Il ne suffit pas de s’aimer pour se comprendre !
Dans le mariage, comme dans toute autre relation, chercher à se connaître et à connaître l’autre est nécessaire pour mieux se comprendre et mieux vivre.
L’amour des époux implique leur compréhension mutuelle. Mais il ne suffit pas de s’aimer pour se comprendre ! Si nous avons tant de peine à nous comprendre nous-mêmes, comment espérer que des époux puissent se comprendre, s’ils ne se sont pas exercés depuis longtemps à l’observation ?
Il est clair qu’observer les autres peut se faire pour des raisons totalement opposées. Ainsi on peut observer égoïstement en vue de tourner à son profit les connaissances acquises. C’est le cas des hommes qui s’appliquent à connaître la femme pour la séduire, ou des femmes qui cherchent à découvrir les faiblesses des hommes pour les plier à leurs caprices. L’intention est alors malicieuse et vise un connaissance intéressée. Mais on peut aussi rechercher un connaissance désintéressée en vue d’aider et de soutenir. C’est le cas de l’éducateur qui s’applique à mieux connaître l’enfant pour mieux s’en occuper, et celui des époux qui cherchent à mieux se connaître pour mieux se comprendre et mieux vivre.
C’est cette connaissance désintéressée qui est si nécessaire à la vie conjugale pour faire du bien à son conjoint. Et comme aimer, c’est vouloir et faire le bien de l’autre, la charité jouera un rôle essentiel dans cette observation et dans cette compréhension mutuelle. Sans la charité, pas de compréhension mutuelle intime : on restera à la surface des cœurs ! Pourquoi cela ? Parce que c’est la charité qui nous détache de nous-mêmes, nous met dans des dispositions de sympathie, et nous aide à pénétrer les vrais besoins du conjoint, à les deviner et même à les anticiper : il vaut mieux prévenir que guérir ! C’est la charité qui nous aide aussi à trouver les remèdes appropriés à ses difficultés, à ses peines et à ses souffrances. Elle pousse à se mettre en quatre !
Voilà pourquoi ceux qui se connaissent eux-mêmes et luttent contre leurs défauts pour devenir meilleurs, et ceux qui cherchent à connaître les autres pour leur faire du bien, seront particulièrement préparés à la bonne entente conjugale. Ils seront plus aptes à comprendre et à aider car ils savent s’oublier, c’est-à-dire que dès qu’il le faut, ils savent renoncer à leur égoïsme et aller vers l’autre pour s’intéresser à lui.
Dans la vie conjugale, il y a des heures difficiles où rester attentif à l’autre est très important. Par exemple, quand l’un des époux souffre sans que l’autre s’en aperçoive. Cette ignorance, coupable ou non, peut l’amener à se considérer comme victime de l’indifférence du conjoint et lui causer de l’amertume qui peut aller jusqu’à l’hostilité : « décidément, il ne voit jamais rien, il me laisse seule dans ma douleur, il me le paiera ! » ; « décidément, elle ne s’intéresse pas à moi, elle ne pense qu’aux enfants et à la maison… mais je compte moi aussi ! » Seuls ceux qui sont habitués à chercher un remède aux souffrances d’autrui seront capables de découvrir le mal et d’y apporter un soulagement. C’est ici une charité attentive qui fait discerner la souffrance de l’autre et en tenir compte en rectifiant son attitude. Que gagnent d’ailleurs les conjoints à s’en vouloir, et à nourrir obstinément un ressentiment envers l’autre ? Rien !
Autre exemple : les heures après une dispute. Elles sont des occasions dangereuses pour le ménage parce qu’elles portent chaque époux à se replier sur soi-même et à bouder, à ignorer l’autre et à renoncer à le comprendre, au lieu de chercher à se réconcilier en trouvant lumière et apaisement auprès de son conjoint. Qu’ils s’habituent à se vaincre et ils domineront alors cette tentation ; ils chercheront à mieux comprendre l’autre en ne permettant pas que la passion de l’égoïsme l’emporte sur la raison et sur l’amour ! C’est encore là une charité attentive, qui aime le conjoint sans l’utiliser, qui sait comprendre ses griefs et en tenir compte en rectifiant notre attitude. Que gagnent les conjoints à se battre froid pendant des jours et des jours ? Rien ! Que les époux travaillent donc à l’unisson à une meilleure compréhension mutuelle, capable de dissiper les malentendus, de remédier aux souffrances et aux indifférences, et d’œuvrer aux réconciliations par des dispositions de bonne volonté et de charité attentive.
Source : Apostol n° 171