Section I – Des peines en général
Canon 2214
§ 1. Indépendamment de toute autorité humaine, l’Église a le droit, propre et inhérent à sa nature, de frapper ses sujets délinquants de peines soit spirituelles soit même temporelles.
§ 2. On gardera sous les yeux l’avertissement du Concile de Trente, sess. XIII, de ref. Chap. 1 : “Les Évêques et autres Ordinaires se souviendront qu’ils sont des pasteurs et non des bourreaux, et qu’ils doivent gouverner leurs sujets non pour les dominer, mais pour les aimer comme des enfants et des frères, et travailler par leurs exhortations et leurs avis à les détourner des pâturages défendus, afin de n’être pas contraints, s’ils devenaient coupables, à les châtier par les peines nécessaires. Si cependant la faiblesse humaine occasionnait des fautes, ils observeraient l’enseignement de St Paul en pressant les coupables, en les suppliant, en les reprenant avec une bonté et une patience extrêmes, car souvent pour corriger, la bienveillance est plus efficace que l’austérité, l’exhortation plus que la menace, la charité plus que l’autorité. Lorsque la gravité du délit exige l’emploi de la verge, on unira la rigueur à la mansuétude, la justice à la miséricorde, la sévérité à la douceur, si bien que la discipline, salutaire au peuple et nécessaire, soit maintenue sans rudesse et que les coupables s’amendent par correction ou, s’ils ne reviennent pas à résipiscence, que les autres soient détournés du vice par l’exemple salutaire du châtiment.
Titre 4 – Notion, espèces, interprétation et application des peines
Canon 2215
La peine ecclésiastique est la privation d’un bien, infligée par l’autorité légitime pour la correction du délinquant et la punition du délit.
Canon 2216
Dans l’Église les délinquants sont punis :
1° Par des peines médicinales ou censures ;
2° Par des peines vindicatives ;
3° Par des remèdes pénaux et des pénitences.
Canon 2217
§ 1. La peine est dite :
1° ‘Déterminée’ si elle est fixée par la loi ou le précepte d’une manière obligatoire ; ‘indéterminée’ si elle est laissée à la prudente décision du juge ou du supérieur en termes préceptifs ou facultatifs.
2° ‘Latae sententiae’ si elle est déterminée par la loi ou le précepte de façon à être encourue par le fait qu’on commet un délit ; ‘ferendae sententiae’ si elle doit être infligée par le juge ou le supérieur.
3° ‘A jure’ la peine déterminée par la loi, qu’elle soit ‘latae’ ou ‘ferendae sententiae’ ; ‘ab homine’ la peine portée par un précepte particulier ou une sentence judiciaire condamnatoire, même fixée par le droit.
§ 2. La peine est toujours comprise comme ‘ferendae sententiae’ à moins qu’il ne soit dit expressément qu’elle est ‘latae sententiae’, qu’elle est contractée ‘ipso facto’ ou ‘ipso jure’ ou que ne soient employés d’autres termes de même nature.
Canon 2218
§ 1. Il faut garder une équitable proportion entre les peines à décerner et le délit, en tenant compte de l’imputabilité, du scandale et du dommage causé. On doit donc avoir égard non seulement à l’objet et la gravité de la loi, mais encore à l’âge, à la science, à l’éducation, au sexe, à la condition, à l’état mental du délinquant, à la dignité de la personne offensée par le délit, ou qui l’a commis, à la fin que le coupable s’est proposée, au temps et au lieu de l’acte délictueux ; on cherchera si le délinquant n’a pas agi sous le coup de la passion ou d’une crainte grave, s’il ne s’est pas repenti de sa faute et ne s’est pas appliqué à en écarter les fâcheux effets et d’autres points du même genre.
§ 2. Ce qui excuse non seulement de toute imputabilité, mais d’imputabilité grave, excuse pareillement de toute peine ‘latae’ ou ‘ferendae sententiae’, et même au for externe si l’excuse est établie pour ce for.
§ 3. Les injures mutuelles se compensent, à moins que l’une des parties ne doive être condamnée à cause de l’injure plus grave qu’elle a faite ; la peine est diminuée s’il y a lieu.
Canon 2219
§ 1. Dans les peines il faut choisir l’interprétation la plus bénigne.
§ 2. Mais s’il paraît douteux que la peine infligée par un supérieur compétent soit juste ou non, on doit l’observer aux deux fors, à moins d’appel suspensif.
§ 3. On ne peut étendre la peine d’une personne à une autre, ni d’un cas à un autre, quand bien même le motif serait égal ou plus grave, sauf cependant la prescription du Can. 2231.
Titre 5 – Du supérieur muni du pouvoir coercitif
Canon 2220
§ 1. Ceux qui ont le pouvoir de porter des lois et d’imposer des préceptes peuvent aussi attacher des peines à la loi ou au précepte ; ceux qui n’ont pas le pouvoir judiciaire ne peuvent qu’appliquer, conformément au droit, les peines légitimement établies.
§ 2. Le vicaire général, sauf mandat spécial, n’a pas le droit d’infliger des peines.
Canon 2221
Les détenteurs du pouvoir législatif peuvent, dans les limites de leur juridiction, munir d’une peine convenable non seulement la loi portée par eux-mêmes ou par leurs prédécesseurs, mais encore, à cause de circonstances spéciales, une loi divine ou une loi ecclésiastique portée par un pouvoir supérieur, si elle est en vigueur dans leur territoire ; ils peuvent aussi aggraver la peine déjà existante.
Canon 2222
§ 1. Quand bien même une loi n’aurait pas été munie de sanction, le supérieur légitime peut en frapper la transgression d’une juste peine, même sans menace préalable, si le scandale causé ou la gravité exceptionnelle de la faute le comporte. En dehors de tels cas, le coupable ne peut être puni que s’il a violé la loi, après avoir reçu une monition avec menace, en cas de transgression, d’une peine ‘latae’ ou ‘ferendae sententiae’.
§ 2. Dans le cas d’un délit seulement probable, ou certain mais couvert par la prescription, le supérieur légitime a le droit et même le devoir de ne pas promouvoir aux ordres un clerc dont l’idonéité est douteuse et, pour éviter le scandale, d’interdire à un clerc l’exercice du saint ministère, ou même de lui retirer son office, conformément au droit. Ces mesures n’ont pas le caractère de peines.
Canon 2223
§ 1. Dans l’application des peines, le juge ne peut augmenter une peine déterminée, à moins que des circonstances extraordinairement aggravantes ne l’exigent.
§ 2. Si, en établissant une peine ‘ferendae sententiae’, la loi est rédigée en termes facultatifs, il est laissé à la prudence et à la conscience du juge de l’infliger, ou, si la peine est déterminée, de la modérer.
