Chers fidèles,
Combien de fois avons-nous écouté le magnifique sermon que Monseigneur Lefebvre prononça lors de son jubilé sacerdotal ? Qui d’entre nous n’a pas été frappé par cette vibrante apologie de l’efficacité de la messe dont Monseigneur nous raconte comment il l’a vue, en Afrique, opérant des merveilles dans les cœurs et dans les sociétés ? Ce sermon s’achève par un appel solennel à la croisade pour que le Christ-Roi, à nouveau, règne sur nos pays.
C’est à cette occasion que Monseigneur s’est adressé aux chefs de famille en des termes justement demeurés célèbres :
« Vous avez une grave responsabilité dans votre pays. Vous n’avez pas le droit de laisser votre pays envahi par le socialisme et le communisme. Vous n’en avez pas le droit ou vous n’êtes plus catholiques. Vous devez militer au moment des élections pour avoir des maires catholiques. (…) Chefs de famille, c’est vous qui êtes responsables de cela, pour vos enfants, pour les générations qui viennent. Vous devriez vous organiser, vous réunir, vous entendre pour arriver à ce que la France redevienne chrétienne, redevienne catholique… ».
Trente ans se sont écoulés depuis cette solennelle mise en demeure pontificale. Où en sommes-nous cependant de la réponse que nous lui avons donnée ? Qu’avons-nous fait de ces paroles ?
Certes, nous n’avons pas perdu notre temps ! Le combat de la messe, la construction et l’aménagement des chapelles, des prieurés et des écoles étaient de première nécessité et ont demandé d’immenses énergies. Il faut saluer la vigueur avec laquelle cette première lutte a été menée ainsi que les magnifiques résultats effectivement produits par la messe au milieu de ces ruines et de ces décombres.
Si notre but est bien de continuer à étendre ce maillage et d’enraciner toujours plus profondément notre œuvre d’Eglise en France, comment ne pas nous préoccuper aussi et ne pas nous inquiéter en même temps de constater que le nombre d’hommes vraiment catholiques, fermement décidés à agir comme tels, même dans les simples municipalités, ne cesse de diminuer ? Il faut bien admettre que la conservation ou la résurrection de notre petit tissu de chrétienté n’a pas été accompagnée par un effort nettement, résolument catholique, d’action politique.
Notre fondateur pouvait-il cependant être plus explicite pour exprimer sa ferme volonté qu’en parlant aussi sévèrement :
« Vous n’avez pas le droit de laisser votre pays envahi par le socialisme et le communisme. Vous n’en avez pas le droit ou vous n’êtes plus catholiques. Vous devez militer au moment des élections pour avoir des maires catholiques…» ?
Il ne faut pas se voiler la face : le constat est là, terrible. Lors des dernières élections présidentielles pas une seule fois le nom de Dieu n’a été prononcé ; ne parlons même pas de celui de Notre-Seigneur : il est banni des discours des candidats à la présidence. Notre pays n’a rien à envier aux républiques communistes à l’athéisme militant.
Dans quelques mois auront lieu les élections municipales et sans doute verrons-nous les musulmans pénétrer en force dans les conseils municipaux. C’est le nom d’un autre « Dieu » qui commencera à être prononcé par de nouveaux élus moins timorés. Les catholiques se lamenteront devant une si triste situation..
Est-il donc impossible que certains de nos meilleurs fidèles essaient de se lancer dans le combat politique local ? Ou pensons-nous que l’avertissement de Monseigneur Lefebvre est irréalisable et que ce vœu pieux, après avoir été religieusement écouté, est destiné à demeurer indéfiniment lettre morte ? Ou cette action est-elle dédaignée parce qu’elle nous paraît trop modeste ? En ce dernier cas, il serait alors plus honnête de cesser de faire passer l’enregistrement de ce sermon…
S’investir dans l’administration des communes, dont la grande majorité est de petite taille, est une action politique vraiment réalisable, utile et formatrice pour apprendre le métier politique. Il existe encore un certain nombre d’élus municipaux catholiques qui se trouvent en place. Leur nombre ne cesse cependant de diminuer de telle manière que l’on peut réellement craindre, sans notre soutien et nos encouragements, que l’on finisse par voir disparaître les derniers.
