de Nous Nos chers Fils le cardinal Camille Laurenti, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, et le susdit cardinal rapporteur de la Cause, ainsi que Nos chers Fils le secrétaire de la Congrégation des Rites, Alphonse Carinci, et le promoteur général de la foi, Sauveur Natucci. Après avoir pieusement célébré la sainte messe, Nous avons solennellement déclaré : Il conste avec tant d’évidence du martyre et de la cause du martyre des bienheureux Jean Fisher, cardinal, et Thomas More, que, dispense des prodiges ou miracles ainsi que toute autre dispense opportune et nécessaire étant accordées, l’on peut faire franchir à la Cause de nouvelles étapes.
Après avoir observé les mêmes formalités, Nous avons décrété le 3 mars que l’on pouvait en toute sûreté procéder à la canonisation de ces mêmes Bienheureux. Mais, afin de suivre dans une affaire si importante la procédure juridique établie par Nos prédécesseurs, Nous avons, le 1er avril dernier, d’abord convoqué en Consistoire secret, au Palais apostolique du Vatican, Nos vénérables Frères les cardinaux de la Sainte Eglise Romaine. Nous adressant à ceux qui étaient présents, Nous leur avons tout de suite indiqué la cause de cette réunion : demander leur avis sur ce point, à savoir s’il y avait lieu d’accorder les honneurs réservés aux saints ou la canonisation aux bienheureux martyrs Jean Fisher, cardinal de la Sainte Eglise Romaine, évêque de Rochester, et Thomas More, grand chancelier d’Angleterre. Après Notre allocution, Notre cher Fils le cardinal Camille Laurenti, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, prononça un éloquent discours sur la vie et le martyre de chacun de ces Bienheureux et relata avec soin tous les actes que la Sacrée Congrégation des Rites, après un sérieux examen, avait admis et approuvés dans leur Cause de canonisation. Ensuite, Nous demandâmes personnellement l’avis de chacun des cardinaux. Ayant reçu et accueilli avec joie ces avis, Nous avons décidé de tenir le quatrième jour de ce même mois un Consistoire publie où l’on plaiderait solennellement en faveur de la Cause de canonisation de ces Bienheureux.
Ce plaidoyer fut fait dans ce Consistoire, et d’une façon remarquable, par Notre cher Fils Auguste Milani, doyen du Collège des avocats consistoriaux. Nous fîmes répondre que Nous étions très désireux de décerner à ces Bienheureux les honneurs suprêmes, d’autant plus que non seulement l’Eglise militante recevrait de ce chef comme une parure et une gloire nouvelles, mais encore parce que ces Bienheureux, intercesseurs et protecteurs auprès de Dieu, apprendraient à tous les fidèles, et en premier lieu à leurs compatriotes, à se montrer pleins de fermeté pour défendre, au besoin jusqu’à la mort, la religion catholique, à mépriser cette vie périssable, à se conduire en parfaits chrétiens. En outre, ils obtiendraient de Dieu que la puissante nation anglaise donne de nouveau, au premier rang et avec éclat, l’exemple de la profession de la foi romaine qui seule est alimentée par la vérité immuable et inébranlablement affermie sur la Chaire de saint Pierre, et aussi que cette nation, frappée par ce nouveau et lumineux éclair de sainteté, tourne sa pensée vers ce centre du catholicisme dont elle a reçu avec tant d’empressement, sous les auspices du Pape Grégoire le Grand, la doctrine du Christ et le culte chrétien. Ce résultat, Nous avons dit l’espérer non seulement parce que ces bienheureux martyrs offrent à Dieu leur prière suppliante, mais aussi parce que leur vie a été mise en pleine lumière à la face du monde entier.