§ 3. Si la loi est rédigée en termes préceptifs, ordinairement il faut infliger la peine, mais il est laissé à la conscience du juge ou du supérieur :
1° De différer l’application de la peine à une époque plus opportune, si l’on prévoir qu’une punition trop rapide entraînera de plus grands maux ;
2° De ne pas infliger la peine, si le coupable est parfaitement corrigé et a réparé le scandale, ou si l’autorité civile l’a déjà suffisamment puni ou le fera vraisemblablement ;
3° De tempérer la peine déterminée, ou de remplacer par un remède pénal ou une pénitence, si on constate une circonstance notablement atténuante, l’amendement du coupable ou un châtiment infligé par le pouvoir civil ; dans de tels cas, le juge ou le supérieur infligera une punition opportune et plus douce.
§ 4. Déclarer une peine ‘latae sententiae’ est généralement laissé à la prudence du supérieur ; mais une sentence déclaratoire s’impose soit à la demande de l’intéressé, soit si le bien commun l’exige.
Canon 2224
§ 1. Ordinairement, il y autant de peines que de délits.
§ 2. Si cependant le nombre des délits entraînait une accumulation excessive des peines à infliger, il est laissé à la prudence du juge soit d’infliger la peine la plus grave de toutes, en y ajoutant, s’il y a lieu, une pénitence ou un remède pénal, soit de réduire les peines dans les limites équitables, en tenant compte du nombre et de la gravité des délits.
§ 3. Si une peine est établie et contre la tentative du délit, et contre le délit consommé, quand celui-ci est commis, on ne doit infliger que la peine portée contre le délit consommé.
Canon 2225
Si la peine est déclarée ou infligée par sentence judiciaire, on observera les prescriptions canoniques sur le prononcé de la sentence ; mais si la peine ‘latae’ ou ‘ferendae sententiae’ est infligée sous forme de précepte particulier, ordinairement on la déclarera ou on l’infligera par écrit ou devant deux témoins, avec l’indication des motifs de la peine, sauf le cas du Can. 2193.
Titre 6 – Du sujet passif du pouvoir coercitif
Canon 2226
§ 1. Est soumis à la peine attachée à la loi ou au précepte quiconque est lié par cette loi ou ce précepte, à moins d’exemption expresse.
§ 2. Si une loi pénale déroge à la loi antérieure, mais que le délit ait été commis avant la parution de la loi plus récente, on doit appliquer la loi plus favorable à l’accusé.
§ 3. Si une loi postérieure abroge une loi antérieure ou seulement la peine, la peine cesse aussitôt, à moins qu’il ne s’agisse de censures déjà contractées.
§ 4. La peine lie le coupable dans tout l’univers, même quand cesse la juridiction du supérieur, à moins d’une expresse disposition contraire.
Canon 2227
§ 1. Le Souverain pontife peut seul infliger ou déclarer une peine, quand il s’agit de personnes mentionnées au Can. 1557 § 1.
§ 2. A moins d’être expressément nommés, les cardinaux ne sont compris sous aucune loi pénale, ni les évêques sous les peines ‘latae sententiae’ de suspense ou d’interdit.
Canon 2228
On n’encourt la peine établie par la loi que si le délit a été parfait en son genre, au sens propre des termes de la loi.
Canon 2229
§ 1. L’ignorance affectée de la loi, ou seulement de la peine, n’excuse jamais d’aucune peine ‘latae sententiae’.
§ 2. Si la loi emploie les mots : ‘praesumpserit, ausus fuerit, scienter, sponte, studiose, temerarie, consulto egerit’, ou d’autres semblables qui exigent pleine connaissance et pleine délibération, toute diminution d’imputabilité du coté de l’intelligence ou du coté de la volonté exempte des peines ‘latae sententiae’.
§ 3. Si la loi ne contient pas de termes de ce genre :
1° L’ignorance crasse ou supine de la loi, ou seulement de la peine, n’excuse d’aucune peine ‘latae sententiae’ ; l’ignorance qui n’est pas crasse ou supine excuse des peines médicinales mais non des peines vindicatives ‘ferendae sententiae’.
2° L’ébriété, l’omission de la diligence requise, la faiblesse d’esprit, l’ardeur de la passion, n’excusent pas des peines ‘latae sententiae’ si malgré la diminution de l’imputabilité, l’action reste gravement coupable.
3° La crainte grave n’exempte nullement des peines ‘latae sententiae’, si le délit tourne au mépris de la foi ou de l’autorité ecclésiastique ou au préjudice des âmes.
§ 4. Dans les cas où le coupable échappe aux censures ‘latae sententiae’ conformément au Par.3 n.1, rien n’empêche, s’il y a lieu, qu’il soit frappé d’une autre peine convenable ou d’une pénitence.
Canon 2230
Les impubères sont excusés des peines ‘latae sententiae’ ; on doit les corriger plutôt par des punitions éducatives que par des censures ou de graves peines vindicatives. Mais les pubères qui les auraient poussés à violer la loi ou qui auraient concouru avec eux au délit, conformément au Can. 2209 § 1–3, encourent la peine établie par la loi.
Canon 2231
Si plusieurs coupables ont concouru à commettre le délit, quand bien même un seul serait nommé dans la loi, la même peine frappe également tous ceux dont fait mention le Can. 2209 § 1–3, à moins d’une autre disposition expresse de la loi ; il n’en va pas de même des autres coopérateurs, mais ils doivent subir une autre juste peine, suivant la prudence du supérieur, à moins que la loi n’ait établi pour eux une peine spéciale.
Canon 2232
§ 1. La peine ‘latae sententiae’ médicinale ou vindicative, atteint par le fait même, aux deux fors, le délinquant qui a conscience de son délit ; cependant, jusqu’à la sentence déclaratoire, le coupable est excusé de l’observation de la peine lorsqu’il ne peut l’observer sans se diffamer, et, au for externe, personne ne peut en exiger de lui l’observation, sauf en cas de délit notoire, et en tenant compte du Can. 2223 § 4.
§ 2. La sentence déclaratoire rétroagit jusqu’au moment où le délit a été commis.
Canon 2233
§ 1. On ne peut infliger aucune peine à moins d’être certain que le délit a été commis et n’a pas été couvert par une prescription légale (cf.Can. 1702–1703).
§ 2. Même après avoir dûment constaté le délit et l’absence de prescription, il faut, avant d’infliger une censure, reprendre le coupable et l’avertir d’avoir à cesser sa contumace, conformément au Can. 2242 § 3 ; si, d’après l’appréciation prudente du juge ou du supérieur, le cas le comporte, on lui accordera un délai convenable pour venir à résipiscence ; si la contumace persiste, on peut infliger la censure.
Canon 2234
Celui qui a commis plusieurs délits doit être puni plus sévèrement ; il doit en outre, si le cas le comporte d’après la sage estimation du juge, être soumis à la vigilance ou à un autre remède pénal.
Canon 2235
Le délit manqué ou la tentative de délit, s’ils ne sont pas frappés par la loi comme des délits spéciaux, peuvent être punis par une peine convenable, conformément au Can. 2213.
Titre 7 – De la remise des peines
Canon 2236
§ 1. La remise de la peine, par l’absolution, s’il s’agit de censures, ou par la dispense, s’il s’agit de peines vindicatives, peut être accordée exclusivement par celui qui a porté la peine, son supérieur ou son successeur compétent, ou par celui à qui ce pouvoir a été accordé.
