Désacralisation et désaffectation des églises – Le grand remplacement religieux


Un hôtel-​restaurant dans une ancienne église de Poitiers

Le concept du « grand rem­pla­ce­ment » de notre popu­la­tion, décrit par Renaud Camus et Eric Zemmour, est éga­le­ment valable pour notre spi­ri­tua­li­té. La reli­gion catho­lique, fon­da­trice de notre pays, est sub­mer­gée par la reli­gion laïque et son idéo­lo­gie libé­rale liber­taire, dont le long pro­ces­sus a été enga­gé en 1789 avant d’être pous­sé davan­tage encore en 1905 puis en 1968.

Si l’islam est sou­vent poin­té du doigt aujourd’hui du fait de sa pro­li­fé­ra­tion rapide et par­fois guer­rière, il ne fait pour­tant que rem­plir un vide, dont la nature a hor­reur. Ce sont bel et bien des Français, des asso­cia­tions et par­fois même des prêtres qui baissent les bras ou font des com­pro­mis irré­mé­diables.

Désacralisation et désaffectation : définitions

Lorsqu’un dio­cèse ne sou­haite plus uti­li­ser une église dont il a la pro­prié­té, il pro­cède à une désa­cra­li­sa­tion. Il s’agit d’un acte juri­dique par lequel l’évêque décrète, lors d’une céré­mo­nie solen­nelle, avec les orne­ments vio­lets propres aux rituels de deuil, que le bâti­ment n’est plus consi­dé­ré comme un lieu de culte.

L’autel et l’église sont vidés de leurs reliques et objets sacrés. D’après le droit cano­nique [1], les lieux sacrés perdent leur dédi­cace ou leur béné­dic­tion si la plus grande par­tie en est détruite, ou s’ils sont réduits à des usages pro­fanes de façon per­ma­nente (Can. 1212) ; et si une église ne peut en aucune manière ser­vir au culte divin et qu’il n’est pas pos­sible de la répa­rer, elle peut être réduite par l’évêque dio­cé­sain à un usage pro­fane qui ne soit pas incon­ve­nant (Can. 1222 – § 1). Le droit cano­nique a lar­ge­ment été outre­pas­sé, puisque de nom­breuses églises sont désa­cra­li­sées à notre époque, uni­que­ment pour des pro­blèmes de finan­ce­ment ou des inté­rêts commerciaux.

Les églises construites avant 1905 sont, depuis la loi du 9 décembre de la même année, pro­prié­tés de l’Etat et des com­munes, elles ont cepen­dant été mises sous la res­pon­sa­bi­li­té des paroisses. La désaf­fec­ta­tion d’une église redonne ain­si défi­ni­ti­ve­ment la res­pon­sa­bi­li­té de l’édifice à la muni­ci­pa­li­té, qui peut donc alors déci­der de son sort et faire le choix de le détruire, de lui don­ner une nou­velle fonc­tion­na­li­té ou de le revendre.

Pour deman­der la désaf­fec­ta­tion, il faut par exemple que le culte n’y soit plus célé­bré depuis six mois ou que la sécu­ri­té des visi­teurs ne soit plus assu­rée. La déci­sion ne peut pas, quoi qu’il en soit, être prise uni­que­ment par les ins­tances répu­bli­caines, même si elles exercent par­fois des pres­sions. Le curé doit donc faire une demande à la muni­ci­pa­li­té, qui doit quant à elle faire voter le pro­jet en conseil muni­ci­pal, enfin l’évêque donne son accord par écrit pour enté­ri­ner la décision.

Conséquences

A Angers, Strasbourg, Nantes, Rennes, Bordeaux, Lyon et ailleurs, d’anciennes églises font main­te­nant office de res­tau­rant, de boîte de nuit, de ciné­ma, et même de lieu de culte d’une autre religion.

La France n’est pas la seule concer­née puisque cer­tains exemples récents nous viennent du Québec (l’église de Chicoutimi, ven­due 500 000 dol­lars puis trans­for­mée en com­plexe funé­raire ; l’église Saint-​Jean de la Croix de Montréal, trans­for­mée en immeuble).

Certaines asso­cia­tions de défense du patri­moine [2] tra­vaillent dans ce sens, pré­fé­rant don­ner une nou­velle uti­li­té à une église plu­tôt que de la voir détruite, car la majo­ri­té des 45 000 églises parois­siales du pays ne sont pas clas­sées monu­ments his­to­riques et encourent ce risque. Si l’on peut com­prendre cette posi­tion qui per­met de défendre cer­tains tré­sors cultu­rels, on peut regret­ter qu’elles ne défendent pas le tré­sor cultu­rel prin­ci­pal de notre pays, la chrétienté.

Joint par télé­phone, le prêtre d’une ville de la métro­pole lil­loise qui a récem­ment été au cœur d’une pro­cé­dure de désaf­fec­ta­tion nous a don­né des argu­ments pour le moins sur­pre­nants, tant ils sem­blaient emplis de rési­gna­tion. « Il n’y avait plus de par­ti­ci­pa­tion dans cette église, puis il fal­lait l’entretenir, ‚c’était plus simple de réunir les gens dans la seconde église de la ville. » Pas d’espoir de voir les gens reve­nir un jour ? « Non… » Au conseil muni­ci­pal, seuls les élus du Rassemblement Bleu Marine se sont oppo­sés à cette déci­sion, pro­vo­quant l’incompréhension de la majo­ri­té de gauche.

Désacralisation et désaf­fec­ta­tion sont trop sou­vent syno­nymes d’abandon, voire de tra­hi­son. Pouvoir ache­ter un télé­phone der­nier cri dans une ancienne église n’est pas un signe de liber­té et de pro­grès, mais un sym­bole de notre déca­dence et de ce grand rem­pla­ce­ment reli­gieux.

Il est grand temps d’affirmer et de défendre notre foi et de redon­ner à Dieu la place qui lui convient, la première.

Alexandre Rivet, in Présent du 3 jan­vier 2015

Notes de bas de page
  1. Le jour­na­liste de Présent fait réfé­rence au Code de Droit Canonique de 1983[]
  2. Contrairement à l’ADPC qui tra­vaille, elle, à la res­tau­ra­tion et à la réha­bi­li­ta­tion des lieux de culte et de tout ce qui touche au patri­moine chré­tien : immo­bi­lier, cultu­rel, artis­tique, etc.,. C’est l’ADPC qui a por­té, par exemple, le pro­jet du film « Monseigneur Lefebvre, un évêque dans la tem­pête ». Dons avec déduc­ti­bi­li­té fis­cale sur demande à : Association de Défense du Patrimoine Chrétien – 11, rue Cluseret – 92280 Suresnes Cedex[]