Les voeux du Supérieur de District pour 2008

Chers fidèles,

Combien de fois avons-​nous écou­té le magni­fique ser­mon que Monseigneur Lefebvre pro­non­ça lors de son jubi­lé sacer­do­tal ? Qui d’entre nous n’a pas été frap­pé par cette vibrante apo­lo­gie de l’efficacité de la messe dont Monseigneur nous raconte com­ment il l’a vue, en Afrique, opé­rant des mer­veilles dans les cœurs et dans les socié­tés ? Ce ser­mon s’achève par un appel solen­nel à la croi­sade pour que le Christ-​Roi, à nou­veau, règne sur nos pays.

C’est à cette occa­sion que Monseigneur s’est adres­sé aux chefs de famille en des termes jus­te­ment demeu­rés célèbres :

« Vous avez une grave res­pon­sa­bi­li­té dans votre pays. Vous n’avez pas le droit de lais­ser votre pays enva­hi par le socia­lisme et le com­mu­nisme. Vous n’en avez pas le droit ou vous n’êtes plus catho­liques. Vous devez mili­ter au moment des élec­tions pour avoir des maires catho­liques. (…) Chefs de famille, c’est vous qui êtes res­pon­sables de cela, pour vos enfants, pour les géné­ra­tions qui viennent. Vous devriez vous orga­ni­ser, vous réunir, vous entendre pour arri­ver à ce que la France rede­vienne chré­tienne, rede­vienne catho­lique… ».

Trente ans se sont écou­lés depuis cette solen­nelle mise en demeure pon­ti­fi­cale. Où en sommes-​nous cepen­dant de la réponse que nous lui avons don­née ? Qu’avons-nous fait de ces paroles ?

Certes, nous n’avons pas per­du notre temps ! Le com­bat de la messe, la construc­tion et l’aménagement des cha­pelles, des prieu­rés et des écoles étaient de pre­mière néces­si­té et ont deman­dé d’immenses éner­gies. Il faut saluer la vigueur avec laquelle cette pre­mière lutte a été menée ain­si que les magni­fiques résul­tats effec­ti­ve­ment pro­duits par la messe au milieu de ces ruines et de ces décombres.

Si notre but est bien de conti­nuer à étendre ce maillage et d’enraciner tou­jours plus pro­fon­dé­ment notre œuvre d’Eglise en France, com­ment ne pas nous pré­oc­cu­per aus­si et ne pas nous inquié­ter en même temps de consta­ter que le nombre d’hommes vrai­ment catho­liques, fer­me­ment déci­dés à agir comme tels, même dans les simples muni­ci­pa­li­tés, ne cesse de dimi­nuer ? Il faut bien admettre que la conser­va­tion ou la résur­rec­tion de notre petit tis­su de chré­tien­té n’a pas été accom­pa­gnée par un effort net­te­ment, réso­lu­ment catho­lique, d’action politique.

Notre fon­da­teur pouvait-​il cepen­dant être plus expli­cite pour expri­mer sa ferme volon­té qu’en par­lant aus­si sévèrement :

« Vous n’avez pas le droit de lais­ser votre pays enva­hi par le socia­lisme et le com­mu­nisme. Vous n’en avez pas le droit ou vous n’êtes plus catho­liques. Vous devez mili­ter au moment des élec­tions pour avoir des maires catho­liques…» ?

Il ne faut pas se voi­ler la face : le constat est là, ter­rible. Lors des der­nières élec­tions pré­si­den­tielles pas une seule fois le nom de Dieu n’a été pro­non­cé ; ne par­lons même pas de celui de Notre-​Seigneur : il est ban­ni des dis­cours des can­di­dats à la pré­si­dence. Notre pays n’a rien à envier aux répu­bliques com­mu­nistes à l’athéisme militant.

Dans quelques mois auront lieu les élec­tions muni­ci­pales et sans doute verrons-​nous les musul­mans péné­trer en force dans les conseils muni­ci­paux. C’est le nom d’un autre « Dieu » qui com­men­ce­ra à être pro­non­cé par de nou­veaux élus moins timo­rés. Les catho­liques se lamen­te­ront devant une si triste situation..

Est-​il donc impos­sible que cer­tains de nos meilleurs fidèles essaient de se lan­cer dans le com­bat poli­tique local ? Ou pensons-​nous que l’avertissement de Monseigneur Lefebvre est irréa­li­sable et que ce vœu pieux, après avoir été reli­gieu­se­ment écou­té, est des­ti­né à demeu­rer indé­fi­ni­ment lettre morte ? Ou cette action est-​elle dédai­gnée parce qu’elle nous paraît trop modeste ? En ce der­nier cas, il serait alors plus hon­nête de ces­ser de faire pas­ser l’enregistrement de ce sermon…

S’investir dans l’administration des com­munes, dont la grande majo­ri­té est de petite taille, est une action poli­tique vrai­ment réa­li­sable, utile et for­ma­trice pour apprendre le métier poli­tique. Il existe encore un cer­tain nombre d’élus muni­ci­paux catho­liques qui se trouvent en place. Leur nombre ne cesse cepen­dant de dimi­nuer de telle manière que l’on peut réel­le­ment craindre, sans notre sou­tien et nos encou­ra­ge­ments, que l’on finisse par voir dis­pa­raître les derniers.