§ 2. Qui peut exempter de la loi peut aussi remettre la peine attachée à la loi.
§ 3. Le juge qui, par office, applique la peine établie par le supérieur ne peut remettre la peine une fois qu’elle est appliquée.
Canon 2237
§ 1. Dans les cas publics l’Ordinaire peut remettre les peines ‘latae sententiae’ établies par le droit commun, excepté :
1° Les cas portés par le for contentieux ;
2° les censures réservées au Siège apostolique ;
3° Les peines d’inhabileté aux bénéfices, offices, dignités, charges dans l’Église, à la voix active et passive, ou de privation des mêmes biens ; les peines de suspense perpétuelle, d’infamie de droit, de la privation du droit de patronage, d’un privilège ou d’une grâce accordée par le Saint Siège.
§ 2. Dans les cas occultes, en tenant compte des Can. 2254 ; Can. 2290, l’Ordinaire peut remettre, par lui-même ou par un délégué, les peines ‘latae sententiae’ établies par le droit commun, excepté les censures spécialement établies ou très spécialement réservées au Siège apostolique.
Canon 2238
La remise de la peine extorquée par la violence ou la crainte est nulle de plein droit.
Canon 2239
§ 1. La peine peut être remise au coupable présent ou absent, absolument ou sous condition, au for externe ou seulement au for interne.
§ 2. Quoique la peine puisse être remise même de vive voix, si toutefois elle a été infligée par écrit, il est bon que la remise en soit accordée par écrit.
Canon 2240
Pour ce qui concerne la prescription de l’action pénale, on observera les dispositions du Can. 1703.
Section II – Des différentes espèces de peines
Titre 8 – Des peines médicinales ou censures
Chapitre 1 – Des censures en général
Canon 2241
§ 1. La censure est une peine par laquelle un baptisé, délinquant et contumace, est privé de certains biens spirituels ou attaché à des biens spirituels, jusqu’à ce que, la contumace ayant cessé, il reçoive l’absolution.
§ 2. Les censures, surtout ‘latae sententiae’, et principalement l’excommunication, ne doivent être infligées que sobrement et avec une grande circonspection.
Canon 2242
§ 1. La censure ne punit qu’un délit extérieur, grave, consommé, joint à la contumace ; une censure peut être portée contre des délinquants inconnus.
§ 2. S’il s’agit de censures ‘ferendae sententiae’, est contumace, celui qui, en dépit des monitions dont parle le Can. 2233 § 2, n’interrompt pas son délit ou refuse de faire pénitence du délit accompli et de réparer convenablement les dommages et le scandale causés ; mais pour encourir une censure ‘latae sententiae’, il suffit de transgresser la loi ou le précepte auquel est attachée cette censure, à moins que le coupable n’en soit excusé par une cause légitime.
§ 3. Il faut dire que la contumace a pris fin lorsque le coupable s’est vraiment repenti de son délit et en même temps a donné une satisfaction convenable pour les dommages et le scandale, ou du moins a sérieusement promis de satisfaire ; il appartient à celui à qui est demandée l’absolution de la censure de juger si, oui ou non, la pénitence est sincère, la satisfaction convenable ou sa promesse sérieuse.
Canon 2243
§ 1. Les censures infligées par sentence judiciaire comportent exécution dès qu’elles ont été portées et il n’y a contre elles qu’un appel dévolutif ; il n’y a de même qu’un recours dévolutif contre les censures infligées par manière de précepte.
§ 2. L’appel ou le recours contre une sentence judiciaire ou un précepte menaçant de censures, même ‘latae sententiae’ et non encore contractées, ne suspend ni la sentence ni le précepte, s’il s’agit d’une matière où le droit n’admet ni appel, ni recours suspensif ; sinon, il suspend les censures, mais en maintenant l’obligation d’observer ce qu’ordonne la sentence ou le précepte, à moins que la coupable n’ait interjeté appel ou recours, non seulement contre la peine, mais aussi contre la sentence ou le précepte.
Canon 2244
§ 1. Les censures, non seulement d’espèce différente mais même de même espèce, peuvent se multiplier dans le même sujet.
§ 2. La censure ‘latae sententiae’ est multipliée :
1° Si des délits différents, dont chacun entraîne une censure, sont commis par une même action ou par des actions distinctes.
2° Si le délit frappé d’une censure est répété de façon à constituer plusieurs délits distincts ;
3° Si le même délit, puni par divers supérieurs de censures différentes, est commis une ou plusieurs fois .
§ 3. La censure ‘ab homine’ est multipliée si plusieurs préceptes ou plusieurs sentences, ou plusieurs parties distinctes du même précepte ou de la même sentence infligent chacun une censure.
Canon 2245
§ 1. Certaines censures sont réservées, d’autres ne le sont pas.
§ 2. La censure ‘ab homine’ est réservée à celui qui l’a infligée ou qui a porté la sentence, à son supérieur compétent, à son successeur ou à son délégué ; certaines censures sont réservées par le droit, les unes à l’Ordinaire, les autres au Siège apostolique.
§ 3. Parmi celles qui sont réservées au Siège apostolique, les unes le sont simplement, d’autres spécialement, d’autres enfin très spécialement.
§ 4. Une censure ‘latae sententiae’ n’est réservée que si c’est dit expressément dans la loi ou le précepte ; dans un doute de droit ou de fait la réserve est inexistante.
Canon 2246
§ 1. Qu’on ne réserve pas de censure sans que ce soit demandé par la gravité spéciale des délits et la nécessité de mieux pourvoir à la discipline ecclésiastique et de guérir la conscience des fidèles.
§ 2. La réserve est d’interprétation étroite.
§ 3. La réserve d’une censure qui empêche la réception des sacrements entraîne la réserve du péché auquel la censure est attachée ; mais, si quelqu’un est excusé de la censure ou en a été absous, la réserve du péché cesse complètement.
Canon 2247
§ 1. Si une censure est réservée au Siège apostolique, l’Ordinaire ne peut porter sur le même délit une autre censure en se la réservant.
§ 2. La réserve d’une censure dans un territoire particulier n’a pas de valeur en dehors de ce territoire, lors même que le censuré en sortirait pour obtenir l’absolution ; une censure ‘ab homine’ est réservée partout, si bien que le censuré ne peut être absous nulle part, sans les pouvoirs nécessaires.
§ 3. Si le confesseur, ignorant la réserve, absout le pénitent de la censure et du péché, l’absolution de la censure est valide, pourvu que ce ne soit pas une censure ‘ab homine’ ou très spécialement réservée au Saint-Siège.
Canon 2248
§ 1. N’importe quelle censure, une fois contractée, n’est levée que par une absolution légitime.
§ 2. L’absolution ne peut être refusée dès que le délinquant a cessé d’être contumax au sens du Can. 2242 § 3 ; celui qui l’absout de la censure peut, s’il y a lieu, lui infliger une peine vindicative convenable ou une pénitence pour le délit commis.
