Chers Amis et Bienfaiteurs,
uand S. Exc. Monseigneur Marcel Lefebvre fêtera ses 80 ans dans quelques semaines, il pourra jeter un coup d’œil en arrière sur une vie bien remplie et bénie par Dieu : missionnaire en Afrique, archevêque de Dakar et délégué apostolique du Saint-Siège pour 64 diocèses, évêque de Tulle, Supérieur général de la Société des Pères du Saint-Esprit comptant (à l’époque) 5000 membres.
Cependant l’œuvre la plus belle, la plus grande et la plus importante lui a été réservée par la Providence divine pour la fin de sa vie : l’engagement total dans la lutte pour sauver la sainte Eglise, ses dogmes, le règne social de son Seigneur et Maître, pour sauvegarder le sacerdoce catholique et le Saint Sacrifice de la Messe par la fondation de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X.
Depuis quinze ans, des jeunes gens du monde entier quittent leur famille, leur profession, leur situation et leur patrie, attirés par le rayonnement de la force de sa foi et par le feu de sa charité, afin de se laisser former dans nos séminaires et d’y monter les marches de l’autel. Gaudium meum et corona mea ! C’est par ces mots de saint Paul qu’il s’adressait il y a quelque temps à ces jeunes gens : « Vous êtes ma joie, vous êtes ma couronne ! » Cette année, il y en a 70 de vingt pays, sans compter les vocations des frères et sœurs.
La Fraternité pourrait former, dans le monde entier, un clergé fort dans la foi ; Ecône deviendrait ainsi le modèle de la formation sacerdotale en notre temps », me disait récemment un cardinal ; cette parole m’a semblé sonner presque comme une prophétie.
En effet, nous envisageons la fondation de deux nouveaux séminaires : l’un en Afrique noire, sur les lieux où travailla jadis le Père Marcel ; l’autre en Inde, pour tout le territoire asiatique. Mais ce ne sont pas les seuls signes de la bénédiction visible de Dieu. Nous attendons, avec ô combien de joie, la date toute proche de l’ordination sacerdotale, la première à avoir lieu au Séminaire Notre-Dame Corédemptrice de La Reja en Argentine, qui portera le 1er décembre le nombre de nos confrères à 160.
Nous nous sentons comblés par les miséricordes du Seigneur à la vue des dix nouvelles églises et des vingt et quelques nouvelles chapelles que nous avons pu ouvrir au cours de cette année dans le monde entier ; à la vue des nouvelles écoles fondées en France, en songeant à la retraite prêchée au Liban fin juillet et au parrainage de notre apostolat en Asie, pris en charge par la charité fraternelle effective de nos fidèles du prieuré de Sarrebruck…
L’appel à la croisade pour la sainte Eglise paraît trouver un écho de jour en jour plus vaste grâce à votre collaboration efficace, chers amis et bienfaiteurs. Réduite à un petit reste, la chrétienté a recours à l’autodéfense face à l’œuvre destructrice des novateurs. Tandis que de sa droite, elle reconstruit le Sanctuaire renversé, de sa gauche, elle repousse les ennemis.
Paisible, mais ferme, elle part en mission à la reconquête du terrain perdu. Elle raffermit ceux qui doutent, éclaire les ignorants, réprimande les pécheurs, console les affligés, pardonne les torts subis, supporte patiemment les importuns, prie Dieu pour les vivants et les morts.
Bien sûr, nos adversaires ne restent pas non plus inactifs. La soi-disant théologie de la libération, qui n’est qu’un marxisme à façade religieuse, a établi à ce jour, dans la seule Amérique latine, 120.000 communautés de base. En Afrique et en Asie, l’inculturation, qui ne fait rien d’autre que ramener au vieux paganisme les chrétiens de ces régions, s’étend constamment sous la poussée de ses idéologues.
Mais restons chez nous : l’Europe n’a rien à envier aux autres ! Grâce à l’approbation des évêques, un nouveau droit matrimonial vient d’être accepté en Suisse, qui est à la fois contraire au droit naturel et à la révélation divine, et qui détruit complètement l’autorité dans la famille. En Allemagne, le président de la Conférence épiscopale, le cardinal Höffner, et le président de l’Eglise Evangélique d’Allemagne, M. Lohse, ont signé une déclaration commune d’après laquelle les mariages mixtes peuvent être conclus dans l’une ou l’autre Eglise et les enfants qui en naissent être baptisés et élevés dans l’une ou l’autre confession. En ce qui concerne le Saint Sacrifice de la Messe et la Cène protestante, le document parle de « concordance malgré quelques différences » !
De tels évêques ont-ils encore la foi catholique ? Et, en de telles conditions, que peut-on attendre du Synode extraordinaire qui aura lieu à Rome du 25 novembre au 8 décembre prochain ? En tout cas, nous renonçons d’avance à « redécouvrir le vrai Vatican II » avec le Cardinal Ratzinger, un Vatican II soi-disant mal compris et mal interprété. Nous nous en tenons plutôt à la parole de Notre Seigneur : on reconnaît l’arbre à ses fruits ; or on constate par tout le monde des symptômes d’une intoxication gravissime. L’existence de 70.000 prêtres apostats n’est qu’un symptôme parmi beaucoup d’autres.
« Priez sans cesse », nous avertit l’Apôtre à la suite du Seigneur, qui nous exhorte à « veiller et à prier ». Tenir bon dans la foi, persévérer dans la prière, poursuivre l’action apostolique et aspirer à la sainteté, tel est le commandement de l’heure.
Que la Médiatrice de toutes grâces nous y aide ; qu’Elle récompense par d’abondantes grâces du Ciel votre soutien généreux à notre œuvre. Qu’elle ramène l’Eglise égarée à Notre-Seigneur Jésus-Christ pauvre, humble, crucifié !
Rickenbach, en la fête des saints Côme et Damien, 27 septembre 1985
Abbé Franz Schmidberger
Supérieur Général
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