Il faut que nous ins­pi­rions aux catho­liques la volon­té de ne plus rien lâcher du ter­rain et des posi­tions qu’il leur reste et, avec la grâce de Dieu, qu’ils aient la volon­té d’en conqué­rir ou d’en recon­qué­rir de nou­velles, aus­si modestes qu’elles soient. Ne croyons pas que cet inves­tis­se­ment soit de peu d’utilité. Nous en connais­sons encore, cer­tains de ces élus muni­ci­paux catho­liques, qui font un bien véri­table dans leur com­mune : leur seule pré­sence au conseil muni­ci­pal suf­fit déjà pour qu’on ne parle plus de la reli­gion avec le mépris qu’il est de bon ton d’adopter aujourd’hui ; l’affichage sau­vage de publi­ci­tés immo­rales est évi­té et, si le prieu­ré ou une cha­pelle se trouvent sur le ter­rain de cette muni­ci­pa­li­té, les rela­tions avec la com­mune s’en trouvent sou­vent bien facilitées.

On dira peut-​être que ce n’est pas grand-​chose : c’est pour­tant déjà un pre­mier effet, même s’il demeure encore faible, de l’action de Notre-​Seigneur dans la cité. Si d’autres catho­liques y sont élus, pour­quoi cette influence n’augmenterait-t-elle pas davan­tage ? Et si l’un de ces élus devient maire ?

Faut-​il comp­ter pour rien que cer­tains maires soient allés jusqu’à consa­crer leurs vil­lages au Sacré-​Cœur ? Nul besoin de devoir ren­trer dans un par­ti poli­tique pour accom­plir cette besogne dans sa com­mune. Et, s’il finis­sait par y avoir une cen­taine de maires en France, catho­liques convain­cus, adeptes régu­liers des Exercices, recon­nus de la popu­la­tion locale pour leurs qua­li­tés, cela n’aurait-il aucun poids pour l’avenir ?

Nous pen­sons que, dans de nom­breuses muni­ci­pa­li­tés, quelques catho­liques, convain­cus, géné­reux, ne comp­tant ni leur peine ni leur temps, peuvent véri­ta­ble­ment coopé­rer au règne du Christ Roi, peti­te­ment et impar­fai­te­ment sans doute, mais d’une manière réelle et efficace.

Bien sûr, l’action poli­tique locale que nous pré­co­ni­sons ne trans­for­me­ra pas d’un seul coup notre socié­té laïque en socié­té chré­tienne. Mais tout est pos­sible à Dieu. Cette action sera longue, très longue avant de por­ter des fruits et d’a­bou­tir à une influence réelle sur les des­ti­nées du pays. Elle don­ne­ra l’habitude de la chose poli­tique, des rouages de l’administration, des pièges à évi­ter et des dif­fi­cul­tés à sur­mon­ter. Elle pré­pa­re­ra les meilleurs à des fonc­tions plus hautes si telle est la volon­té de Dieu. Petit à petit, d’un simple man­dat local, cer­tains pour­ront être appe­lés à des res­pon­sa­bi­li­tés plus impor­tantes avec une influence qui pour­ra être réelle dans la mesure elle est le fruit d’un enra­ci­ne­ment sur le terrain.

Ne rien faire, « se reti­rer sous sa tente », attendre un hypo­thé­tique grand monarque et cher­cher à ne pro­té­ger que sa famille et sa cha­pelle sont des com­por­te­ments qui annoncent la mort. Nos enne­mis cherchent à effa­cer jusqu’au sou­ve­nir de la Fille aînée de l’Eglise, et, s’ils ne peuvent encore y arri­ver entiè­re­ment aujourd’hui, demain, si les catho­liques finissent d’abandonner ce ter­rain, ce seront nos écoles, nos prieu­rés, nos familles qui seront mena­cés de dis­pa­ri­tion. Devons-​nous nous lais­ser éli­mi­ner sans com­battre ? Ce serait oublier la belle his­toire des Maccabées.

Aussi j’en­cou­rage les hommes pieux, ins­truits, cou­ra­geux et habiles à mener ce com­bat des élec­tions muni­ci­pales pro­chaines. Apprenez aus­si à connaître les élus catho­liques qui, dans votre région, mènent ce com­bat afin de les soutenir.

Nous cher­chons, quant à nous, à vous appor­ter le sou­tien spi­ri­tuel pour que vous teniez bon dans ce com­bat et nous vou­lons vous appor­ter l’éclairage que pro­cure la for­ma­tion à la doc­trine de l’Église qui est la seule charte de com­bat d’un catho­lique dans la cité.

Nous ne nous recon­nais­sons dans aucun par­ti et nous ne sommes d’aucun par­ti sinon du par­ti de Notre-​Seigneur. Nous sommes per­sua­dés que « le suf­frage uni­ver­sel est le men­songe uni­ver­sel » et que la recon­quête de notre pays à Notre-​Seigneur ne vien­dra pas de l’addition des bul­le­tins dans les urnes.

Voilà pour­quoi, nous affir­mons nos pré­fé­rences pour le com­bat poli­tique local où les méfaits du suf­frage uni­ver­sel sont atté­nués par la plus grande connais­sance que l’on a des hommes, des néces­si­tés et des inté­rêts locaux.

Je vous sou­haite, dans cette pers­pec­tive, une bonne et sainte année 2008 dans le Cœur Douloureux et Immaculé de Marie.

Abbé Régis de Cacqueray-​Valménier, Supérieur du District de France

Capucin de Morgon

Le Père Joseph fut ancien­ne­ment l’ab­bé Régis de Cacqueray-​Valménier, FSSPX. Il a été ordon­né dans la FSSPX en 1992 et a exer­cé la charge de Supérieur du District de France durant deux fois six années de 2002 à 2014. Il quitte son poste avec l’ac­cord de ses supé­rieurs le 15 août 2014 pour prendre le che­min du cloître au Couvent Saint François de Morgon.