§ 3. La censure enlevée par l’absolution ne revit pas, sauf dans le cas ou l’obligation imposée sous peine de réincidence n’a pas été accomplie.
Canon 2249
§ 1. Si quelqu’un est lié par plusieurs censures, il peut être absous de l’une sans être absous des autres.
§ 2. Celui qui demande l’absolution doit indiquer tous les cas ; sinon l’absolution ne vaut que pour les cas indiqués ; toutefois, si à la suite d’une demande particulière, l’absolution générale a été accordée, elle vaut pour tous les cas omis de bonne foi, à l’exception des censures très spécialement réservées au Saint-Siège, mais non pour les cas omis de mauvaise foi.
Canon 2250
§ 1. S’il s’agit d’une censure qui n’empêche pas la réception des sacrements, le censuré, qui est bien disposé et n’est plus contumax, peut être absous de ses péchés, bien que la censure subsiste.
§ 2. Mais s’il s’agit d’une censure qui empêche la réception des sacrements, le censuré ne peut être absous de ses péchés avant d’avoir été absous de sa censure.
§ 3. L’absolution d’une censure au for sacramentel se trouve dans la formule ordinaire de l’absolution des péchés, prescrite dans les rituels ; au for non sacramentel, elle peut être donnée de n’importe quelle manière, mais, pour absoudre d’une excommunication, il convient régulièrement d’employer la formule des rituels.
Canon 2251
Si l’absolution de la censure est donnée au for externe, elle vaut pour les deux fors ; si elle est donnée au for interne, celui qui est absous peut, en écartant le scandale, se comporter comme absous même dans les actes du for externe ; mais à moins que la concession de l’absolution ne soit prouvée ou du moins légitimement présumée au for externe, le supérieur du for externe, auquel le coupable doit obéissance, peut exiger l’observation de la censure, aussi longtemps qu’elle n’a pas été absoute au for externe.
Canon 2252
Ceux qui se trouvant en danger de mort, ont reçu d’un prêtre sans pouvoir spécial l’absolution d’une censure ‘ab homine’ ou très spécialement réservée au Saint-Siège, sont tenus, une fois revenus à la santé, de recourir, sous peine de réincidence, à celui qui a porté la censure, s’il s’agit d’une censure ‘ab homine’ ; à la S. Pénitencerie, à l’évêque ou à un clerc muni du pouvoir nécessaire, conformément au Can. 2254 § 1, s’il s’agit d’une censure ‘a jure’, et d’obéir à leurs prescriptions.
Canon 2253
En dehors du danger de mort :
1° Peut absoudre d’une censure non réservée, au for sacramentel tout confesseur ; en dehors du for sacramentel quiconque a juridiction au for externe sur le coupable.
2° Peut absoudre d’une censure ‘ab homine’ celui à qui elle est réservée conformément au Can. 2245 § 2 ; il le peut, même si le coupable a changé de domicile ou de quasi-domicile.
3° Peuvent absoudre d’une censure réservée par le droit, celui qui l’a établie ou à qui elle est réservée, et leurs successeurs, leurs supérieurs compétents ou leurs délégués. En conséquence, quand une censure est réservée à l’évêque ou à l’Ordinaire, tout Ordinaire peut en absoudre ses sujets, et l’Ordinaire du lieu même les étrangers ; quand elle est réservée au Saint-Siège, peuvent en absoudre non seulement le Saint-Siège, mais ceux qui en ont obtenu le pouvoir d’absoudre : général, si la censure est simplement réservée ; spécial si elle est spécialement réservée ; très spécial, si elle l’est très spécialement. On tiendra compte du Can. 2254.
Canon 2254
§ 1. Dans les cas les plus urgents, c’est-à-dire si les censures ‘latae sententiae’ ne peuvent être observées extérieurement sans danger de grave scandale ou d’infamie, ou s’il est dur au pénitent de rester en état de péché mortel pendant le temps nécessaire pour que le pouvoir supérieur pourvoie à la situation, alors tout confesseur peut absoudre au for sacramentel des mêmes censures, de quelque manière qu’elles soient réservées ; toutefois le confesseur doit imposer à son pénitent sous peine de réincidence, l’obligation de recourir dans le mois, au moins par lettre et par le confesseur, si cela se peut sans grave inconvénient, et sous un nom fictif, à la S. Pénitencerie ou à l’évêque ou à un autre supérieur muni du pouvoir nécessaire, et d’obéir à ses ordres.
§ 2. Si le pénitent, même après avoir reçu l’absolution conformément au Par.1, a recouru au supérieur, rien ne l’empêche de s’adresser à un autre confesseur muni du pouvoir nécessaire et de lui renouveler son accusation, au moins l’accusation du délit censuré ; après avoir obtenu l’absolution, il recevra les ordres de ce confesseur, sans être tenu par la suite d’observer ceux qui lui parviendraient du supérieur auquel il avait recouru.
§ 3. Si dans un cas exceptionnel, le recours au supérieur est moralement impossible, le confesseur, sauf quand il s’agit d’une censure établie au Can. 2367, peut accorder l’absolution sans imposer l’obligation de recourir, mais en prescrivant ce que de droit et en imposant une pénitence suffisante et une satisfaction pour la censure, de façon que si le pénitent n’a pas accompli sa pénitence et donné satisfaction dans le délai déterminé par le confesseur, il retombe dans la censure.
Chapitre 2 – Les différentes espèces de censures
Canon 2255
§ 1. Les censures sont :
1° L’excommunication ;
2° L’interdit ;
3° La suspense.
§ 2. L’excommunication ne peut atteindre que les personnes physiques ; en conséquence, si elle est portée contre un corps moral, il est entendu qu’elle frappe seulement les personnes qui ont pris part au délit. La suspense et l’interdit peuvent affecter même une communauté, comme personne morale. L’excommunication et l’interdit peuvent atteindre même les laïques, la suspense est propre aux clercs ; un lieu peut être frappé d’interdit. L’excommunication est toujours une censure ; l’interdit et la suspense peuvent être censures ou peines vindicatives, mais dans le doute on présume que ce sont des censures.
Canon 2256
1° Dans les canons suivants on entend sous le nom d’offices divins les fonctions du pouvoir d’ordre qui, en vertu de l’institution du Christ ou de l’Église, sont ordonnées au culte divin et ne peuvent être accomplies que par les clercs.
2° Sous le nom d’actes légitimes ecclésiastiques on comprend : l’administration des biens d’Église ; les fonctions de juge, auditeur, rapporteur, défenseur du lien, promoteur de justice et promoteur de la foi, notaire et chancelier, huissier et appariteur, avocat et procureur dans les causes ecclésiastiques ; la charge de parrain du baptême ou de la confirmation ; le suffrage dans les élections ecclésiastiques ; le droit de patronat.
Article 1 – L’excommunication
Canon 2257
§ 1. L’excommunication est une censure par laquelle quelqu’un est exclut de la communion des fidèles, avec les effets énumérés dans les canons qui suivent, et qui ne peuvent en être séparés.
§ 2. On l’appelle aussi anathème principalement si elle est infligée avec les solennités décrites dans le Pontifical romain.
