Entretien avec l’abbé Grégoire Celier.
L’abbé Grégoire Celier, Prieur de la chapelle Notre-Dame de Consolation à Paris, répond aux questions de l’abbé Benoît Espinasse à propos des travaux qui se déroulent dans sa chapelle.
— Monsieur l’abbé, pour commencer, quelques mots pour situer votre chapelle.
4 mai 1897. Une grande kermesse de bienfaisance, intitulée « Bazar de la Charité », démarre rue Jean Goujon, à Paris, pour une durée d’un mois. Accidentellement, un feu se déclare et se propage très rapidement (photo 1).

Outre de nombreux blessés, on compte 125 morts, notamment de la haute société. L’émotion est énorme, le gouvernement décrète un deuil national, et les familles des victimes lancent une souscription nationale pour ériger un mémorial à leurs défunts. Ce sera la chapelle Notre-Dame de Consolation, inaugurée le 4 mai 1900, et dont la Fraternité Saint-Pie X a reçu la charge en 2013, avec la mission d’y mener les travaux de rénovation nécessités par l’existence de plus d’un siècle de cet édifice classé Monument historique (photo 2).

— Ces travaux ont donc commencé ?
Ils ont commencé très précisément le 7 octobre 2024, après des années de préparation technique et administrative. Tout d’abord, pendant quatre mois, ont été édifiés d’immenses échafaudages, qui enserrent la coupole et dont le haut culmine à plus de vingt-cinq mètres (photo 3).

Ces échafaudages ont ensuite été eux-mêmes emballées dans une bulle de plastique blanc, d’une part pour protéger la chapelle (à partir du moment où la couverture aurait été enlevée), d’autre part pour protéger le public des émanations de plomb (photo 4).

— Traitons les sujets les uns après les autres. Vos travaux consistent à rénover le toit de la chapelle ?
Notre projet consiste en la rénovation complète de la chapelle, extérieur et intérieur. Mais la phase dans laquelle nous sommes actuellement engagés consiste en la rénovation des deux coupoles en plomb qui couvrent la chapelle, une grande au-dessus de la nef, une petite au-dessus du chœur (photo 5).

Après plus de 120 ans, ces deux coupoles n’assurent plus l’étanchéité, entraînant des dommages pour les décors intérieurs. Et, pour le moment, nous travaillons sur la grande coupole (photo 6).

— Et comment se déroule cette restauration de la grande coupole ?
Il y a d’un côté un travail de pierre, de l’autre un travail, beaucoup plus important, de plomb.
Le travail de pierre porte sur l’assise de la coupole, composée de pierres de taille. Ces pierres ont été nettoyées, par diverses techniques, de toute la salissure accumulée depuis 1900. Et certaines pierres trop altérées ont été retirées et remplacées par des pierres nouvelles, mais exactement similaires.
— Et pour la partie plomb ?
Les couvreurs ont d’abord retiré chacune des plaques (on dit les « tables ») de plomb, pour les trois quarts de la coupole. Le dernier quart a été conservé provisoirement pour servir de modèle au remontage. Chaque table a été soigneusement cotée, de façon à savoir où et comment la replacer. Puis les tables de plomb démontées ont été expédiées en Angleterre, où elles ont été refondues de manière traditionnelle.
— Le chantier s’est-il arrêté durant cette refonte ?
Pas du tout ! car, en attendant le retour des tables de plomb, les couvreurs ont refait à neuf toute la couche de plâtre, largement altérée par les infiltrations d’eau (photo 7).

Ils ont restauré ou changé les pièces de bois qui permettent d’accrocher les tables de plomb. Ils ont installé ce qu’on appelle du « papier anglais », un papier épais que l’on place entre le plâtre et le plomb, pour éviter les effets de « pile » entre deux matériaux très différents (photo 8).

Enfin, ils ont mis en place des bandes de cuivre, sur lesquelles les tables de plomb seront encore arrimées, afin qu’elles ne glissent pas au cours du temps (le plomb étant un matériau mou, on aurait envie de dire fluide) (photo 9).

— Les tables de plomb sont-elles revenues ?
Après leur refonte, les tables de plomb sont effectivement revenues, et ont commencé à être remises en place. Les couvreurs ont, pour cela, installé des petits « ateliers » en divers points de l’échafaudage, où les compagnons peuvent découper à la bonne dimension (grâce aux cotes qu’ils ont prises pendant le démontage) les feuilles de plomb qui sont arrivées sous forme de longs rouleaux. Ensuite, pour que les tables de plomb prennent exactement la forme de la coupole, ils les martèlent avec des marteaux à tête plastique : on dit qu’ils « battent le plomb ». Actuellement, nous entendons à longueur de journée la découpe et le martellement du plomb.
— Les couvreurs vont sans doute procéder au démontage du quatrième quart ?
Effectivement, une fois qu’ils auront remonté à neuf un premier quart, qui pourra donc leur servir de modèle pour le remontage des autres, ils vont procéder au démontage du quart restant, qui sera lui aussi expédié en Grande-Bretagne pour y être refondu, et remonté ensuite à son retour. Ainsi, l’intégralité des tables de plomb sera en place dans un état neuf.
— Et alors, le chantier de la grande coupole sera achevé ?
Pas encore ! Car il restera les quatre méridiens, qui comportent les instruments de la Passion (photo 10).

Ces méridiens, très ouvragés, ne vont pas être refondus, mais nettoyés et restaurés à l’identique. Ensuite, ils seront remis en place. Et là, interviendra la partie la plus subtile de ce chantier. Car ces méridiens étaient originellement dorés : mais la dorure a disparu au fil du temps. Nous allons restituer cette dorure primitive. Le doreur va travailler sur les méridiens, non pas en atelier, mais à leur emplacement normal, grâce à l’échafaudage en hauteur. Pour cela, il a besoin d’une température clémente : c’est ce qui explique que les couvreurs « mettent le paquet » actuellement, afin de livrer les méridiens au travail du doreur vers le mois de septembre 2025.
Quant à la suite du chantier, si vous me le permettez, je reviendrai en parler à vos lecteurs en temps utile.
En attendant, ils peuvent suivre notre aventure sur le site : « www.restaurons-ndconsolation.fr », où ils trouveront des photos, des vidéos, des podcasts et des textes.