Néanmoins, afin que tout s’accomplît régulièrement selon la tradition suivie par le Siège apostolique, Nous avons déclaré ne pas vouloir faire connaître Notre manière de voir, que l’on attendait et espérait être une cause de joie, avant d’avoir, dans un Consistoire appelé semi-public, demandé et examiné les suffrages des cardinaux, des patriarches et des autres évêques réunis dans ce but. En attendant, Nous exhortâmes tous les personnages présents à faire monter vers Dieu leurs prières pour obtenir à Notre intelligence les lumières de l’Esprit-Saint afin de prendre sur une chose d’une telle importance la décision convenable. Ce Consistoire semi-public fut fixé par Nous au 9 mai suivant. Des lettres adressées par Nos soins aux évêques non seulement les plus rapprochés de Nous, mais encore à ceux qui sont les plus éloignés, les informèrent d’une si grave affaire afin de leur permettre, au cas où ils le pourraient, de venir près de Nous pour Nous donner aussi leur opinion. Nous avons ordonné qu’à chacun d’eux fût envoyé un abrégé de la vie et des actes de la Cause de canonisation des bienheureux Jean Fisher, cardinal, et Thomas More, afin qu’après avoir étudié et mûrement examiné l’affaire, chacun puisse Nous faire connaître son sentiment. Au jour indiqué plus haut, Nous avons d’abord adressé une allocution à Nos vénérables Frères les cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, ainsi qu’à tous les évêques présents, réunie dans la salle du Consistoire du Palais apostolique ; ensuite Nous leur avons demandé ce qu’ils pensaient de la Cause en question, les priant de Nous le faire connaître chacun en particulier Nous reçûmes les suffrages de tous les membres présents. Tous s’accordaient avec Notre pensée et avaient été formulés avec un très grand empressement : Nous en éprouvâmes la joie la plus vive et Nous décidâmes, à la suite de cet accord unanime, de conduire cette Cause à son terme par les rites solennels de la canonisation. La date de cette dernière à célébrer dans la basilique de Saint-Pierre fut fixée au 19 du présent mois de mai. Nous avions confiance que cet événement, accueilli avec joie par le peuple anglais et par tout l’univers Catholique, procurerait à l’Eglise une gloire et des avantages considérables. En outre, Nous engageâmes tous les assistants à joindre à Nos supplications les prières les plus ardentes, afin que Dieu, auteur et nourricier de toute sainteté, daigne éclairer et diriger Notre esprit. Selon la coutume, les protonotaires apostoliques présents reçurent l’ordre de dresser les actes officiels de ces choses.
Quand vint le jour que Nous avions fixé, les Ordres du clergé séculier et régulier en très grand nombre, les prélats et officiers de la Curie romaine avec Nos vénérables Frères les cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, et les patriarches, archevêques, évêques et Abbés se rendirent à la Basilique Vaticane splendidement décorée et déjà occupée par les fidèles en très grand nombre. Tandis qu’ils Nous précédaient en pieuse et solennelle procession, Nous avons fait Notre entrée dans la Basilique. Après avoir dévotement adoré le Très Saint Sacrement, Nous Nous sommes dirigé vers Notre trône pour y prendre place. Alors, Notre cher Frère le cardinal Camille Laurenti, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites et chargé de cette Cause de canonisation, Nous demanda, par la bouche de Notre cher Fils Auguste Milani, doyen du collège des avocats consistoriaux, avec instance, selon la coutume, d’inscrire ces deux martyrs au catalogue des saints. Pareille demande fut faite une seconde et troisième fois, c’est-à-dire d’une façon plus pressante, puis enfin très pressante. Par deux fois, Nous avons imploré avec tous les assistants et avec la plus grande ferveur la lumière divine, élevant par la prière les esprits et les cœurs vers les nouveaux saints. De ces derniers, par de pressantes supplications, Nous avons surtout sollicité cette grâce : que les peuples qui ont fait schisme, et en particulier ceux qui en ce jour reçoivent un nouvel honneur, fassent heureusement retour dans le giron de leur Mère, la Sainte Eglise, où la vraie foi ne peut jamais se tromper, où la divine charité ne se refroidit jamais, où l’éclat de la sainteté brillera toujours. Enfin, du haut de cette chaire de vérité, où le bienheureux Pierre vit et préside sur son propre siège, Nous avons prononcé cette sentence définitive :
A l’honneur de la sainte et indivisible Trinité, pour l’exaltation de la foi catholique et l’extension de la religion chrétienne, de par l’autorité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux apôtres Pierre et Paul, et par la Nôtre, après mûre délibération, après avoir fréquemment imploré le secours divin, et sur l’avis de Nos vénérables Frères les cardinaux de la Sainte Eglise Romaine et celui des patriarches, archevêques et évêques se trouvant à Rome, Nous décidons et déclarons que le bienheureux Jean Fisher, cardinal de la Sainte Eglise Romaine, et le bienheureux Thomas More, laïc, sont des saints, et Nous les inscrivons au catalogue des saints ; décrétant que leur mémoire doit être pieusement et dévotement honorée au titre de saints martyrs, par l’Eglise universelle, chaque année, le jour de leur naissance au ciel, à savoir pour Jean Fisher le 22 juin, pour Thomas More le 6 juillet. Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.