Canon 2258
§ 1. Certains excommuniés sont ‘à éviter’, d’autres sont ‘tolérés’.
§ 2. Personne n’est ‘à éviter’, s’il n’a été nommément excommunié par le Siège apostolique, si l’excommunication n’a pas été rendue publique et si le décret ou la sentence ne déclare expressément que le coupable doit être évité, sauf le cas du Can. 2343 § 1 1°.
Canon 2259
§ 1. Tout excommunié est privé du droit d’assister aux offices divins, non toutefois à la prédication de la parole de Dieu.
§ 2. Si un excommunié ‘toléré’ assiste passivement à un office, il n’est pas nécessaire de la chasser ; si c’est un ‘à éviter’, on doit l’expulser ; si c’est impossible, on doit cesser l’office pourvu qu’on le puisse sans inconvénient grave. Quant à l’assistance active, qui implique une certaine participation à la célébration des offices divins, il faut en écarter non seulement le ‘à éviter’, mais encore tout excommunié après sentence déclaratoire ou condamnatoire ou tout excommunié notoire.
Canon 2260
§ 1. L’excommunié ne peut recevoir les sacrements, ni même, après une sentence déclaratoire ou condamnatoire, les sacramentaux.
§ 2. Quant à la sépulture ecclésiastique, il faut observer la prescription du Can. 1240 § 1 2°.
Canon 2261
§ 1. Il est défendu à l’excommunié de produire et d’administrer les sacrements et les sacramentaux sauf les exceptions suivantes.
§ 2. Les fidèles en tenant compte du Par.3, peuvent, pour toute juste cause, demander à un excommunié les sacrements et les sacramentaux, surtout si les autres ministres font défaut, et alors cet excommunié peut les administrer sans être tenu de s’informer de la cause de la demande.
§ 3. Mais quant aux excommuniés ‘à éviter’ ou aux autres excommuniés qui ont été l’objet d’une sentence condamnatoire ou déclaratoire, les fidèles ne peuvent qu’en danger de mort leur demander soit l’absolution sacramentelle, conformément aux Can. 882 ; Can. 2252 soit même, en l’absence d’autres ministres les autres sacrements et les sacramentaux.
Canon 2262
§ 1. L’excommunié n’a aucune part aux indulgences, aux suffrages, aux prières de l’Église.
§ 2. Il n’est pourtant pas défendu :
1° Aux fidèles de prier de façon privée pour l’excommunié ;
2° Aux prêtres d’appliquer la messe pour lui de façon privée et en écartant le scandale, mais, s’il est ‘à éviter’, uniquement pour sa conversion.
Canon 2263
L’excommunié est écarté des actes ecclésiastiques légitimes dans les limites déterminées par le droit ‘suis in locis’ ; il ne peut être demandeur dans les causes ecclésiastiques sinon en conformité avec le Can. 1654 ; et il lui est interdit d’exercer les offices et charges ecclésiastiques et de jouir des privilèges précédemment accordés par l’Église.
Canon 2264
Tout acte de juridiction, tant du for interne que du for externe, posé par un excommunié est illicite ; s’il y a eu une sentence condamnatoire ou déclaratoire, l’acte est même invalide, sauf ce qui est prescrit au Can. 2261 § 3 ; toutefois avant le prononcé de la sentence, ils sont valides et même licites, s’ils ont été sollicités par les fidèles selon la teneur du Can. 2261 § 2.
Canon 2265
§ 1. Tout excommunié :
1° Ne peut exercer le droit d’élire, de présenter, de nommer.
2° Ne peut obtenir les dignités, offices, bénéfices, pensions ecclésiastiques ou toute autre charge dans l’Église.
3° Ne peut être promu aux ordres.
§ 2. Quant à l’acte posé contrairement aux prescriptions du Par.1 n.1, 2, il n’est pas nul, à moins d’avoir été posé par un excommunié ‘à éviter’ ou par un autre excommunié après une sentence déclaratoire ou condamnatoire ; si une telle sentence a été portée, l’excommunié ne peut en outre obtenir validement aucune grâce pontificale, à moins que le rescrit ne fasse mention de l’excommunication.
Canon 2266
Après une sentence condamnatoire ou déclaratoire, l’excommunié demeure privé des fruits de sa dignité, de son office, de son bénéfice, de sa pension ou de sa charge, s’il en avait dans l’Église ; le ‘à éviter’ est privé de la dignité même, de l’office, du bénéfice, de la pension ou de la charge.
Canon 2267
Les fidèles doivent éviter les relations en matière profane avec le ‘à éviter’, à moins qu’il ne s’agisse du conjoint, des parents, des enfants, des domestiques, des subordonnés, et en général, à moins d’une excuse raisonnable.
Article 2 – L’Interdit
Canon 2268
§ 1. L’interdit est une censure qui prive des fidèles, restant dans la communion de l’Église, des biens sacrés énumérés dans les canons suivants.
§ 2. La prohibition de biens sacrés se fait soit directement par l’interdit personnel, quand l’usage de ces biens est interdit aux personnes elles-mêmes, soit indirectement par l’interdit local, quand la dispensation ou la réception de ces biens est défendue en certains lieux.
Canon 2269
§ 1. L’interdit général, soit local sur le territoire d’un diocèse ou d’un État, soit personnel sur le peuple d’un diocèse ou d’un État, ne peut être porté que par le Siège apostolique ou d’après ses ordres ; mais l’interdit général sur le territoire ou le peuple d’une paroisse, et l’interdit particulier, local ou personnel, peuvent être portés par l’évêque.
§ 2. L’interdit personnel suit partout les personnes ; l’interdit local ne lie pas en dehors du lieu interdit, mais, dans ce lieu, tous, même les étrangers et les exempts, doivent l’observer, ‘sauf privilège spécial’.
Canon 2270
§ 1. L’interdit local général ou particulier ne défend pas d’administrer aux mourants les sacrements et les sacramentaux, en respectant ce qui doit être respecté, mais il défend dans le lieu tout office divin ou tout rite sacré, sauf les exceptions indiquées au Par.2 de ce canon et aux Can. 2271–2272.
§ 2. Aux jours de Noël, de Pâques, de la Pentecôte, du Saint-Sacrement et de l’Assomption, l’interdit local est suspendu ; restent seulement défendues la collation des ordres et la bénédiction solennelle des noces.
Canon 2271
Si le décret ne prend pas expressément d’autres mesures :
1° Il est permis aux clercs, pourvu qu’ils ne soient pas eux-mêmes interdits, d’accomplir tous les offices divins et tous les rites sacrés, d’une manière privée, dans toutes les églises et oratoires, mais les portes fermées, à voix basse et sans sonner les cloches.
