13 avril 2006
La capitulation des évêques de France par Jean Molard, 13 avril 2006 – Golias
Les évêques de France se sont réunis à Lourdes en Assemblée Générale et le 7 avril 2006 les conclusions ont été publiées (voir le site internet de l’épiscopat).
Le premier point porte sur la réforme des structures de la conférence, et le troisième sur « le malaise de la jeunesse comme révélateur d’une crise profonde de notre société ». C’est le deuxième point qui retient aujourd’hui notre attention, car nous y avons vu une nouvelle avancée de la « lefebvrisation » de l’Eglise .
Il est intitulé : « L’accueil des groupes « traditionalistes » au sein de nos diocèses ». OUI, les autorités ecclésiastiques, romaines et maintenant françaises, ont fait le choix dangereux de réintégrer les intégristes de tout poil, prenant le risque de tensions fortes à l’intérieur des communautés paroissiales et autres. Ces fils de Lefebvre et de l’Extrême-Droite réunis ne sont pas des brebis égarées, regrettant leurs erreurs, ce sont des activistes qui reviennent en conquérants et en croisés pour rebâtir l’Eglise selon leurs convictions profondes. Et leurs convictions profondes, clairement exposées dans leur littérature, ont de quoi faire peur.
Pour prendre conscience de cette capitulation sans conditions devant l’extrémisme religieux, il suffit de lire les conclusions des évêques de France dont nous citons les passages les plus instructifs :
« … Depuis plus de 15 ans, la situation a beaucoup évolué. Des demandes nouvelles sont apparues, des sociétés de prêtres nouvelles se sont présentées pour se mettre au service de ces groupes, des jeunes sont entrés dans leurs séminaires, des écoles privées prises en charge directement par des parents se sont créées. Chaque évêque a dû faire face pastoralement à cette situation en constante évolution. Notre échange a montré que beaucoup portaient la préoccupation de bien articuler l’accueil des diversités liturgiques et d’animations ecclésiales, sans pour autant contribuer à faire naître des Eglises parallèles qui n’auraient pas de lien entre elles. Nous sentons qu’il y a là un enjeu ecclésiologique et pastoral important. Nous sommes prêts comme évêques à nous engager dans ce vrai travail de communion. C’est pourquoi la mise en place d’une structure juridique qui risquerait de distendre les liens de ces fidèles avec leur pleine appartenance à leur Eglise diocésaine ne nous paraît pas opportune « .
Que veut dire la dernière phrase, sinon que, au nom de la communion, la porte va s’ouvrir à tous les tradis jusqu’alors maintenus sur les bords par « une structure juridique ».
Ils vont être intégrés dans les paroisses, les écoles, les séminaires, les prêtres (nombreux) vont rejoindre et noyauter le clergé des paroisses et des aumôneries. Le processus est déjà bien enclenché pour les ralliés de la Fraternité Saint Pierre.
Demain, ce seront les lefebvristes dont le retour, pratiquement sans condition, est annoncé. Ils n’auront plus besoin de squatter des églises, M. le Cardinal Ricard et ses confrères évêques leur ouvrent les portes et leur remettent les clés du bercail. Il est envisageable donc que le célèbre Abbé Laguérie devienne curé de Notre Dame de Paris, que l’abbé Cottard soit désigné aumônier national des Scouts de France et que le très chrétien et très frontiste Bernard Anthony soit nommé directeur de la Croix, tout cela, bien évidemment, au nom de l’unité de l’Eglise et de la fidélité à Benoît XVI.
