Froid comme un marbre de Thassos. C’est l’accueil que l’orthodoxie grecque a accordé au pontife romain, une vingtaine d’années après la première visite historique en Grèce du pape Jean-Paul II, en 2001 : un voyage qui, à l’époque, avait déjà vu des moines fanatiques brandissant des drapeaux noirs dans les rues d’Athènes, en signe de réprobation.
La demande de pardon, réalisée par le pape François, le 4 décembre 2021, en présence du chef de file des orthodoxes hellènes, Hieronyme II, fait partie du processus œcuménique tel que le conçoit le Saint-Siège : « à notre honte – je le reconnais au nom de l’Eglise catholique – des actions et des choix (…) ont flétri la communion. Nous avons ainsi laissé les divisions compromettre la fécondité », a déclaré le successeur de Pierre.
Et ce dernier d’ajouter, devant un hiérarque que les photographies montrent dubitatif : « l’Histoire a du poids, et je ressens aujourd’hui le besoin de renouveler ma demande de pardon à Dieu et à mes frères, pour les erreurs commises par beaucoup de catholiques ».
On imagine que cette demande de pardon aura été diversement goûtée du côté des catholiques bosniaques qui, depuis le massacre de Srebrenica, en 1995, ont une approche assez nuancée des rapports avec l’orthodoxie.
Le père Hyacinthe Destivelle, directeur de l’Institut d’études œcuméniques de l’Angelicum à Rome, joint par l’Agence France-Presse, a tenté de justifier le discours pontifical, estimant que « le monde grec a été le plus blessé par les relations avec les chrétiens d’Occident, davantage que les autres Eglises ». Il semble que la cancel culture ne soit pas l’apanage des idéologues originaires d’outre-Atlantique.
Cette énième manifestation de contrition à l’égard des « orthodoxes » de Grèce sera-t-elle suffisante pour réchauffer les relations entre les deux confessions ?
Il est difficile d’être optimiste en la matière. A son arrivée au siège de l’Eglise autocéphale d’Athènes, un prêtre orthodoxe a apostrophé le pontife argentin en ces termes : « pape, tu es un hérétique ! », avant d’être exfiltré manu militari, par les services de sécurité. Comme signe de communion, on a fait mieux.
« Il faut comprendre qu’il existe encore des fanatiques anticatholiques à l’instar de l’archevêque Séraphin du Pirée qui a qualifié la visite du pape d’immorale. Ils appellent les catholiques des ‘papistes’ », tente de relativiser Nikos Dimou, sociologue et écrivain.
Il faut ajouter que durant la visite papale, aucun office religieux n’a été célébré en commun. La possibilité de prier le Notre Père chacun dans sa langue n’a pas même été évoquée.
Enfin, le Saint-Synode – conseil des archevêques orthodoxes grecs – n’a pas jugé bon de participer à la messe célébrée par le Saint-Père, dimanche 5 décembre dernier, au Megaron, l’équivalent du Palais des Congrès dans la capitale grecque.
Y aurait-il quelque chose de pourri au royaume de l’œcuménisme conciliaire ? Nul besoin de s’appeler Hamlet pour que la question mérite d’être posée.
Source : Fsspx.Actualités