2° Dans la cathédrale, dans les églises paroissiales ou dans l’église qui est la seule d’une commune, mais pas ailleurs, le droit permet : la célébration d’une seule messe, la conservation du Saint-Sacrement ; l’administration du baptême, de l’eucharistie, de la pénitence ; l’assistance aux mariages à l’exclusion de la bénédiction nuptiale ; les funérailles, mais sans aucune solennité ; la bénédiction de l’eau baptismale et des saintes huiles ; la prédication de la parole de Dieu. Cependant dans toutes ces fonctions sacrées restent interdits le chant, la somptuosité du matériel et l’usage des cloches, de l’orgue et des autres instruments de musique. Le viatique doit être porté aux malades de façon privée.
Canon 2272
§ 1. Si l’interdit local particulier est porté sur un autel ou une chapelle de quelque église, aucun office divin, ni aucun rite sacré ne peut y être célébré.
§ 2. Si un cimetière est interdit, les corps des fidèles peuvent y être inhumés mais sans aucun rite ecclésiastique
§ 3. Si l’interdit a été porté contre une église déterminée ou un oratoire :
1° Si l’interdit frappe une église capitulaire mais non le chapitre, on applique le Can. 2271 1°, à moins que le décret ne prescrive de célébrer la messe conventuelle et de réciter les heures canoniques dans une autre église ou un autre oratoire.
2° Si une église paroissiale est interdite, il faut observer le Can. 2271 2°, à moins que le décret n’y substitue une autre église pour le temps de l’interdit.
Canon 2273
Lorsqu’une ville est interdite, sont interdits aussi les lieux accessoires, même exempts, et même la cathédrale ; quand une église est interdite, les chapelles contiguës le sont aussi, mais non le cimetière ; lorsqu’une chapelle est interdite, l’église contiguë ne l’est pas ; mais si c’est le cimetière, l’église contiguë est interdite ainsi que les oratoires érigés dans le cimetière.
Canon 2274
§ 1. Si une communauté ou un collège a commis un délit, l’interdit peut être porté soit sur chaque délinquant, soit sur la communauté comme telle, soit à la fois sur les délinquants et la communauté.
§ 2. Dans le premier cas il faut observer le Can. 2275.
§ 3. Dans le second, la communauté ou le collège est privé de tous ses droits spirituels.
§ 4. Dans le troisième cas, il y a cumul des effets.
Canon 2275
Ceux qui sont personnellement interdits :
1° Ne peuvent célébrer les offices divins, ni y assister, sauf aux prédications ; il n’est pas nécessaire d’expulser ceux qui y assistent passivement, mais il faut exclure d’une assistance active, comportant quelque participation à la célébration des offices, les interdits qui ont subi une sentence condamnatoire ou déclaratoire, ou dont la censure est notoire par ailleurs ;
2° Il leur est défendu d’administrer, de produire et de recevoir les sacrements, conformément aux Can. 2260 § 1 et Can. 2261
3° Ils sont soumis aux prescriptions du Can. 2265
4° Ils sont privés de la sépulture ecclésiastique conformément au Can. 1240 § 1 2°.
Canon 2276
Celui qui est soumis à un interdit local ou à un interdit porté contre une communauté ou un collège, sans avoir donné cause à l’interdit et sans être lié par une autre censure, peut, s’il est bien disposé, recevoir les sacrements dans les conditions mentionnées aux canons précédents sans se faire absoudre de l’interdit ou donner une autre satisfaction.
Canon 2277
L’interdit de l’entrée de l’église comprend la défense de célébrer dans une église les offices divins ou d’y assister, ou d’y avoir la sépulture ecclésiastique ; si le coupable assiste aux offices dans une église, il n’est pas nécessaire de l’expulser ; s’il y est inhumé, il n’est pas nécessaire de l’exhumer.
Article 3 – La Suspense
Canon 2278
§ 1. La suspense est une censure qui interdit à un clerc l’usage de son office, ou de son bénéfice, ou les deux.
§ 2. Les effets de la suspense peuvent être séparés ; mais, si rien de contraire n’est dit, dans la suspense décrétée en termes généraux sont compris tous les effets énumérés dans les canons de cet article ; par ailleurs, dans la suspense de l’office ou du bénéfice, sont compris seulement les effets de l’une ou de l’autre.
Canon 2279
§ 1. La suspense dite simplement ‘de l’office’, sans mention d’aucune limite, défend tout acte soit du pouvoir d’ordre et de juridiction, soit même de simple administration découlant de l’office, sauf l’administration des biens du propre bénéfice.
§ 2. La suspense
1° ‘De juridiction’, en général, défend tout acte du pouvoir de juridiction ordinaire ou déléguée pour les deux fors.
2° ‘A divinis’ défend tout acte du pouvoir d’ordre qu’on possède soit par l’ordination, soit par privilège.
3° ‘Des ordres’ défend tout acte du pouvoir d’ordre reçu par l’ordination ;
4° ‘Des ordres sacrés’ défend tout acte du pouvoir d’ordre reçu par l’ordination aux ordres sacrés.
5° ‘D’exercer un certain ordre défini’ défend tous les actes de l’ordre désigné ; de plus il est défendu au clerc suspend de conférer cet ordre, de recevoir un ordre supérieur et d’exercer un ordre reçu après la suspense.
6° ‘De conférer un certain ordre défini’ de conférer cet ordre, non les ordres inférieurs ou supérieurs ;
7° ‘D’un certain ministère défini’ par ex. entendre les confessions ; ou ‘d’un office’, par ex. à charge d’âmes défend tout acte de ce ministère ou de cet office.
8° ‘De l’ordre pontifical’ défend tout acte du pouvoir épiscopal ;
9° ‘Des pontificaux’ défend l’exercice des actes pontificaux définis au Can. 337 § 2
Canon 2280
§ 1. La suspense des ‘bénéfices’ prive des fruits du bénéfice sauf de l’habitation dans la maison bénéficiale, mais non du droit d’administrer les biens bénéficiaux, à moins que le décret ou la sentence de suspense n’enlève expressément au clerc suspens le droit d’administrer pour le confier à un autre
§ 2. Si, malgré la censure, le bénéficier perçoit les fruits, il doit les restituer et il peut être contraint à cette restitution, même, au besoin, par des sanctions canoniques.
Canon 2281
La suspense générale ‘de l’office’ ou ‘du bénéfice’ affecte tous les offices ou bénéfices que le clerc détient dans le diocèse du supérieur qui l’a portée, à moins qu’une autre disposition ne soit manifeste.
Canon 2282
L’Ordinaire du lieu ne peut suspendre un clerc d’un office ou d’un bénéfice déterminé qui se trouve dans un autre diocèse ; mais une suspense ‘latae sententiae’, établie par le droit commun, affecte tous les offices et bénéfices possédés dans n’importe quel diocèse.
Canon 2283
Il faut appliquer à la suspense ce qui est dit de l’excommunication au Can. 2265.
Canon 2284
Si l’on a encouru une suspense défendant l’administration des sacrements et des sacramentaux, il faut observer le Can. 2261. Si la suspense encourue interdit un acte de juridiction, au for externe ou au for interne, l’acte est invalide, par ex. une absolution sacramentelle, s’il y a eu sentence condamnatoire ou déclaratoire, ou si le supérieur déclare expressément qu’il révoque le pouvoir de juridiction ; sinon, il n’est qu’illicite ; il est même licite quand il est demandé par les fidèles conformément au Can. 2261 § 2.