On exagère ? Sans doute un peu pour l’immédiat, mais lisez ce qui suit et vous comprendrez qu’avec le retour de ces activistes, on se rapproche du domaine du possible, surtout en l’absence des « structures juridiques »(1) signalées plus haut et qui constituent tout de même un minimum de barrières sanitaires. Toujours dans les conclusions, le cardinal Ricard poursuit :
« Les évêques « mettront en œuvre fidèlement » les directives de Benoît XVI. « La question des relations avec la Fraternité Saint Pie X mérite un traitement particulier. Nous savons que le pape Benoît XVI en porte le souci. Dans les semaines ou les mois qui viennent, il devrait donner des directives pour faciliter le chemin vers un retour possible à une pleine communion. Nous les accueillerons dans la foi et les mettrons en ouvre fidèlement « … Cette communion doit être recherchée dans la charité et la vérité. La charité implique qu’on cherche à se connaître, à se comprendre, à faire disparaître les images fausses que l’on peut avoir les uns des autres. Elle implique également l’abandon de toute polémique systématique et de toute volonté de confrontation sur le terrain. La vérité implique qu’on soit au clair sur nos points de dissension. Ceux-ci portent moins d’ailleurs sur les questions de liturgie que sur celles de l’accueil du magistère, tout particulièrement de celui du concile Vatican II et des papes des dernières décennies. La communion peut s’accompagner de questions, de demandes de précisions ou d’approfondissement. Elle ne saurait tolérer un refus systématique du Concile, une critique de son enseignement et un dénigrement de la réforme que le Concile a décrétée. Certes des abus ont pu voir le jour dans les années qui ont suivi le Concile : certains ont pu se réclamer d’un « esprit du Concile » qui n’avait pas grand chose à voir avec lui, comme l’a souligné le pape Benoît XVI dans son discours à la Curie du 22 décembre dernier. Mais il ne faut pas oublier tous ces prêtres religieux, religieuses et laïcs, qui ont mis en ouvre, avec sagesse et sens apostolique, les réformes conciliaires et ont contribué à la réception en profondeur du Concile dans l’Eglise. Il est important de leur dire aujourd’hui toute notre reconnaissance ».
Cette finale est sans aucune ambiguïté : en dénonçant les « abus » qui ont suivi le concile, le texte épiscopal veut absoudre les intégristes : il faut les comprendre, les malheureux, ils ont été poussés au « schisme », par la faute des « progressistes ».
Nos évêques oublient simplement que pendant les débats du Concile, donc avant tout abus, Mgr Lefebvre s’était déjà fait remarquer par son opposition farouche à toute ouverture de l’Eglise…
Poursuivant le largage de l’avancée et de l’ouverture conciliaires, nos évêques adressent un petit salut, en guise de coup de pied de l’âne, à tous ceux qui ont mis en ouvre le concile « avec sagesse et sens apostolique ». Cette « reconnaissance », comme ils l’appellent, est particulièrement odieuse.
Elle ressemble à un hommage rendu à des gens dont l’entreprise veut se débarrasser pour mettre à leur place ceux qui apparaissent comme les seuls capables de remettre les chrétiens à genoux devant Dieu et à plat ventre devant les clercs : Merci, vous avez fait, en votre temps, du bon boulot, mais on n’a plus besoin de vous. Lâchez les manettes, rentrez chez vous, une nouvelle équipe attend pour prendre le manche.
A quand la canonisation de Lefebvre (il vient pourtant de réussir son premier miracle) ?
A quand Mgr Fellay sur le siège archiépiscopal de Bordeaux, et pourquoi pas au poste de Président de la Conférence des évêques de France ? Si devant tant de naïveté et de démissions épiscopales, les chrétiens, fiers de leur Dieu de liberté et d’ouverture, ne réagissent pas, l’Eglise va retourner au XIXe siècle. Mais elle n’aura plus l’adhésion des masses. Elle ne sera plus qu’une secte assise sur un fondamentalisme prétendument doctrinal, comme il y en a déjà tant en Amérique.
QUELLE TRISTESSE EN CETTE PÂQUES 2006 !
Indulgence pour la messe St Pie V – Christian Terras, 13 avril 2006 – Golias
D’après une source du Saint-Sièg,e le pape Benoît XVI s’apprête à donner l’indulgence universelle pour la messe de St Pie V, le rite de célébration liturgique qui avait cours avant le Concile Vatican II.