Puis, acquiesçant à la demande que Nous présenta le susdit doyen des avocats consistoriaux au nom du même cardinal ponent, Nous avons prescrit que l’on expédiât ces présentes Lettres décrétales munies du sceau en plomb, et Nous avons ordonné aux protonotaires apostoliques de dresser l’acte officiel pour fixer à jamais le souvenir de cette canonisation. En outre, Nous remerciâmes le Tout-Puissant pour un si grand bienfait. Après avoir imploré pour la première fois l’intercession des nouveaux saints martyrs auprès de Dieu, Nous avons accordé à tous les fidèles présents l’indulgence plénière. Ensuite, Nous, avons commencé d’offrir, selon le rite solennel, le Saint Sacrifice de la messe. Après la lecture de l’Evangile, adressant an clergé et au peuple une homélie, Nous avons prononcé un bref éloge de ces mêmes saints martyrs, et” très vivement exhorté, non seulement les assistants qui se tenaient là dans l’attitude la plus religieuse, mais encore tous ceux qui, dans le monde entier, étaient Nos fils dans le Christ, à orienter leurs esprits et leurs cœurs vers l’imitation des vertus de ces saints et à. implorer en faveur d’eux-mêmes et de l’Eglise leur patronage. Voici ce que Nous avons favorablement auguré : par d’ardentes supplications, les fidèles s’efforceront surtout d’obtenir de Dieu, par l’entremise de ces deux protecteurs célestes, que la nation anglaise, considérant quelle a été l’issue de leur vie, imite leur foi, et, à cause de cela, qu’elle revienne à Nous « dans l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu. ». Que ceux, avons-Nous dit, qui sont encore séparés de Nous considèrent attentivement tes anciennes gloires de leur Eglise qui reflètent et accroissent au plus haut point les fastes glorieux de cette Eglise Romaine ; qu’ils considèrent également, ce que Nous souhaitons vivement, que ce Siège apostolique les attend tous depuis longtemps pour les recevoir, lorsqu’ils reviendront enfin, non pas dans une demeure étrangère, mais dans leur propre maison. Après la lecture de cette homélie, Nous avons, Dieu aidant, terminé la messe solennelle.
Après avoir examiné attentivement tout ce qui devait être considéré, en pleine connaissance de cause, en vertu de la plénitude de Notre pouvoir apostolique. Nous confirmons et corroborons et à nouveau Nous établissons et décrétons et faisons savoir à l’Eglise universelle toutes et chacune des choses mentionnées ci-dessus. En outre, Nous voulons que les copies ou les exemplaires, même imprimés, de ces Lettres décrétales, pourvu cependant qu’ils portent la signature manuscrite et le sceau d’un notaire apostolique, obtiennent exactement la même créance que les présentes Lettres obtiendraient si elles étaient elles-mêmes produites ou montrées. Que si quelqu’un s’avisait d’enfreindre ce que par ces Lettres décrétâtes Nous définissons, décrétons, inscrivons, mandons, établissons et voulons, ou bien était assez téméraire pour oser s’y opposer, qu’il sache qu’il encourrait l’indignation du Dieu tout-puissant et des bienheureux apôtres Pierre et Paul.
Donné à Rome, près Saint-Pierre ; le 19 mai, quatrième dimanche après Pâques, en l’année 1935, de Notre Pontificat le quatorzième.
Moi, Pie, évêque de l’Eglise catholique.
(Suivent les signature de dix-sept cardinaux.)
Fr. Thomas-Pie, O. P., card. Boggiani, Chancelier de la S. E. R. Camille card. Laurenti, Préfet de la S. Congrégation des Rites. Joseph Wilpert, doyen du Collège des Protonat. apostoliques
Source : Actes de S. S. Pie XI, t. XIII, p. 49, La Bonne Presse – A. A. S., vol. XXVIII, 1936, p. 185.