Canon 2285
§ 1. Si une communauté ou un collège de clercs a commis un délit, la suspense peut être portée soit sur chaque délinquant, soit sur la communauté comme telle, soit sur les délinquants et la communauté.
§ 2. Dans le premier cas, on observera les Can. 2278–2285.
§ 3. Dans le second cas, il est défendu à la communauté d’exercer les droits spirituels qu’elle possède comme telle.
§ 4. Dans le troisième cas, on cumule les effets.
Titre 9 – Des peines vindicatives
Canon 2286
Les peines vindicatives sont celles qui tendent à l’expiation du délit, de sorte que leur remise ne dépende pas de la cessation de la contumace du délinquant.
Canon 2287
Contre les peines vindicatives infligées, il y a lieu à un appel ou à un recours suspensif, à moins que le droit n’ait expressément pris une autre disposition.
Canon 2288
Excepté les peines de dégradation, de déposition, de privation de l’office ou du bénéfice, et à moins d’urgente nécessité de réparer le scandale, on laisse à la prudence du juge, si le coupable a commis un délit pour la première fois après une vie irréprochable, de suspendre l’exécution de la peine ordinaire infligée par une sentence condamnatoire, mais à la condition que, si le coupable, au cours des trois années suivantes, commet un autre délit, du même genre ou d’un autre genre, il subira la peine due aux deux délits.
Canon 2289
La peine vindicative cesse, à sa complète exécution ou par la dispense accordée par celui qui, aux termes du Can. 2236 a le pouvoir légitime de dispenser.
Canon 2290
§ 1. Dans les cas occultes plus urgents, si l’observation d’une peine vindicative, ’latae sententiae’, doit, en trahissant le coupable, causer sa diffamation personnelle et du scandale, tout confesseur, au for sacramentel, peut suspendre l’obligation d’observer la peine, en lui enjoignant la charge de recourir au moins dans le mois, par lettre et par confesseur, si cela se peut sans grave inconvénient, et sous un nom fictif, à la S. Pénitencerie ou à un évêque muni du pouvoir nécessaire, et d’exécuter leurs prescriptions.
§ 2. Si dans un cas extraordinaire, ce recours était impossible, le confesseur pourrait lui-même accorder la dispense conformément au Can. 2254 § 3.
Chapitre 1 – Les peines vindicatives communes
Canon 2291
Les peines vindicatives admises dans l’Église et qui peuvent atteindre tous les fidèles selon la gravité de leurs délits sont surtout les suivantes :
1° L’interdit local et l’interdit sur une communauté ou un collège, perpétuel ou pour un temps déterminé, ou au gré du supérieur.
2° L’interdit de l’entrée de l’église, à perpétuité, ou pour un temps déterminé, ou au gré du supérieur ;
3° Le transfert pénal ou la suppression d’un siège épiscopal ou paroissial ;
4° L’infamie de droit ;
5° La privation de la sépulture ecclésiastique, conformément au Can. 1240 § 1.
6° La privation des sacramentaux
7° La privation ou la suspension temporaire d’une pension payée par l’Église ou sur des biens d’Église, ou d’un autre droit ou privilège ecclésiastique.
8° L’exclusion des actes légitimes ecclésiastiques ;
9° L’inhabilité aux faveurs ecclésiastiques, ou aux charges dans l’Église qui n’exigent pas l’état clérical, ou aux grades académiques accordés par l’autorité ecclésiastique ;
10° La privation ou la suspense temporaire d’une charge, d’une faculté ou d’une grâce déjà obtenue ;
11° La privation du droit de préséance, de voix active et passive ou du droit de porter des titres honorifiques, des habits ou insignes accordés par l’Église ;
12° L’amende pécuniaire.
Canon 2292
La suppression ou la translation pénale d’un siège épiscopal est réservée au Souverain pontife ; celle d’un siège paroissial ne peut être décrétée par les Ordinaires des lieux qu’après avis du chapitre.
Canon 2293
§ 1. L’infamie est de droit ou de fait.
§ 2. L’infamie de droit est celle qui est établie dans les cas exprimés par le droit commun.
§ 3. Quelqu’un contracte l’infamie de fait quand, à cause d’un délit ou de ses mauvaises mœurs, il a perdu sa réputation aux yeux des fidèles honnêtes et sérieux, ce dont l’Ordinaire est juge.
§ 4. Aucune des deux n’atteint les parents ou les alliés du coupable, étant sauves les dispositions du Can. 2147 § 2 3°.
Canon 2294
§ 1. Celui qui est frappé d’une infamie de droit est irrégulier, conformément au Can. 984 5° ; de plus, il est inhabile à obtenir des bénéfices, pensions, offices et dignités ecclésiastiques, à exercer les actes légitimes ecclésiastiques, un droit ou un emploi ecclésiastique, et enfin il doit être écarté de tout exercice des fonctions sacrées.
§ 2. Celui qui est frappé par une infamie de fait doit être exclu non seulement de la réception des ordres, conformément au Can. 987 7°, et de celle des dignités, bénéfices et offices ecclésiastiques, mais de l’exercice du saint ministère et des actes légitimes ecclésiastiques.
Canon 2295
L’infamie de droit ne cesse que par une dispense du Siège apostolique. L’infamie de fait cesse lorsque l’estime des fidèles honnêtes et sérieux a été recouvrée, suivant le prudent jugement de l’Ordinaire, qui tiendra compte de toutes les circonstances et surtout du long amendement du coupable.
Canon 2296
§ 1. S’il s’agit de biens pour l’acquisition desquels la capacité est établie par le droit commun, la peine d’inhabilité ne peut être infligée que par le Siège apostolique.
§ 2. Les droits acquis ne se perdent pas à raison d’une inhabilité postérieure, à moins que la peine de la privation ne soit ajoutée à cette inhabilité.
Canon 2297
Les amendes infligées par le droit commun sans détermination d’emploi, et les autres amendes, établies ou à établir par un droit particulier, doivent être affectées par les Ordinaires des lieux à des œuvres pies et non au profit de la mense épiscopale ou capitulaire.
Chapitre 2 – Les peines vindicatives propres aux clercs
Canon 2298
Les peines vindicatives applicables seulement aux clercs sont :
1° La défense d’exercer le saint ministère, sauf dans une église déterminée ;
2° La suspense à perpétuité ou pour un temps fixé, ou au gré du supérieur ;
3° Le transfert pénal d’un office ou d’un bénéfice à un office ou un bénéfice inférieur ;
4° La privation d’un droit uni à l’office ou au bénéfice ;
5° L’inhabilité totale ou partielle, aux dignités, offices, bénéfices ou autres fonctions propres aux clercs.
6° La privation pénale d’un office ou bénéfice, avec ou sans pension ;
7° La défense de séjourner dans un lieu ou un territoire déterminé.
8° La prescription de séjourner dans un lieu ou un territoire déterminé.