L’ANNONCE de cette mesure se ferait entre le Jeudi-saint (jour même où on célèbre l’institution de l’eucharistie) et Pâque, fête de la Résurrection.
Pour le pape ce geste officiel permettra que cette messe soit célébrée par ceux qui le désirent, rappelant que ce rite est toujours valide même s’il a été moins pratiqué ces dernières années et qu’en tout état de cause, ce rite n’est pas aboli. Cette annonce est à situer dans le contexte de la « réforme de la réforme » (liturgique), qu’impulse actuellement Benoît XVI et dont on trouvera les grandes lignes d’action dans sa prochaine Exhortation Apostolique post synodal sur l’eucharistie en octobre prochain. Un geste d’une grande importance puisqu’il permettrait ainsi de mettre fin au schisme lefebvristes (1988) avec la réintégration des prêtres et des évêques de la Fraternité St Pie X dans le giron de l’Eglise catholique.
Rappelons que la Commission Pontificale « Ecclesia Dei » (chargée de la réintégration des intégristes), organisme présidé par le cardinal colombien Castrillon Hoyos, très proche de Mgr Fellay, le leader des intégristes, s’est enrichie de trois nouveaux membres : le cardinal américain Levada, patron de la congrégation pour la Doctrine de la foi, le cardinal espagnol de Tolède, Mgr Canizares et… le cardinal français Jean Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux.
La boucle est bouclée…
Bientôt le retour du latin dans la liturgie
Le pape Benoît XVI recevra en juin prochain la proposition finale du Synode des Evêques en vue de la préparation de son exhortation apostolique post synodale sur l’Eucharistie, dans laquelle il demandera à réintroduire le latin à la messe et une plus grande solennité dans les célébrations litugiques. La commission des douze cardinaux et évêques présidée par le secrétaire du Synode, l’archevêque Nicolas Eterovic, se réunira en juin pour présenter au souverain pontife une proposition finale sur la base des cinquante propositions qui ont conlu le synode des Evêques.
Selon une source au Vatican, la commission approuvera « une proposition et uns chéma de réforme liturgique », qui sera publiée dans le cadre de l’exhortation apostolique que Benoît XVI publiera en octobre prochain.
Ce document pontifical, toujours selon la même source, contiendra une invitation à un plus grand usage du latin dans la prière quotidienne de l’Eglise, et la liturgie dominicale – excepté la liturgie de la Parole ; consigne qui s’appliquera aussi aux grands messes internationales.
L’exhortation inciterait aussi à donner une plus grande place au chant gérgorien et à la musique polyphonique classique ; elle conseillera l’élimination de l’usage des chants profanes,que ce soit sur le plan musical ou littéraire, ainsi que les instruments « inadéquats pour l’usage liturgique » à l’instar de la guiare électrique ou la batterie ; d’autres instruments seront mentionnés spécifiquement dans le document en préparation.
Enfin, le pape insistera pour que « la célébration de l’Eucharistie se déroule avec beaucoup plus de décor et de sobriété litrugique, excluant notamment les applaudissements ». Rappelons Benoît XVI qu’il pourrait aussi interdire l’orgue dans les églises, comme cela se pratiquait dans des temps finalement pas très anciens. L’orgue étant perçu comme un instrument diabolique par le fait qu’elle rappelait les orgues de barbarie des marchands ambulants !…
Après l’hiver polonais, l’Eglise catholique romaine va donc rentrer dans une période de glaciation polaire. Au nom de la Tradition et de la Vérité toute puissante.
A pleurer !
Note de La Porte Latine
Il va de soi que nous ne prenons pas pour argent comptant les « informations » de cet organe de presse dont la non-catholicité n’est plus à démontrer.