Il faut que nous inspirions aux catholiques la volonté de ne plus rien lâcher du terrain et des positions qu’il leur reste et, avec la grâce de Dieu, qu’ils aient la volonté d’en conquérir ou d’en reconquérir de nouvelles, aussi modestes qu’elles soient. Ne croyons pas que cet investissement soit de peu d’utilité. Nous en connaissons encore, certains de ces élus municipaux catholiques, qui font un bien véritable dans leur commune : leur seule présence au conseil municipal suffit déjà pour qu’on ne parle plus de la religion avec le mépris qu’il est de bon ton d’adopter aujourd’hui ; l’affichage sauvage de publicités immorales est évité et, si le prieuré ou une chapelle se trouvent sur le terrain de cette municipalité, les relations avec la commune s’en trouvent souvent bien facilitées.
On dira peut-être que ce n’est pas grand-chose : c’est pourtant déjà un premier effet, même s’il demeure encore faible, de l’action de Notre-Seigneur dans la cité. Si d’autres catholiques y sont élus, pourquoi cette influence n’augmenterait-t-elle pas davantage ? Et si l’un de ces élus devient maire ?
Faut-il compter pour rien que certains maires soient allés jusqu’à consacrer leurs villages au Sacré-Cœur ? Nul besoin de devoir rentrer dans un parti politique pour accomplir cette besogne dans sa commune. Et, s’il finissait par y avoir une centaine de maires en France, catholiques convaincus, adeptes réguliers des Exercices, reconnus de la population locale pour leurs qualités, cela n’aurait-il aucun poids pour l’avenir ?
Nous pensons que, dans de nombreuses municipalités, quelques catholiques, convaincus, généreux, ne comptant ni leur peine ni leur temps, peuvent véritablement coopérer au règne du Christ Roi, petitement et imparfaitement sans doute, mais d’une manière réelle et efficace.
Bien sûr, l’action politique locale que nous préconisons ne transformera pas d’un seul coup notre société laïque en société chrétienne. Mais tout est possible à Dieu. Cette action sera longue, très longue avant de porter des fruits et d’aboutir à une influence réelle sur les destinées du pays. Elle donnera l’habitude de la chose politique, des rouages de l’administration, des pièges à éviter et des difficultés à surmonter. Elle préparera les meilleurs à des fonctions plus hautes si telle est la volonté de Dieu. Petit à petit, d’un simple mandat local, certains pourront être appelés à des responsabilités plus importantes avec une influence qui pourra être réelle dans la mesure elle est le fruit d’un enracinement sur le terrain.
Ne rien faire, « se retirer sous sa tente », attendre un hypothétique grand monarque et chercher à ne protéger que sa famille et sa chapelle sont des comportements qui annoncent la mort. Nos ennemis cherchent à effacer jusqu’au souvenir de la Fille aînée de l’Eglise, et, s’ils ne peuvent encore y arriver entièrement aujourd’hui, demain, si les catholiques finissent d’abandonner ce terrain, ce seront nos écoles, nos prieurés, nos familles qui seront menacés de disparition. Devons-nous nous laisser éliminer sans combattre ? Ce serait oublier la belle histoire des Maccabées.
Aussi j’encourage les hommes pieux, instruits, courageux et habiles à mener ce combat des élections municipales prochaines. Apprenez aussi à connaître les élus catholiques qui, dans votre région, mènent ce combat afin de les soutenir.
Nous cherchons, quant à nous, à vous apporter le soutien spirituel pour que vous teniez bon dans ce combat et nous voulons vous apporter l’éclairage que procure la formation à la doctrine de l’Église qui est la seule charte de combat d’un catholique dans la cité.
Nous ne nous reconnaissons dans aucun parti et nous ne sommes d’aucun parti sinon du parti de Notre-Seigneur. Nous sommes persuadés que « le suffrage universel est le mensonge universel » et que la reconquête de notre pays à Notre-Seigneur ne viendra pas de l’addition des bulletins dans les urnes.
Voilà pourquoi, nous affirmons nos préférences pour le combat politique local où les méfaits du suffrage universel sont atténués par la plus grande connaissance que l’on a des hommes, des nécessités et des intérêts locaux.
Je vous souhaite, dans cette perspective, une bonne et sainte année 2008 dans le Cœur Douloureux et Immaculé de Marie.
Abbé Régis de Cacqueray-Valménier, Supérieur du District de France