La crémation ou incinération est un rite funéraire qui consiste à brûler ou à réduire en cendres les cadavres des morts.
Quel est le problème qui se pose alors ?
L’incinération est une pratique qui s’oppose à ce que l’Eglise a toujours fait depuis deux mille ans en pratiquant l’inhumation : les cadavres sont déposés en terre et leur décomposition se fait selon les lois de la nature.
Finalement cela ne revient-il pas au même puisque dans tous les cas le corps est censé retourné en poussière ?
Certes, le résultat est le même. Mais le procédé diffère. Dans un cas il est naturel (inhumation) dans l’autre il est hâtif et brutal (incinération). Mais ce n’est pas là que réside le fond du problème. Ces deux pratiques révèlent deux mentalités différentes.
Qu’entendez-vous par mentalité ?
Il faut comprendre par là que la façon d’agir révèle une façon de penser. Il est d’ailleurs intéressant de noter que dans les civilisations antiques grecques et romaines (et d’autres encore) l’inhumation était de coutume car les hommes croyaient à une vie après la mort. En Grèce tout particulièrement, la crémation a été introduite lorsque l’on n’a plus cru à la survivance de l’âme. En un mot donc, les cérémonies funéraires sont liées aux conceptions de la mort et de la vie après la mort. C’est pourquoi, dans l’Ancien Testament, on ne trouve aucun rite d’incinération. La loi mosaïque ordonnait même d’ensevelir les ennemis. C’est aussi la tradition dans le Nouveau Testament. On ne trouve absolument aucune trace de pratique de crémation dans la chrétienté. Il faut attendre la fin du XIIIe siècle pour voir quelques chrétiens demander l’incinération. Le pape Boniface VIII s’est élevé avec beaucoup de véhémence contre ces pratiques.
S’il ne s’agit que de mentalité, alors vous voulez peut-être dire que l’incinération n’est pas un mal, mais que l’inhumation est préférable ?
Exactement. En soi, la crémation ne s’oppose pas directement aux dogmes de la survivance de l’âme et de la résurrection des corps. D’ailleurs, il est des cas (comme celui de la contagion) où l’Eglise a permis l’incinération. Le Bon Dieu n’est pas limité par les pratiques humaines et la crémation ne peut être en aucun cas une entrave à sa toute-puissance. Mais ce n’est pas parce qu’une pratique n’est pas absolument mauvaise de soi qu’elle convient de fait. Et il faut bien dire que la crémation est très
inconvenante. Et ce qui convient hautement doit toujours être préféré à ce qui est très inconvenant.
Pourquoi alors vous opposez-vous à l’incinération ?
Il est nécessaire de remettre cette pratique dans son contexte historique. Il fallut attendre en effet la révolution dite française pour qu’un rapport en faveur de la crémation fût présenté à la chambre des Cinq-Cents (novembre 1796). Rapport qui d’ailleurs resta lettre morte ! Mais l’idée continua de faire son chemin parmi les révolutionnaires. Ce sont les sociétés maçonniques qui finirent par obtenir de certains gouvernement cette pratique de l’incinération. On est à la fin du XIXe siècle. Les premières pratiques furent exécutées en Italie dans les années 1870. En France un amendement est publié en 1886. Puis cette pratique s’étendit à travers l’Europe. Or toutes ces sociétés ont promu l’incinération pour s’opposer à la pratique de l’Eglise, et par là indirectement mais sournoisement et réellement aux dogmes des fins dernières. Voilà pourquoi l’Eglise s’est dressé très vivement contre ces sectateurs anti-chrétiens.
En quoi donc l’inhumation est-elle préférable ?
D’abord elle est la pratique constante de l’Eglise, et ce fait n’est pas négligeable. La sagesse de l’Eglise s’exprime particulièrement dans cette constance à travers le temps. Cette constante tient au fait que l’inhumation signifie le mieux les dogmes des fins dernières. Toute la liturgie des défunts parle de repos éternel et de sommeil en attendant la résurrection des morts. Cette attente est bien signifiée par l’ensevelissement. L’Eglise a aussi toujours respecté et honoré les corps de ses fidèles. La liturgie prévoit dans la cérémonie de l’absoute l’aspersion et l’encensement du corps. En effet, le corps a été marqué des onctions saintes, il a été sur terre le temple de Saint-Esprit, a participé aux bonnes œuvres et a été finalement l’instrument du salut. C’est ce même corps qui a reçu l’eucharistie, semence d’éternité. Il serait inconvenant et irrespectueux de traiter brutalement le corps par l’incinération. Enfin, la pratique de l’inhumation est davantage un motif de consolation et d’espérance pour ceux qui restent. On voit mal comment un corps qui a fait l’objet d’affection, de piété ou d’amitié puisse être traité par la crémation qui est une destruction hâtive et brutale.
C’est pour toute ces raisons que l’Eglise, mère et maitresse de vie, a légiféré en la matière. Léon XIII tout d’abord s’est élevé avec beaucoup de force contre la crémation. Saint Pie X ensuite, dans le code de droit canonique a réprouvé ce rite allant même jusqu’à porter des peines contre les catholiques qui auraient demandé l’incinération.
Ne croyez-vous pas que l’Eglise pourrait changer sa discipline en la matière ?
Il est toujours possible à l’Eglise de changer certaines pratiques. Mais les arguments de convenance que nous avons donnés en faveur de l’inhumation ainsi que le contexte bien précis et anti-chrétien lié à l’expansion de l’incinération sont des arguments de poids pour l’Eglise à demeurer dans sa tradition inchangée.
Depuis vingt siècle L’Eglise a toujours défendu l’inhumation, et elle a encore plus d’intérêt à le faire aujourd’hui, à une époque où les mentalités sont de plus en plus changeantes, où la foi s’amenuise sur la terre, où les conceptions erronées des dogmes vont bon train dans le monde entier. Face à un monde de plus en plus hostile au christianisme, l’Eglise, en permettant l’incinération, fruit des loges maçonniques, se ferait la complice de ces mêmes loges et trahirait sa mission de préserver ses fidèles de la contagion du péché et de l’erreur.
Pour résumer en une phrase célèbre, on pourrait dire qu’à force de ne plus vivre comme on pense, on finit par penser comme on vit. Ainsi, à force d’estomper les vérités des fins dernières par la pratique de l’incinération, on finit par les nier.
Abbé Gabriel Billecocq, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X