(1) A propos des « structures juridiques » : Une correspondance de Yves Chiron à Luc Perrin
Lettre d’Yves Chiron à Luc Perrin, suivie des Clarifications de Luc Perrin
Lettre d’Yves Chiron à Luc Perrin, au sujet de son analyse des déclarations de Mgr Ricard – 12 avril 2006
Cher Monsieur,
j’ai lu avec intérêt votre « savoir lire… ». Je ne suis pas d’accord avec vous, sur plusieurs points. Il y en a notamment un qui me semble tout à fait erroné.
Quand les évêques de France disent refuser « la mise en place d’une structure juridique... », ils ne font pas allusion à la proposition déjà faite en 2001 à la FSSPX, et toujours en cours, mais aux catholiques ECCLESIA DEI.
Les évêques de France refusent la création d’une structure canonique où seraient liés les catholiques ECCLESIA DEI. Ce refus figure à la fin du paragraphe consacré spécifiquement à ces catholiques.
Pour la FSSPX et ses fidèles, dont il est question plus loin dans le document, les évêques de France se disent prêts à « accueillir dans la foi » et à « mettre en ouvre fidèlement » les « directives » que va donner Benoît XVI « dans les semaines ou les mois qui viennent ». Que dans ces « directives » figure une proposition d’administration apostolique personnelle ou autre formule canonique, cela semble acquis.
Les évêques de France ne peuvent refuser une solution canonique qui concernerait des prêtres installés sur tous les continents. Je ne nie pas pour autant que nombre d’archevêques et d’évêques de France veuillent freiner autat qu’il leur sera possible la réconciliation. Mais pas tous. Vous savez autant que moi les noms de ceux qui, au contraire, y sont prêts.
Yves Chiron
Clarifications de Luc Perrin
Les remarques d’Yves Chiron appellent une clarification de ma part.
La première va de soi : la citation choisie est un exemple parmi d’autres (Zenit, S. de Ravinel…) d’une façon de lire cette déclaration, plus sensible au ton empreint de douceur évangélique qu’au fond qui adresse un message bien différent.
Ma lecture visait à comprendre le message, au-delà du style. Je le remercie d’attirer l’attention des lecteurs sur un saut implicite de mon analyse et donc une petite erreur pédagogique.
Le refus d’une structure canonique propre s’applique, comme il l’indique, aux fidèles Ecclesia Dei. Mais le prétexte invoqué, « distendre » le lien avec l’Église diocésaine, s’appliquerait de la même manière à une FSSPX réconciliée.
C’est bien cette structure canonique propre, indépendante mais non sans liens avec les évêques, que le cardinal Castrillon Hoyos a proposé à Mgr Fellay depuis 2001. Rejeter une administration apostolique personnelle aux premiers revient bien à la refuser aux seconds. A moins d’imaginer qu’il y aurait deux espèces différentes de baptisés traditionalistes et que seules les communautés Ecclesia Dei de France nourriraient la volonté de rompre la communion ecclésiale … dans laquelle elles vivent parfois depuis 1984/1988.
I. de Gaulmyn (La Croix 10/4/2006) conclut son commentaire, exclusivement dédié à la FSSPX, sur ce refus épiscopal. Refus qui n’est pas nouveau : dès 1994, les traditionalistes américains pétitionnaient pour obtenir une structure de ce type devant les obstacles mis à l’application du motu proprio Ecclesia Dei, pétition reprise en France par la suite.
Le président de la CEF s’exprime au nom de l’ensemble de l’épiscopat français : le refus et les trois conditions posées sont donc le fait d’une majorité d’évêques.
e souhaite, avec Y. Chiron, voir grandir la minorité des évêques qui ont compris l’atout que représentent les communautés traditionalistes pour l’Église, en France et ailleurs. La présente déclaration démontre qu’il leur reste, et qu’il nous reste, à convaincre l’actuelle majorité d’abandonner ses crispations, de s’ouvrir au dynamisme traditionaliste, jeunesse de l’Église, l’un des visages de l’avenir : Excellences, n’ayez pas peur !
Luc Perrin