9° La privation temporaire de l’habit ecclésiastique ;
10° La déposition ;
11° La privation perpétuelle de l’habit ecclésiastique ;
12° La dégradation.
Canon 2299
§ 1. Si un clerc est pourvu d’un bénéfice inamovible, il ne peut en être privé par peine que dans les cas exprimés par le droit ; s’il s’agit d’un bénéfice amovible, la privation peut lui en être imposée aussi pour d’autres causes raisonnables.
§ 2. Aux clercs qui possèdent des bénéfices, offices, dignités, on peut interdire, pour un temps déterminé, un ministère attaché à leur charge, par ex. celui de la prédication ou de la confession.
§ 3. Un clerc ne sera pas privé du bénéfice ou de la pension qui constitue son titre d’ordination, à moins qu’on ne pourvoie autrement à son honnête subsistance, en tenant compte des Can. 2303–2304.
Canon 2300
Si un clerc cause de graves scandales et ne s’amende pas après monition, si, de plus, il n’y a pas d’autre moyen d’écarter le scandale, on pourra le priver pour un temps du droit de porter l’habit ecclésiastique ; aussi longtemps que dure cette privation, elle entraîne la défense d’exercer aucun ministère ecclésiastique et la privation des privilèges cléricaux.
Canon 2301
L’ordinaire ne peut prescrire à un clerc de séjourner dans un lieu déterminé, en dehors de son diocèse, sans le consentement de l’Ordinaire de ce lieu, à moins qu’il ne s’agisse d’une maison de pénitence ou d’amendement, destinée aux clercs même des autres diocèses ou, si le supérieur y consent, d’une maison religieuse exempte.
Canon 2302
La prescription ou la défense de séjourner dans un lieu déterminé, l’obligation de demeurer dans une maison de pénitence ou une maison religieuse, surtout si cela doit durer longtemps, ne peuvent être imposées que dans des cas graves, lorsque ces peines, au jugement prudent de l’Ordinaire, sont nécessaires pour l’amendement du clerc et la réparation du scandale.
Canon 2303
§ 1. La déposition, en laissant subsister les obligations résultant de l’ordre reçu et les privilèges cléricaux, entraîne non seulement la suspense ‘d’office’, et l’inhabilité à n’importe quel office, dignité, bénéfice, pension, charge dans l’Église, mais encore la privation de ceux dont le coupable était pourvu, même s’ils constituaient son titre d’ordination.
§ 2. Mais dans ce dernier cas, si le clerc est vraiment indigent, l’Ordinaire aura soin, par charité, de pourvoir à son entretien, pour qu’il ne soit pas réduit à mendier, au déshonneur de l’état ecclésiastique.
§ 3. La peine de la déposition ne peut être infligée que dans les cas expressément prévus dans le droit.
Canon 2304
§ 1. Si le clerc déposé ne présente pas de signes d’amendement, et surtout s’il continue à causer du scandale et à ne pas tenir compte de la monition reçue, l’Ordinaire peut le priver à perpétuité du droit de porter l’habit ecclésiastique.
§ 2. Cette peine entraîne la privation des privilèges cléricaux et la cessation de la prescription du Can. 2303 § 2.
Canon 2305
§ 1. La dégradation comprend la déposition, la privation perpétuelle de l’habit ecclésiastique et la réduction du clerc à l’état laïque.
§ 2. Cette peine ne peut être portée qu’à cause d’un délit expressément mentionné dans le droit ou si le clerc, déjà déposé et privé de l’habit ecclésiastique continue à causer un grave scandale pendant un an.
§ 3. On appelle dégradation verbale ou par édit, celle qui est infligée uniquement par sentence judiciaire, mais produit immédiatement tous ses effets juridiques sans aucune exécution ; est dite réelle la dégradation où l’on observe tous les rites solennels prescrits dans le pontifical romain.
Titre 10 – Des remèdes pénaux et des pénitences
Chapitre 1 – Remèdes pénaux
Canon 2306
Les remèdes pénaux sont :
1° La monition ;
2° La correction ou réprimande ;
3° Le précepte ;
4° La mise en surveillance.
Canon 2307
Celui qui se trouve dans l’occasion prochaine de commettre un délit ou qui, après enquête, est gravement soupçonné d’en avoir commis un, sera averti par l’Ordinaire lui-même ou par personne interposée.
Canon 2308
Si la conduite de quelqu’un cause du scandale ou trouble gravement l’ordre public, il y a lieu à une correction, que l’Ordinaire donnera lui-même ou par personne interposée ou même par lettre, en l’adaptant aux conditions particulières de la personne et aux circonstances du fait.
Canon 2309
§ 1. La monition comme la correction peut être publique ou secrète.
§ 2. La correction ou la monition publique doit se faire en présence d’un notaire ou de deux témoins, ou par lettre, mais de telle façon qu’un document fasse constater la réception et la teneur de la lettre.
§ 3. La correction publique ne peut être donnée qu’à un coupable déjà convaincu du délit ou qui en a fait l’aveu ; elle est judiciaire, si elle est donnée par le juge siégeant au tribunal, ou par l’Ordinaire avant le procès criminel.
§ 4. La correction judiciaire tantôt tient lieu de peine, tantôt a pour but d’aggraver la peine, surtout s’il s’agit d’un récidiviste.
§ 5. Même si la monition et la correction ont été secrètes, il faut les constater par un document gardé dans les archives secrètes.
§ 6. La correction ou la monition peuvent se faire une ou plusieurs fois, suivant la décision prudente du supérieur.
Canon 2310
Si les monitions et corrections ont été faites sans fruit, ou si on ne peut espérer qu’elles produisent un effet, le précepte peut prendre place indiquant exactement ce que le prévenu doit faire ou éviter, avec la menace d’une peine en cas de transgression.
Canon 2311
§ 1. Si la gravité du cas le comporte, et surtout s’il s’agit de quelqu’un en danger de retomber dans le même crime, que l’Ordinaire le soumette à la surveillance.
§ 2. La surveillance peut aussi être prescrite pour aggraver la peine surtout à l’égard des récidivistes.
Chapitre 2 – Les pénitences
Canon 2312
§ 1. Au for externe, les pénitences sont imposées soit pour que le délinquant échappe à la peine, soit pour qu’il reçoive l’absolution ou la dispense de la peine déjà contractée.
§ 2. Qu’on n’impose jamais une pénitence publique pour un délit ou une transgression occulte.
§ 3. Les pénitences doivent être proportionnées moins à la grandeur du délit qu’à la contrition du coupable, et il faut tenir compte des qualités des personnes et des circonstances du délit.
Canon 2313
§ 1. Les principales pénitences sont les préceptes :
1° De réciter des prières déterminées ;
2° D’accomplir un pieux pèlerinage ou d’autres œuvres de piété ;
3° D’observer un jeûne particulier ;
4° De consacrer des aumônes à de pieux usages
5° De faire les exercices spirituels pendant quelques jours dans une maison pieuse ou religieuse.
§ 2. L’Ordinaire peut prudemment ajouter des pénitences au remède pénal de la monition ou de la correction.