Le pape François a, le 8 avril 2016, publié une longue Exhortation apostolique intitulée Amoris lætitia, consacrée à « l’amour dans la famille ». Ce texte fait suite aux deux synodes sur la famille. Y sont traités de nombreux sujets : le mariage dans la Bible, la réalité actuelle de la famille, l’amour dans le mariage, l’éducation des enfants, les crises de la famille, etc. Il y a d’ailleurs d’intéressants passages, tel le paragraphe 56 qui critique fortement l’idéologie mortifère du « gender ».
Toutefois, ce qui avait notablement agité les deux synodes, on s’en souvient, c’était l’accès à la communion des divorcés-remariés. Le Pape en parle, tout en n’en parlant pas : son texte est (volontairement) embrouillé, entortillé, ambigu. Comme l’a souligné, de façon un peu cruelle, Thibaud Collin au micro de Radio Notre-Dame le 10 avril, « sur les divorcés-remariés, le Pape ne prend pas position. Il cite le texte du synode de 2015, qui lui-même concluait de manière totalement indéterminée sur cette question ».
Et c’est au détour d’une simple note que la question est abordée, comme l’a reconnu le cardinal Schönborn dans sa présentation : « Le Pape affirme dans la note 351 que l’on peut aussi apporter l’aide des sacrements dans certains cas aux divorcés-remariés ». Bref, reprend Collin, « le Pape reste totalement dans l’indétermination. (…) Il risque d’y avoir des polémiques indéfinies sur les interprétations à donner au texte ». Et cela contribuera une fois de plus, malheureusement, à affaiblir l’institution du mariage et à créer le doute dans le cœur des catholiques.
Ce qui est plus positif, en revanche, c’est que durant tout le processus, de vives réactions contraires ont eu lieu, pour défendre la doctrine catholique. Des cardinaux en nombre non négligeable (plus de trente) ont manifesté clairement leurs réticences théologiques. Il se dit également que la Congrégation pour la Doctrine de la Foi aurait proposé près de 200 amendements au projet d’exhortation, et que le cardinal Müller, son Préfet, a boudé la conférence de presse de présentation pour exprimer son opposition à ce texte.
On mesure par là le chemin parcouru depuis la promulgation de la nouvelle messe, en 1969. A l’époque, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi l’avait validée sans mot dire, et seuls deux cardinaux à la retraite, Ottaviani et Bacci, avaient osé s’y opposer.
La présente réaction en faveur du mariage chrétien est sans aucun doute largement insuffisante, trop timide, fâcheusement limitée. Mais elle existe toutefois, et cela signifie qu’il ne faut jamais se décourager, qu’il faut toujours prêcher la vérité à temps et à contre-temps : avec la grâce de Dieu, des oreilles finiront bien par écouter.
Abbé Christian BOUCHACOURT, Supérieur du District de France de la FSSPX